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dimanche 2 novembre 2025

Des paroles prononcées pour expliquer sa détresse ne constituent pas nécessairement des menaces au sens du Code criminel; il faut analyser ce type de confidence dans le contexte où les paroles sont prononcées

Martel c. R., 2023 QCCA 205


La mens rea

[27]      L’appelant reproche d’abord au juge d’avoir omis d’analyser l’élément intentionnel de l’infraction. Il s’agit d’une erreur de droit. Le juge se devait de tenir compte du contexte dans lequel les paroles ont été prononcées, soit dans le cadre d’une demande d’aide. L’appel au PAE a été fait dans un état de détresse, afin d’obtenir l’aide d’un professionnel et pour trouver des solutions.

[28]      Lors de son troisième appel au PAE, l’appelant souligne qu’il a clairement expliqué ne pas avoir l’intention d’être pris au sérieux par les intervenants. Il souhaitait « imager son état d’esprit »[32]. Il appelait pour avoir de l’aide et ne pas « se mettre dans le trouble »[33].

[29]      Pour l’intimé, le juge de première instance a correctement identifié l’élément de faute de l’infraction tout en l’appliquant aux faits. Il a tenu compte du contexte dans lequel les propos ont été prononcés.

[30]      L’intimé estime qu’au procès l’appelant a semblé reconnaître que, lors de son appel au PAE, il voulait que ses interlocuteurs le prennent au sérieux en référant à une tuerie. Il est également d’avis que le fait que ce dernier cherchait de l’aide en appelant au PAE n’était pas décisif pour déterminer son intention. Le mobile ne doit pas être confondu avec l’intention. En outre, celui-ci cherchait principalement à être exempté du port du couvre-visage.

* * *

[31]      L’infraction de menace de causer la mort ou des lésions corporelles est prévue à l’alinéa 264.1(1)aC.cr:

264.1 (1) Commet une infraction quiconque sciemment profère, transmet ou fait recevoir par une personne, de quelque façon, une menace :

 

a) de causer la mort ou des lésions corporelles à quelqu’un;

264.1 (1) Every one who, in any manner, knowingly utters, conveys or causes any person to receive a threat

 

 

 

(a) to cause death or bodily harm to any person;

[32]      L’élément de faute de l’infraction de menace revêt un caractère subjectif. Comme le mentionne la Cour suprême dans l’arrêt R. c. McRae, il faut examiner ce que l’accusé entendait effectivement faire. On doit rechercher son intention véritable lorsqu’il a prononcé les paroles qui lui sont reprochées :

[19]      L’élément de faute revêt ici un caractère subjectif; ce qui importe, c’est ce que l’accusé entendait effectivement faire. Toutefois, comme c’est généralement le cas, la décision quant à l’intention véritable de l’accusé peut dépendre de conclusions tirées de toutes les circonstances (voir, p. ex., McCraw, p. 82). Le fait de tirer ces conclusions ne revient pas à s’écarter de la norme subjective de faute. Dans R. c. Hundal1993 CanLII 120 (CSC), [1993] 1 R.C.S. 867, le juge Cory cite les propos suivants du professeur Stuart qui explique ce point :

[traduction] Il est loisible au juge des faits qui cherche à déterminer ce qui se passait dans l’esprit de l’accusé, ainsi que le commande la méthode subjective, de tirer des conclusions raisonnables des gestes ou des paroles de l’accusé soit au moment de l’acte qui lui est reproché soit à la barre des témoins.  On peut croire l’accusé ou ne pas le croire. Conclure, sur la foi de la totalité de la preuve, que le ministère public a prouvé hors de tout doute raisonnable que l’accusé a « dû » avoir l’état d’esprit entraînant la sanction ce n’est pas s’écarter de la norme fondamentale subjective. Le recours à une norme fondamentale objective n’a lieu que si on se dit que l’accusé « aurait dû s’en rendre compte s’il y avait réfléchi ». [Je souligne; p. 883][34]

[33]      Pour faire cette détermination, le juge du procès doit tenir compte de toutes les circonstances dans lesquelles les paroles ont été prononcées et des explications que l’accusé fournit lors de son témoignage. L’examen de l’intention requise pour l’infraction de menace implique une analyse subjective de la faute commise. La finalité des propos est importante.

[34]      Le professeur Pierre Rainville explique que le crime de menace implique un dessein criminel. Il s’exprime ainsi :

Le degré de prise de conscience de l’accusé suppose quelques remarques supplémentaires. Sa perception du sens des paroles en jeu est déterminante. Il a droit à l’acquittement si l’idée ne lui effleure pas l’esprit que ses paroles puissent être prises au sérieux. Même l’insouciance possible du plaisantin quant aux conséquences de ses paroles ne saurait suffire, selon nous, à le faire condamner. L’insouciance suppose la réalisation par l’accusé du risque que ses paroles revêtent une signification intimidante. Cette prise de conscience est insuffisante. Le crime de menaces exige un dessein criminel. Cette infraction obéit au principe classique du droit pénal canadien selon lequel un crime d’intention spécifique ne saurait se satisfaire de l’insouciance du prévenu.[35]

[Renvois omis]

[35]      En l’espèce, la Cour est d’avis que le juge a commis une erreur de droit en omettant d’analyser l’élément intentionnel de l’infraction[36]. La Cour, dans l’arrêt Joad c. R., mentionne que pour trancher la question de la mens rea, le juge doit se pencher d’abord sur les explications de l’accusé :

[23]        Le juge de première instance ne pouvait pas trancher la question de la mens rea pour l’une ou l’autre des deux accusations sans se pencher d’abord sur les explications de l’appelant. Ces explications dépassent de beaucoup la question du mobile qui l’animait. Elles touchent à l’interprétation même de son message et par voie de conséquence, à ses intentions en écrivant ce texte. Le juge de première instance se devait, dans les circonstances, d’en traiter. L’appelant n’a pas à deviner ce que le juge a pensé, et fait de ses explications; il doit pouvoir l’entendre ou le lire. Il s’agit d’une lacune importante dans le jugement dont appel, justifiant l’intervention de la Cour sans qu’il soit nécessaire d’analyser les autres moyens d’appel soulevés par l’appelant.[37]

[36]      Or, l’analyse du juge de la mens rea se limite essentiellement à ce passage :

[59]      Voulait-il être pris au sérieux? J'en suis convaincu hors de tout doute raisonnable. Cela lui permettait-il de donner plus de force à son point de vue, dans son esprit? Cela est bien possible.[38]

[37]      Il ne se questionne pas sur l’intention de l’appelant lors des appels au PAE et s’en tient essentiellement à l’examen de l’actus reus.

[38]      La Cour est d’avis que le juge a commis une erreur dans son analyse de la mens rea. Premièrement, il a erré en écartant les explications données par l’appelant lors du troisième appel au PAE, alors qu’il a eu lieu quelques minutes seulement après les deux autres. Dès ce moment, l’appelant explique qu’il recherche de l’aide et qu’il n’a aucune intention de tuer quelqu’un. Plutôt que de tenir compte des explications de l’appelant, le juge considère qu’il est trop tard pour exprimer des regrets puisque le crime était déjà commis[39].

[43]      Il est exact en l’espèce que l’appelant n’était pas en thérapie au moment où il a prononcé les paroles ayant mené à des accusations criminelles. Il était toutefois en contact avec le PAE afin d’obtenir de l’aide. C’est à la suite d’une question de la première agente qui voulait connaître les raisons de sa demande de consultation, et après quelques instants d’hésitation[43], qu’il a prononcé les paroles visées par les accusations. Il n’appelait pas au PAE pour menacer qui que ce soit, il cherchait de l’aide pour ne pas en venir à perdre le contrôle. Il avait d’ailleurs consulté ce service avec succès dans le passé.

[44]      Comme le souligne le professeur Rainville, une consultation visant à freiner des pensées noires « suppose de toute évidence la volonté d'être pris au sérieux »[44], mais les paroles prononcées pour expliquer la détresse ne constituent pas nécessairement des menaces. Il explique qu’il faut analyser ce type de confidence dans le contexte où les paroles sont prononcées. Un cri de désespoir ou un cri du cœur ne s’apparente généralement pas à une menace :

La thèse de la culpabilité semble acquise dans un cas précis. L’impunité n’est nullement méritée si l’inculpé se montre imperturbable quant à son dessein. Qu’il suffise de songer au détenu tenu de rencontrer un psychologue afin d’évaluer les risques de récidive ou la perspective d’une libération conditionnelle. L’exposition d’une volonté de récidive assumée relève, à n’en point douter, du champ d’incrimination de l’article 264.1 C.cr.

Les autres cas de figure appellent davantage de circonspection. Un cri de désespoir ou un cri du cœur ne s’apparente généralement pas à une menace : la personne désireuse de faire comprendre à son interlocuteur sa détresse ou sa frustration et non pas sa volonté de passer à l’acte ne saurait écoper d’une déclaration de culpabilité.[45]

[45]      Les circonstances dans lesquelles les paroles ont été prononcées revêtent donc la plus haute importance pour déterminer si elles doivent faire l’objet de sanctions criminelles. Il ne faut pas faire en sorte que des personnes qui cherchent de l’aide évitent de le faire de peur que leurs paroles soient mal interprétées. Un appel à l’aide ne devrait pas être visé par l’article 264.1 C.cr.[46].

[46]      La Cour est d’avis que le juge a commis une erreur de droit en concluant que l’appelant avait l’intention requise pour commettre l’infraction de menace. L’ensemble des circonstances, incluant les explications données par l’appelant tant au moment du troisième appel au PAE, de sa déclaration aux policiers que lors du procès, indique qu’il n’avait pas l’intention requise pour être déclaré coupable en vertu de l’article 264.1(1) C.cr. Il doit donc être acquitté de cette infraction.

Des propos tenus sous le coup de la frustration ou sans que le « projet » soit pris au sérieux constitue un moyen de défense recevable contre une infraction de menace de causer des lésions corporelles; le témoignage de l'accusé est donc important pour déterminer s’il possédait l’intention spécifique requise

Patoine c. R., 2022 QCCA 1517



[17]      L’infraction en cause est énoncée à l’alinéa 264.1(1)a) du Code criminel :

264.1 (1) Commet une infraction quiconque sciemment profère, transmet ou fait recevoir par une personne, de quelque façon, une menace :

264.1 (1) Every one commits an offence who, in any manner, knowingly utters, conveys or causes any person to receive a threat

a) de causer la mort ou des lésions corporelles à quelqu’un;

(a) to cause death or bodily harm to any person;

[18]      Les éléments de cette infraction comprennent 1) le fait de proférer ou de transmettre une menace de causer la mort ou des lésions corporelles; et 2) l’intention de menacer[7].

[19]      L’acte prohibé (actus reus) est le fait de proférer des menaces de mort ou de blessures graves. Il n’est pas nécessaire de prouver que le destinataire de la menace en a été informé ou qu’il a été intimidé par celle-ci ou l’a prise au sérieux[8]. Il n’est pas nécessaire que les paroles prononcées s’adressent à une personne en particulier ni qu’elle soit identifiable puisqu’« il suffit que la menace soit dirigée contre un groupe déterminé de personnes »[9].

[20]      Par contre, la détermination de ce qu’est une menace au sens de l’al. 264.1aC.crest une question de droit qui doit être tranchée à la lumière d’une norme objective[10]. Dans le cadre de cette analyse, la Cour suprême nous indique qu’il faut s’en tenir au sens ordinaire des mots qui sont prononcés. S’ils sont manifestement menaçants et qu’ils ne comportent pas de sens secondaire, il n’est pas nécessaire de pousser plus loin l’analyse. Or, des propos qui peuvent paraître anodins peuvent être élevés au rang de menace, si, compte tenu du contexte de l’affaire, ils s’avèrent menaçants[11]. Ainsi, afin de déterminer si des mots contreviennent à la disposition en cause, il faut s’en tenir au sens qu’une personne raisonnable donnerait aux mots prononcés dans les circonstances particulières dans lesquelles ils ont été proférés ou transmis[12].

[21]      Quant à l’élément intentionnel (mens rea) de l’infraction, il est établi s’il est démontré que les mots menaçants proférés ou transmis visaient à intimider ou à être pris au sérieux[13]. Encore là, le fait que l'accusé n'a pas eu l'intention de mettre à exécution la menace n'est pas un élément essentiel; seule compte l'intention que la menace soit prise au sérieux[14]. Cela étant, l’élément de faute revêt un caractère subjectif; ce qui importe, c’est ce que l’accusé entendait réellement faire[15].

[22]      Dans R. c. McRae, les juges Cromwell et Karakatsanis résument ainsi l’élément intentionnel requis[16] :

[23]      En somme, l’élément de faute de l’infraction est établi si l’accusé entendait que les mots proférés ou transmis intimident ou soient pris au sérieux.  Il n’est pas nécessaire de prouver l’intention que les mots soient transmis à la personne visée par la menace. Une norme subjective de faute s’applique. Toutefois, pour déterminer ce que l’accusé avait en tête, le tribunal devra souvent tirer des conclusions raisonnables des mots et des circonstances, y compris de la façon dont les mots ont été perçus par ceux qui les ont entendus.

[23]      Il s’agit d’une intention spécifique par opposition à une intention générale[17]. Les commentaires du professeur Rainville, cités avec approbation de la Cour[18], sont pertinents[19] :

Le degré de prise de conscience de l’accusé suppose quelques remarques supplémentaires. Sa perception du sens de ses paroles est déterminante. Il a droit à l’acquittement si l’idée ne lui effleure pas l’esprit que ses paroles puissent être prises au sérieux. Même l’insouciance possible du plaisantin quant aux conséquences de ses paroles ne saurait, selon nous, suffire à le faire condamner. L’insouciance suppose la réalisation par l’accusé du risque que ses paroles revêtent une signification intimidante. Cette prise de conscience est insuffisante. Le crime de menaces exige un dessein criminel. Cette infraction obéit au principe classique du droit pénal canadien selon lequel un crime d’intention spécifique ne saurait se satisfaire de l’insouciance du prévenu. Le crime de menaces exige l’intention spécifique d’intimider autrui. La Cour suprême préconise la définition suivante dans l’arrêt McCraw : « Une menace est un moyen d’intimidation visant à susciter un sentiment de crainte chez son destinataire ». Et la Cour de renchérir dans l’arrêt Clemente : « La menace est une manifestation par laquelle on marque à quelqu’un sa colère, avec l’intention de lui faire craindre le mal qu’on lui prépare ».

[Soulignement ajouté]

[24]      Lorsqu’un accusé offre des explications, son témoignage est important pour déterminer s’il possédait l’intention spécifique requise[20]. Dans l’arrêt Joad c. R., l’accusé faisait face à des accusations d’avoir transmis sur Facebook des menaces de mort ou de lésions corporelles à des journalistes syriens et d’avoir conseillé à autrui de commettre un meurtre. La Cour s’exprime comme suit quant à l’analyse de la mens rea pour de telles infractions[21] :

[23]      Le juge de première instance ne pouvait pas trancher la question de la mens rea pour l’une ou l’autre des deux accusations sans se pencher d’abord sur les explications de l’appelant. Ces explications dépassent de beaucoup la question du mobile qui l’animait. Elles touchent à l’interprétation même de son message et par voie de conséquence, à ses intentions en écrivant ce texte. Le juge de première instance se devait, dans les circonstances, d’en traiter. L’appelant n’a pas à deviner ce que le juge a pensé, et fait de ses explications; il doit pouvoir l’entendre ou le lire. Il s’agit d’une lacune importante dans le jugement dont appel, justifiant l’intervention de la Cour sans qu’il soit nécessaire d’analyser les autres moyens d’appel soulevés par l’appelant.

[25]      Dans l’arrêt LSJPA – 1026[22], la Cour est intervenue pour prononcer un acquittement à une infraction de menace de causer des lésions corporelles. Dans cette affaire, l’accusé avait menacé verbalement une éducatrice de l’agresser physiquement. L’acquittement fut prononcé au motif que la mens rea requise n’avait pas été établie, vu que les propos de l’accusé manifestaient une frustration et non pas une intention réelle d’intimider[23]. De même, dans Dulac c. R.[24], un étudiant en arts visuels avait remis à son professeur une description de projet dans laquelle il expliquait qu’il allait enlever des enfants d’une école primaire, les accrocher au plafond et les frapper avec une masse de fer. La Cour est intervenue afin de substituer un verdict d’acquittement au motif que la preuve, analysée à la lumière du témoignage de l’accusé, ne permettait pas de déceler une intention spécifique de susciter la crainte ou que le projet soit pris au sérieux[25].

Comment apprécier les « menaces » ou l' « intimidation » d’un enseignant du primaire dans l'objectif de garder le contrôle de la classe et d’y maintenir l’ordre

J.P. c. R., 2007 QCCA 1803


[38]           Soit dit avec égards, le juge a fait une erreur à ce chapitre. Le juge insiste sur l’objectif de l’accusée d’ « intimider » et sur la crainte provoquée par ses paroles « menaçantes ». Mais il ne s’arrête pas à la première question à laquelle il devait répondre, à mon avis, à savoir si la menace en était une de causer la mort ou des lésions corporelles.

[39]           Le juge a raison de conclure que les paroles de l’appelante ont eu pour effet « d’intimider » certains enfants – alors qu’elles en faisaient sourire d’autres – mais c’est le propre de toute menace de faire naître la crainte. Évoquer la perte d’un privilège ou l’imposition d’une sanction – la carotte et le bâton – sont des « menaces » légitimes.

[40]           « Intimider » a une connotation péjorative. Il est de la responsabilité d’une enseignante, d’un enseignant de garder le contrôle de la classe, d’y maintenir l’ordre. L’exercice de l’autorité a toujours un effet quelque peu intimidant. L’objectif poursuivi par l’appelante lors de ses interventions n’est pas en soi répréhensible même si certains élèves ont pu alors être « intimidés ».

[41]           Le juge a encore raison de tenir compte de la vulnérabilité des enfants. Certains craindront du seul fait que l’appelante haussera le ton. D’autres, si on menace d’aviser les parents – du moins c’était le cas à l’époque. Les aurait-elle menacés d’appeler la police, je crois encore là que plusieurs auraient eu peur.

[42]           Y a-t-il eu réellement des menaces de causer la mort ou des lésions corporelles ?

[43]           L'article 2 C.cr. définit ainsi l'expression « lésions corporelles » :

Blessure qui nuit à la santé ou au bien-être d’une personne et qui n’est pas de nature passagère ou sans importance.

[44]           L'interprétation des mots « blessures graves », contenus à l'ancien article 264.1 C.cr. et maintenant remplacés par « lésions corporelles », a fait l'objet de l’arrêt Mcraw[3], où la Cour suprême explique que l'expression « blessures graves » au sens de l'article 264(1)a) C.cr, signifie toute blessure ou lésion psychologique, qui nuit d'une manière importante à l'intégrité, à la santé ou au bien-être d'une victime. Le test pour déterminer si des termes sont des menaces au sens de cet article est objectif. On doit examiner le contexte dans lequel ils furent prononcés, la personne à qui ils s'adressaient et la signification que leur attribuerait une personne raisonnable.

[45]           Remarquons également que quelques années plus tard, notre Cour a conclu que l'existence de menace de mort ne tient pas à la preuve de l'utilisation de certains mots particuliers puisqu'il faut tenir compte de l'ensemble de la conversation et de la situation[4].

[46]           Ainsi, elle a jugé qu'un paraplégique qui ne peut se déplacer sans son fauteuil roulant ne peut être reconnu coupable selon l'article 264.1 C.cr. lorsqu'il a dit qu'il allait battre la plaignante et lui donner une claque au visage[5]

[47]           « Menacer » des enfants de troisième année du primaire, de sept ou huit ans, d’un certain poids, de les suspendre au plafond par une ficelle qui tient à une punaise, ne constitue pas, soit dit encore une fois avec égards, une menace de causer des lésions corporelles.

[48]           Que la démarche soit peu pédagogique, que l’ « intimidation » soit réelle, qu’un enfant puisse en avoir fait un cauchemar, peut-être. Mais cette allusion aux mobiles de papier virevoltant dans l’air au bout des ficelles n’était que métaphorique, qu’allégorique.

[49]           Encore une fois, le juge lui-même prend soin de noter :

[2] […] À plusieurs reprises, elle disait, pour calmer l’atmosphère dans la classe, « je vais vous accrocher au plafond » rapportent-ils. Certains ne prenaient pas la remarque au sérieux, mais d’autres ne l’appréciaient pas, en éprouvaient une certaine crainte, même si en même temps ils pouvaient, après mûre réflexion, en conclure qu’il eût été très difficile de « pendre  » au plafond sur une corde retenue par des punaises l’un ou l’autre des enfants.

[50]           Le juge fait état de l’élève D qui « pleurait souvent » et qui était visée, semble-t-il, par les paroles de l’enseignante : « Celui-là qui pleure trop va se faire accrocher ». Dans son exposé, l’appelante souligne avec raison que l’enfant n’a pas témoigné. Comment savoir ce qu’elle a ressenti, si elle y a cru ou si ça n’a rien changé à ce qui la faisait déjà pleurer.

[51]           L’appelante doit être acquittée de ces deux chefs.

Le dédommagement à la victime doit toujours être envisagé lors de la détermination de la peine

Le droit applicable à la preuve de la conduite postérieure à l’infraction

R. c. Cardinal, 2018 QCCS 2441 Lien vers la décision [ 33 ]             L’essentiel du droit applicable à la preuve de la conduite postérieu...