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mardi 14 juillet 2009

L'exhibition d’une partie du corps (souvent des parties génitales) n'est pas un aspect constituant un élément essentiel de l’infraction d'indécence

R. c. Vallée, 2004 CanLII 58258 (QC C.M.)

[13] Il n’est pas contesté que les gestes posés ont eu lieu dans un endroit public, en présence d’autres personnes. Il reste à décider si ces gestes constituent une action indécente.

[14] Le Code criminel ne définit pas la notion «d’indécence». Il faut donc se référer aux décisions jurisprudentielles.

[15] La Cour d’appel du Québec souligne que pour décider si un acte est indécent le juge doit considérer les éléments suivants:

1. la norme de tolérance de la société (et non d’un particulier)

2. la nature des actes incriminés

3. le contexte ou les circonstances dans lesquelles les actes ont été commis.

[16] Afin de déterminer la norme de tolérance de la société, la Cour suprême dans R.c. Tremblay a adopté le critère émis par R.c.Butler soit celui du degré de préjudice qui peut résulter de l’acte reproché. Plus forte sera la conclusion de l’existence d’un risque de préjudice, moins grandes seront les chances de tolérance :

«The court must determine … what the community would tolerate others being exposed to on the basis of the degree of harm that may flow … harm in this context means that it predisposes persons to act in an antisocial manner… »

[17] Un comportement antisocial est celui que la société reconnaît comme incompatible avec son bon fonctionnement.

[18] Naturellement pour bien évaluer la norme de tolérance, il faut tenir compte du contexte dans lequel l’acte est posé incluant le lieu et les personnes visées. L’indécence ne provient pas du comportement lui-même mais plutôt du contexte dans lequel il se produit.

[19] De plus, il n’est pas nécessaire que l’acte visé ait une connotation sexuelle.

[20] Il est à noter par contre, que le voyeurisme, généralement, ne peut constituer une action indécente.

[21] Dans l’arrêt R.v. Jacob, la Cour d’appel de l’Ontario a souligné que la poursuite doit faire la preuve que l’acte indécent a été commis avec l’intention d’insulter ou offenser, en plus de constituer un acte indécent.

[22] La défense a raison de souligner que dans la quasi-totalité des causes rapportées au sujet des actes indécents, nous retrouvons une exhibition d’une partie du corps et souvent des parties génitales.

[23] Par contre, ni le Code criminel, ni la jurisprudence ne prévoit que cet aspect constitue un élément essentiel de l’infraction.

[24] D’ailleurs, la Cour d’appel de l’Ontario nous met en garde de ne pas ajouter des éléments à l’infraction qui ne se retrouvent pas dans l’article 173 du Code criminel.

[25] Tenant compte de la nature du geste reproché et le contexte dans lequel ce geste a été commis, et en appliquant les critères de la jurisprudence, ce geste est incompatible avec le «bon fonctionnement» de la société. Il constitue donc clairement un acte indécent, et ce malgré l’absence d’une exhibition du corps ou des parties génitales.

lundi 13 juillet 2009

Faiblesses de la preuve d’identification fournie par des témoins oculaires

R. c. Nikolovski, 1996 CanLII 158 (C.S.C.)

Les tribunaux ont depuis longtemps reconnu les faiblesses de la preuve d’identification fournie par des témoins oculaires indépendants, honnêtes et bien intentionnés. La reconnaissance de cette faiblesse a permis de faire ressortir le besoin essentiel de contre‑interroger les témoins oculaires. Il y a tellement de facteurs qui entrent en jeu lorsque l’identification repose sur un humain.

En effet, il faut au moins déterminer si le témoin était physiquement dans une position lui permettant de voir l’accusé et, dans l’affirmative, si ce témoin avait une bonne vue, une bonne ouïe, ainsi que l’intelligence et la capacité requises pour communiquer ce qu’il a vu et entendu.

Le témoin avait‑il la capacité de comprendre et de relater ce qu’il avait perçu? Le témoin avait‑il une bonne mémoire? Quel effet ont eu la crainte ou l’énervement sur la capacité du témoin de percevoir clairement les événements et de les relater plus tard fidèlement? Le témoin avait‑il un préjugé en ce qui concerne les événements ou les parties en cause, ou du moins une perception partiale de ceux-ci? On peut se fonder sur cette courte énumération des faiblesses de l’identification par témoin oculaire pour examiner les forces relatives de la preuve par bande vidéo.

Une bande vidéo peut à elle seule, apporter la preuve nécessaire pour identifier l’accusé comme étant l’auteur du crime

R. c. Nikolovski, 1996 CanLII 158 (C.S.C.)

28 Une fois qu’il est prouvé qu’une bande vidéo n’a pas été retouchée ou modifiée et qu’elle décrit la scène d’un crime, elle devient alors une preuve admissible et pertinente. Non seulement la bande (ou la photo) constitue‑t‑elle une preuve matérielle au sens où ce terme a été utilisé dans des arrêts antérieurs, mais elle est également, dans une certaine mesure, une preuve testimoniale. Elle peut et elle devrait être utilisée par le juge des faits pour déterminer si un crime a été commis et si c’est l’accusé qui est devant la cour qui en est l’auteur. Elle peut constituer en effet un témoin silencieux, fiable, impassible, impartial et fidèle, qui se rappelle intégralement et instantanément des événements. Elle peut fournir une preuve solide et convaincante qui, par elle-même, démontrera clairement l’innocence ou la culpabilité de l’accusé.

29 Le poids qui doit être accordé à cette preuve peut être évalué en visionnant la bande vidéo. Le degré de clarté et la qualité de la bande, ainsi que, dans une moindre mesure, le temps durant lequel l’accusé apparaît sur la bande vidéo sont autant de facteurs qui serviront à déterminer le poids que le juge des faits peut à juste titre accorder à cette preuve. La durée de l’action sur la bande peut ne pas être un facteur important car, même s’il n’y a que quelques images montrant clairement l’auteur de l’infraction, cela peut être suffisant pour identifier l’accusé. Ce sera particulièrement vrai si le juge des faits a visionné la bande à plusieurs reprises et en a arrêté le défilement pour étudier les images pertinentes.

30 Bien que le juge des faits ait le droit de tirer une conclusion relativement à l’identification en se fondant uniquement sur la preuve par bande vidéo, il doit faire montre de prudence à cet égard. Par exemple, lorsqu’on demande à des jurés d’identifier un accusé de cette manière, il est essentiel de leur donner des directives claires quant à la façon dont ils doivent aborder cette tâche. Il faut leur dire d’examiner soigneusement la bande vidéo pour déterminer si elle est d’une clarté et d’une qualité suffisantes et si elle montre l’accusé pendant une période suffisante pour leur permettre de conclure que l’identification a été prouvée hors de tout doute raisonnable. S’il s’agit de la seule preuve produite relativement à l’identité de l’auteur du crime, il faudrait le rappeler aux jurés. De plus, il faudrait leur parler de nouveau de l’importance du fait que, pour déclarer l’accusé coupable sur la foi de la seule bande vidéo, ils doivent être convaincus hors de tout doute raisonnable qu’elle identifie l’accusé.

Exigences de communication de l'alibi

R. c. Cleghorn, 1995 CanLII 63 (C.S.C.)

La communication de l'alibi doit réunir deux conditions: elle doit être suffisante et être présentée en temps opportun. L'omission de communiquer correctement un alibi a pour conséquence que le juge des faits peut tirer une conclusion défavorable dans l'appréciation de la preuve d'alibi au procès. La communication insuffisante peut seulement affaiblir la preuve de l'alibi; elle ne peut exclure l'alibi.

Ainsi, l'omission de communiquer correctement un alibi a pour conséquence que le juge des faits risque de tirer une conclusion défavorable dans l'appréciation de la preuve d'alibi présentée au procès

La règle tient à la commodité et vise à fermer la porte aux alibis‑surprises fabriqués à la barre des témoins. Elle a été adaptée en fonction de normes de la Charte canadienne des droits et libertés, de sorte que la communication est suffisante si elle permet à la poursuite et à la police de vérifier la preuve de l'alibi avant le procès.

Le caractère suffisant et l'opportunité sont donc évalués au regard de la question de savoir si une vérification utile aurait pu être faite par suite de la communication. Il n'est pas exigé que la communication soit faite le plus tôt possible, ni qu'elle soit faite par l'accusé lui‑même. La communication par un tiers suffit.

3 En l'espèce, il s'agit de savoir si la défense d'alibi invoquée par l'accusé au procès a été correctement communiquée au ministère public. Comme l'a expliqué mon collègue, pour être correcte, la communication de l'alibi doit réunir deux conditions: elle doit être suffisante et être présentée en temps opportun. Ce principe a récemment été réitéré dans l'arrêt R. c. Letourneau 1994 CanLII 445 (BC C.A.), (1994), 87 C.C.C. (3d) 481 (C.A.C.‑B.), où le juge Cumming a écrit au nom de la cour à l'unanimité, à la p. 532:

[traduction] Il est établi en droit que la communication de la défense d'alibi doit respecter deux conditions:

a)elle doit être faite suffisamment tôt pour permettre aux autorités de la vérifier

b)elle doit être suffisamment précise pour permettre aux autorités de la vérifier de façon utile

Si l'omission de communiquer l'existence d'un alibi n'annule pas la défense, elle risque d'affaiblir la valeur que le juge des faits lui accordera . . .

4 Ainsi, l'omission de communiquer correctement un alibi a pour conséquence que le juge des faits risque de tirer une conclusion défavorable dans l'appréciation de la preuve d'alibi présentée au procès (Russell c. The King (1936), 67 C.C.C. 28 (C.S.C.), à la p. 32). Cependant la communication insuffisante peut seulement affaiblir la preuve de l'alibi; elle ne peut exclure l'alibi.

samedi 11 juillet 2009

Droit d'avoir recours à l'assistance d'un avocat et d'être informé de ce droit ‑‑ Services gratuits d'avocats de garde

R. c. Bartle, 1994 CanLII 64 (C.S.C.)

Il existe une obligation d'informer les personnes détenues de l'existence de services d'avocats de garde.

L'alinéa 10b) impose trois obligations aux représentants de l'État: informer la personne détenue de son droit d'avoir recours à l'assistance d'un avocat, lui donner la possibilité raisonnable d'exercer ce droit et s'abstenir de l'interroger jusqu'à ce qu'elle ait eu cette possibilité raisonnable.

La première obligation touche à l'information. Les deuxième et troisième sont des obligations de mise en application qui ne prennent naissance que si la personne détenue indique qu'elle veut exercer son droit à l'assistance d'un avocat. Le droit à l'assistance d'un avocat garanti par l'al. 10b) n'est pas absolu. À moins que la personne détenue ne fasse valoir son droit et qu'elle ne l'exerce avec diligence, l'obligation correspondante des policiers de lui donner la possibilité raisonnable de l'exercer et de s'abstenir de tenter de lui soutirer des éléments de preuve, soit ne prendra pas naissance, soit sera suspendue.

La personne détenue peut renoncer aux droits garantis par l'al. 10b), mais la norme est stricte, surtout lorsque la renonciation alléguée a été implicite. Le volet information du droit à l'assistance d'un avocat doit donc avoir une portée large et les policiers doivent donner les renseignements «promptement et d'une manière compréhensible». À moins d'être clairement et complètement informées de leurs droits dès le début, les personnes détenues ne sauraient faire des choix et prendre des décisions éclairées quant à savoir si elles communiqueront avec un avocat et, en outre, si elles exerceront d'autres droits, comme celui de garder le silence.

Qui plus est, étant donné la règle selon laquelle, en l'absence de circonstances particulières indiquant que la personne détenue ne comprend pas la mise en garde prévue à l'al. 10b), les policiers ne sont pas tenus de s'assurer qu'elle comprend pleinement ses droits, il importe que la mise en garde type soit aussi instructive et claire que possible.

La jurisprudence a ajouté deux éléments au volet information: les renseignements sur l'accès à l'aide juridique et à des avocats de garde.

L'imposition d'exigences supplémentaires aux policiers en matière d'information est justifiée par la nécessité de réaliser l'objectif sous‑jacent du droit à l'assistance d'un avocat que garantit la Charte. Le volet information de l'al. 10b), c.‑à‑d. l'information donnée dans tous les cas aux personnes détenues et dont dépendent les obligations corrélatives de l'État, revêt un caractère essentiel.

L'arrêt R. c. Brydges énonce le principe que les autorités policières sont tenues d'informer les personnes en détention de l'existence dans leur province ou territoire de services d'aide juridique et d'avocats de garde. La mise en garde type faite en vertu de l'al. 10b) devrait comprendre des renseignements de base sur la façon d'avoir accès aux conseils juridiques préliminaires gratuits qui sont à la disposition de ces personnes. L'omission de donner ces renseignements constitue une violation de l'al. 10b).

Si les policiers ne se sont pas conformés à leurs obligations découlant de l'al. 10b), on n'a pas à se demander si la personne détenue a exercé son droit de se voir faciliter le recours à l'assistance d'un avocat (toutefois ces questions peuvent être pertinentes lorsqu'il faut décider s'il y a lieu d'écarter, conformément au par. 24(2) de la Charte, les éléments de preuve obtenus par suite de la violation de la Charte). La violation de l'al. 10b) est complète, sauf dans les cas de renonciation ou d'urgence, quand les représentants de l'État n'informent pas la personne détenue comme il se doit de son droit à l'assistance d'un avocat et ce, jusqu'à ce que cette omission ait été corrigée.

Pour qu'une renonciation à un droit procédural soit valide, il faut qu'il soit bien clair que la personne renonce au moyen de procédure conçu pour sa protection et qu'elle le fait en pleine connaissance des droits que cette procédure vise à protéger. Ce critère s'applique également aux droits garantis par la Charte. Dans le cas du volet information de l'al. 10b), pour qu'une personne renonçant au droit le fasse en «pleine connaissance», elle doit être déjà pleinement informée des renseignements qu'elle est en droit de recevoir. Si une personne détenue indique qu'elle ne désire pas entendre lecture des renseignements figurant sur la «mise en garde» habituelle donnée en vertu de l'al. 10b), ce fait ne constituera pas en soi une renonciation valide au volet information de l'al. 10b).

Lorsque les circonstances révèlent qu'une personne détenue ne comprend pas la mise en garde habituelle, les autorités doivent prendre des mesures additionnelles pour s'assurer qu'elle comprend ses droits en vertu de l'al. 10b) et les moyens qui lui permettront de les exercer. Par contre, il peut à l'occasion y avoir des cas où l'obligation des autorités de prendre des moyens raisonnables d'informer la personne détenue des droits que lui garantit l'al. 10b) sera respectée même s'il y a omission de certains éléments de la mise en garde habituelle. Cela sera possible seulement si la personne détenue renonce explicitement à son droit de recevoir la mise en garde habituelle et si les circonstances révèlent des motifs raisonnables de croire qu'elle connaît ses droits, les a invoqués et est au courant des moyens de les exercer.

Le fait qu'une personne détenue indique simplement qu'elle connaît ses droits n'établira pas en soi l'existence de motifs raisonnables de croire qu'elle en comprend pleinement l'ampleur ou qu'elle est au courant des moyens de les mettre en oeuvre. Il doit exister des motifs raisonnables de croire qu'une personne détenue qui renonce au volet information de l'al. 10b) est véritablement au courant de la totalité ou d'une partie des renseignements contenus dans la mise en garde habituelle. Dans ce cas, il peut ne pas y avoir violation de l'al. 10b) si l'on omet les renseignements en question dans la lecture de la mise en garde habituelle.

La norme relative à la renonciation au droit d'être informé est stricte. Compte tenu de l'importance du volet information dans l'atteinte des objectifs de l'al. 10b), on ne devrait reconnaître la validité d'une renonciation que dans les cas où il est évident que la personne détenue comprend pleinement les droits que lui garantit l'al. 10b) ainsi que les moyens qui lui sont offerts pour les exercer, et qu'elle invoque ces droits. En exigeant le respect de ces conditions, on s'assure qu'une renonciation au droit à l'assistance d'un avocat, qui suit une renonciation au droit d'être informé, est une décision prise en pleine connaissance de cause. Puisque les obligations d'informer que l'al. 10b) impose aux autorités de l'État ne sont pas écrasantes, il n'est pas déraisonnable d'insister pour que ces autorités dissipent toute incertitude quant à la connaissance que la personne détenue a de ses droits.

Droit de l’accusé de contre-interroger les témoins à charge

R. c. Lyttle, 2004 CSC 5 (CanLII)

Le droit d’un accusé de contre‑interroger les témoins à charge, sans se voir imposer d’entraves importantes et injustifiées, est un élément essentiel du droit à une défense pleine et entière. Le droit de contre‑interroger, qui est garanti par l’art. 7 et l’al. 11d) de la Charte canadienne des droits et libertés, doit être protégé jalousement et être interprété généreusement.

Il est possible de contre‑interroger un témoin sur des points qui n’ont pas besoin d’être prouvés indépendamment, pourvu que l’avocat soit de bonne foi lorsqu’il pose ses questions. Il n’est pas inhabituel qu’un avocat prête foi à un fait qui est effectivement vrai, sans qu’il soit capable d’en faire la preuve autrement que par un contre-interrogatoire. La « bonne foi » est fonction des renseignements dont dispose le contre-interrogateur, de l’opinion de celui-ci sur leur probable exactitude et du but de leur utilisation.

Ces renseignements peuvent ne pas être des éléments de preuve admissibles et ils peuvent avoir un caractère incomplet ou incertain, pourvu toutefois que le contre-interrogateur ne soumette pas au témoin des hypothèses qui soient inconsidérées ou qu’il sait être fausses. Le contre-interrogateur peut soulever toute hypothèse qu’il avance honnêtement sur la foi d’inférences raisonnables, de son expérience ou de son intuition et rien ne l’oblige à présenter un fondement de preuve à l’égard de chaque fait soumis à un témoin. Lorsqu’une question implique l’existence d’une assise factuelle contestée et manifestement fragile ou suspecte, le juge du procès peut demander à l’avocat l’assurance qu’il pose la question de bonne foi.

Si les assurances données à cet égard satisfont le juge et que la formulation de la question n’est pas prohibée pour une autre raison, l’avocat devrait être autorisé à poser la question au témoin.

Bien que le contre‑interrogatoire puisse souvent s’avérer futile et parfois se révéler fatal, il demeure néanmoins un ami fidèle dans la poursuite de la justice ainsi qu’un allié indispensable dans la recherche de la vérité. Dans certains cas, il n’existe en effet aucun autre moyen de mettre au jour des faussetés, de rectifier une erreur, de corriger une distorsion ou de découvrir un renseignement essentiel qui, autrement, resterait dissimulé à jamais.

Le droit de l’innocent de ne pas être déclaré coupable est lié à son droit de présenter une défense pleine et entière. Il doit donc pouvoir présenter les éléments de preuve qui lui permettront d’établir sa défense ou de contester la preuve présentée par la poursuite. [. . .] Bref, la dénégation du droit de présenter ou de contester une preuve équivaut à la dénégation du droit d’invoquer un moyen de défense autorisé par la loi.

Le contre‑interrogatoire a une importance incontestable. Il remplit un rôle essentiel dans le processus qui permet de déterminer si un témoin est digne de foi. Même lorsqu’il vise le témoin le plus honnête qui soit, il peut permettre de jauger la fragilité des témoignages. Il peut servir, par exemple, à montrer le handicap visuel ou auditif d’un témoin. Il peut permettre d’établir que les conditions météorologiques pertinentes ont pu limiter la capacité d’observation d’un témoin, ou que des médicaments pris par le témoin ont pu avoir un effet sur sa vision ou son ouïe. Son importance ne peut être mise en doute. C’est le moyen par excellence d’établir la vérité et de tester la véracité. Il faut autoriser le contre‑interrogatoire pour que l’accusé puisse présenter une défense pleine et entière. La possibilité de contre‑interroger les témoins constitue un élément fondamental du procès équitable auquel l’accusé a droit. Il s’agit d’un principe ancien et bien établi qui est lié de près à la présomption d’innocence.

Le droit de contre‑interroger doit donc être protégé jalousement et être interprété généreusement. Il ne doit cependant pas être exercé de manière abusive. Les avocats sont liés par les règles de la pertinence et il leur est interdit de harceler le témoin, de faire des déclarations inexactes, de se répéter inutilement ou, de façon plus générale, de poser des questions dont l’effet préjudiciable excède la valeur probante.

Tout comme le droit de contre‑interroger n’est pas lui-même absolu, les limites dont il est assorti ne le sont pas elles non plus. Le juge du procès jouit, à cet égard comme dans d’autres aspects de la conduite d’un procès, d’un large pouvoir discrétionnaire lui permettant d’assurer l’équité de celui-ci et de voir à ce que justice soit rendue — et perçue comme l’ayant été. Il peut arriver que, dans l’exercice de ce pouvoir discrétionnaire, le juge estime approprié d’assouplir quelque peu les règles de la pertinence ou de tolérer un degré de répétition qui serait par ailleurs inacceptable dans d’autres circonstances.

Un avocat dispose de la latitude voulue pour poser, en contre‑interrogatoire, des questions reposant sur des éléments d’information qu’il n’est pas en mesure de prouver directement. Le prix à payer est que, s’il obtient une dénégation ou une réponse qui ne lui convient pas, cette réponse joue contre lui pour ce qu’elle vaut.

mercredi 8 juillet 2009

Conséquence déontologique du refus d'un policier de prendre une plainte

Article 7 du Code de déontologie des policiers du Québec

Le policier doit respecter l'autorité de la loi et des tribunaux et collaborer à l'administration de la justice.
Notamment, le policier ne doit pas :

1. empêcher ou contribuer à empêcher la justice de suivre son cours;
2. cacher ou ne pas transmettre une preuve ou un renseignement dans le but de favoriser ou de nuire à une personne.

Tiré de Commissaire c. Gagnon, C.D.P., C-2000-2857-1, 14 novembre 2000
Le refus de la part d'un policier de prendre une plainte s'inscrit bien dans le cadre de l'article 7 du Code de déontologie des policiers du Québec en ce que cela touche directement l'administration de la justice. En effet, qu'il soit de nature pénale ou déontologique, le processus débute généralement par le dépôt d'une plainte.

Tiré de Commissaire c. Dumouchel, C.D.P., C-98-2437-1, 24 février et 9 mars 1999

La discrétion du policier ne va pas jusqu'à lui permettre de refuser de prendre une plainte. (...) Il ne s’agit pas ici d’un enquêteur qui, aux termes d’une enquête tenue en bonne et due forme, arrive à la conclusion que la plainte est dénuée de tout fondement. C'est le devoir du policier de prendre la plainte et de la référer au service des enquêtes. En refusant de prendre une plainte, le policier ne se comporte pas de manière à préserver confiance et considération et omet d'accomplir son devoir d'officier de justice, contrairement aux normes de conduite prescrites à l'article 7 du Code de déontologie

Le dédommagement à la victime doit toujours être envisagé lors de la détermination de la peine

Les déclarations d'un accusé à son complice ne sont pas du ouï-dire

R v Ballantyne, 2015 SKCA 107 Lien vers la décision [ 58 ]             At trial, Crown counsel attempted to tender evidence of a statement m...