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mercredi 30 décembre 2009

La règle en matière d'actes similaires en est une d'exclusion et elle est essentiellement une preuve de propension

R. c. Cormier, 2009 QCCQ 449 (CanLII)

[29] Dans R. c. Handy, la Cour suprême réitère que la règle en matière d'actes similaires en est une d'exclusion.

« Il est évident que l’intimé a raison de plaider l’inadmissibilité de la preuve d’inconduite qui va au-delà de ce qui est allégué dans l’acte d’accusation et qui ne fait que ternir sa réputation. Personne n’est accusé d’avoir une prédisposition ou propension « générale » au vol, à la violence ou à quoi que ce soit d’autre. En général, l’exclusion vise à interdire l’utilisation de la preuve de moralité en tant que preuve circonstancielle d’une conduite, c’est-à-dire pour inférer des « faits similaires » que l’accusé avait une propension ou une prédisposition à accomplir le type d’actes reprochés et qu’il est donc coupable de l’infraction. »

[30] Évidemment, la poursuite cherche par cette preuve à tirer une inférence. Une telle inférence doit cependant rencontrer des exigences précises.

« Les inférences que l’on cherche à faire doivent être conformes au bon sens, aux notions intuitives de probabilité et à l’improbabilité d’une coïncidence. »

[31] La preuve d'actes similaires est essentiellement une preuve de propension dont la valeur probante doit l’emporter sur tout préjudice susceptible d’être causé pour être admissible.

[32] Le préjudice considéré est le préjudice moral et le préjudice de raisonnement.

[33] Évidemment, le préjudice potentiel est moindre dans le cas d'un procès devant juge seul.

[34] La question de savoir si la valeur probante d’une preuve l’emporte ou non sur son effet préjudiciable ne peut être tranchée qu’en fonction de la fin, i.e de la question soulevée et donc de la question en litige.

« Les questions soulevées découlent des faits allégués dans l’accusation ainsi que des moyens de défense invoqués ou raisonnablement escomptés. Il incombe donc au ministère public de cerner la question en litige dans le procès, à laquelle on prétend que la preuve de prédisposition se rapporte. Si la question n’est plus litigieuse, comme, par exemple, lorsque l’accusé a admis le fait, la preuve n’est plus pertinente et doit être exclue. »

[35] La question de la valeur probante en rapport avec l'effet préjudiciable en est une de degré.

« La valeur probante l’emporte sur le préjudice du fait que la force des circonstances similaires écarte toute coïncidence ou autre explication tendant à innocenter l’accusé.

La jurisprudence canadienne reconnaît que plus les « faits similaires » se rapprochent spécifiquement des circonstances de l’accusation (c’est-à-dire lorsqu’ils se rapportent davantage à la situation), plus la valeur probante de la propension, ainsi circonscrite, augmente. On considère que plus s’estompent les différences et les variables qui distinguent les « faits similaires » antérieurs de l’objet de l’accusation dans ce type de dossier, plus s’intensifie la force probante des inférences souhaitées. En fin de compte, la prémisse qui sous-tend la règle générale d’exclusion (le préjudice l’emporte sur la valeur probante) ne s’applique plus. »

[36] Lorsqu'une preuve d'actes similaires est présentée pour étayer la crédibilité d'une plaignante, la Cour suprême émet quelques réserves.

« Selon le ministère public, la question en litige concerne de façon générale la « crédibilité de la plaignante » et plus particulièrement [traduction] « le fait que l’accusé est fortement prédisposé à accomplir l’acte même qui est allégué dans les accusations portées contre lui ». Toutefois, il y a des précisions à apporter. Il faut prendre garde de trop ouvrir la porte à l’admission de la preuve de propension ou, comme on le dit parfois, de permettre qu’elle ait une trop grande incidence sur la preuve que le ministère public doit présenter (Sopinka, Lederman et Bryant, op. cit., § 11.26). La crédibilité est une question omniprésente dans la plupart des procès, qui, dans sa portée la plus étendue, peut équivaloir à une décision sur la culpabilité ou l’innocence.

Tout ce qui ternit la moralité de l’accusé peut accessoirement accroître la crédibilité du plaignant. Décider que la « question soulevée » porte sur la crédibilité risque, à moins qu’on en limite la portée, de donner lieu à l’admission de rien de plus qu’une preuve de prédisposition générale (« mauvaise personnalité »). »

Délit de fuite – Intention spécifique – Doute raisonnable

R. c. Lavoie, 2009 QCCQ 647 (CanLII)

[10] Il est entendu que cette présomption n'impose pas à l'accusé un fardeau de persuasion, mais plutôt un fardeau de présentation, et qu'elle peut être repoussée en soulevant un doute raisonnable (R. c. Poulin-Chénard, [2007] J.Q. no 1738, (C.A.Q).

[12] Il existe dans la jurisprudence des jugements qui ont eu à examiner ce que certains qualifient, à tort ou à raison, de "défense de peur ou de panique".

[13] Par exemple, dans R. v. Brautigam, [1988] B.C.J. no. 417 (C.A.C.B.), l'accusé s'était contenté de déclarer qu'il avait quitté les lieux de l'accident car il avait eu peur (scared), sans plus, sans expliquer pourquoi il avait eu peur:

(…) Unusual circumstances might conceivably occur where fright may be caused for reasons other than escaping criminal or civil liability. But fright or panic are not by themselves sufficient to displace the presumption established by Parliament to force drivers who injure persons in motor vehicle accidents to render assistance to their victims. Being scared describes a man's reaction to the events but does not disclose why he flees. In this case there was no other evidence for the judge to consider, as there was in Emery. Absent reasonable and explicit other specific reasons for leaving the scene of the accident the judge was right in concluding the presumption to escape liability was not displaced. The expression "I was scared" is not by itself evidence of a lack of intent to escape criminal or civil liability.

[14] Dans R. v. Emery [1981] B.C.J. No. 889 (C.A.C.B.), auquel il est fait allusion dans l'extrait précédent de Brautigam, l'accusé avait quitté les lieux de l'accident non pas dans l'intention d'échapper à sa responsabilité civile ou criminelle, mais, parce que, disait-il, il avait paniqué, car "he was afraid of […] the view of a dead man at the scene".

[15] Malgré cette explication, et malgré que le juge de première instance ait dit croire l'explication de l'accusé, celui-ci a tout de même été trouvé coupable. Cette condamnation a été maintenue en appel devant la County Court.

[16] En appel devant la Cour d'appel de Colombie-Britannique, l'appel de l'accusé a été rejeté, mais non sans une forte dissidence du juge Anderson. La majorité a dû interpréter la décision du premier juge pour maintenir la condamnation. Quant au juge Anderson, il aurait accueilli l'appel de l'accusé et cassé la condamnation au motif que:

[34] The learned trial judge, in my opinion, fell into error in holding that panic or fear could not constitute a lawful excuse for leaving the scene of an accident. In so doing, the learned trial judge applied the wrong test. The issue to be determined was not whether the accused left the scene because he panicked, but whether when he left the scene he did so with the intention of escaping civil or criminal liability. The accused testified that it was not his intention to escape liability, either criminal or civil, and that he left the scene because, "I was just afraid that I was pretty positive the fellow was dead and I just didn't want to go there. I don't think I could have handled it if he was, to see his dead body lying."

[35] As the learned trial judge accepted this evidence, he was bound in law to reach the conclusion that the presumption contained in Section 233 subsection (3) had been rebutted and that the accused must be acquitted.

[17] Par ailleurs, la jurisprudence contient de multiples exemples où l'explication de l'accusé à l'effet qu'il avait quitté les lieux de l'accident parce qu'il avait eu peur ou parce qu'il avait paniqué a été retenue.

[18] Par exemple, dans une affaire de R. v. Vitzthum, [1988] B.C.J. no. 3112, (C.C.C.B.), le juge retient que:

8. The learned trial Judge found that with regard to the appellant's failure to stop his vehicle, there was evidence to the contrary. In this regard, he refers to the appellant's "panic" and "the general excitement of the situation" and concludes that stopping his vehicle might only have aggravated the already violent situation between himself and the complainant and the complainant's friend

[19] Dans cette affaire, l'accusé était confronté à une prostituée qui venait d'accepter son argent sans lui rendre les services escomptés, et de laquelle il avait bien l'intention de récupérer la somme d'argent avancée.

[20] Dans ses efforts pour récupérer ladite somme d'argent, l'accusé s'est retrouvé face à cette dame, qui est soudainement sortie de l'auto de son souteneur, cette fois armée d'un couteau avec une lame de 6 pouces, et face au souteneur lui-même, armé quant à lui d'un "2 x 4", dont il s'est d'ailleurs servi pour frapper violemment une des portes du véhicule de l'accusé.

[21] Pris de panique, l'accusé a omis de s'arrêter après qu'il eût accidentellement frappé le souteneur en voulant prendre la fuite. Accusé de délit de fuite, le juge d'appel a jugé que l'accusé avait de bonnes raisons d'avoir peur, et que sa responsabilité civile et criminelle était le moindre de ses soucis dans les circonstances. L'accusé a donc été acquitté.

[22] Pour un autre exemple, voir aussi R. v. Kleberc, [2007] Y.J. No.58 (YK. T.C.).

[23] Dans Poulin-Chénard, précité, la Cour d'appel écrit dans son jugement que la preuve présentée laissait, dans les circonstances, amplement place pour un doute raisonnable quant à l'intention spécifique de l'accusé:

6. Tel que mentionné précédemment, l'état de panique dont il est question ne se limite pas à une simple affirmation de l'intimée quant à un tel état. Au contraire, la défense était fondée à la fois sur la déclaration de l'intimée, qui n'a pas limité son explication à un état de panique, et sur une preuve scientifique, déclaration et preuve que le juge a retenues dans leur entièreté et qui ont soulevé, dans son esprit, un doute raisonnable quant à l'existence de l'intention spécifique. Ceci distingue le présent dossier des arrêts R. v. Emery, 61 C.C.C. (2d) 84 (B.C. C.A.) et R. v. Brautigam, 6 M.V.R. (2d) 135 (B.C. C.A.), cités par l'appelante.

[24] Dans l'affaire R. c. Breault, [1995] J.Q. no. 3137 (C.Q.), citée par la défense, l'accusé a soulevé dans l'esprit de la juge d'instance un doute raisonnable quant à son intention de quitter les lieux dans le but d'éviter "une poursuite criminelle ou civile", et l'accusé a été acquitté.

[25] Pour ce faire, l'accusé a témoigné sur son état d'esprit après l'accident, et a fait entendre des témoins qui ont "corroboré" ou ajouté à la version de l'accusé.

[26] Dans Breault, aucune preuve de nature médicale relative à l'état d'esprit de l'accusé n'a été présentée. Manifestement, une preuve de nature médicale de l'état mental de l'accusé est pertinente dans l'évaluation de l'intention qui animait l'accusé lorsqu'il a quitté les lieux de l'accident. Mais elle n'est pas essentielle.

[27] Dans une affaire de F.F.T, [2003], AZ-50176834 (C.Q.), le juge de première instance, face aux explications de l'accusée, conclut que l'état de l'accusée

[…] est celui d'une personne normale qui a vu un homme en train de mourir des suites d'un accident où elle a été impliquée et où elle n'avait rien à se reprocher. Elle ne circulait pas trop vite ni négligemment avant l'accident. Elle n'était pas intoxiquée au moment de l'écrasement de monsieur A.

[28] L'accusée a été trouvée coupable.

[29] Finalement, dans une affaire de Fournier, rapportée à [1979] J.Q. no 215 (C.A.Q.), les faits étaient les suivants:

[20] [L'accusé] réside à St-Antoine de Pontbriand, mais passe la soirée dans un hôtel de St-Jacques de Leeds, où, en compagnie d'un ami, il consomme, dit-il, de 7:30 p.m. environ jusque vers 3:00 a.m., cinq ou six petites bouteilles de bière. Au volant de sa voiture il quitte l'hôtel dans l'intention d'aller coucher chez son beau-frère, à St-Jacques. Arrivant à destination il freine, dévie à gauche dans l'intention de faire un virage à droite, dérape et heurte les voitures stationnées de Chabot et de Poulin. Il conduit sa voiture dans l'entrée de la cour de son beau-frère, en descend, examine les dégâts.

[21] Enervé, dit-il, il remonte dans son automobile, réfléchit et se dit qu'il n'éveillera pas son beau-frère à cette heure de la nuit, que le matin venu il avisera Chabot de l'accident; il ignore alors avoir heurté aussi la voiture de Poulin.

[22] Fournier se rend coucher chez lui, et vers 11:00 a.m. se rend chez son beau-frère, constate qu'íl a endommagé deux voitures, et s'identifie aux deux victimes.

[30] La Cour d'appel accueille l'appel de l'accusé, et l'acquitte, et ce dans les termes suivants:

A l'étude de l'ensemble de la preuve, vu la crédibilité que le premier juge ne refusa pas à Fournier [le juge de première instance avait cru l'accusé], considérant que l'appelant connaissait les victimes de l'accident dont il fut l'auteur et se rendit les visiter, les explications vraisemblables et raisonnablement croyables fournies par l'accusé de son départ des lieux sans s'identifier, l'heure tardive de la nuit et les autres circonstances que révèle le dossier, je ne puis dissiper un doute que j'estime raisonnable que l'accusé n'ait pas eu l'intention, en quittant les lieux, de se soustraire à sa responsabilité civile ou criminelle.

mardi 29 décembre 2009

Est-ce que les éléments constitutifs de voie de fait sont alors rencontrés?

R. c. Guimont, 2009 QCCQ 9881 (CanLII)

[34] La définition de voie de fait est étudiée de façon exhaustive par l'honorable juge Vauclair dans l'affaire Freedman. Il convient de conclure qu'il subsiste un certain débat sur la nature du geste qui constitue une voie de fait au sens du Code criminel.

[35] J'appliquerai en l'espèce une interprétation souple et large telle que retenue par plusieurs instances. Particulièrement par la Cour d'appel du Québec dans R. c. Bernier. La Cour d'appel avait alors à décider si le caractère hostile est nécessaire pour qu'un attouchement (dans ce cas à caractère sexuel) prenne un sens ou une portée criminel.

[36] La Cour d'appel l'exprimait ainsi :

21 Le sous-paragraphe 265 (1)a) stipule que l'emploi intentionnel de la force, directement ou indirectement, est nécessaire pour commettre une agression. Toutefois, le terme force souffre d'imprécision. Quel degré de force est requis pour constituer une agression? S'agit-il d'une force physique extrême ou négligeable?

22 À cet égard, la Common law a adopté une approche souple pour définir la force. Les auteurs Smith et Hogan adoptent la notion de "intentional touching... without consent and lawful excuse":

An assault is an act by which D, intentionally or recklessly, causes P to apprehend immediate and unlawful personal violence (...). But "violence" here includes any unlawful touching of another, however slight, for, as Blackstone wrote:

" the law cannot draw the line between different degrees of violence, and therefore prohibits the first and lowest stage of it; every man's person being sacred, and no other having a right to meddle with it, in any the slightest manner. "

As Lane LCJ put it:

" An assault is any intentional touching of another person without the consent of that person and without lawful excuse. It need not necessarily be hostile, or rude, or aggressive, as some of the cases seem to indicate. »

23 Selon cette définition, tout toucher intentionnel sans excuse légitime est donc une agression.

[37] La Cour suprême, en 1998, soit un an après l'arrêt Bernier précédemment mentionné, examinait la définition d'une voie de fait grave. La juge L'Heureux-Dubé enseignait :

11 Comme il ressort d'un examen des éléments sous-jacents des voies de fait, qui sont à la base de toutes les dispositions relatives aux voies de fait, l'interdiction au Code criminel de l'emploi intentionnel et non consensuel de la force est interprétée de façon très large. Tout attouchement non souhaité, quelque minime que soit la force employée, est criminel. Les actes physiques interdits par le régime des voies de fait comprennent non seulement le coup de poing au visage ou les rapports sexuels obtenus à la pointe d'un couteau, mais encore l'imposition de la main sur la cuisse de la personne qui occupe la place voisine dans un autobus : voir R. c. Burden (1981), 25 C.R. (3d) 283 (C.A.C.-B). L'objectif du régime des voies de fait est nettement beaucoup plus large que la simple protection des personnes contre les blessures graves. Le régime des voies de fait vise, de façon plus générale, à protéger l'intégrité physique des gens.

[38] Dans Canadian Foundation en 2004, l'approche de la juge Arbour est plus restrictive sur la qualification d'une voie de fait que celle adoptée par le juge Binnie. Ainsi, l'honorable juge Arbour (dissidente) écrivait :

201 L’emploi d’une certaine force contre autrui n’indique pas toujours l’existence de voies de fait au sens du droit criminel. [Traduction] « Bien au contraire, nombreux sont les exemples de contacts accessoires qui ne sauraient être considérés comme des actes criminels »

[39] Voici ce qu'exprimait le juge Binnie :

116 À première vue, l’article 265 est très général et il a été interprété de manière libérale, parce que, ainsi que le souligne Blackstone, op. cit., p. 195, on a toujours estimé qu’il était irréalisable d’établir une distinction rationnelle entre les « degrés de violence ». Le professeur Ashworth ajoute : [traduction] Est-il normal d’élargir la portée du droit criminel au simple contact, si anodin soit-il? La justification traditionnelle veut qu’il n’existe aucune autre ligne de démarcation logique et qu’à tout le moins, ce fait révèle l’intérêt que le droit porte à l’intégrité physique des citoyens. (A. Ashworth, Principles of Criminal Law (4e éd. 2003), p. 319)

[40] Dans notre cas, contrairement à Freedman, le procureur de Madame Guimont ne reconnaît pas que le geste posé par cette dernière constitue une voie de fait. En retenant la version de l'accusée, le Tribunal conclut que de mettre de la pression sur l'épaule d'un étudiant est « techniquement » une voie de fait au sens du Code criminel. La force est utilisée par le toucher et par la pression exercée. Sans être assuré de la nécessité de prouver le contexte d'hostilité, le Tribunal considère que le geste commis avait un certain caractère d'irrespect et de légère rudesse. Ce geste rend la personne qui le subit suffisamment inconfortable pour sentir une atteinte à son intégrité physique. Ce geste remplit l'actus reus prévu par le législateur et est conforme à ce que le législateur a voulu proscrire en codifiant l'article 265 C.cr.

La définition de voie de fait est étudiée de façon exhaustive par l'honorable juge Vauclair dans l'affaire Freedman

R. c. Freedman, 2006 QCCQ 1855 (CanLII)

[19] In the course of his analysis, Gonthier J. expressed concerns about the scope of the assault offence:

Assault has been given a very encompassing definition in s. 265. It arises whenever a person intentionally applies force to a person "directly or indirectly", without the other's consent. The definition says nothing about the degree of harm which must be sustained. Nor does it refer to the motives for the touching. If taken at face value, this formulation would mean that the most trivial intended touching would constitute assault. As just one of many possible examples, a father would assault his daughter if he attempted to place a scarf around her neck to protect her from the cold but she did not consent to that touching, thinking the scarf ugly or undesirable. (Even an argument for implied consent would not seem to apply in a case like this.) That absurd consequence could not have been intended by Parliament. Rather its intention must have been for the courts to explain the content of the offence, incrementally and over the course of time. [4]

[20] Judge and Law Professor Irénée Lagarde is of opinion that the Canadian assault offence was built on the two common law crimes of assault and battery:

Distinction du “common law” entre “l’assault” et la “battery” : la définition des voies de fait ne la reconnaît pas :

Si la définition des « voies de fait ou attaque » énoncée au présent article, provient du “common law”, au contraire de celle-ci, elle évite la distinction entre “assault” et la “battery”. Hawkins’ Pleas of the Crown [1837, Vol. I., p. 110] énonce ce qui suit:

“Une attaque (“assault”) est, semble-t-il, une tentative ou une proposition, accompagnée de violence, de faire mal à un autre. Par exemple, vouloir donner, avec ou sans arme, un coup à quelqu’un; diriger, d’une distance d’où la cible peut être atteinte, une arme à feu contre quelqu’un; pointer une fourche contre quelqu’un qui se trouve à la portée d’un coup; montrer le poing à quelqu’un ou tout autre acte semblable posé d’une façon courroucée et menaçante sont autant de cas de “assault”. Et toute blessure ou inconvénient physique, si léger soit-il, causé à un autre par une personne qui agit par colère, par vengeance ou d’une façon violente ou insolente, en – par exemple – crachant à la figure, en le touchant de quelque façon d’une façon irritée, en le bousculant violemment, constitue une “battery”. Une “battery” comprend nécessairement un “assault”. Il semble universellement admis de nos jours que des mots seuls ne peuvent constituer un “assault” »

[21] In R. v. Burden, McFarlane J.A. relied also on the Common law to define the common assault:

I agree with the argument presented here on behalf of the Crown that s. 244 of the Criminal Code is patently based upon the common law of England which can be referred to to assist in interpreting it. In particular, I refer to Taschereau's Criminal Code of the Dominion of Canada (1893), and the extract there quoted from Hawkins, Pleas of the Crown, vol. 1 (1716-1721), at p. 110. I will not read it all, but s. 2, part of it dealing with battery, seems to me particularly apposite to the question before us. The extract is this:

"Section 2: As to the second point. What shall be said to be a battery. It seems that any injury whatsoever, be it ever so small, being actually done to the person of a man, in an angry or revengeful or rude or insolent manner, as by spitting in his face, or any way touching him in anger or by violently jolting him out of the way are batteries in the eyes of the law."

And later from the same source in Taschereau's Criminal Code, dealing with the subject of battery, the conclusion is stated in these words:

"Battery seemeth to be when any injury whatsoever, be it ever so small, is actually done to a person of a man in an angry or avengeful or rude or insolent manner ... For the law can not draw the line between different degrees of violence, and therefore, totally prohibits the first and lowest stages of it, every man's person being sacred, and no other having a right to meddle with it in any, the slightest manner:"

[22] Burden was acquitted on a charge of indecent assault on the following facts: "the complainant, Miss Bakonyi, was sitting on a practically empty bus when the accused boarded it, looked around briefly, and noticed she was sitting alone on a seat, and came and sat down beside her. Nearly every other seat on the bus was empty at the time, there being, I think, only two other passengers on it. He sat beside her, stared at her for a short while, then put his hand on her thigh for a period of time which she says was between five and ten seconds." The Appeal Court quashed the acquittal and directed a conviction of common assault.

[23] It would seem that a criminal assault must be accompanied with some intention of being violent, insolent or rude. But the facts of the case lead many courts to conclude that very minimal force was necessary to become a criminal assault.

[24] Consequently, there is some debate about the nature of a criminal assault: does the intentional application of force need a hostile context to become criminal? In Canadian Foundation, the Supreme Court struggled with s. 43 of the Criminal code, Binnie J. wrote:

¶ 116 Section 265 is very broad on its face and it has been interpreted broadly, because, as pointed out in Blackstone, supra, at p. 120, it has always been considered unworkable to draw a principled distinction between "degrees of violence". Professor Ashworth adds:

Is it right that the criminal law should extend to mere touchings, however trivial? The traditional justification is that there is no other sensible dividing line, and that this at least declares the law's regard for the physical integrity of citizens.

¶ 117 This near-zero tolerance (i.e., subject to the de minimis principle) for physical intervention continues to be the law, although in R. v. Jobidon, 1991 CanLII 77 (S.C.C.), [1991] 2 S.C.R. 714, Gonthier J. suggested that, in the family context, the law of assault should have a more nuanced application. Otherwise, he said, at pp. 743-44:

... a father would assault his daughter if he attempted to place a scarf around her neck to protect her from the cold but she did not consent to that touching, thinking the scarf ugly or undesirable... . That absurd consequence could not have been intended by Parliament.

¶ 118 We are not asked in this case to establish the threshold for a criminal "assault" in the family context, or whether the unwanted touching in Gonthier J.'s example could be said to be "by way of correction". Section 43 presupposes the existence of conduct that does amount to a criminal assault. Section 265 would clearly be triggered by much of the non-violent physical contact that is not out of place growing up in a robust family environment. The appellant points to some other jurisdictions like Sweden, which do without a parental defence provision equivalent to s. 43; but Sweden, at least, has a very different criminal law regime applicable to physical assaults.

[25] Surely, in her opinion, Arbour J. shared a different view when she wrote: “the application of some force upon another does not always suggest an assault in the criminal sense”

[26] In R. v. Cuerrier, L'Heureux-Dubé J. formulated the opinion that the assault provision in the Criminal Code is very broadly constructed:

¶ 11 As can be seen from an examination of the underlying elements of assault, which form the basis of all of the assault provisions, the Criminal Code prohibition against the intentional and non-consensual application of force is very broadly constructed. Any unwanted touching by another, no matter how minimal the force that is applied, is criminal. The physical acts prohibited by the assault scheme include not only a punch in the face, or forced sexual intercourse at knife-point, but also placing one's hand on the thigh of the person sitting adjacent on the bus: see R. v. Burden (1981), 25 C.R. (3d) 283 (B.C.C.A.). Clearly, the purpose of the assault scheme is much broader than just the protection of persons from serious physical harm. The assault scheme is aimed more generally at protecting people's physical integrity.

[27] In 1943, Ross D.C.J. in R. v. McGibney, did conclude that an assault must consist of threatening actions, i.e. intent to apply violence and that grabbing one's collar in the course of an agitated argument was not. It seems that McIntyre J. in R. v. Lepage adopted the same approach in defining a criminal assault. Even with the plaintiff's version accepted by the trial judge, McIntyre believed "that there was no evidence to support a finding that there was an intentional application of force by Lepage against Mitchell in the sense of being a wrongful application of force".

[28] The question was extensively examined in R. v. Matsuba, a case involving an art schoolteacher and a student aged fourteen. Apparently, the accused's hand would have touched the student between her ankle and her knee, without sexual overtones, during a regular class when he approach to check on the assignment he gave her. The Court did not find that the prosecution had proved its case. Nevertheless, and relying on R. v. Burden, Jones Prov. Ct. J. went on:

It is not simply enough that there be an intentional deliberate touching, without consent, but it is necessary, in order to conclude that the particular touching constitutes "force" within the meaning of the statutory provision, that there be a connotation of anger, revengefulness, rudeness, or insolence, or at least some like behaviour to the touching performed before it can be said that there is the "force" which completes the legal definition of assault. It seems to me that this must be so, otherwise any deliberate application of physical contact that exhibited nothing more than the general intent to intentionally touch the victim without the victim's consent would be actionable at the instance of the criminal law …"

[29] In R. v. Matsuba, Jones Prov. Ct. J. was prepared to find that the Burden case did reveal circumstances "which had a major bearing on the conclusion that the B.C. Court of Appeal came to with respect to the evidence pointing towards a conviction for assault", mainly being the bizarre attitude of the accused.

[30] The case of R. v. Phillips is also instructive and illustrative. Philips was charged with assaulting a police officer. He was trying to get into his office in a building being picketed. He had called the police. An animated discussion followed between one of the officer arriving on the scene and Phillips. At one point, the officer turned away from Phillips when the latter denounced the officer as "another union bum protecting the strikers". Phillips then grabbed the officer's wrist and poked his fingers at the officer's chest, telling him that if the officer would not help him, he should get someone who would. Brien Prov. Ct. J. held that the de minimis principle could apply depending on the circumstances of the case. He found that the grabbing of the wrist was done in a motion to indicate that he did not want the officer to leave. It was trivial and could not constitute an assault. However, when the accused poked the officer in the chest, it was voluntary touching done in anger, it was not a friendly contact nor was it done with consent express or implied. Although minor, it could not be considered trivial.

[31] It would seem that motive played a part in these decisions. Although motive is no part of the crime and is legally irrelevant to criminal responsibility, it may be used to determine the nature of the assault. It was suggested in R. v. Elek that motive might be useful to determine if a criminal assault was intended and that "a criminal assault is one motivated by some degree of animus or ill-will".

[32] However, as we have seen, that route was not always followed. In R. v. Dejong, MacDonald Prov. Ct. J. held that "… if it's an intentional application of force without the consent of the other, it may technically be an assault."

[33] Most importantly, in R. v. Bernier, the Quebec Court of Appeal was asked to decide if Bernier's actions constituted an assault, and more specifically, a sexual assault.

a) L'absence de caractère "hostile" de l'agression

[…]

¶ 19 Une agression suppose-t-elle nécessairement le recours à la force physique ou à une forme quelconque d'hostilité physique? N'existe-t-il pas des situations où un agresseur n'a pas besoin d'utiliser sa force pour porter atteinte à l'intégrité physique ou sexuelle de sa victime?

[…]

¶ 21 Le sous-paragraphe 265 (1)a) stipule que l'emploi intentionnel de la force, directement ou indirectement, est nécessaire pour commettre une agression. Toutefois, le terme force souffre d'imprécision. Quel degré de force est requis pour constituer une agression? S'agit-il d'une force physique extrême ou négligeable?

¶ 22 À cet égard, la Common law a adopté une approche souple pour définir la force. Les auteurs Smith et Hogan adoptent la notion de "intentional touching... without consent and lawful excuse":

An assault is an act by which D, intentionally or recklessly, causes P to apprehend immediate and unlawful personal violence (...). But "violence" here includes any unlawful touching of another, however slight, for, as Blackstone wrote:

"the law cannot draw the line between different degrees of violence, and therefore prohibits the first and lowest stage of it; every man's person being sacred, and no other having a right to meddle with it, in any the slightest manner."

As Lane LCJ put it:

"An assault is any intentional touching of another person without the consent of that person and without lawful excuse. It need not necessarily be hostile, or rude, or aggressive, as some of the cases seem to indicate."

¶ 23 Selon cette définition, tout toucher intentionnel sans excuse légitime est donc une agression.

[34] The Quebec Appeal Court concluded that the trial judge erred in acquitting the accused of sexual assault, inter alia, on the basis that evidence did not reveal the hostility required for an assault. Further appeal to the Supreme Court was summarily dismissed. By concluding that any intentional touching without lawful excuse is an assault, the Quebec Appeal Court interpreted the offence very broadly.

[35] The above brief development illustrates, in my view, some difficulties associated with the assault offence when borderline cases reach the Courts. Like Binnie J. acknowledged in Canadian Foundation, it is difficult to draw a principled distinction between degrees of violence. One could argue that there should be a clear line between criminal and non-criminal conduct. An all-inclusive definition might be clear, but it might also attract absurd results, like the illustration in R. v. Jobidon. It is worth noting that Bernier was a case of sexual assault, a concept that may demand different considerations for policy reasons, as in R. v. Jobidon.

[36] The Court is inclined to decide that the intentional application of force does need a context of hostile, rude, aggressive or disrespectful attitude to levitate to the criminal level as in R. v. Burden or R. v. Bernier.

lundi 28 décembre 2009

Exemples jurisprudentiels où l'absolution a été considéré lorsqu'une personne en situation d'autorité a été reconnu coupable d'une infraction

R. c. Côté, 2008 QCCQ 262 (CanLII)

[35] À titre d'exemples jurisprudentiels uniquement, la Cour réfère au paragraphe 59 de la décision (voir citations en annexe) sur sentence dans l'affaire Michel Grenier, dont quelques cas de cet ordre sont énoncés :

▪ Rozon a été absout inconditionnellement suite à une accusation d'agression sexuelle de moindre degré.

▪ Absolution conditionnelle pour un policier dans le cas d'une accusation de voies de fait dans l'exécution de ses fonctions.

▪ Absolution conditionnelle pour un policier de la Gendarmerie Royale ayant détourné des sommes d'argent qui lui avait été confiées dans le cadre de ses fonctions.

▪ Absolution inconditionnelle concernant un policier pour la commission de 2 voies de fait dans l'exécution de son travail.

▪ Libération inconditionnelle pour un policier qui a conseillé un collègue d'inscrire une mention inexacte dans un rapport d'événement relatif à un test d'ivressomètre concernant son gendre.

▪ Absolution conditionnelle pour fraude d'une somme de 5 000,00 $ par un avocat de l'aide juridique à l'égard de son syndicat.

▪ Absolution inconditionnelle pour un agent de la paix ayant posé des voies de fait à l'égard d'un citoyen. On a précisé que cette mesure sentencielle ne comportait pas de règle spéciale pour les officiers de paix.

▪ Absolution conditionnelle pour un agent de bureau du ministère de la Sécurité public qui a exhibé ses organes génitaux.

▪ Libération inconditionnelle d'un éducateur spécialisé qui a utilisé une force excessive envers un handicapé mental.

▪ Absolution conditionnelle dans le cas d'agressions sexuelles (2 touchés et 1 fellation) d'un accusé qui occupait un emploi d'agent de sécurité.

▪ Absolution conditionnelle pour un policier déclaré coupable d'avoir agressé sexuellement une collègue (touché d'un sein sous le soutien-gorge).

[36] Dans l'arrêt R. c. Jacques Boucher, la Cour d'appel du Québec a confirmé la décision d'un juge de la Cour du Québec qui avait prononcé l'absolution inconditionnelle d'un policier trouvé coupable de voies de fait ayant causé des lésions corporelles et d'utilisation négligente d'arme à feu survenue dans l'exercice de ses fonctions.

[37] Dans l'affaire La Reine c. Steeve Larouche, monsieur le juge Claude Provost de la Cour du Québec résume ainsi les faits relatifs à l'arrêt Boucher :

« 79. Suite à une plainte de tentative de vol de voiture, le policier Boucher s'était mis à la poursuite d'un véhicule suspect. La poursuite s'était étendue sur plus de 6 kilomètres et tous les feux rouges avaient été brûlés. La voiture suspecte s'était tout à coup immobilisée, après avoir heurté une chaîne de trottoir.

80. Au moment où elle est repartie, le policier Boucher, de l'intérieur du véhicule-patrouille qu'il occupait, a vidé son arme en direction de la voiture suspecte, sans heureusement blesser ou tuer quelqu'un.

81 Puis, lorsque les occupants de la voiture en étaient ressortis, l'accusé, sans raison apparente, avait frappé un des jeunes passagers d'un coup de revolver au visage, lui occasionnant de sérieuses blessures. »

[38] Dans la cause précitée citée par la défense, monsieur le juge Provost prononce une absolution inconditionnelle pour le policier Larouche reconnu coupable d'utilisation négligente d'arme à feu contrairement à l'article 86(1) du Code criminel.

[39] Lors de son exposé, le procureur en défense a cité également les causes suivantes :

• La Reine c. Vincent Bodet précitée. Le juge Richard Grenier de la Cour supérieure absout inconditionnellement le policier Vincent Bodet, qui avait plaidé coupable à des accusations de voies de fait contre Jonathan Roy et Vincent Royer, le tout punissable sur déclaration sommaire de culpabilité.

• L'affaire R. c. Craig, dans laquelle le juge Valmont Beaulieu absout conditionnellement le policier pour s'être livré à des voies de fait portées par déclaration sommaire de culpabilité.

• L'affaire R. c. Jackman. Absolution conditionnelle a été prononcée à l'égard d'un policier pour « assaut ».

[40] Pour sa part, la procureure de la poursuite cite quelques causes jurisprudentielles aux termes desquelles on a refusé l'absolution :

• La Reine c. Bergeron. Cette cause concerne 4 policiers pour des voies de fait avec lésions corporelles en regard de la célèbre affaire Barnabé. Il s'agissait d'un procès devant jury présidé par le juge Greenberg qui a prononcé des sentences d'incarcération.

• Dans l'affaire La Reine c. Daniel Simard, madame la juge Paradis de la Cour du Québec a prononcé des sentences de détention à l'égard du policier Simard reconnu coupable de voies de fait, voies de fait avec lésions à l'égard de deux individus, tentative d'entrave dans le cours de la justice, le tout commettant ainsi des actes criminels prévus aux dispositions pertinentes du Code criminel. Aux paragraphes 35 à 55, la juge Paradis fait une analyse intéressante de la jurisprudence pertinente démontrant que, dans certains cas, on décrète l'absolution et dans d'autres on la refuse à l'égard de policiers ayant commis divers délits relevant du Code criminel.

• La Reine c. Guy Hovington. Dans cet arrêt, la Cour d'appel du Québec infirme l'ordonnance d'absolution inconditionnelle pour condamner le policier Hovington à un emprisonnement avec sursis de 3 mois suite à des verdicts de culpabilité concernant des voies de fait armées et voies de fait simples dont le procès s'était tenu devant juge et jury. En rapport avec cette affaire, il y avait 3 autres accusés policiers qui avaient été reconnus coupables de voies de fait armées et voies de fait ayant causé des lésions corporelles. La Cour d'appel précise au paragraphe 27 que « l'absolution inconditionnelle ne peut, en l'espèce, s'harmoniser logiquement aux peines d'emprisonnement avec sursis imposées aux 3 complices de M. Hovington ». De plus, la Cour d'appel souligne au paragraphe 29 qu'il ne s'agit pas, en l'espèce, d'une erreur de jugement de la part de Hovington dans l'exécution de ses fonctions d'agent de la paix. Soit dit en passant, la Cour d'appel est d'avis que « les infractions constituent un abus d'autorité, puisque les policiers avaient toute autorité sur le détenu, dont ils devaient assurer la sécurité », ce qui constitue une circonstance aggravante. En l'espèce, la victime était détenue au moment des incidents.

• Enfin, dans l'affaire R. c. William, la Cour de justice de l'Ontario a refusé une absolution conditionnelle à l'égard d'un policier coupable d'assaut ayant causé des lésions

LE DROIT RÉGISSANT UNE DEMANDE D'ABSOLUTION

R. c. Côté, 2008 QCCQ 262 (CanLII)

[28] Eu égard à la position des parties, il importe avant tout de déterminer les principes gouvernant une demande d'absolution qu'elle soit conditionnelle ou inconditionnelle.

[29] À cet égard, la Cour a eu le loisir d'aborder la question dans une affaire mettant en cause un procureur de la Couronne qui avait reconnu sa culpabilité à l'accusation d'avoir été en possession de cocaïne le 7 avril 2005.

[30] Il s'agit de l'affaire La Reine c. Michel Grenier dont la sentence a été rendue le 20 janvier 2006 district de Québec, chambre criminelle et pénale (200-73-005501-054).

[31] Dans cette cause, l'accusé Grenier a bénéficié d'une absolution inconditionnelle.

[32] Aux paragraphes 17 à 34, la Cour procède ainsi à l'analyse des principes jurisprudentiels régissant l'absolution conditionnelle ou inconditionnelle, savoir :

«17. La disposition pertinente se trouve à l'article 730 du C. cr., laquelle fait partie du chapitre du Code criminel consacré à la détermination de la peine.

18. Aux termes du paragraphe 1 de cette disposition, le Tribunal peut, s'il considère qu'il est de l'intérêt manifeste d'un accusé sans nuire à l'intérêt public, prescrire par ordonnance une absolution conditionnelle ou inconditionnelle.

19. Cette ordonnance ne peut être rendue dans les cas d'infractions comportant une peine minimale ou si l'infraction est punissable d'un emprisonnement de 14 ans ou à perpétuité.

20. L'absolution entraîne donc l'absence de casier judiciaire pouvant compromettre les projets d'avenir d'un accusé.

21. Dans une décision récente rendue le 25 novembre 2005, La Reine c. Mansour, monsieur le juge Denis Lavergne résume ainsi les principes de base établis par la jurisprudence :

« [34] Il est bien établi que cette mesure dont l'effet évite au contrevenant le stigmate d'une condamnation n'a rien d'exceptionnelle et n'exclut aucune infraction au-delà des limites mentionnées précédemment; essentiellement, elle vise à éviter qu'une condamnation ait des conséquences disproportionnées ou démesurées au regard, d'une part, de la faute commise par le contrevenant, et d'autre part, au regard de d'autres contrevenants coupables d'infractions semblables. L'intérêt de l'accusé au sens où l'entend l'article 730 du Code ne saurait donc se réduire au seul préjudice que constitue une condamnation créant un casier judiciaire.

[35] Si la condamnation seule, et partant un casier judiciaire, suffisait pour établir l'intérêt de toute personne à obtenir une absolution inconditionnelle ou conditionnelle, il n'y aurait pas été nécessaire que l'article 730 le précise expressément d'autant plus d'ailleurs que la disposition ajoute le qualificatif véritable. »

22. Tel qu'énoncé par la juge Michèle Toupin, Cour du Québec. dans l'affaire La Reine c. Gollain, « la preuve de l'intérêt véritable de l'accusé est généralement facile à prouver, particulièrement lorsque l'individu à sentencer n'a pas d'antécédent judiciaire et est de bonne moralité. Il est évident que la possession d'un casier judiciaire, quoique dans certains cas fatals, peut représenter un empêchement ou une conséquence sérieuse, à la recherche d'un emploi, au maintien de ce dernier, à l'obtention de cautionnement et au déplacement à l'étranger par affaires ou par pur plaisir. »

23. Dans le même sens, monsieur le juge Béliveau, dans Rozon c. La Reine, écrit:

« Par ailleurs, l'intérêt véritable de l'accusé suppose que ce dernier est une personne de bonne moralité, qu'il n'a pas d'antécédent judiciaire, quoique cela ne soit pas déterminant (R. c. Chevalier), qu'il n'est pas nécessaire d'enregistrer une condamnation pour le dissuader de commettre d'autre infraction ou pour qu'il se réhabilite et que cette mesure aurait à son égard des conséquences particulièrement négatives. »

24. « La perspective de complications futures suffit ».

25. Ce qui importe, c'est de déterminer si une condamnation aurait pour effet d'entraîner pour l'accusé des conséquences négatives disproportionnées par rapport à la faute commise.

26. C'est la règle d'or établir par la Cour d'appel dans Abouabdellah c. La Reine, savoir :

« La règle d'or en la matière est qu'un justiciable ne doit pas, dans les faits, subir un châtiment qui n'a aucune mesure avec sa faute. »

27. C'est en somme le critère de la juste proportionnalité qui doit prévaloir.

28. Quant au critère de l'intérêt public, monsieur le juge Béliveau définit ainsi ce concept dans l'affaire Rozon précitée :

« 41. Quant à la notion d'intérêt public, elle doit prendre en cause l'objectif de la dissuasion générale, la gravité de l'infraction, son incidence dans la communauté, l'attitude du public à son égard et la confiance de ce dernier dans le système judiciaire (R. c. Elsharawy, par. 3). Cela étant, il faut se rappeler que dans l'arrêt R. c. Meneses, (1976) 25 C.C.C. (2d) 115, la Cour d'appel de l'Ontario a précisé que l'arrestation et la comparution d'un délinquant peuvent constituer une mesure de dissuasion efficace à l'égard de personnes qui ne sont pas criminalisées, lesquelles sont justement celles qui sont candidates à une absolution.

42. Dans ce même arrêt, la Cour d'appel de l'Ontario a indiqué que l'intérêt public comporte également le fait que l'accusé ait la possibilité de devenir une personne utile dans la communauté et qu'elle puisse assurer sa subsistance et celle de sa famille. On avait accordé une libération, selon la terminologie de l'époque, à une dentiste immigrante des Philippines qui désirait être admise à la pratique de cette profession au Canada. »

29. À ce propos, monsieur le juge Narcisse Proulx mentionne ce qui suit dans La Reine c. Durocher :

« Deuxièmement, l'intérêt public exige qu'on accorde une attention particulière à la dissuasion générale, à la gravité de l'infraction, à son incidence dans la communauté, à l'attitude du public à son égard et à la confiance de ce dernier dans le système judiciaire. De plus, il est important d'examiner si la personne peut être utile pour la société, de vérifier si elle peut assurer sa subsistance et celle de sa famille. »

30. La Cour d'appel dans La Reine c. Moreau, soulignait que l'absolution de l'article 730 du Code criminel ne doit pas être appliquée de façon exceptionnelle.

31. Chaque cas est un cas d'espèce qui doit être évalué à sa juste valeur et à son mérite.

32. C'est le principe de l'individualisation des sentences reconnu en jurisprudence et doctrine.

33. À ce sujet, les commentaires de monsieur le juge René de la Sablonnière, dans l'affaire La Reine c. Caron sont particulièrement significatifs.

34. Le juge de la Sablonnière n'a pas retenu l'argument de la poursuite selon lequel accorder une peine d'emprisonnement dans la communauté ne ferait qu'encourager d'autres agresseurs à procéder de la même façon, afin d'obtenir une peine moindre. Il précise qu'en matière de sentence, chaque cas est un cas d'espèce qui doit être traité au fond. Il ajoute qu'un accusé ne peut se voir priver du bénéficie d'application d'une disposition du Code criminel, sous prétexte que d'autres pourraient s'en servir ultérieurement à mauvais escient. »*

[33] Dans l'affaire La Reine c. Vincent Bodet, monsieur le juge Richard Grenier de la Cour supérieure résume comme suit les principes de base régissant l'absolution :

« 24. La défense demande que l'accusé soit absout inconditionnellement, le ministère public propose plutôt l'imposition de travaux communautaires et, subsidiairement, dans l'hypothèse où cette Cour choisirait la voie de l'absolution, une absolution conditionnelle.

25. Chacun des deux procureurs a soumis de nombreuses décisions portant sur l'octroi ou le refus d'une absolution dans des causes impliquant des policiers. C'est un lieu commun de dire que chaque cas est un cas d'espèce et il importe de revenir aux principes de base régissant l'absolution.

26. La Cour d'appel du Québec, dans l'arrêts R. c. Sheper, [1986] J.Q. No 1806 et R. c. Moreau, 1992 CanLII 3313 (QC C.A.), (1993) 76 C.C.C. (3d) 181, a clairement établi que l'absolution ne constitue pas une mesure exceptionnelle. Elle a même, récemment, dans R. c. Landry, [2005] J.Q. no 6631, 200-10-001726-053, rétabli une deuxième absolution pour un second crime de voies de fait commis à une date différente.

27. Le législateur parle de l'intérêt véritable de l'accusé. Celui qui requiert une absolution doit démontrer qu'il est une personne de bonne moralité, qu'il n'est pas nécessaire qu'une condamnation soit prononcée pour le dissuader de commettre d'autres infractions et qu'une condamnation pourrait avoir des effets négatifs à son endroit, R.c. Chevalier, [1990] A.Q. No 415.

28. Quant au deuxième volet, celui de l'intérêt public, mon collègue le juge Béliveau dans Rozon c. R., [1999] J.Q. No 752 en traite comme suit :

Quant à la notion d'intérêt public, elle doit prendre en cause l'objectif de la dissuasion générale, la gravité de l'infraction, son incidence dans la communauté, l'attitude du public à son égard et la confiance de ce dernier dans le système judiciaire (R. c. Elsharawy, [1997] N.J. no 249, par. 3). Cela étant, il faut se rappeler que dans l'arrêt R. c. Meneses, (1976) 25 C.C.C. (2d) 115, la Cour d'appel de l'Ontario a précisé que l'arrestation d'un délinquant peut constituer une mesure de dissuasion efficace à l'égard de personnes qui ne sont pas criminalisées, lesquelles, lesquelles sont justement celles qui sont candidates à une absolution.

29. La Cour d'appel de l'Ontario reprenait ce même principe dans R. c. Cheung et Chow, [1977] 19 C.L.Q. 280 :

« Speedy apprehension, arrest and trial with the public disgrace and jeopardy which is occasioned should be sufficient deterrent. »

[34] Dans l'affaire R. c. Craig, monsieur le juge Valmont Beaulieu de la Cour du Québec énonce précisément les règles jurisprudentielles établies par les tribunaux de juridiction d'appel, savoir :

« 47. Résumons maintenant les règles qui se dégagent de l'enseignement des tribunaux de juridiction d'appel au sujet de cette disposition.

1. L'article 730 ne doit pas être considéré comme une mesure exceptionnelle, sinon il serait vidé de tout sens qu'a voulu y donner le législateur, tel que l'écrivait le regretté honorable juge Amédée Monette de la Cour d'appel du Québec, dans l'arrêt La Reine c. Cyr.

2. Il irait à l'encontre de l'administration de la justice si les tribunaux accordaient d'une manière routinière les demandes en vertu de l'article 730. Soulignons qu'il n'est pas rare qu'un agent de la paix obtienne une absolution conditionnelle ou inconditionnelle. Chaque cas est un cas d'espèce. Par contre, il ne faudrait pas en venir à ce que les agents de la paix prennent pour acquis qu'ils obtiendront automatiquement cette demande devant les tribunaux.

3. L'exemplarité est un facteur dont il faut considérer et tenir compte. Mais cela ne doit pas faire obstacle à une application judicieuse de cet article.

4. Cette disposition ne vise pas uniquement les contraventions triviales et techniques.

5. L'absolution ne constitue pas une alternative à la probation ou au sursis de sentence.

6. L'absolution est accordée lorsque son refus résulterait d'une disparité injuste entre l'acte lui-même et l'effet que la condamnation aurait sur l'avenir du délinquant. Ainsi s'exprimait la Cour d'appel du Québec dans l'affaire Abouabdellah c. La Reine, [1996] A.Q. no 1078, du 8 mai 1996 en page 5 :

"La règle d'or en la matière est qu'un justiciable ne doit pas, dans les faits, subir un châtiment qui n'a aucune mesure avec sa faute."

La question de la fiabilité de l'identification de l'accusé

R. c. Peterson, 2005 CanLII 15920 (QC C.Q.)

[28] Au cœur du présent litige, se trouve la question de la fiabilité de l'identification de l'accusé.

[29] La jurisprudence rappelle constamment la mise en garde qui s'impose en matière d'identification par témoin oculaire, vu les risques d'erreur judiciaire. Le Juge McIntyre s'exprime ainsi dans l'arrêt Mezzo c. R.

"Dans l'arrêt Turnbull, (1976) 3 All E.R. 549), le juge en chef lord Widgery, s'exprimant au nom de la Cour d'appel, division criminelle (les lords juges Roskill et Lawton et les juges Cusack et May), a souligné les dangers d'injustice qui peuvent être engendrés et qui dans certains cas l'ont été par suite d'erreurs commises lors d'identifications visuelles de personnes accusées d'un crime. Mais en même temps, il a pris la peine de faire clairement entendre qu'une identification visuelle ne peut être éliminée en tant que preuve admissible dans une instance criminelle. Il s'est étendu sur la nature et la portée des directives que le juge du procès doit donner à un jury qui est appelé à examiner une preuve d'identification visuelle et il a affirmé que le défaut de donner des directives adéquates peut entraîner l'annulation de déclarations de culpabilité. Somme toute, il se référait à ce qu'il a appelé la qualité de la preuve. Il dit, à la p. 552:

(Traduction) Si cette qualité est bonne et le demeure jusqu'à la fin de la présentation de la preuve de l'accusé, le danger d'erreur d'identification est réduit; mais plus la preuve est de piètre qualité plus grand est le danger.

Il est impossible de ne pas être d'accord avec le juge en chef lord Widgery lorsqu'il parle du danger d'erreur que comporte une identification visuelle. Personne ne peut être en désaccord avec lui lorsqu'il insiste sur la nécessité de donner au jury des directives complètes et minutieuses sur la façon dont il doit traiter une telle preuve."

[30] Le danger auquel on fait référence est expliqué de la façon suivante par le Juge Lamer dans la cause Chartier c. R.:

"Lorsque "l'identification reposait sur un seul témoin, ou qu'on ait fait usage de méthodes d'identification inacceptables lors d'une parade ou encore par un usage suggestif de photos de l'accusé" ou que "l'affirmation du ou des témoins d'identification était contredite par une preuve d'impossibilité ou encore d'alibi,"

[31] Afin d'assurer une complète indépendance et liberté de jugement au témoin, les entraves possibles à une preuve oculaire fiable sont énumérées en ces termes par le Juge Proulx dans l'arrêt Proulx C.R.:

"Il est pour cette raison tout à fait irrégulier et inacceptable: 1) de faire des gestes ou de prononcer des paroles qui risquent d'influer sur l'identification, 2) d'aider le témoin à "choisir" parmi les photos, 3) de lui indiquer de quelque façon que ce soit qui est ou qui sont les suspects, s'il y en a parmi les sujets des photos, et 4) plus particulièrement de ne montrer au témoin qu'une seule photographie ou de lui exhiber une série de photos où celle du suspect est de facture différente des autres ou encore, il va de soi, une série de photos où celles du suspect sont plus nombreuses."

[32] Dans ce même arrêt, le Juge Proulx, s'apprêtant à ordonner un nouveau procès, analyse les circonstances dans lesquelles l'identification de l'accusé a été faite et conclut que celle-ci n'est pas fiable pour les motifs ci-après.

"Le juge a cru bon de ne faire au jury aucune mise en garde comme l'exigent les arrêts Turnbull, Mezzo ou Canning. Il n'a pas informé le jury "du danger que comporte une identification visuelle" ni "de la nécessité de montrer de la prudence en abordant cette preuve", et il n'a donc "pas établi le lien entre cette nécessité et les faits de l'espèce".

Le Juge n'a par conséquent ni mentionné que la preuve oculaire ici était ténue en soi ni noté de façon particulière que la rencontre entre le témoin et "son barbu" fut très brève et en soirée, que la personne aperçue était un parfait inconnu et que toute l'identification portait sur la forme des yeux de l'individu, un simple témoin, alors que le regard échangé, ce soir d'octobre 1982, avait toutes les caractéristiques d'un simple coup d'œil. Il n'a enfin pas signalé que le souvenir de M. Paquet ne s'est manifesté, ou ravivé, qu'après plus de huit ans à la vue d'une photographie qu'il avait cependant plusieurs fois eue sous les yeux, comme d'autres d'ailleurs, dans le contexte d'émissions à tout le moins suggestives et d'action en dommages.

Enfin, les directives sont muettes sur les procédures irrégulières utilisées par M. Tardif, sa suggestivité à peine voilée au moment d'exhiber la photographie de l'appelant, son intérêt personnel apparent et le fait de ne faire voir à M. Paquet que la seule photographie de la personne récemment décrite en ondes, et ce, à la connaissance de MM. Tardif et Paquet, comme l'unique suspect dans le meurtre de France Alain.

Il eût certainement été a propos de signaler aussi aux jurés les risques d'erreur découlant de la séance d'identification au bureau du ministère public, où l'on a exhibé au témoin éventuel huit photos, l'appelant figurant sur chacune."

Le dédommagement à la victime doit toujours être envisagé lors de la détermination de la peine

Il incombe à la défense de préciser ses demandes de communication de la preuve supplémentaires et cela doit être fait en temps opportun

R. v. Atwell, 2022 NSSC 304 Lien vers la décision [ 8 ]              The Crown has a duty to make disclosure of all relevant information to ...