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samedi 6 février 2010

La validité de l'ordre de fournir un échantillon d'haleine au fin de l'alcootest lorsqu'aucun technicien qualifié n'est disponible au poste de police

R. c. Tolley, 2004 CanLII 20776 (QC C.Q.)

[16] On est dès lors en mesure de constater dès à présent que l'expression française «dès que possible» n'a pas tout à fait la même signification que l'expression anglaise «as soon as practicable», la seconde véhiculant une notion d'assujettissement à la possibilité matérielle de procéder aux prélèvements que la première ne connote pas nécessairement.

[17] Aussi, dans un effort de conciliation entre les deux textes, la jurisprudence et la doctrine ont-elles d'abord précisé que la demande du policier, requérant des échantillons d'haleine aux fins d'analyse à l'aide de l'ivressomètre, ne doit pas être «faite dès que cela est physiquement possible, mais plutôt dès que cela est raisonnablement possible eu égard aux circonstances»: LABRÈCHE, D. et C. JARRY, "Les infractions relatives à l'automobile"; dans Collection de droit 2003-2004, École du Barreau du Québec, vol. 11, Droit pénal: Infractions, moyens de défense et peine, Les Éditions Yvon Blais, 2003, à la page 132.

[18] Il est par ailleurs acquis que, pour établir que le prélèvement des échantillons a été fait dès que cela était raisonnablement possible dans les circonstances, la Couronne doit faire la preuve de l'heure de la commission de l'infraction, de l'heure à laquelle l'accusé a été sommé de fournir l'échantillon, et finalement de l'heure à laquelle il a subi le test. Bien qu'il n'ait pas à justifier chacune des minutes du délai écoulé entre le moment de l'infraction et la prise des tests, le Substitut doit au surplus faire la démonstration – au besoin en exposant la façon dont la police était organisée pour procéder aux prélèvements – que ce délai était raisonnable eu égard à l'ensemble des circonstances. C'est en effet ce qui ressort de l'arrêt suivant de la Cour d'appel de l'Ontario, rendu dans l'affaire R. c. Letford, [2000] O.J. no. 4841 (Ont. C.A.), aux par. 19 et 20:

«[…] the way in which the police organized their staff and equipment appears relevant to the time taken until the first breathalyzer test, it and any reason offered for it are matters for the court to consider in determining whether the Crown has met its obligation under s. 258 (1) (c) (ii).

The Crown need not show that the police are organized to take breath samples as soon as possible in each case. However, s. 258 (1) (c) (ii) does require that in every case the Crown demonstrate that in all the circumstances, including, where relevant, the way the police are organized and why, the breath samples were taken within a reasonably prompt time.»

[19] Mais cela ne signifie pas pour autant que le policier doive être en présence d'un ivressomètre approuvé et d'un technicien qualifié pour pouvoir décerner au suspect une sommation légalement valide. Car, ce qu'il s'agit d'apprécier ici, ce n'est pas la légalité du délai observé entre la sommation et la prise des échantillons, mais plutôt la légalité de l'ordre donné par l'agent de la paix et, accessoirement, la possibilité que l'ordre tel que donné enclenche l'obligation légale, pour celui auquel il s'adresse, de s'y conformer.

[20] C'est du moins là la distinction que, déjà dans l'arrêt R. v. Matthews, (1974) 14 C.C.C. (2d) 1 (Man. C.A.), rendu à l'époque où l'actuel article 254 C. cr. portait le numéro 235 C. cr., la Cour d'appel du Manitoba apportait, aux pages 2 et 3:

«Breathalyzer test equipment was not located at the detachment to which Matthews was taken. The police officers testified that Matthews was not taken to the office, where equipment was located, because of his indication at the scene that he would not submit to a breathalizer test.

[…]

[…] the question before the Court was not whether the accused was given a reasonable time to make up his mind about the demand but whether, having refused, the offense was complete. There was no dispute with the proposition that a person upon whom a demand is made ought to have a reasonable time to make up is mind.»

[21] Cela dit, la Cour a finalement adopté le point de vue précédemment exprimé dans l'affaire Sawicki, dont il sera question ultérieurement, selon lequel la sommation ne devait pas nécessairement être décernée en présence de l'ivressomètre approuvé pour être valide. Cette position avait d'ailleurs déjà été énoncée, seulement quelques mois plus tôt, par la Cour d'appel de la Saskatchewan dans l'affaire R. v. Kitchemonia, (1973) 12 C.C.C. (2d) 225 (Sask. C.A.). Le juge en chef Culliton y écrivait alors, à la page 227:

«I am of the opinion, as well, that the learned trial Judge erred in law in holding that Kitchemonia could not be guilty of failing to comply with the demand made pursuant to s. 235 (1), unless there was immediately available an approved instrument for analysis of a sample. This very question was considered by this Court in R. v. Sawicki, [1972] 6 W.W.R. 755. There, speaking on behalf of the Court, I said at p. 757:

«[...] The demand provided for in s. 235 (1) can be made any place. To suggest that it could be made only at the place where the approved machine is located is contrary to the clear intent of the section. If this were the correct interpretation, there would be no need for the right given to the peace officer to demand that the person accompany him for the purpose of enabling the sample to be taken.»

I have no reason to depart from these views expressed on behalf of the Court.»

[22] Le point de vue fut subséquemment repris par les tribunaux de toutes les juridictions, qui en ont dérivé la proposition selon laquelle, en règle générale, la police n'a pas l'obligation d'organiser ses ressources matérielles de façon à ce qu'un alcootest approuvé et/ou un technicien qualifié soit disponible en tout temps dans chaque poste de police, pour autant qu'elle soit en mesure de faire subir le test au prévenu dans un délai qui soit raisonnable eu égard à l'ensemble des circonstances: R. v. Laybolt, (1974) 17 C.C.C. (2d) 16 (P.E.I. S.C.); R. v. Myrick, [1995] N.J. No. 154 (Nfl. C.A.); R. v. Letford, [2000] O.J. No. 4841 (Ont. C.A.); R. v. Dechamplain, [2001] O.J. No. 2293 (Ont. S.C.J.); R. v. Ferguson, [2004] O.J. No. 127 (Ont. C.J.).

[23] Puis, dans un arrêt récent déposé le 19 février 2004 dans l'affaire R. v. Danychuk, [2004] O.J. No. 615 (Ont. C.A.), la Cour d'appel de l'Ontario a complété la boucle. S'exprimant au nom d'une Cour unanime, le juge Blair écrit en effet, aux paragraphes 20 et 21:

«Mr. Danychuk refused, unequivocally, to provide a breath sample. This Court has held, in such circumstances, that the Crown need not even demonstrate the device in question was an approved screening device as a prerequisite to a valid demand: [...]. In addition, the Court and others have held that in such circumstances the Crown does not have to show an approved screening device was in possession of, or immediately available to, the police officer at the time of the demand. [...].

In my opinion, while it may be sensible for a police officer to make sure the device is working and the motorist apprised of the process and the consequences of non compliance, it cannot be said – in the face of these authorities – that these matters constitute prerequisites to a valid demand for a breath sample under subsection 254 (2), in my opinion.»

[24] L'absence d'un technicien qualifié ou encore d'un ivressomètre approuvé au poste de la police autochtone, au moment où a été donné l'ordre de fournir les échantillons d'haleine, n'a dès lors aucune incidence sur la validité de cette sommation. Par ailleurs, s'il avait obéi à la sommation et avait échoué le test de l'ivressomètre, ce n'aurait été qu'au moment de mettre en preuve le taux d'alcoolémie dans le sang de l'accusé, lors de son procès pour conduite avec plus de 80 milligrammes d'alcool par 100 millilitres de sang (art. 253 b) C. cr.), que la Couronne aurait dû justifier le délai écoulé entre le moment de l'infraction et le moment du test, en supposant évidemment qu'elle aurait voulu produire les résultats d'analyse des prélèvements d'haleine effectués par le technicien qualifié, selon les prescriptions de l'article 258 (1) c) du Code criminel.

Le refus de fournir un échantillon d'haleine en l'absence d'un technicien qualifié constitue-t-il une infraction?

R. c. Tolley, 2004 CanLII 20776 (QC C.Q.)

[26] Le défaut de se soumettre au test de l'ivressomètre constitue une infraction qui est créée au paragraphe 5 de l'article 254 C. cr.:

«Commet une infraction quiconque, sans excuse raisonnable, fait défaut ou refuse d'obtempérer à un ordre que lui donne un agent de la paix en vertu du présent article.»

[27] Les éléments essentiels de l'infraction de refus de se soumettre au test de l'ivressomètre se résument donc d'une part à une sommation valide ordonnant au prévenu de fournir des échantillons d'haleine ou de suivre l'agent de la paix qui a procédé à son interception afin de procéder à ces prélèvements, et d'autre part à un refus de la part du prévenu de se soumettre à l'ordre donné. L'accusé peut dès lors commettre l'infraction prévue à l'article 254 (5) C. cr. de deux façons, soit en refusant de suivre l'agent de police ou encore en refusant de fournir les échantillons demandés.

[28] On sait par ailleurs que l'incorporation de l'expression «sans excuse raisonnable» au texte constitutif de l'infraction n'a pas pour effet d'ajouter l'absence d'excuse raisonnable comme élément essentiel de l'infraction que la Couronne aurait le fardeau de prouver hors de tout doute raisonnable, mais plutôt d'ouvrir à l'accusé une défense d'excuse qui lui permet de soulever un doute raisonnable par la preuve d'un élément étranger aux exigences légales stipulées. C'est en effet l'accusé qui a le fardeau de prouver, par prépondérance des probabilités, que l'excuse invoquée est raisonnable.

[29] Ce sont en effet là les enseignements qui ressortent de la jurisprudence: Taraschuk v. R., (1976) 25 C.C.C. (2d) 108 (C.S.C.); R. c. Dupré, [1995] A.Q. No. 1155 (C.S.); Aubut c. R., J.E. 92-589 (C.A.).

[30] Or, dans l'affaire Kitchemonia, précitée, la Cour d'appel de la Saskatchewan écrivait dès 1973 ce qui suit, à la page 227:

«In my respectful view, s. 235 (2) creates a single offence, that is, an offence for non-compliance with the demand provided for in s. 235 (1). It is immaterial whether the non-compliance arises from a failure or a refusal without reasonable excuse to supply a sample of breath. These are simply two of the ways in which the offence may be committed: […].»

[31] La position fut aussitôt reprise par la Cour d'appel du Manitoba dans l'arrêt précité Matthews, lui aussi rendu en 1973, aux pages 3 et 4:

«And see R.c. Sawicki, [1972] 6 W.W.R. 755 (Sask. C.A.), where Culliton, C.J.S., said at p. 757:

«Under s. 235 (1) the peace officer, when the circumstances as set out therein exist, has a right to demand from the person a sample of his breath and to demand that he accompany him for the purpose of enabling such a sample to be taken. A failure or refusal to comply with either of these demands without reasonable excuse constitutes an offence under s. 235 (2). […]»

In the case at bar, it was not suggested that Matthews had a reasonable excuse for non-compliance with the demand by Simpson. I am satisfied that the offence, as charged, was complete when Matthews responded negatively in response to Simpson's demands. Whether Matthew would have changed his mind about providing a breath sample if another demand had been made later on at a place where a sample could have been taken, is not relevant to the circumstances of this case.»

[32] Puis, en 1978, la Cour d'appel de la Nouvelle-Écosse adoptait un point de vue analogue. En effet, dans l'affaire R. v. Belliveau, (1979) 42 C.C.C. (2d) 357 (N.S.S.C. (A.D.)), le juge en chef Mackeigan écrivait, aux pages 359 et 360:

«We should emphasize that the law does not require an accused to be taken to the breathalyzer instrument in order to conclude that he refused to comply with the demand. The demand is twofold – to require the accused to provide samples of his breath and to require him to «accompany the peace officer for the purpose of enabling such samples to be taken» (s. 235 (1) […]). The offence is to fail or refuse to comply with either of those demands. The failure or refusal to comply must thus take place or not take place before any trip to the breathalyzer begins. Any suggestion that it is necessary or even desirable to take the accused to the machine before the fact of failure or refusal to comply is determined entirely overlooks the twofold nature of the demand.

No authority is needed for what seems so clear. I note, however, that other Courts of appeal have also rejected similar misinterpretations of the section: […] .»

[33] Enfin, dans son arrêt récent rendu en 2004 dans l'affaire Danychuk, déjà citée, la Cour d'appel de l'Ontario ajoutait la contribution suivante à la discussion, aux paragraphes 22 et 26:

«[…] It is the failure or refusal to comply with the demand to provide the breath sample that is at the core of the infraction, not the failure or refusal to provide the breath sample «forthwith». The word «forthwith» in subsection 254 (2) does not define the substance of the offence. Rather, it imposes on the person to whom the demand is made an obligation to comply in a timely fashion, and on the authorities an obligation to conduct the test in a timely fashion once the request is honoured in order that the detainee's rights to counsel under section 10 (b) of the Charter are minimally impaired.

[…]

[…] Where, as here, there has been an outright refusal to provide a breath sample, it is not a prerequisite to such a demand that the Crown establish the approved screening device was present at the scene, tested and ready to accept a sample, or that the police officer presented the device to the driver and explained the purpose of the test and the consequences of a failure to provide a sample.»

[34] Bien que l'accusé subissait alors son procès sur une accusation de refus de fournir un échantillon d'haleine dans l'appareil de détection approuvé (art. 254 (2) C. cr.) plutôt que dans l'ivressomètre approuvé (art. 254 (3) C. cr.), le Tribunal est d'avis que le principe énoncé a force obligatoire dans l'une et l'autre situation, rien ne permettant de distinguer à cet égard le refus de fournir l'échantillon dans l'un ou l'autre des deux types d'appareils.

[35] Ainsi donc, pour tout résumer, comme, pour se décharger de son fardeau de preuve, le Ministère public n'a pas à démontrer qu'un appareil était effectivement à la portée de la main au moment du refus, l'infraction de refus est perpétrée dès lors que le prévenu d'une part se fait servir une sommation légalement valide par un agent de la paix et d'autre part ne s'y conforme pas en faisant défaut ou en refusant, sans excuse raisonnable, d'y donner suite.

[36] Or, c'est précisément ce qui s'est produit dans la présente affaire. N'ayant fourni aucune explication qui serait susceptible de constituer une excuse raisonnable dans les circonstances, l'accusé a clairement indiqué au constable Petonoquot qu'il ne voulait pas se soumettre à la sommation, position qu'il a du reste réitérée après avoir été dûment informé des conséquences d'un refus.

[37] Aussi, dans le contexte de la présente affaire, faut-il ultimement conclure que la sommation du policier autochtone ordonnant à monsieur Tolley de fournir des échantillons d'haleine a été validement décernée et que le refus injustifié d'obtempérer clairement exprimé par l'accusé couvre tous les éléments essentiels de l'infraction prévue au paragraphe 5 de l'article 254 du Code criminel.

[38] L'accusé doit dès lors être déclaré coupable de l'infraction d'avoir refusé de donner les échantillons d'haleine qu'il était légalement tenu de fournir.

vendredi 5 février 2010

Orientations pour déterminer si les diverses obligations qui découlent de l’al. 10b) de la Charte et leurs modalités d’interaction sont remplis

R. c. Steven Croteau, 2009 NBCP 41 (CanLII)

Les diverses obligations qui découlent de l’al. 10b) de la Charte et leurs modalités d’interaction ont été résumées dans l’arrêt R. c. Luong (G.V.) 2000 ABCA 301 (CanLII), 2000 ABCA 301 (CanLII), (2000), 271 A.R. 368, [2000] A.J. No. 1310 (QL), 2000 ABCA 301 :

En guise d’assistance aux juges de procès chargés de la lourde tâche de trancher pareilles questions en litige, nous offrons les orientations suivantes :

1. Il incombe à la personne qui affirme que son droit garanti par la Charte a été violé d’établir qu’il y a eu violation ou négation du droit garanti par la Charte.

2. L’alinéa 10b) impose aux autorités de l’État qui arrêtent une personne ou la placent en détention des obligations en matière d’information et en matière de mise en application.

3. L’obligation en matière d’information consiste à informer la personne détenue de son droit d’avoir recours sans délai à l’assistance d’un avocat et à lui faire connaître l’existence et l’accessibilité de l’aide juridique et des avocats de service.

4. Les obligations en matière de mise en application sont doubles et prennent naissance lorsque la personne détenue indique qu’elle désire exercer son droit à l’assistance d’un avocat.

5. La première obligation en matière de mise en application consiste à « donner [à la personne détenue] la possibilité raisonnable [d’exercer son droit] (sauf en cas d’urgence ou de danger) ». Voir R. c. Bartle, 1994 CanLII 64 (C.S.C.), 1994 CanLII 64 (C.S.C.), [1994] 3 R.C.S. 173; 92 C.C.C. (3d) 289 (C.S.C.), à la page 192 [R.C.S.].

6. La deuxième obligation en matière de mise en application consiste à « s’abstenir de tenter de soutirer des éléments de preuve à la personne détenue jusqu’à ce qu’elle ait eu cette possibilité raisonnable (encore une fois, sauf en cas d’urgence ou de danger) ». Voir R. c. Bartle, précité, à la page 192 [R.C.S.].

7. Le juge du procès doit d’abord déterminer si, étant donné l’ensemble des circonstances, la police a accordé à la personne détenue une possibilité raisonnable d’exercer son droit à l’assistance d’un avocat; il incombe à la Couronne d’établir que la personne détenue qui a invoqué le droit à l’assistance d’un avocat a obtenu une possibilité raisonnable d’exercer ce droit.

8. Si le juge du procès conclut qu’il y a eu violation de la première obligation en matière de mise en application, l’atteinte aux droits de la personne détenue est prouvée.

9. Si le juge du procès est convaincu que la première obligation en matière de mise en application a été respectée, ce n’est qu’alors qu’il peut examiner si la personne détenue qui a invoqué le droit à l’assistance d’un avocat a fait preuve d’une diligence raisonnable pour l’exercer, et il incombe à la personne détenue d’établir qu’elle a fait preuve d’une diligence raisonnable afin d’exercer ses droits. Voir R. c. Smith 1989 CanLII 27 (S.C.C.), 1989 CanLII 27 (S.C.C.), (1989), 50 C.C.C. (3d) 308 (C.S.C.), aux pages 315, 316 et 323.

10. Si on conclut que la personne détenue qui a invoqué le droit à l’assistance d’un avocat n’a pas fait preuve d’une diligence raisonnable pour l’exercer, ou bien les obligations en matière de mise en application ne prennent pas naissance du tout, ou bien elles sont suspendues. Voir R. c. Tremblay 1987 CanLII 28 (S.C.C.), 1987 CanLII 28 (S.C.C.), (1987), 37 C.C.C. (3d) 565 (C.S.C.), à la page 568, R. c. Ross 1989 CanLII 134 (S.C.C.), 1989 CanLII 134 (S.C.C.), (1989), 46 C.C.C. (3d) 129 (C.S.C.), à la page 135, R. c. Black 1989 CanLII 75 (S.C.C.), 1989 CanLII 75 (S.C.C.), (1989), 50 C.C.C. (3d) 1 (C.S.C.), à la page 13, R. c. Smith, précité, à la page 314, R. c. Bartle, précité, à la page 301 et R. c. Prosper, 1994 CanLII 65 (C.S.C.), 1994 CanLII 65 (C.S.C.), [1994] 3 R.C.S. 236; 92 C.C.C. (3d) 353 (C.S.C.), aux pages 375 à 381, 400 et 401 [du recueil C.C.C.]. Dans de telles circonstances, aucune atteinte aux droits n’est prouvée.

11. Une fois qu’une personne détenue a affirmé son droit à l’assistance d’un avocat et a fait preuve d’une diligence opportune pour l’exercer (après avoir obtenu une possibilité raisonnable de l’exercer), si elle indique qu’elle a changé d’idée et ne veut plus d’avis juridique, la Couronne est tenue de prouver l’existence d’une renonciation valide à l’assistance d’un avocat. Dans un tel cas, les pouvoirs de l’État ont une obligation additionnelle en matière d’information : ils doivent « informer [la personne détenue] de son droit d’avoir une possibilité raisonnable de communiquer avec un avocat et de l’obligation de la police, au cours de cette période, de s’abstenir, tant que la personne n’aura pas eu cette possibilité raisonnable de prendre toute déposition ou d’exiger qu’elle participe à quelque processus qui pourrait éventuellement être incriminant » (c’est ce qu’on appelle parfois « la mise en garde prévue dans l’arrêt Prosper »). Voir R. c. Prosper, précité, à la page 274 [du R.C.S.]. En l’absence d’une telle mise en garde, une atteinte aux droits est prouvée.

J’estime qu’il est peu réaliste dans chaque cas de catégoriser nettement les obligations qui découlent de l’élément de mise en application du droit que garantit l’al. 10b). Il en est ainsi parce que le premier principe directeur qui permet de trancher les questions de la « possibilité raisonnable » et de la « diligence raisonnable » est le besoin d’examiner l’ensemble des circonstances. Par conséquent, toute analyse qui exige que soit déterminée la « possibilité raisonnable » sans tenir compte de l’ensemble des circonstances ne constitue pas la démarche appropriée pour procéder à l’analyse fondée sur l’al. 10b). Le juge des faits doit considérer les faits globalement et décider si, dans « l’ensemble des circonstances », on peut dire que la personne détenue n’a pas eu une possibilité raisonnable d’exercer son droit à l’assistance d’un avocat. Ces circonstances comprennent non seulement le comportement de la police, mais aussi celui de la personne détenue. Ce qui pourrait s’avérer raisonnable dans certains cas pourrait fort bien ne pas l’être dans d’autres cas.

jeudi 28 janvier 2010

État du droit relatif à l'infraction de méfait public

R. c. C.B., 2006 QCCQ 12806 (CanLII)

[31] Les éléments essentiels de l'infraction sont:

1) avoir amené un agent de la paix à commencer ou à continuer une enquête;

2) en faisant une fausse déclaration;

3) avec l'intention de tromper;

4) parmi les infractions concernées, il y a celle qu'une autre personne a commise (...)

[32] Les Tribunaux ont reconnu que l'infraction de l'article 140 du Code criminel comporte deux éléments:

A) L'ACTUS RÉUS

L'actus réus de l'infraction de méfait public est la transmission de la fausse information;

La preuve doit démontrer hors de tout doute raisonnable qu'une déclaration a été faite et que cette déclaration est fausse.

La Cour d'appel du Québec s'exprime ainsi:

« Il va bien sûr de soi que l'inculpation d'avoir rapporté… qu'une infraction a été commise quand elle ne l'a pas été impose à la poursuite d'établir qu'…elle ne l'a pas été et non pas à l'accusé de faire voir qu'elle l'a été ». Juge Vallerand

Parmi les éléments substantifs du crime reproché, l'un des plus importants sinon le plus important qui devait être prouvé, est sans aucun doute le fait que la déclaration faite par l'appelante était fausse. Elle ne pouvait être fausse de toute évidence que si, de facto, l'automobile de l'appelant n'avait pas été volée ». Juge Richard

B) LA MENS REA

Suivant les enseignements de la doctrine et de la jurisprudence, l'utilisation d'un vocable tel que dans l'intention de créer une infraction d'intention spécifique. L'auteur Hugues Parent écrit:

« L'intention spécifique complète l'action principale en ajoutant à celle-ci la poursuite d'un but ultérieur. Dans ce cas, il ne suffit pas que l'accusé accomplisse l'action qui sous-tend l'élément matériel du crime, mais encore faut-il qu'il souhaite atteindre un but spécifique, un résultat qui excède l'accomplissement de l'acte à la source de l'infraction.

[33] Le fardeau de la partie poursuivante est donc de prouver hors de tout doute raisonnable:

- que l'information transmise est fausse (fausse accusation);

mais en plus:

- que celle-ci a été faite dans l'intention de tromper et que cette intention existait lors de la commission de l'injustice

mercredi 27 janvier 2010

Plusieurs décisions traitant de la détermination de la peine concernant l'infraction de voies de fait causant des lésions corporelles

R. c. Tajer, 2007 CanLII 56768 (QC C.M.)

[37] La poursuite a soumis les arrêts suivants au soutien de sa recommandation :

1. La Reine c. Stymiest [2002] N.B.J. nº 101 (N.B.Q.B.)
Accusé 23 ans; antécédents de vols; comportement non caractéristique de l’accusé; nombreux coups de poing au visage victime; reconnaissance par accusé de sa faute, plaidoyer culpabilité. Victime, nez, os joue gauche et orbite gauche fracturés, chirurgie et hospitalisation requise; pas de séquelle permanente; accusé bon travailleur.
Sentence : 6 mois de prison assortis d’une probation de 18 mois.

2. La Reine c. Punnen (2004), 59 W.C.B. (2d) 313 (C.A. Ont.)
Accusé 20 ans; victime et accusé sous l’effet de l’alcool; support familial; plaidoyer culpabilité, accusé était en bris de condition au moment infraction; coups de poing et de pied à la victime; causes pendantes; accusé pensait que la victime l’avait volé; victime a souffert œil tuméfié, coupure près sourcil et diverses éraflures au coude et côté droit du torse.
Sentence : 5 mois et demi de prison tenant compte de 7 jours de détention préventive.

3. La Reine c. Taylor (1992) 16 W.C.B. (2d) 439 (C.A. Alta)
Accusé chauffeur taxi; sans antécédent judiciaire; bon employé; au Canada depuis 4 ans; victime client taxi ne veut pas payer sa course; accusé frappe victime avec barre de fer; victime dents cassées et cicatrices permanentes au visage.
Sentence : 9 mois de prison assortis d’une probation de 18 mois.

4. La Reine c. Lantin (17 mai 2006), dist. de Terrebonne 700-01-056085-056 (C.Q.)
Accusé père de 2 enfants; sans antécédent judiciaire; accusé frappe la victime de plusieurs coups au visage et au corps; blessures œil droit, nez et bouche; problèmes permanents de sensibilité aux dents; maux de tête et nausées récurrents; aucun remord exprimé; violence gratuite suite à une histoire de neige entre voisins; perte de contrôle.
Sentence : 3 mois de prison assortis d’une probation de 3 ans avec dédommagement.

5. La Reine c. Khan (19 janvier 2000) dist. de Vancouver (B.C.S.C.)
Accusé 27 ans; 1 antécédent culture canabis; victime flatte chien de l’amie de cœur de l’accusé; jalousie; coup de poing arrière tête victime; victime tombe; accusé donne deux coups de pied à la tête de la victime; victime souffre commotion; points de suture à la tête; lettres support pour accusé d’employeur et famille; remords accusé.
Sentence : 9 mois de prison.

6. La Reine c. Bunka (28 septembre 2004) dist. de Courtenay (B.C. Prov. Ct)
Accusé 21 ans; rapport présentenciel défavorable, antécédents juvéniles autre nature; procès; victime mâchoire fracturée, dentition affectée; attaque non provoquée dans un café; pas de remord; 1re infraction adulte.
Sentence : 6 mois de prison assortis probation 18 mois.

7. La Reine c. Agalou (27 juin 2001) dist. de Westminster (B.C. prov. Ct)
Accusé jeune; sans antécédent judiciaire; individu de bon caractère; lettres de support de ses employeurs, amis et école; rapport présentenciel très positif; incident se déroule dans un Palais de justice; accusé frappe sans avertissement un avocat; perte de contrôle momentané; remords exprimés; victime souffre œil tuméfié, nez et lèvres enflés, coupure à l’intérieur de la bouche et une dent cassée; lacération du cuir chevelu.
Sentence : 60 jours de prison assortis d’une probation 1 année. Ordre de dédommagement.

[38] La défense quant à elle produit les arrêts suivants au soutien de sa recommandation :

1. La Reine c. Craig (23-03-2000) Cour du Québec
Accusé 43 ans; policier; effets néfastes condamnation sur sa carrière; plaidoyer culpabilité; gifle au visage victime, accusation de voies de fait simple; pas de lésion; dossier disciplinaire vierge, déclaration sommaire de culpabilité; effectué don de 400,00 $ avant sentence.
Sentence : absolution conditionnelle, probation période de 30 jours.

2. La Reine c. Tremblay-Gagné (07-05-2003) Cour du Québec
Accusé 19 ans; plaidoyer culpabilité, victime pousse et frappe accusé qui revient à la charge et donne un coup de poing au visage victime; victime perd conscience; os de la joue fracturée, diminution partielle et permanente vision pour la victime; geste spontané, répercussions d’une condamnation sur son emploi; accusé n’a pas d’antécédent judiciaire.
Sentence : absolution conditionnelle, probation de 6 mois.

3. La Reine c. Kamal (01-06-2006) Cour municipale de la Ville de Montréal
Accusé âgé 26 ans; emploi stable; étudiant sérieux; étudie pour devenir ingénieur; procès; sans antécédent judiciaire; coups de poing au visage victime; histoire anodine de déneigement; dommages causés aux dents et à la mâchoire de la victime, condamnation peut affecter sa carrière.
Sentence : absolution conditionnelle, probation durée 1 année.

4. La Reine c. Sagesse (02-03-2006) Cour supérieure du Québec
Accusée ex-épouse victime; se présente chez victime afin d’avoir de l’argent pour acheter nourriture à ses enfants; accusée frappe victime au visage et au corps; résultat trois égratignures, plaidoyer culpabilité; sans antécédent judiciaire; étudie temps plein comme infirmière, travaille à temps partiel; condamnation pourrait nuire à sa future carrière.
Sentence : absolution conditionnelle, probation durée 1 année.

5. La Reine c. Perreault (31-03-2003) Cour supérieure du Québec
Accusé âgé 47 ans; procès; responsabilités familiales; emploi stable; aucun antécédent judiciaire; blessures à la victime constituées de quelques ecchymoses; coups échangés entre victime et accusé suite altercation de la route; condamnation nuirait au travail accusé et à la nécessité pour lui de se rendre aux États-Unis pour son travail.
Sentence : absolution conditionnelle; probation durée 6 mois.

6. La Reine c. F.M. (16 novembre 2006) Cour municipale de Laval
Accusé; antécédent voies de fait pour lequel il a reçu une absolution; étudie en droit; voies de fait commis sur sa conjointe; claque au visage, marques au visage et enflure œil droit; agent immobilier agréé; transactions futures aux États-Unis; pas remords; conséquences négatives sur sa carrière d’avocat, conséquences sur son emploi en regard de ses déplacements futurs à l’extérieur du pays.
Sentence : absolution conditionnelle, probation durée 1 an.

7. La Reine c. Chen (04-10-2005) Cour municipale de la Ville de Montréal
Accusé 23 ans; plaidoyer de culpabilité; pas d’antécédent judiciaire; soutien financièrement ses parents; ingénieur dans le domaine de l’optique; condamnation empêcherait défendeur de se rendre à l’extérieur du pays; conséquences sur son emploi qui requiert de tels déplacements; geste non prémédité, rapport présentenciel très favorable; victime donne mauvaise impression au Tribunal; remords; Tribunal retient provocation victime.
Sentence : absolution inconditionnelle.

[41] La lecture de ces arrêts nous montre que, pour des causes se rapprochant sensiblement du présent dossier, les sentences prononcées varient, selon les circonstances de l’absolution conditionnelle à un emprisonnement de 6 mois.

[42] Cette grande variation de sentence nous indique l’importance que prennent les circonstances particulières de chaque dossier et les caractéristiques personnelles de chaque défendeur dans la fixation d’une sentence juste.

[43] Toutefois, cette lecture nous permet tout de même de constater que les tribunaux imposent généralement l’emprisonnement pour ce type d’infraction lorsque la victime a subi des lésions sérieuses à moins que d’autres circonstances ou faits du dossier ne militent en faveur d’une autre forme de sentence.

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Autres décisions considérées
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1. La Reine c. Wales, [1987] B.C.J. no 2680 (B.C.C.A.)
Sentence : 30 jours de prison à être purgé de façon discontinue.
Accusé âgé 19 ans, père est co-accusé, pas antécédent judiciaire, victime œil tuméfié, saignement du nez et fracture os de la joue; victime avait volé une somme argent à l’accusé; plaidoyer culpabilité.

2. La Reine c. Penney, [1987] N.J. No 438 (N.S.C.T.)
Sentence : Sentence suspendue et probation 1 an.
Accusé âgé 24 ans; sous influence alcool, plusieurs claques au visage victime; nez fracturé, geste inhabituel pour défendeur; rapport présentenciel favorable; bon employé; remords.

3. La Reine c. Heeg, [1986] S.J. no 760 (Sask. C.A.)
Sentence: 30 jours de prison.
Accuse âgé 27 ans, 1 antécédent judiciaire non relié à la violence, partie de hockey amateur, coup de bâton, nez fracturé.

4. La Reine c. Price, [1986] B.C.J. no 2645 (B.C.C.C.)
Sentence: 4 mois de prison et probation 1 an.
Accusé a déjà antécédents avec violence, coups de poing et coups de pied en regard de deux victimes; co-accusé a reçu 60 jours de prison, car pas d’antécédent de violence.

5. La Reine c. White, 6 W.C.B. (2d) 271 (N.S.C.T.)
Sentence : 6 mois de prison.

6. La Reine c. Adams, [1988] A.J. no 814 (Alta. C.A.)
Sentence: 4 mois de prison et probation 8 mois.
Accusé âgé 22 ans; blessures victime mais complètement guérie; remords exprimés, victime belle-sœur enceinte 3 mois mais accusé ignorait ce fait, pas d’antécédent judiciaire avec violence.

7. La Reine c. Klaiber, [1988] A.J. no 567 (Alta. C.A.)
Sentence: amende 1 200,00 $.
Accusé sans antécédent avec violence, attaque sans provocation, victime subit dommages à sa dentition et blessure à un oeil; Cour d’appel aurait imposée une longue période d’incarcération si l’accusé avait eu un antécédent avec violence.

8. La Reine c. Ellis, [1991] A.J. no 161 (Alta. C.A.)
Sentence : 1 jour de prison et probation 1 an.
Accusé à la suite de fausses informations reçues de son épouse frappe la victime au visage; victime souffre enflures de la joue, du front et d’une lèvre; également coupure sur le nez et celui-ci brisé; pas antécédent judicaire.

9. La Reine c. Riley, [1991] N.S.J. no 64 (N.S.C.A.)
Sentence : 3 mois de prison.
Accusé a un dossier criminel; incidents arrivent au cours d’une fête; coups de pied; victime souffre nez brisé, oeil tuméfié et a une coupure; sentence aurait dû être plus sévère donc appel ne peut être accueilli.

10. La Reine c. Ludvigson, [1990] B.C.J. no 695 (B.C.C.A.)
Sentence : 6 mois de prison
Accusé 19 ans, co-accusé retenait la victime; il frappe la victime a plusieurs reprises; un antécédent d’introduction par effraction; victime 16 ans; victime a eu nez brisé, les deux yeux tuméfiés; plusieurs coupures au visage et tout son corps a des égratignures dues à sa fuite à travers des arbustes; accusé en probation au moment infraction.

11. La Reine c. Whittaker, [1989] A.N.-B. no 1010 (C.A.N.B.)
Sentence: Temps purgé (18 avril 1989 - 14 novembre 1989) et probation 2 ans.
Accusé âgé 19 ans, 2 antécédents de vol; victime tombée par terre, accusé donne deux coups de poing sur œil. Plaie béante. Sentence 1 an de prison réduite; appel accueilli.

12. La Reine c. Ramsay, [1989] P.E.I.S. no 103 (P.E.I.S.C.)
Sentence: 5 mois de prison et probation 1 an.
Accusé a un antécédent méfait; comportement inhabituel pour accusé; remords exprimés; victime trop ivre pour se battre; victime a souffert plusieurs coupures et égratignures au visage, œil gauche enflé; coups de pied au visage alors que victime est au sol.

13. La Reine c. Zhang, [1992] O.J. no 597 (O.C.J.)
Sentence : Absolution conditionnelle et probation 1 an.
Accusé âgé 20 ans; pas antécédent judiciaire; victime et accusé co-employés; une première escarmouche est survenue entre victime et accusé; accusé a la lèvre fendue; plus tard les parties se rencontrent à nouveau; nouvelle escarmouche; victime subie une longue coupure au-dessus oeil gauche; accusé statut résidant avec visa qui expire en 1992; il étudie anglais, bon étudiant; bon employé; condamnation peut mettre sa présence au Canada en danger; le degré de violence n’est pas élevé.

14. La Reine c. Faubert, [1991] S.J. no 112 (Sask. C.A.)
Sentence : 3 mois de prison et probation 18 mois.
Accusé âgé 27 ans; après partie hockey amateur accusé intoxiqué frappe avec un verre un inconnu; victime a des blessures aux lèvres et à la bouche; victime devra subir chirurgie plastique; nerf atteint insensibilité à une partie du visage victime; accusé bon employé; ivre au moment de l’incident; 2 antécédents juvéniles, l’un pour méfait, l’autre pour vol; 1 antécédent de facultés affaiblies; accusé a remboursé dommages; prise de conscience de ses fautes.

15. La Reine c. Charette, 70 W.C.B. (2d) 74 (N.-B. Q.B.)
Sentence : 1 mois de prison et dédommagement.
Accusé policier, victime agressive, policier frappe victime au visage causant la perte d’un bout de dent; victime demande copie de la vidéo; plus tard policier efface bande vidéo; accusé d’entrave justice également, défendeur se voit imposer 1 an de prison pour l’entrave; accusé a donné sa démission de son emploi.

16. La Reine c. Vitanza, [2005] O.J. no 3173 (O.S.C.J.)
Sentence : Sursis 4 mois et probation 1 an.

17. La Reine c. Wiltshire, [2004] O.J. no 4554 (O.S.C.J.)
Sentence: Absolution inconditionnelle
Appel d’une sentence suspendue avec probation 1 an; circonstances particulières; accusé voit son jeune fils assis avec son ex-conjointe et son ami de cœur à ce moment il y avait des scènes de nu à la télévision; accusé pénètre maison pour retirer son fils de cet endroit; 1 coup de poing donné au visage victime, 2 dents de la victime sont devenues plus mobiles à la suite du coup et la victime a saigné.

18. La Reine c. Myers, 55 W.C.B. (2d) 631 (M.P.Ct.)
Sentence : Sursis de 6 mois.
Accusé plaide coupable; remords; emploi régulier; sous influence alcool lors infraction, infraction se déroule lors d’un événement sportif; victime spectateur; accusé attaque victime avec un groupe d’amis; victime a souffert commotion, des éraflures au visage et diverses coupures; accusé sous cautionnement lors de l’infraction.

19. La Reine c. Wiebe, [2001] S.J. no 498 (S.K.Q.B.)
Sentence: Amende 500,00 $.
Accusé et victime font connaissance dans un camping, ils boivent de l’alcool; à un certain moment accusé fait une prise de tête à la victime qui perd momentanément conscience, sa cheville se brise; victime venait d’être opéré pour cette cheville; victime souffre de douleur au cou et au dos et de façon aiguë à la cheville; demande absolution refusée.

20. La Reine c. Clarke, 158 C.C.C. (3d) 60 (Cour d’appel Terre-Neuve)
Sentence : 3 mois de prison et probation 2 ans.
Accusé possède un antécédent de voies de fait et un d’entrave à un policier; coup de poing au visage victime; victime a dû subir opération d’urgence pour sauver sa vision à l’œil droit; on a inséré des plaques de métal pour sa joue fracturée; il devra y avoir de la chirurgie plastique pour diverses marques au visage; accusé copropriétaire d’un « bar ».

21. La Reine c. Sweeney, [2001] O.J. no 1899 (O. Ct. J.)
Sentence : Absolution conditionnelle et probation 1 an.
Accusé n’a pas antécédent, rapport présentenciel très favorable; aucun risque de récidive, répercussions d’une condamnation sur son travail; accusé donne un coup de poing à la victime; celle-ci tombe au sol; défendeur frappe le défendeur avec son pied à quelques reprises; blessures décrites comme sérieuses mais aucune description détaillée.

22. La Reine c. Hobbs, [1999] N.J. no 194 (Nfld S. Ct.)
Sentence : Amende 700,00 $, probation 1 an et dédommagement.
Accusé plaide coupable, effets d’une condamnation à l’emprisonnement sur son travail pris en compte, accusé frappe victime; celle-ci tombe au sol; accusé donne coups de pied à la figure et autres parties du corps de la victime; coupure nécessitant 7 points de suture au-dessus œil gauche; marques aux bras et au dos victime; attaque non provoquée; il y a lieu de penser que le défendeur n’a pas d’antécédent judiciaire.

23. La Reine c. Jimenez, [1999] O.J. no 1847 (O. Ct. J.)
Sentence : Absolution conditionnelle, probation 6 mois, ordonnance de dédommagement 5 059,01 $.
Accusé âgé 23 ans; statut résident permanent au Canada, déclaration sommaire de culpabilité, acte non représentatif de l’accusé, pas d’antécédent, accusé a donné un coup de poing au visage de la victime; victime femme; accusé marié, a un enfant de 3 ans, carrière prometteuse dans le baseball professionnel; dentition victime nécessitera des traitements, rapport présentenciel très favorable; appel accueilli de la sentence de 8 mois de prison prononcée.

24. La Reine c. Gerbrandt, [1998] S.J. no 828 (S.C.Q.B.)
Sentence : Sentence suspendue, probation 6 mois.
Accusé âgé 18 ans; pas antécédent judiciaire adulte; 3 antécédents juvéniles non reliés; échange de coups avec victime; victime tombe au sol accusé donne alors 3 ou 4 coups de poing; victime mâchoire fracturée; plaidoyer culpabilité, remords; procédures sommaires; accusé sous influence alcool; victime responsable en partie de l’incident; bien que sentence est clémente elle n’est pas déraisonnable.

25. La Reine c. Vandervalle, [1998] O.J. no 5312 (O. Ct. J.)
Sentence : Absolution conditionnelle; probation 1 an avec don 1 000,00 $.
Accusé âgé de 25 ans, pas antécédent judicaire, camionneur, risque sérieux pour son emploi si condamnation car doit faire des transports aux États-unis, provocation de la victime; accusé donne quelques coups de poing au visage victime, la victime a les 2 yeux tuméfiés et le nez enflé.

26. La Reine c. Arpin, [1998] P.E.I.J. no 56 (P.E. I.S. Ct.)
Sentence : Sentence suspendue, probation 1 an.
Accusé âgé 18 ans, pas antécédent judiciaire adulte, dossier criminel juvénile, accusé prend main de la victime et la tord, 1 os de la main est fracturé, Tribunal considère que les actions de la victime ont contribué à l’infraction.

27. La Reine c. Dupont, [1997] B.C.J. no 2018 (B.C.C.A.)
Sentence : Temps purgé (soit environ 6 semaines) et probation 1 an.
Accusé âgé 18 ans; pas antécédent judiciaire; appel d’une sentence de 9 mois de prison et probation 1 an; geste inhabituel pour accusé; beaucoup remords, attaque menée par accusé et ami; l’ami a été particulièrement celui qui a donné des coups, accusé sous influence alcool; victime a souffert fracture orbite d’un œil, trouble temporaire de la vision, nez fracturé, blessure à la mâchoire et 6 dents de brisées.

28. La Reine c. Mackenzie, [1997] N.S.J. no 150 (N.S. S. Ct.)
Sentence : 6 mois de prison.
Appel sentence de sursis de 90 jours, accusé est étudiant, 2 antécédents de violence, victime sépare bataille entre deux femmes; attroupement de 20 personnes autour de ces femmes; la victime quitte pour s’en aller; reçoit bouteille de bière à l’arrière de la tête; victime tombe par terre, le groupe dont fait partie l’accusé tabasse la victime au sol; victime a eu os bas de la jambe fracturé, cheville disloquée, nez brisé, œil tuméfié, blessures aux côtes; victime a encore douleur à la jambe; Tribunal trouve très clémente la demande d’emprisonnement de 4 à 6 mois faite par la couronne; Tribunal considère accusé aussi responsable que toutes les autres personnes qui ont frappé la victime.

29. La Reine c. Curtis, [1996] S.J. no 343 (Sask. C.A.)
Sentence : Sentence suspendue avec probation 2 ans comprenant 30 jours d’emprisonnement à domicile ou sursis de 30 jours avec probation de 2 ans. Le dispositif ne ressort pas clairement de l’arrêt.
Accusé âgé 20 ans; employé temps plein sur ferme; aide son père aux travaux de la ferme; pas antécédent judicaire; aide financièrement son père; aucun détail sur blessure victime; accusé a donné coups de pied alors victime au sol.

30. La Reine c. Carroll, [1995] B.C.J. no 365 (B.C.C.A.)
Sentence : Absolution conditionnelle et probation 6 mois.
Accusé âgé 42 ans, pas antécédent judiciaire, a travaillé dans le domaine de la finance mais est actuellement sans emploi; se cherche du travail dans ce domaine; individu de bon caractère; incident arrive au cours d’une partie de soccer; accusé donne un coup de tête à la victime, ce geste endommage 3 dents; elles n’ont pu être sauvées; condamnation empêcherait accusé de se trouver un emploi dans le domaine de la finance

31. La Reine c. Dasilva, [1995] O.J. no 644 (O. Ct.J.)
Sentence : 3 mois de prison.
Accusé et son père suite à une altercation avec la victime lui donnent plusieurs coups de poing et quelques coups de pied; nature des blessures à la victime sont inconnues à la lecture de l’arrêt; accusé a 2 antécédents pour ne pas s’être conformé à un ordre d’une Cour; il est concierge; rapport présentenciel neutre.

32. La Reine c. Thornington, [1995] B.C.J. no 498 (B.C.C.A.)
Sentence: 90 jours de prison servis de façon discontinue.
Appel d’une sentence de 5 mois de prison, Cour d’appel considère sentence adéquate au moment imposition sauf que nouvelles preuves devant Cour d’appel; accusé croyant qu’une personne a touché à la poitrine de sa fiancée, coups de poing donnés au visage victime, juge a retenu que la cheville brisée est la résultante de la chute de la victime suite aux coups de poing, victime a la cheville brisée, tympan perforé, trouble de vision, nerfs facial endommagé, os de l’orbite écrasé; accusé bon travailleur; fille âgée de 3 ans; suivi un programme sur le contrôle de la colère; épouse malade, petit dossier criminel n’impliquant pas de violence; perdra son emploi si purge une peine de 5 mois de prison; remords.

33. La Reine c. Grant, [1995] A.J. no 148 (Alta C.A.)
Sentence : 1 jour de prison et amende 2 000,00 $.
Accusé est policier; utilise poivre de cayenne sur victime qui est détenue pour infraction facultés affaiblies; accusé ne nettoie pas la victime; victime a souffert temporairement des yeux; plaidoyer culpabilité.

34. La Reine c. Swenson, 91 C.C.C. (3d) 541 (Sask. C.A.)
Sentence : Sentence suspendue, probation 1 an, dédommagement 1 200,00 $.
Accusé «bouncer» dans un bar; pas antécédent; accusé intervient auprès victime dans le cadre de son travail; accusé prend victime par le cou et la gorge et l’entraîne à ’extérieur rendu à cet endroit il la laisse tomber au sol; victime a diverses égratignures au front, des lacérations au front et a perdu 7 dents. Ces dommages semblent être survenus lorsque la victime est tombée au sol; Cour d’appel révise la sentence de 6 mois de prison; Cour remarque que l’accusé agissait dans le cadre de son travail suite à un début de bagarre; Cour prend acte du geste qui a conduit aux blessures.

35. La Reine c. Gallant, [1994] M.J. no 354 (Man. C.A.)
Sentence : 7 mois et probation 1 an.
Appel d’une sentence de 2 ans de prison et probation 2 ans; accusé âgé 21 ans; pas antécédent judiciaire; accusé et 2 amis perçoivent un passant comme étant homosexuel. Il décide de le tabasser; victime est traité comme patient en externe à l’hôpital; l’arrêt ne spécifie pas la nature des blessures subies; remords exprimés, la Cour prend en considération l’âge et l’absence de dossier criminel et révise la sentence.

36. La Reine c. Opekokew [1994] S.J. no 310 (Sask. C.A.)
Sentence: 90 jours de prison discontinus, probation 1 an, dédommagement 2 000,00 $.
Accusé plaide coupable; appel sentence suspendue; accusé a 2 antécédents de voies de fait; la lecture de l’arrêt semble indiquer que l’accusé est membre d’une communauté autochtone, accusé a entrepris régler problème d’alcool, suivi également programme pour contrôler sa colère; incident survient lors partie de hockey; victime est un arbitre; victime expulse accusé; accusé le met en échec au visage avec son bâton, donne également un coup de poing; père de 2 enfants; victime a 2 dents brisées et des coupures mineures; sentence révisée.

37. La Reine c. Cormier [1994] N.S.J. no 150 (N.S.C.A.)
Sentence : 6 mois de prison et probation de 2 ans.
Appel d’une sentence suspendue; accusé âgé 18 ans; plaidoyer culpabilité pas d’antécédent judiciaire; support famille de son amie de coeur; accusé avec 2 amis dans un autobus commettent un méfait; victime leur dit d’avoir du respect pour les gens et de ne pas briser propriété publique; victime est de petite taille, accusé grande taille ainsi que ses amies; le groupe commence à importuner la victime; celle-ci quitte l’autobus; le groupe le suit; victime demande à être laissée tranquille, ami frappe victime; victime perd ses lunettes; amis poussent victime avec leur pied; accusé donne coup de poing sur côté visage victime; amis frappent encore la victime; une dame se porte au secours victime; victime a eu le nez fracturé, les 2 yeux tuméfiés et des maux de tête; geste inhabituel pour accusé; sentence révisée.

38. La Reine c. Dayle, [1993] P.E.I.J. no 66 (P.E.I. C.A.)
Sentence : 5 mois de prison, probation 18 mois, dédommagement de 1 000,00 $.
Accusé âgé 37 ans, plaidoyer de culpabilité, pas antécédent judiciaire; accusé assume sa responsabilité, victime est une femme qui travaille dans un autre magasin d’un centre d’achat où l’accusé travaille; incident se déroule dans le stationnement; accusé étrangle victime par l’arrière et par la suite lui donne 4 à 5 coups de poing dans la région du visage; victime a souffert d’un nez fracturé, d’hématomes au-dessus du nez, sous son oeil gauche et sur le menton; elle a également eu une côte brisée.

39. La Reine c. Dunne, [1993] A.J. no 193 (Alta. C.A.)
Sentence : 90 jours de prison à purger de façon discontinue.
Accusé membre des Forces Armées; prend taxi avec des amis; le chauffeur demande au groupe de sortir car interdit de fumer; alors chauffeur met son bras à l’arrière pour faire signe de sortir; accusé tire sur le bras; par la suite accusé menace verbalement le chauffeur; victime souffre épaule disloquée; accusé a démissionné des Fores Armées; pas antécédent judiciaire.

40. La Reine c. Hrehirchuk, [1992] M.J. no 430 (Man. C.A.)
Sentence: Amende 500,00 $, probation 6 mois, dédommagement 200,00 $.
Accusé joueur hockey junior; jeune; pas antécédent judiciaire, bonne réputation dans la communauté; incident se déroule au cours de la partie au moment où des bagarres éclatent; accusé et un co-équipier s’en prennent au gardien adverse; victime a eu 2 yeux tuméfiés et a perdu ses verres de contact; plaidoyer culpabilité.

41. La Reine c. Weare, [2004] O.J. no 2678 (O.S. Ct. J.)
Sentence: 30 jours de prison à être servis de façon discontinue.
Accusé pas antécédent; rapport présentenciel favorable; incident se déroule près d’une table de billard; le juge du procès a crédité le défendeur pour sa détention préventive, pas de détails sur les blessures de la victime.

42. La Reine c. Fazlic, [2007] M.J. no 148 (Man. P. Ct.)
Sentence: Amende de 800,00 $ et probation 18 mois.
Accusé âgé 21 ans; pas antécédent judiciaire; plaidoyer culpabilité; support familial, sous l’effet de l’alcool; accusé expulsé d’un bar, sans raison il donne un coup de poing à la figure d’un passant; celui-ci a le nez fracturé; accusé a un emploi stable; remords exprimés; action inhabituelle chez le défendeur.

dimanche 24 janvier 2010

Détermination de la peine pour possession de cocaïne en vue d'en faire le trafic

R. c. Desbiens, 2001 CanLII 20896 (QC C.Q.)

[18] Outre l'arrêt Proulx, la défense invoque certaines autorités:

a) La Reine c. Prokos: La Cour d'appel, majoritairement, confirme l'imposition d'une peine d'emprisonnement dans la collectivité de 23 mois pour des infractions de trafic et de possession pour fins de trafic d'héroïne.

b) La Reine c. Dionne: Un individu a plaidé coupable à diverses accusations de possession de stupéfiants pour fin de trafic et de trafic, pour une valeur d'environ 21 000 $. Le juge Vaillancourt le condamne à une peine dans la collectivité de 24 mois moins un jour.

c) La Reine c. Vamvas: La Cour d'appel impose une peine dans la collectivité de 12 mois à un individu coupable d'avoir fait le trafic de 3.1 grammes de cocaïne.

d) La Reine c. Borges: La juge de première instance avait infligé une peine de 30 mois pour importation de 1 214 grammes de cocaïne et pour complot à cette fin. La Cour d'appel infirme ce jugement et impose une peine de deux ans moins un jour avec sursis.
LA POURSUITE

[19] La poursuite, quant à elle propose une peine fédérale de 36 mois. Dans la mesure où le Tribunal conclurait à une sanction inférieure à 24 mois, une détention ferme s'impose. Voici pourquoi:

a) M. Desbiens avait en sa possession une quantité importante de cocaïne, évaluée sur le marché à environ 28 000 $.

b) L'accusé a opéré des changements importants dans sa vie en 1992, donc bien avant la commission de la présente infraction.

c) Il a agi uniquement pour des raisons financières, ce qui constitue une circonstance aggravante.

d) Le geste posé en avril 1999 était pleinement réfléchi et M. Desbiens doit assumer les conséquences de ses choix.

e) La cocaïne représente un fléau social et les tribunaux doivent envoyer un message clair à la société.

f) Les objectifs de dénonciation et de dissuasion prévus à l'article 718 du Code criminel doivent en conséquence l’emporter.

[20] En plus de proposer son interprétation de l'arrêt Proulx, la poursuite appuie son argumentation sur les autorités suivantes:

a) La Reine c. Smith: La Cour suprême établit le principe que les non-utilisateurs insensibles méritent de longues peine d'incarcération.

b) La Reine c. Dorvilus: La Cour d'appel maintient une peine ferme de deux ans moins un jour pour deux transactions de crack.

c) La Reine c. Blagrove: La Cour d'appel augmente à trente mois la peine pour divers trafics de crack.

d) La Reine c. Girard: La Cour d'appel augmente à 42 mois la peine pour divers trafics de cocaïne et possession de plus de trente grammes. La Cour mentionne que le seul fait d'avoir un emploi ne milite pas en faveur de la clémence.

e) La Reine c. Cohen: Après avoir été trouvé coupable de possession pour fins de trafic d'héroïne, de cocaïne et de crack, un prévenu est condamné à trois ans de pénitencier.

f) La Reine c. Stanislaus: L'accusé a été condamné à une peine de quinze mois ferme suite à un trafic de crack et à une possession pour fins de trafic. La Cour d'appel refuse de substituer une peine dans la collectivité.

g) La Reine c. Tremblay: Pour avoir conspiré en vue de vendre de la cocaïne et avoir vendu .44 grammes, un individu est condamné à 36 mois par la Cour d'appel, infirmant ainsi une peine de 18 mois dans la collectivité.

Détermination de la peine dans les cas d'infractions reliées au trafic de cocaïne-base (Crack)

R. c. Leduc, 2009 QCCQ 3582 (CanLII)

[17] Il y a déjà très longtemps, notre Cour d'appel a expliqué, sans détour, les dangers sociaux entourant le trafic de cocaïne-base qui demeure d'une part, une drogue bon marché à la portée de tous et d'autre part, une drogue aux effets néfastes chez les individus qui en consomment et chez ceux qui, une fois dépendants, en manquent.

[18] C'était dans l'arrêt Dorvilus où le juge Baudouin confirmait une peine de 2 ans moins un jour d'emprisonnement pour deux ventes de quatre roches à un agent double, le tout dans le contexte d'un « crack house » que l’accusé tenait avec une complice, ce qui faisait l'objet d'un troisième chef d'accusation. Dorvilius était âgé de 34 ans, marié et père de quatre enfants. Il était lui-même consommateur de marihuana et de cocaïne. Il n'avait pas d'antécédent judiciaire. Le juge Proulx aurait pour sa part diminué la peine à une année étant donné que Dorvilius était lui-même consommateur. Notre Cour d'appel a continué de tracer la voie dans l'arrêt Blagrove où elle a reconnu que les trafiquants opérant à des fins de lucre méritaient des peines de détention sévères.

[19] Cela étant, plusieurs décisions de la Cour d'appel du Québec citées pour appuyer le caractère avant tout dissuasif de la peine, traitent de cas où le trafic de stupéfiants possède l'une ou l'autre ou une combinaison des caractéristiques suivantes : appât du gain, activités répétées, quantité importante, groupe organisé, individu fortement criminalisé.

[20] Un juge ne peut pas ignorer ces messages clairs de notre Cour d'appel. Il faut se méfier toutefois d'y voir une incitation à infliger des peines d'emprisonnement minimal et continu puisque la peine doit être avant tout individualisée. Le juge Lamer écrivait :

… La détermination de la peine est un processus intrinsèquement individualisé, et la recherche d'une peine appropriée applicable à tous les délinquants similaires, pour des crimes similaires, sera souvent un exercice stérile et théorique. De même, il faut s'attendre que les peines infligées pour une infraction donnée varient jusqu'à un certain point dans les différentes communautés et régions du pays, car la combinaison «juste et appropriée» des divers objectifs reconnus de la détermination de la peine dépendra des besoins de la communauté où le crime est survenu et des conditions qui y règnent. …

[21] Notre Cour d'appel a encore récemment rappelé que la théorie du point de départ contrevient au principe bien ancré de l'individualisation de la peine. Plus spécifiquement dans l'arrêt R. c. Prokos, la juge Rousseau-Houle écrivait :

L'individualisation de la sentence demeure un principe fondamental de la détermination de la peine. À l'égard d'infractions relatives aux stupéfiants, le système de détermination de la peine ne peut se fonder exclusivement sur la dissuasion sociale et la dénonciation de la gravité des infractions. La détermination de la peine doit être modulée et individualisée.

[22] Le juge LeBel, dissident, était d'opinion de modifier la peine d'emprisonnement avec sursis pour une peine d'emprisonnement ferme. Il notait ce qui suit :

… Un revendeur comme lui [Prokos] constitue un élément nécessaire d'une chaîne de revente d'héroïne.

Par ailleurs, l'absence de dossier criminel antérieur ne constitue pas en soi un obstacle à l'imposition d'une peine d'emprisonnement, dans le cas de trafic de stupéfiants, lorsque l'ensemble des circonstances de l'affaire l'exige. Dans le présent cas, le caractère commercial, continu et organisé du trafic, la connaissance par l'appelant de la substance qu'il vendait et la continuation de ses opérations une fois cette connaissance acquise, rendent la peine non indiquée. En effet, elle ne respecte pas suffisamment les impératifs de dénonciation et de dissuasion générale à l'égard de ce type d'infraction.

[23] La même année, notre Cour d'appel dans l'arrêt R. c. Stanislaus, rappelant notamment les principes des arrêts R. c. Blagrove, R. c. Dorvilus et R. c. Farfan a confirmé une peine de 15 mois pour un trafic de crack (3 g) et une possession en vue de trafic (3 roches). En appel, Stanislaus recherchait l'emprisonnement dans la collectivité en invoquant notamment son profil et ses acquis sociaux. En rejetant l'appel, la Cour écrit:

Appellant appeals from that sentence invoking: his lack of prior criminal convictions; his age at the time of the offence, 20; his successful rehabilition since the conviction by following a university program, engaging in community activities, and maintaining a part-time job; and that the trial judge failed to consider these and other relevant factors in imposing the sentence.

[…]

Considering that at the time he committed the offences, Appellant was a member of a community drug distribution network; that he was a non-user who admitted engaging in the crimes strictly for economic gains; the particular narcotic involved, cocaine base (crack); and the principles established in our judgments in R. v. Blagrove, C.A.Q. 500-10-000582-963, August 30, 1996; Dorvilus v. R., C.A.Q. 500-10-000111-904, July 4, 1990; Farfan v. R., C.A.Q. 500-10-000369-957, January 22, 1996.

[24] S'il est vrai que le juge bénéficie d'un pouvoir discrétionnaire considérable, ce dernier doit être exercé judiciairement, c'est-à-dire en fonction des faits, mais aussi du droit applicable.

[25] Comme la fait remarquer le procureur des accusés, citant le juge Tessier dans l'arrêt R. c. Camillucie, il n'existe pas de règle mathématique précise entre les quantités et la peine, bien que ce facteur soit néanmoins un considérant dans le processus de déterminer une peine adéquate et juste.

[26] Il plaide que MM. Leduc et Montreuil peuvent bénéficier de l'emprisonnement avec sursis. Rappelons qu'il faut d'abord que les infractions ne soient pas exclues par l'article 742.1 du Code et c'est le cas ici. Le juge doit ensuite déterminer si une peine d'emprisonnement de moins de deux ans est indiquée, c'est-à-dire qu'il doit déterminer s'il y a lieu d'écarter les mesures probatoires et l'emprisonnement dans un pénitencier. Au surplus, le sursis ne doit pas mettre en danger la sécurité de la communauté, un risque qu'il faut évaluer à la lumière des conditions éventuelles de l’ordonnance de sursis. Puis une fois ce risque maîtrisé autant que possible, la gravité du préjudice susceptible d’être causé par une récidive, doit être soupesé. Enfin, l'ordonnance d'emprisonnement avec sursis doit être conforme à l'objectif et aux principes de la détermination de la peine énoncés au Code criminel[12]. Dans l'arrêt R. c. Proulx, feu le juge Lamer rappelait qu'aucune des parties n'a formellement la charge de prouver que l'emprisonnement avec sursis est indiqué ou non, mais qu'en pratique, le délinquant est généralement celui qui est le mieux placé pour convaincre le juge. Enfin, il soulignait qu' « il serait à la fois inutile et peu avisé que les tribunaux créent des présomptions d'inapplicabilité du sursis à l'emprisonnement à certaines infractions.»

[27] Il est indéniable que le trafic de cocaïne-base ou la possession en vue d'en faire le trafic n'excluent pas, dans les cas appropriés, le recours à l'emprisonnement avec sursis. Même s'il est faux de prétendre qu'il s'agit d'une peine exceptionnelle, elle demeure l'exception parmi l'abondante jurisprudence soumise par les parties

Le dédommagement à la victime doit toujours être envisagé lors de la détermination de la peine

Il incombe à la défense de préciser ses demandes de communication de la preuve supplémentaires et cela doit être fait en temps opportun

R. v. Atwell, 2022 NSSC 304 Lien vers la décision [ 8 ]              The Crown has a duty to make disclosure of all relevant information to ...