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dimanche 24 août 2025

Revue du droit applicable à l'enquête caution par le juge Vauclair, siégeant lors à la Cour du Québec

R. c. Brunetti, 2006 QCCQ 11317

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[24]      Le paragraphe 515(6) C.cr. impose à Brunetti de faire valoir l'absence de fondement à sa détention dans l’attente de son procès. Les parties ayant convenu que le danger que Brunetti s’esquive n’est pas réel, il doit donc démontrer par prépondérance de preuve que sa détention n’est pas nécessaire

515(10) b) … pour la protection ou la sécurité du public, notamment celle des victimes et des témoins de l'infraction, eu égard aux circonstances, y compris toute probabilité marquée que le prévenu, s'il est mis en liberté, commettra une infraction criminelle ou nuira à l'administration de la justice;

515(10) c) … pour ne pas miner la confiance du public envers l'administration de la justice, compte tenu de toutes les circonstances, notamment le fait que l'accusation paraît fondée, la gravité de l'infraction, les circonstances entourant sa perpétration et le fait que le prévenu encourt, en cas de condamnation, une longue peine d'emprisonnement.

[25]      Ce renversement de fardeau respecte la présomption d’innocence[1] et fait partie des règles de notre société en matière de remise en liberté. Ce renversement de fardeau est non seulement logique, mais souhaitable, eu égard à la nature même de l’activité criminelle en cause. Dans le cas du trafic de quantités importantes de stupéfiants, il s’agit d’un agir criminel systématique et lucratif.  La présomption d'innocence est néanmoins la base de notre droit pénal. Ainsi, une preuve accablante n'est qu'un facteur parmi plusieurs autres que le juge doit considérer et l’enquête sur la remise en liberté ne constitue pas un procès anticipé[2], non plus qu'un moyen «de faire débuter la peine en ordonnant une détention immédiate»[3].

[26]      L’enquête sur remise en liberté et le procès criminel se distinguent en ce que la première s’intéresse autant à la personne qu’à ce qu’elle est accusée d’avoir fait. Aussi, la preuve de propension, exceptionnelle lors du procès, est une preuve non seulement pertinente, mais importante lors de l’enquête sur remise en liberté:

The trial, of course, usually focuses on the binary issue of guilt or innocence. Rules of evidence have developed to, ensure that this determination is done fairly and in accordance with Charter values. At a bail hearing, the court is required to make a prediction about the accused person's future conduct. The assessment is based upon what the accused is alleged to have done, along with information about the accused person's social circumstances and character. Subject to rules of admissibility (discussed below), anything that sheds light on these issues is relevant at a bail hearing. Consequently, evidence may be led that would not be relevant and admissible at a trial. This may include: character evidence; propensity for violence; uncharged conduct; other contacts with the police; evidence as to disposition; psychiatric history; stayed charges; and employment history. Equally, this same expansive approach to relevance is applicable to evidence led by the accused person.[4]

[27]      Dans l'arrêt Rondeau, le juge Proulx a exposé les critères applicables dans l'évaluation du risque exposé par l'alinéa 515(10)b) C.cr., en insistant sur l'effet combiné de ceux-ci:

Dans le cas à l'étude, le litige porte sur l'évaluation de la probabilité de dangerosité. À mon avis, plusieurs facteurs doivent être pris en compte pour décider de cette question, dont (1) la nature de l'infraction, (2) les circonstances pertinentes de celle-ci, ce qui peut mettre en cause les événements antérieurs et postérieurs, (3) la probabilité d'une condamnation, (4) le degré de participation de l'inculpé, (5) la relation de l'inculpé avec la victime, (6) le profil de l'inculpé, i.e., son occupation, son mode de vie, ses antécédents judiciaires, son milieu familial, son état mental, (7) sa conduite postérieurement à la commission de l'infraction reprochée, (8) le danger que représente, pour la communauté particulièrement visée par l'affaire, la liberté provisoire de l'inculpé. [5]

[28]      À ces facteurs est venue s’ajouter plus récemment l’appartenance à un gang criminalisé. Dans l’arrêt R. c. Ruest, le juge Réjean Paul écrivait :

Il est maintenant de connaissance judiciaire que les Hells Angels constituent une organisation criminelle vouée au trafic de drogue, impliquée dans les réseaux de prostitution et en charge de divers réseaux de contrebande. De plus, en vue d'éliminer la concurrence, ils ont livré une guerre sans merci à leurs concurrents (plus de 170 victimes reliées à cette guerre ont été recensées entre 1995 et 2001).

Ainsi, ceux qui participent aux activités criminelles d'une organisation criminelle, telle que celle des Hell's Angels, doivent s'attendre à ce qu'un nouveau facteur aggravant s'ajoute à cette liste (non exhaustive) de monsieur le juge Proulx dans Rondeau.[6]

[29]      Dans R. c. Boulianne, confirmant la décision du premier juge de ne pas accorder de remise en liberté pour le motif énoncé à l'alinéa 515(10)b) C.cr., le juge Grenier concluait :

L'appartenance à des groupes criminels structurés qui visent, par définition, à devenir des monopoles de la vente de drogue, que ce soit sur le plan local ou national, démontre un choix de vie, celui de mener des affaires lucratives en violation et au mépris de la loi.

La société, par l'entremise des tribunaux, a le devoir de réagir à ce phénomène en privilégiant la dissuasion comme remède. Cette dissuasion doit s'exercer, non seulement à l'endroit des têtes dirigeantes des réseaux, mais aussi à l'endroit de tous les individus constituant des rouages importants permettant à ces organisations d'être opérationnelles et de se régénérer avec rapidité quand elles sont décapitées. [7]

[30]      Dans l’arrêt R. c. Bédard, le même juge faisait siens les propos du juge Gagnon, à l’effet que :

Il résulte donc que la mise en liberté d'un membre important d'une organisation criminelle structurée est exceptionnelle à cause du fardeau de preuve très grand qui lui incombe.[8]

[31]      Si la prévisibilité exacte de la dangerosité future n’est pas exigée par la Constitution [9], il faut que cette probabilité soit importante, qu’elle compromette la protection et la sécurité du public, et qu’elle soit nécessaire pour cette protection [10] et non "seulement commode ou avantageuse” [11].  La mise en liberté provisoire ne doit pas être refusée à toute personne qui risque de commettre une infraction. Tel n’est pas le critère. Non plus que les règles interdisent tout élargissement avant procès d'un membre d'une organisation criminelle, comme l'a expliqué de façon très à propos le juge François Doyon, alors juge à la Cour du Québec, dans R. c. Judd :

 Il me paraît que l'arrêt Pearson ne signifie pas que le membre d'une organisation criminelle structurée doive se voir nécessairement refuser la remise en liberté. Par contre, cet arrêt nous enseigne, se basant sur des études et des rapports qui y sont mentionnés, qu'un membre d'une telle organisation, accusé d'importation et de trafic de stupéfiants, aura tendance à poursuive ses activités criminelles après sa remise en liberté et sera souvent en position de se soustraire à la justice. C'est dans cet esprit que l'appartenance à une organisation criminelle structurée et pertinente à une enquête sur cautionnement.[12]

Les infractions énumérées à l'al. 515(6)d) présentent des particularités qui justifient un traitement différent dans le processus de la mise en liberté sous caution. Ces particularités sont relevées par le Groupe de travail sur la lutte contre la drogue, Rapport du groupe de travail sur la lutte contre la drogue (1990). Aux pages 18 et 19, on y lit que le trafic de stupéfiants constitue généralement une forme de crime organisé:

     Au Québec, le trafic de drogues est généralement sous le contrôle de membres du crime organisé qui assurent la distribution dans toutes les régions. Bénéficiant d'organisations bien structurées, leur capacité à financer des transactions importantes leur permet d'importer de grandes quantités de drogues, souvent même sous le couvert d'entreprises légitimes. Depuis quelque temps, ils investissent et mettent en commun leurs ressources afin d'optimiser le rendement financier des mises de fonds; ces cartels vont jusqu'à planifier une forme d'assurance-risque leur permettant de répartir entre eux les pertes subies lors des saisies policières. À la fois importateurs, grossistes et détaillants, ces organisations peuvent vendre à la tonne, au kilo et même au gramme via les points de vente qu'ils contrôlent; elles sont particulièrement actives dans le trafic du cannabis et de l'héroïne. … [En caractères gras dans l'original.]

     À la p. 21, on fait aussi remarquer que le trafic de la drogue est parfois considéré à tort comme étant de nature moins grave que des crimes nettement plus violents:

     Contrairement aux vols qualifiés, aux agressions sexuelles, aux meurtres, le trafic de drogues est souvent considéré, à tort, comme un crime sans violence; d'où une certaine tolérance à l'endroit des trafiquants qui donnent l'illusion de gens d'affaires anonymes, dissimulés parmi ceux dont le commerce est légal. Une telle impression est cependant loin de la réalité si l'on considère les luttes féroces pour le contrôle de territoires et les actions violentes pour se procurer l'argent nécessaire à l'achat de drogues; si l'on songe également aux sévices personnels et aux drames sociaux qui s'en suivent. [En caractères gras dans l'original.] [13]

In fact, unless we close our eyes and deliberately plug our ears, it is impossible not to be aware of certain widespread phenomena in our society: first, the daily increase in the use of drugs and narcotics; secondly, the fact that this usage is almost exclusively confined to young people; thirdly, the alarming case with which users are able to obtain them, and finally, the deleterious effects that these drugs, especially "hard" drugs, produce on those who use them.

The three categories of persons who come before our Courts are, beginning with those at the end of the chain, the user; on the way toward him, the middleman or "pusher", and at the beginning of the chain, the wholesaler. The simple possessor is harmful only to himself; the pusher profiteers. As forthe wholesaler, it is especially against him that society must protect itself, because he is the source of the evil, which eventually contaminates public health both physical and mental.

It is therefore this Court's opinion with respect to interim release, that while one can and must give sympathetic attention to the case of the simple possessor, one must look severely upon that of the wholesaler, who initiates the distribution and marketing process, since were it not for the wholesaler's existence, our young drug addicts would be much less likely to be exposed, or at least they would be infinitely less numerous.[14]

[34]      Ce qui amène au critère de l'alinéa 515(10)c) C.cr., dont la validité constitutionnelle et les principes qui doivent guider son application ont été examinés par la Cour suprême. Ce troisième critère est autonome. Il constitue un motif séparé et distinct. [15]  Certes, les cas de détention fondés sur ce troisième critère seront rares[16]. Même face à des phénomènes criminels dangereux et inquiétants, il faut se montrer prudent à recourir à cette disposition.[17] C’est toutefois la perte de confiance de la population envers le système de justice qui est au cœur de l'analyse[18].

[35]      Comme l’a souligné le juge Boilard dans l'arrêt R. c. Sweeney :

… il faut accepter la conséquence de l'intervention parlementaire dans l'article 515(10)(c) et reconnaître qu'il y a des cas de criminalité où ceux qui en sont inculpés vont devoir attendre l'aboutissement de la présomption d'innocence en prison.[19]

Une enquête sur mise en liberté provisoire est une procédure qui se veut expéditive et la preuve administrée ne peut donc pas être exhaustive

R. c. Coates, 2010 QCCA 919 

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[16]           Une enquête sur mise en liberté provisoire n'est pas un procès et ne doit pas le devenir. Il s'agit d'une procédure qui se veut expéditive et la preuve ne peut donc pas être exhaustive. Il en est de même de la décision judiciaire; celle-ci doit être prononcée dans les meilleurs délais possibles et il ne saurait être question d'exiger du juge qu'il traite de tous les éléments de preuve ni qu'il examine de façon définitive toutes les questions de droit et de fait soulevées par la preuve. Il doit faire un choix et le résumé de la preuve, particulièrement dans un dossier comme celui-ci, ne peut être que sommaire, en fonction des critères et facteurs pertinents.

[17]           En l'espèce, l'on ne peut reprocher au juge de première instance d'avoir erronément omis de tenir compte de l'ensemble de la preuve. Si le jugement ne fait pas état de façon spécifique d'un élément de preuve, cela ne peut en soi permettre d'inférer que le juge n'a pas tenu compte de cette preuve. Ici, la lecture du jugement démontre au contraire qu'il était conscient de l'ampleur de la preuve dont il devait tenir compte, mais qu'il ne pouvait ni n'avait d'ailleurs l'obligation de l'exposer de manière exhaustive.

[18]           On ne peut davantage lui reprocher d'avoir écrit que, bien que la preuve paraisse solide, elle n'avait pas encore été mise à l'épreuve[5]. Même si une partie de cette preuve a été examinée et analysée à l'occasion d'autres procès, souvent de manière favorable à la théorie de la poursuite, il demeure qu'elle n'a pas été évaluée dans le contexte que l'on connaît maintenant. Il vaut de rappeler, par exemple, que le témoin Boulanger, qui est au cœur de la théorie de l'appelante, n'a jamais été confronté à un contre-interrogatoire et que sa crédibilité n'a jamais été soumise à l'analyse d'un jury.

[19]           De même, le juge n'était pas en mesure de déterminer la fiabilité de nombreux autres éléments de preuve, de sorte que l'exercice auquel il pouvait s'astreindre en rapport avec la preuve disponible consistait plutôt, comme le prévoit le paragr. 515 (10) c) C.cr., à tenir compte notamment du « fait que l'accusation paraît fondée ». Il était donc également autorisé à prendre en considération les moyens de défense auxquels la preuve pouvait donner prise; il serait en effet injuste de permettre à la poursuite de faire état de la preuve à charge sans que le juge puisse considérer non seulement ses faiblesses, mais aussi les moyens de défense qu'elle laisse voir.

[20]           Il faut aussi rappeler que, sauf erreur importante, la Cour ne doit pas substituer son opinion à celle du juge de première instance en ce qui a trait à l'évaluation de la preuve, celui-ci étant toujours dans une position privilégiée par rapport à un tribunal d'appel. Comme l'écrit la juge Côté dans R. c. M.J. [6] :

[27]  Bien que l'article 680 du C.cr. permette à cette Cour de substituer à la décision de première instance la décision qui, à son avis, aurait dû être rendue, il faut se garder de substituer de façon capricieuse notre propre appréciation de la preuve à celle de la première juge qui a eu l'avantage d'entendre six témoins et d'apprécier leur témoignage respectif.

samedi 23 août 2025

Pour déterminer si une conduite vise à susciter un sentiment de crainte chez son destinataire, on doit s'intéresser à l'effet que produirait la conduite de l'accusé sur une personne raisonnable se trouvant dans la même situation que la personne visée par la conduite

R. v. Sim, 2017 ONCA 856

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[15]      Sim submits that the trial judge erred in law in making this finding because establishing the actus reus of the offense requires proof that the accused subjectively intended to engage in threatening conduct. The trial judge acknowledged that if the actus reus imports a requirement to prove an accused’s subjective intention, then Sim was entitled to be acquitted. But the trial judge held that there was no such requirement. I agree. For that reason, I do not accept Sim’s submission.

[16]      In R. v. Burns2008 ONCA 6, 77 W.C.B. (2d) 402  – relying on the judgment of the Yukon Territory Court of Appeal in R. v. George2002 YKCA 2, 52 W.C.B. (2d) 530 – this court endorsed an objective standard for determining the actus reus of harassment by engaging in threatening conduct. At para. 2, the court wrote:

To establish harassment under s. 264(2)(d) of the Criminal Code, the Crown had to establish that the appellant engaged in “threatening conduct”. We accept the definition of threatening conduct given in R. v. George at para. 39 that, in order to meet the objectives of s. 264, the threatening conduct must amount to a “tool of intimidation which is designed to instill a sense of fear in the recipient”. The impugned conduct is to be viewed objectively, with due consideration for the circumstances in which they took place, and with regards to the effects those acts had on the recipient. [Citation omitted.]

[17]      In support of his submission, Sim focuses on the word “designed” in the phrase “tool of intimidation which is designed to instill a sense of fear in the recipient”. I do not read this phrase or the word “designed” in the way Sim does for two main reasons.

[18]      First, Sim’s submission is inconsistent with s. 264(1) of the Code and thus is contrary to Parliament’s express intent. Subsection 264(1) specifies that the mens rea component of criminal harassment can be met by an accused’s knowledge or recklessness. To suggest that the actus reus of threatening conduct requires a specific intent to instil fear is contrary to the plain language of s. 264(1).

[19]      Second, as this court said in Burns, under s. 264(2)(d) the conduct in question must be viewed objectively. In other words, would the accused’s threatening conduct cause a reasonable person in the complainant’s situation to fear for her safety? The word “designed” does not require the Crown to prove the accused’s subjective intention. And, in assessing whether an accused’s conduct is threatening under s. 264(2)(d), a judge is not required to get into the accused’s mind.

[20]      Instead, the word “designed” is meant to focus on the effect of the accused’s conduct on a reasonable person in the shoes of the target of the conduct. In Burns, this court clarified that the objective assessment must consider the circumstances in which the conduct took place, and the effects that the conduct actually had on the complainant. Although an accused's threatening conduct may not affect every target of that conduct, in every conceivable situation, it could well instill fear in a reasonable person in the complainant’s specific situation, particularly when the actual effects of the conduct on the complaint are considered. That is the case here. The trial judge did not err in finding that the Crown had established the actus reus of the offence.

Face à une preuve circonstancielle, cette dernière doit être suffisante pour permettre d'inférer la mens rea hors de tout doute raisonnable des faits prouvés

R. v. Holmes, 2008 ONCA 604

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[2]               Whether the appellant had the requisite mens rea was in this case primarily a question of fact. Since there was no evidence from the appellant, whether or not he had the requisite mens rea depended on the inferences to be drawn from the proven facts. The trial judge rejected the submission that the use of a hat and sunglasses was a disguise and he was entitled to do so on this record. Moreover, the appellant drove slowly past the gym twice in his distinctive car and then ran on to the street as the complainant’s vehicle was leaving. Given those facts it was open to the trial judge to find, as he did, that the appellant was reckless as to whether the complainant was harassed.

Quand un seul événement peut-il se qualifier comme étant du harcèlement criminel?

R. v. Kohl, 2009 ONCA 100

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[4] This case raises the issue of whether a single incident of this nature can constitute harassment under s. 264(2)(d) of the Criminal Code, R.S.C. 1985, c. C-46. It also raises the issue of whether a sentence of three years in the penitentiary is a fit sentence.

[26] Counsel for the appellant submits that, for a single incident to constitute harassment under s. 264 of the Criminal Code, such incident must be linked to past conduct or "carry with it the threat of future contact". He relies upon this court's reasons for judgment in R. v. Kosikar1999 CanLII 3775 (ON CA), [1999] O.J. No. 3569, 138 C.C.C. (3d) 217 (C.A.), at para. 28, where Goudge J.A. said:

Moreover, while in this case the prior contact is important proof of the consequence caused to the complainant, it is possible to imagine a case where the complainant's feeling harassed would be proven not through the context of prior contact but by evidence of a single incident that carried the real future prospect of the continuing tormenting of the complainant. In other words, prior contact may not be the only way of proving the necessary consequence of a single act of threatening conduct.

[27] In Kosikar, the conduct relied upon by the Crown was an abusive letter sent after a previous conviction for harassing the [page248] complainant. The issue before the court was whether a single incident (the letter) could found a conviction under s. 264 given the harassment element of the offence. Goudge J.A. concluded that a single incident could be sufficient to support a conviction. He said, at para. 20:

As a matter of statutory interpretation I do not think that s. 264(2)(d) is limited to repeated threatening conduct to the exclusion of a single threatening act. Parliament expressly required repeated conduct in defining the prohibited acts in s. 264(2)(a) and (b). The absence of such a qualification in s. 264(2)(d) strongly suggests to me a legislative intention not to confine that prohibition to repeated threatening conduct, but to encompass a single threatening act as well. Goudge J.A. went on to say that the threatening conduct need not be repetitious provided that it produces in the complainant a state of being harassed. Relying in part on Sillipp, Goudge J.A. concluded that a state of being harassed involved the complainant being "tormented, troubled, worried continually or chronically, plagued, bedevilled and badgered".

[28] In a more recent judgment of this court, R. v. O'Connor, [2008] O.J. No. 1125, 2008 ONCA 206, Simmons J.A. appears to carry the analysis in Kosikar a step further. At paras. 4 and 5, Simmons J.A. said:

In Kosikar, evidence of prior contact between the accused and the complainant was used to show that as the consequence of a letter the complainant felt harassed. However, Goudge J.A. also stated, "it is possible to imagine a case where the complainant's feeling harassed would be proven . . . by evidence of a single incident that carried the real future prospect of the continuing tormenting of the complainant."

On the facts of this case, in my view, it was open to the trial judge to find that the complainant was harassed both because the appellant's behaviour during the incident was persistent and because the incident occurred while the appellant was subject to a probation order requiring that he have no contact with the complainant.

[29] I would adopt the approach taken by the court in O'Connor. Even though the conduct in this case occurred over a relatively short period of time and there was no prior contact, it was highly threatening and persistent. The appellant jumped out of the bushes, blocked the progress of the complainant with outstretched arms, chased her down the road where she fled from him, then stood outside the Montgomery residence and stared at her. The trial judge properly described the appellant's conduct as persistent:

When the persistence of his actions are taken into consideration with the fact that during this time he spoke no words to ease what obviously from his apology appeared to him to have an unfavourable effect on the complainant, his actions may, as previously described, appear as threatening conduct . . . [page249]

[30] During the encounter with the appellant, brief as it was, the complainant reasonably feared for her safety and was clearly in a state of being harassed.

Le critère applicable au stade de la requête pour un verdict imposé d’acquittement

R. c. Latendresse, 2023 QCCQ 2357

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[39]        Le chapeau que porte le juge à cette étape des procédures est fort différent de celui qu’il porte à la fin du procès, alors qu’il évalue la valeur probante de la preuve en dernière analyse. Le rôle actuel du Tribunal n’est pas de déterminer la culpabilité ou l’innocence.

[40]        Le but de la présente requête est plutôt d’écarter, avant que l’accusé soit appelé à présenter une défense, les accusations ne présentant aucune possibilité réaliste de condamnation. Le recours vise à prévenir les condamnations injustifiées ou erronées, en plus d’écourter les débats qui aboutiront nécessairement à un acquittement[14].

[41]        Quant au critère pour justifier la continuation du procès, le seuil à franchir est minime. Il s’agit d’ailleurs du même critère qui s’applique en matière de renvoi à procès aux fins d’une extradition, ou même en matière de citation à procès au terme d’une enquête préliminaire[15]. Le juge doit se demander s’il existe une preuve prima facie de chacun des éléments essentiels de l’infraction. La question que doit se poser le juge est la suivante : la preuve suffit-elle pour qu’un jury raisonnable, agissant de bonne foi et ayant reçu des directives appropriées, puisse prononcer un verdict de culpabilité[16]?

[42]        Lorsque plusieurs modes alternatifs de commission de l’infraction sont évoqués par le ministère public, chacun doit être considéré par le Tribunal de façon individuelle et consécutive[17]. Une réponse affirmative pour l’un des modes entraînera le rejet de la motion de non-lieu.

[43]        Une jurisprudence abondante et constante énonce qu’à cette étape, le juge n’est pas autorisé à apprécier la crédibilité et la fiabilité des témoins et que, lorsque plusieurs inférences peuvent résulter de la preuve, il ne faut considérer que celles qui sont favorables au ministère public[18]. Le juge qui ne respecte pas ces contraintes outrepasse sa compétence[19]. Il appartiendra à ce même juge, mais seulement à la fin du procès, d’apprécier les inférences opposées ou faire un choix parmi celles-ci[20]. Autrement dit, le juge entendant une requête en non-lieu ne peut tirer des conclusions sur la qualité, la crédibilité et la fiabilité de la preuve.

[44]        Par ailleurs, dans l’arrêt R. c. Arcuri, la Cour suprême a reconnu que le juge pouvait exercer une fonction d’évaluation limitée de la preuve dans certaines circonstances précises, soit lorsque la poursuite se base sur une preuve circonstancielle. Toutefois, même dans ces cas, cette évaluation étroite se limite à déterminer si un jury équitable pourrait raisonnablement tirer les inférences nécessaires de la preuve circonstancielle pour arriver à un verdict de culpabilité. À ce stade, la règle de l’Affaire Hodge et les principes énoncés par la Cour suprême dans l’arrêt R. c. Villaroman[21] n’ont aucune application[22].

[45]        Le test n’est pas exigeant pour le ministère public. Comme l’a mentionné la Cour d’appel du Québec dans l’arrêt R. c. Blier, l’expression consacrée pour définir le degré de preuve requise est un soupçon de preuve ou, en anglais, « a scintilla of evidence »[23].

Le dédommagement à la victime doit toujours être envisagé lors de la détermination de la peine

Le droit applicable à la preuve de la conduite postérieure à l’infraction

R. c. Cardinal, 2018 QCCS 2441 Lien vers la décision [ 33 ]             L’essentiel du droit applicable à la preuve de la conduite postérieu...