DOI: https://doi.org/10.60082/2563-8505.1320
https://digitalcommons.osgoode.yorku.ca/sclr/vol71/iss1/18
R. c. Costanzo-Peterson, 2024 QCCA 1282
[60] Pour déterminer si le délai pour tenir le procès est déraisonnable, il faut nécessairement établir le plafond qui gouverne les accusations ainsi que le point de départ du calcul du délai.
[61] La juge, qui n’avait pas le bénéfice de l’arrêt R. c. Poitras, 2022 QCCA 1561, mais uniquement de l’arrêt R. c. Guimont, 2017 QCCA 1754, a retenu la date d’inculpation initiale, janvier 2020, pour l’ensemble des accusations. Elle a conclu que la substitution et les ajouts des nouvelles accusations n’étaient que la continuité du même dossier et que cela ne marque pas un nouveau départ.
[62] En appel, cette conclusion est contestée en partie. Comme en première instance, l’appelant prétend qu’il y a un point de départ pour les premières accusations de janvier 2020 et un autre pour les nouvelles accusations de septembre 2020. Les intimés ne sont pas en désaccord avec deux points de départs, mais pour eux, le problème demeure entier puisque dans les deux cas, le plafond de 18 mois est atteint.
[63] Je veux clarifier ce point. Pour calculer le délai dans cette affaire, il importe d’établir la date initiale d’inculpation. Je rappelle que dans l’arrêt R. c. Poitras, 2022 QCCA 1561, le juge Cournoyer explique bien le droit à cet égard, retraçant les arrêts pertinents de la Cour suprême. Le début du calcul pour les besoins de l’alinéa 11b) de la Charte commence au moment où une personne est inculpée, c’est-à-dire « quand une dénonciation relative à l'infraction qu’on lui reproche est déposée ou quand un acte d’accusation est présenté directement sans dénonciation » : R. c. Kalanj, 1989 CanLII 63 (CSC), [1989] 1 R.C.S. 1594; R. c. Poitras, 2022 QCCA 1561.
[64] On reconnaît qu’exceptionnellement, « si la poursuite retire l’accusation pour la remplacer par une autre mais pour la même affaire, le calcul du délai pourrait bien commencer à partir de la première accusation » : R. c. Carter, 1986 CanLII 18 (CSC), [1986] 1 R.C.S. 981, p. 985. Ainsi, il est évident que les chefs 10 à 29 du nouveau dossier 206 sont identiques à ceux du dossier 191. À mon sens, il s’agit d’un cas clair du principe énoncé dans l’arrêt R. c. Antoine, 1983 CanLII 1743 (C.A.O.), repris notamment dans l’arrêt R. c. Poitras, 2022 QCCA 1561. Pour ces chefs, le point de départ est janvier 2020.
R. c. Lefebvre, 2018 QCCS 4468
[102] Dans un premier temps, il faut reconnaître au bénéfice du juge d’instance que la règle d’équité procédurale entourant la mise en œuvre de la connaissance d’office n’a pas reçu une si grande attention en droit criminel et pénal.
[103] À ce titre, dans le célèbre arrêt Baie-Comeau c. D’Astous[34], le juge Gendreau formule implicitement une exigence d’équité procédurale en cette matière.
[104] Dans cette affaire, le juge Gendreau examine la portée de la connaissance d’office et il explique qu’un juge « ne peut référer à des connaissances acquises à l'occasion de l'audition d'autres affaires ou par l'étude personnelle de certains sujets »[35], car « [n]otre régime de débats contradictoires commande qu'il en soit ainsi »[36]. Le juge a « l'obligation de ne fonder sa décision que sur les faits dont les parties lui ont légalement fait la preuve »[37].
[105] Or, puisque le principe audi alteram partem constitue une règle de justice naturelle et un précepte fondamental de notre système de justice contradictoire, il exige que les tribunaux accordent aux personnes visées par leurs décisions, l'occasion d'être entendues[38].
[106] Sans formuler ou établir explicitement un droit d’être entendu au sujet de la prise de connaissance d’un fait en litige, il découle, implicitement et inévitablement, de la référence au système de justice contradictoire dans l’extrait qui précède, l’existence d’une telle exigence envers les parties avant la prise de connaissance d’office d’un fait en litige[39].
[107] Il est vrai que l’exigence d’équité procédurale s’avère, au mieux, implicite.
[108] Cependant, il existe des limites reconnues à l’utilisation des faits établis dans le cadre d’autres dossiers et la prudence s’impose[40].
[109] Un juge ne peut prendre connaissance d’office de la preuve produite devant d’autres juges, car un témoignage antérieur ou une preuve produite dans une autre instance constitue du ouï-dire, à moins que cette preuve ne soit versée du consentement des parties[41].
[110] Pour ces raisons, un « juge ne peut pas fonder sa décision sur des éléments externes non mis en preuve lors du procès »[42].
[111] Comme le précise la Cour d’appel dans l’arrêt R. c. Perron, le « juge de procès ne doit pas ajouter à la preuve de son propre chef sans donner l'opportunité aux parties, s'il a des interrogations, d'y répondre »[43].
[112] Dans l’arrêt R. c. Fraillon[44], même s’il considérait une question différente, le juge Vallerand exprime une opinion similaire :
C'est tout d'abord à tort que le premier juge a statué comme il l'a fait sans donner le loisir aux parties de plaider sur le sujet. Il est, en thèse générale, loisible au juge de signaler aux parties que, dans sa mission de rendre justice, il est troublé par un point de faits ou de droit que ni l'une ni l'autre n'a soulevé. Et cela surtout lorsqu'il s'agit d'un droit reconnu par la Charte. Mais encore faut-il qu'il le signale aux parties et leur donne tout le loisir de vider la question avant qu'il ne statue en conséquence. Or ici, les parties ont, à leur grand étonnement, appris au prononcé du jugement que celui-ci était fondé et uniquement fondé sur une question que le juge n'avait qu'alors soulevée et résolue proprio motu. Le procédé est inadmissible et suffirait à lui seul à soutenir le pourvoi. Mais il y a plus et il nous faut, je pense, en traiter.
[Le soulignement est ajouté]
[113] Bref, les parties ne doivent pas être informées du caractère notoire d’un fait en litige lorsque le jugement est rendu.
[114] Cette règle s’applique aussi dans le domaine du droit administratif.
[115] Dans l’affaire Syndicat des producteurs de bois de la Gaspésie c. Damabois, division Cap-Chat inc.[45], la Cour d’appel devait déterminer si lors d’un arbitrage sous l’égide de la Loi sur la mise en marché des produits agricoles alimentaires et de la pêche[46], la Régie des marchés agricoles et alimentaires du Québec avait, en fixant le du prix d’une essence de bois, transgressé la règle audi alteram partem « en se basant sur la moyenne des prix offerts pour la même essence par les acheteurs dans d’autres régions »[47].
[116] Dans un premier temps, la juge Thibault établit les règles d’équité procédurale entourant la connaissance d’office :
[17] En principe, la jurisprudence ne permet pas à un tribunal de recueillir une preuve sans en aviser les parties et leur permettre de faire des observations. Sur cette question, le professeur Patrice Garant écrit :
Sous réserve de la connaissance d’office, la jurisprudence ne permet pas à un tribunal de recueillir sa propre preuve sans en aviser les parties au dossier et sans les inviter à faire valoir leurs prétentions à l’encontre de celle-ci avant de rendre sa décision. […] Que les observations du tribunal découlent d’une visite ou d’une photographie présentée en preuve, le requérant savait sans doute ce qu’il avait vu et l’équité procédurale est respectée s’il a eu la possibilité de formuler des arguments pertinents.
[Je souligne].
[18] Pour sa part, le professeur Jean-Claude Royer écrit que la connaissance judiciaire de faits est plus étendue devant les tribunaux spécialisés, mais que ceux-ci doivent tout de même, avant de fonder leur décision sur un tel fait, inviter les parties intéressées à faire leurs observations :
Devant des tribunaux administratifs ou spécialisés ou devant des arbitres, la connaissance judiciaire des faits est encore plus étendue. Les membres de ces tribunaux sont souvent nommés en raison de leurs connaissances et de leur expérience dans un domaine spécialisé. Ils peuvent parfois prendre connaissance d'office des faits qui, sans être connus de tout le monde, sont notoires à l'égard des parties qui plaident devant ces tribunaux. [...] Toutefois, dans ces derniers cas, le tribunal ne peut fonder sa décision sur un fait relevé d'office par un membre sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations, sauf si elles ont renoncé à exposer leurs prétentions.
[19] J'en retiens qu'il est largement reconnu dans la doctrine et la jurisprudence qu’un tribunal administratif ne peut importer de nouvelles données sans permettre aux parties de les commenter ou d’en discuter[48].
[Le soulignement dans le paragraphe 19 de l’arrêt est ajouté]
[117] Dans cette affaire, la juge Thibault estime que la Régie n’avait pas violé le droit des parties d’être entendues, car elle avait été invitée par l’une des parties à le faire; les données n’étaient pas intrinsèquement nouvelles; les parties pouvaient s’attendre à ce que la Régie puise dans son expérience; et finalement, il s’agissait de données publiques connues de tous :
[27] La Régie a donc déterminé le prix du tremble en se basant sur la moyenne des prix offerts pour la même essence par les acheteurs dans d’autres régions. À l’instar du juge de première instance, je suis d’avis que la Régie n’a pas violé la règle audi alteram partem en procédant comme elle l’a fait. Les parties savaient que la Régie, dans son rôle de régulation de la mise en marché du bois, devait fixer le prix du tremble pour les années concernées et que, pour ce faire, elle pouvait, comme le lui avait suggéré le Syndicat, prendre en compte « l’état du marché » et « l’évolution des prix payés aux producteurs par les entreprises concurrentes ». Il ne faut pas oublier que, lors de l’arbitrage d’une convention de mise en marché, la Régie entend, dans un débat contradictoire, les parties à une future convention. Dans ce cadre, son pouvoir ne se limite pas à appliquer une règle de droit, mais elle agit dans une perspective plus large de régulation économique. Elle jouit, en conséquence, d’une large discrétion dans ce rôle et dans la décision qu’elle est appelée à rendre.
[28] Je suis donc d’accord avec le juge de première instance pour dire que les données utilisées par la Régie n’étaient pas intrinsèquement nouvelles et que les parties pouvaient s’attendre à ce que la Régie puise dans l’expérience du marché des données publiques connues de tous et qui étaient de nature à lui permettre de fixer le juste prix du tremble pour les années concernées. S'il fallait exiger de la Régie qu'elle soumette à tous les intéressés chacune des données publiques connues, pertinentes et de la même nature que celles soumises lors des séances publiques et dont elle envisage de tenir compte, cela pourrait scléroser son action.
[Le soulignement et le caractère gras sont ajoutés]
[118] Ainsi, en principe, le décideur ne peut importer de nouvelles données sans permettre aux parties de les commenter ou d’en discuter.
[119] Il s’avère aussi crucial de déterminer si le décideur a été invité par l’une des parties à considérer certaines données relatives à la question qui doit être tranchée.
[120] L’expectative des parties, tant à l’égard de la question que le décideur doit trancher que les données qu’il aura à considérer pour ce faire, se révèlent pertinentes à tout accroc au droit d’être entendu.
[121] Par ailleurs, la nouveauté des données qui doivent faire l’objet de la connaissance d’office par le décideur et leur caractère public notoire se révèlent importants à la démonstration de toute contravention au droit d’être entendu.
[122] Voilà les jalons posés par la jurisprudence québécoise sur le droit d’être entendu avant qu’un juge prenne connaissance d’office d’un fait.
R. c. Lefebvre, 2018 QCCS 4468
[102] Dans un premier temps, il faut reconnaître au bénéfice du juge d’instance que la règle d’équité procédurale entourant la mise en œuvre de la connaissance d’office n’a pas reçu une si grande attention en droit criminel et pénal.
[103] À ce titre, dans le célèbre arrêt Baie-Comeau c. D’Astous[34], le juge Gendreau formule implicitement une exigence d’équité procédurale en cette matière.
[104] Dans cette affaire, le juge Gendreau examine la portée de la connaissance d’office et il explique qu’un juge « ne peut référer à des connaissances acquises à l'occasion de l'audition d'autres affaires ou par l'étude personnelle de certains sujets »[35], car « [n]otre régime de débats contradictoires commande qu'il en soit ainsi »[36]. Le juge a « l'obligation de ne fonder sa décision que sur les faits dont les parties lui ont légalement fait la preuve »[37].
[105] Or, puisque le principe audi alteram partem constitue une règle de justice naturelle et un précepte fondamental de notre système de justice contradictoire, il exige que les tribunaux accordent aux personnes visées par leurs décisions, l'occasion d'être entendues[38].
[106] Sans formuler ou établir explicitement un droit d’être entendu au sujet de la prise de connaissance d’un fait en litige, il découle, implicitement et inévitablement, de la référence au système de justice contradictoire dans l’extrait qui précède, l’existence d’une telle exigence envers les parties avant la prise de connaissance d’office d’un fait en litige[39].
[107] Il est vrai que l’exigence d’équité procédurale s’avère, au mieux, implicite.
[108] Cependant, il existe des limites reconnues à l’utilisation des faits établis dans le cadre d’autres dossiers et la prudence s’impose[40].
[109] Un juge ne peut prendre connaissance d’office de la preuve produite devant d’autres juges, car un témoignage antérieur ou une preuve produite dans une autre instance constitue du ouï-dire, à moins que cette preuve ne soit versée du consentement des parties[41].
[110] Pour ces raisons, un « juge ne peut pas fonder sa décision sur des éléments externes non mis en preuve lors du procès »[42].
[111] Comme le précise la Cour d’appel dans l’arrêt R. c. Perron, le « juge de procès ne doit pas ajouter à la preuve de son propre chef sans donner l'opportunité aux parties, s'il a des interrogations, d'y répondre »[43].
[112] Dans l’arrêt R. c. Fraillon[44], même s’il considérait une question différente, le juge Vallerand exprime une opinion similaire :
C'est tout d'abord à tort que le premier juge a statué comme il l'a fait sans donner le loisir aux parties de plaider sur le sujet. Il est, en thèse générale, loisible au juge de signaler aux parties que, dans sa mission de rendre justice, il est troublé par un point de faits ou de droit que ni l'une ni l'autre n'a soulevé. Et cela surtout lorsqu'il s'agit d'un droit reconnu par la Charte. Mais encore faut-il qu'il le signale aux parties et leur donne tout le loisir de vider la question avant qu'il ne statue en conséquence. Or ici, les parties ont, à leur grand étonnement, appris au prononcé du jugement que celui-ci était fondé et uniquement fondé sur une question que le juge n'avait qu'alors soulevée et résolue proprio motu. Le procédé est inadmissible et suffirait à lui seul à soutenir le pourvoi. Mais il y a plus et il nous faut, je pense, en traiter.
[Le soulignement est ajouté]
[113] Bref, les parties ne doivent pas être informées du caractère notoire d’un fait en litige lorsque le jugement est rendu.
[114] Cette règle s’applique aussi dans le domaine du droit administratif.
[115] Dans l’affaire Syndicat des producteurs de bois de la Gaspésie c. Damabois, division Cap-Chat inc.[45], la Cour d’appel devait déterminer si lors d’un arbitrage sous l’égide de la Loi sur la mise en marché des produits agricoles alimentaires et de la pêche[46], la Régie des marchés agricoles et alimentaires du Québec avait, en fixant le du prix d’une essence de bois, transgressé la règle audi alteram partem « en se basant sur la moyenne des prix offerts pour la même essence par les acheteurs dans d’autres régions »[47].
[116] Dans un premier temps, la juge Thibault établit les règles d’équité procédurale entourant la connaissance d’office :
[17] En principe, la jurisprudence ne permet pas à un tribunal de recueillir une preuve sans en aviser les parties et leur permettre de faire des observations. Sur cette question, le professeur Patrice Garant écrit :
Sous réserve de la connaissance d’office, la jurisprudence ne permet pas à un tribunal de recueillir sa propre preuve sans en aviser les parties au dossier et sans les inviter à faire valoir leurs prétentions à l’encontre de celle-ci avant de rendre sa décision. […] Que les observations du tribunal découlent d’une visite ou d’une photographie présentée en preuve, le requérant savait sans doute ce qu’il avait vu et l’équité procédurale est respectée s’il a eu la possibilité de formuler des arguments pertinents.
[Je souligne].
[18] Pour sa part, le professeur Jean-Claude Royer écrit que la connaissance judiciaire de faits est plus étendue devant les tribunaux spécialisés, mais que ceux-ci doivent tout de même, avant de fonder leur décision sur un tel fait, inviter les parties intéressées à faire leurs observations :
Devant des tribunaux administratifs ou spécialisés ou devant des arbitres, la connaissance judiciaire des faits est encore plus étendue. Les membres de ces tribunaux sont souvent nommés en raison de leurs connaissances et de leur expérience dans un domaine spécialisé. Ils peuvent parfois prendre connaissance d'office des faits qui, sans être connus de tout le monde, sont notoires à l'égard des parties qui plaident devant ces tribunaux. [...] Toutefois, dans ces derniers cas, le tribunal ne peut fonder sa décision sur un fait relevé d'office par un membre sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations, sauf si elles ont renoncé à exposer leurs prétentions.
[19] J'en retiens qu'il est largement reconnu dans la doctrine et la jurisprudence qu’un tribunal administratif ne peut importer de nouvelles données sans permettre aux parties de les commenter ou d’en discuter[48].
[Le soulignement dans le paragraphe 19 de l’arrêt est ajouté]
[117] Dans cette affaire, la juge Thibault estime que la Régie n’avait pas violé le droit des parties d’être entendues, car elle avait été invitée par l’une des parties à le faire; les données n’étaient pas intrinsèquement nouvelles; les parties pouvaient s’attendre à ce que la Régie puise dans son expérience; et finalement, il s’agissait de données publiques connues de tous :
[27] La Régie a donc déterminé le prix du tremble en se basant sur la moyenne des prix offerts pour la même essence par les acheteurs dans d’autres régions. À l’instar du juge de première instance, je suis d’avis que la Régie n’a pas violé la règle audi alteram partem en procédant comme elle l’a fait. Les parties savaient que la Régie, dans son rôle de régulation de la mise en marché du bois, devait fixer le prix du tremble pour les années concernées et que, pour ce faire, elle pouvait, comme le lui avait suggéré le Syndicat, prendre en compte « l’état du marché » et « l’évolution des prix payés aux producteurs par les entreprises concurrentes ». Il ne faut pas oublier que, lors de l’arbitrage d’une convention de mise en marché, la Régie entend, dans un débat contradictoire, les parties à une future convention. Dans ce cadre, son pouvoir ne se limite pas à appliquer une règle de droit, mais elle agit dans une perspective plus large de régulation économique. Elle jouit, en conséquence, d’une large discrétion dans ce rôle et dans la décision qu’elle est appelée à rendre.
[28] Je suis donc d’accord avec le juge de première instance pour dire que les données utilisées par la Régie n’étaient pas intrinsèquement nouvelles et que les parties pouvaient s’attendre à ce que la Régie puise dans l’expérience du marché des données publiques connues de tous et qui étaient de nature à lui permettre de fixer le juste prix du tremble pour les années concernées. S'il fallait exiger de la Régie qu'elle soumette à tous les intéressés chacune des données publiques connues, pertinentes et de la même nature que celles soumises lors des séances publiques et dont elle envisage de tenir compte, cela pourrait scléroser son action.
[Le soulignement et le caractère gras sont ajoutés]
[118] Ainsi, en principe, le décideur ne peut importer de nouvelles données sans permettre aux parties de les commenter ou d’en discuter.
[119] Il s’avère aussi crucial de déterminer si le décideur a été invité par l’une des parties à considérer certaines données relatives à la question qui doit être tranchée.
[120] L’expectative des parties, tant à l’égard de la question que le décideur doit trancher que les données qu’il aura à considérer pour ce faire, se révèlent pertinentes à tout accroc au droit d’être entendu.
[121] Par ailleurs, la nouveauté des données qui doivent faire l’objet de la connaissance d’office par le décideur et leur caractère public notoire se révèlent importants à la démonstration de toute contravention au droit d’être entendu.
[122] Voilà les jalons posés par la jurisprudence québécoise sur le droit d’être entendu avant qu’un juge prenne connaissance d’office d’un fait.
R v S (WEQ), 2018 MBCA 106 Lien ver la décision [ 14 ] When an accused challenges the validity of a warrantless arres...