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vendredi 19 février 2010

Peines appropriées dans différents cas d'homicide involontaire coupable

R. c. Caron, 2009 QCCS 5837 (CanLII)

[39] Voici quelques illustrations de ce qu'ont pu décider, récemment, nos tribunaux, en regard des peines appropriées dans différents cas d'homicide involontaire coupable :

▪ R. c. Billings, [2004] B.C.J. (Quicklaw) no 1031 (B.C.S.C.).

Sans antécédent judiciaire, le délinquant a étranglé son vendeur de drogue. Âgé de 25 ans, il était devenu dépendant des drogues. L'homicide involontaire qu'il a commis se rapprochait du meurtre. Il a été condamné à six ans de pénitencier.

▪ R. c. Leaf, [2004] O.J. (Quicklaw) no 1692 (O.S.C.J.).

Possédant des antécédents judiciaires de conduite avec facultés affaiblies et de conduite dangereuse, il procédait à commettre un vol qualifié lorsque la victime a été tuée. Il a plaidé coupable à l'infraction qu'on lui reprochait et affirmait n'avoir pas eu l'intention d'utiliser l'arme à feu. Il a coopéré avec les policiers et a reconnu l'entière responsabilité de ses actes. Il était affecté par un problème sérieux de consommation de drogue et d'alcool. La peine a été fixée à douze ans d'emprisonnement.

▪ R. c. Whitteker, [2004] O.J. (Quicklaw) no 1415 (O.S.C.J.).

Le coup de poing qu'elle a donné à son époux a causé sa mort. Elle était alors intoxiquée par l'alcool, dans un état de dépression et sous l'effet des médicaments. Elle a bénéficié d'une peine d'emprisonnement avec sursis au sein de la collectivité d'une durée de deux ans moins un jour assortie d'une ordonnance de probation de trois ans.

▪ R. c. Dadgar, [2004] J.Q. (Quicklaw) no 5702 (C.A.).

Le délinquant a poignardé son épouse à soixante reprises. Le crime a été perpétré dans des circonstances d'extrême violence. Le délinquant représentait un degré élevé de dangerosité compte tenu de la schizophrénie dont il était affligé. Il a été condamné à une peine d'emprisonnement de vingt ans.

▪ R. c. Eliason, [2003] B.C.J. (Quicklaw) no 2780 (B.C.S.C.).

La victime est décédée à la suite d'une violente bagarre. L'accusé âgé de 37 ans était un homme violent faisant un usage excessif de l'alcool et des drogues. Il n'a démontré aucun signe d'une volonté réelle de se réhabiliter. La peine a été fixée à sept ans d'emprisonnement.

▪ R. c. T.J.N., [2004] B.C.J. (Quicklaw) no 1341 (B.C.C.A.).

La victime cohabitait avec l'accusé. Elle est morte par strangulation. Âgé de 20 ans, le délinquant en était à sa première offense. Il a plaidé coupable et sa situation ne révélait aucun autre cas de violence. La peine a été fixée à huit ans et demi d'emprisonnement.

▪ R. c. E.H., [2004] B.C.J. (Quicklaw) no 1486(B.C.S.C.).

La victime a été battue par les deux accusés. On voulait lui donner une leçon. La victime était sous l'effet des drogues, plus faible que les deux attaquants et était incapable de se défendre. La victime avait des problèmes de drogue et avait d'une certaine façon provoqué l'attaque. L'accusé qui avait des problèmes d'alcool a admis l'entière responsabilité de ses actes et a vu la peine prononcée contre lui à huit années d'emprisonnement.

▪ R. c. B.D., [2004] A.N.-B. (Quicklaw) no 468 (C.B.R.N.-B.).

La victime était âgée de 20 ans et a été tuée par balle. L'accusé était sous l'influence de l'alcool et de la drogue et présentait certains problèmes de comportement. Bien qu'il ait admis sa responsabilité et qu'il ait plaidé coupable, la Cour avait des doutes sur la sincérité de ses remords. Il a été condamné à une peine d'emprisonnement de huit ans.

▪ R. c. LaFantaisie, [2004] A.J. (Quicklaw) no 691 (A.P.C.).

Ce délinquant a étranglé sa mère. Il a ensuite placé le corps de celle-ci dans des sacs de plastique qu'il a cachés dans une garde-robe au sous-sol de la résidence. Deux semaines plus tard il a avisé la police de la situation. Il a manifesté certains remords tout en imputant la responsabilité de son acte à l'usage de l'alcool et des drogues. La peine qui a été dans ce cas trouvée adéquate était une peine d'emprisonnement de huit ans.

[40] La Cour d'appel du Québec confirmait récemment, une peine d'emprisonnement de huit ans pour un individu trouvé coupable d'homicide involontaire coupable. Il avait étouffé sa victime à l'occasion d'une chicane relative à sa conjointe.

[41] D'autres décisions ont été rendues plus récemment. À titre d'illustration, en voici quelques-unes :

▪ R. c. Langlais, 2007 QCCS 3361 (CanLII), [2007] J.Q. no 7391, 2007 QCCS 3361.

Langlais a causé la mort de Gagnon en utilisant une arme à feu. Il hébergeait la victime temporairement. Sous l'effet des drogues, la victime a eu un comportement bizarre, en insultant sa femme, en le poussant, en menaçant de le frapper, et a même lancé différents objets en sa direction. Voulant faire peur à la victime, Langlais a choisi d'aller chercher un fusil. Voyant l'agressivité de la victime, Langlais a décidé de prendre des munitions. La victime a empoigné le bout du canon du fusil et, pendant l'altercation, le coup de feu est parti. Langlais avait de nombreux antécédents judiciaires et le rapport pré-décisionnel lui était défavorable. En précisant qu'un verdict de culpabilité à un homicide involontaire avec usage d'une arme à feu emporte une privation importante de la liberté, monsieur le juge Moulin, de cette Cour, a privilégié des facteurs de dénonciation et de dissuasion. Langlais a été condamné à une peine de neuf ans d'emprisonnement de laquelle a été déduite la période de sa détention provisoire.

▪ R. c. Macryllos, 2007 QCCS 4541 (CanLII), [2007] J.Q. no. 11430, 2007 QCCS 4541.

À la suite d'une altercation, Macryllos est coupé à la main avec un couteau par la victime. Macryllos a pris possession du couteau et a donné une quarantaine de coups à la victime qui en est décédée. Le délinquant a plaidé coupable à un homicide involontaire coupable. Il n'avait aucun antécédent judiciaire. Macryllos et la poursuite ont suggéré une peine de quatorze ans et demi d'emprisonnement. Reconnaissant qu'il s'agissait là d'un quasi-meurtre, notre collègue madame la juge Cohen a accepté la recommandation commune et a fixé la peine à quatorze ans et demi de détention.

▪ R. c. Ellis, 2007 QCCS 5719 (CanLII), [2007] J.Q. no 13731, 2007 QCCS 5719.

À la suite d'une dispute avec la victime, Ellis l'a poignardée à plusieurs reprises. Ellis a témoigné en disant qu'il n'avait pas voulu tuer la victime et que son geste résultait d'une mauvaise réaction provoquée par la peur. Ellis était âgé de 63 ans. Considérant que l'homicide involontaire, dans ce cas, se rapprochait plus de l'accident que du meurtre, monsieur le juge Zigman, de cette Cour, a prononcé une peine de huit ans d'emprisonnement.

▪ R. c. Laplante, 2008 QCCS 13 (CanLII), [2008] J.Q. no 42, 2008 QCCS 13.

À l'occasion d'une transaction de drogue, Laplante et Helgen se rendent à l'endroit prévu où l'attendait la victime. La transaction a mal viré. Lefebvre a sorti une arme et l'a pointée vers Helgen. Laplante a sauté sur Lefebvre qui a déchargé son arme à feu sur Helgen. Helgen a ensuite tiré sur Lefebvre, qui est décédé presque instantanément. Laplante, âgé de 28 ans, a des antécédents judiciaires impliquant la violence. Helgen est condamné à sept ans d'emprisonnement et Laplante à six ans, les dix-huit mois de détention provisoire ayant été pris en compte. Le juge Martin, de notre Cour, mentionne que :

« (…) Il y avait cependant un comportement, même amateur jusqu’à un certain point, qui faisait fi de la sécurité, non seulement des acteurs principaux mais celle des autres personnes présentes. Les conséquences étaient tout à fait prévisibles. »

▪ R. c. Escamilla, 2008 QCCS 2005 (CanLII), [2008] J.Q. no 4143, 2008 QCCS 2005.

Les événements sont survenus dans un contexte de transaction liée au trafic de drogue. Espinosa et Hueman devaient vendre de la drogue à Escamilla, pour une somme de 15 000 $. Après avoir encaissé l'argent, Espinosa et Hueman n'ont jamais donné la drogue à Escamilla. Quelques semaines après la transaction, Escamilla les a retrouvés et a tiré sur eux. Il plaide que son intention était d'envoyer un message clair aux victimes qu'il voulait son argent. Il voulait seulement leur faire peur, non les blesser, encore moins les tuer. Les antécédents judiciaires d'Escamilla sont nombreux et concernent des infractions de vols, de voies de faits et de possession d'arme prohibée. La poursuite réclame une peine de pénitencier de quinze ans alors que la défense considère qu'une sentence d'incarcération de 10 ans moins le temps passé en détention préventive est une sentence juste dans les circonstances. Notre collègue, madame la juge Bourque, a estimé que la peine appropriée était une peine de treize ans d'emprisonnement dont on devait soustraire trente mois de détention provisoire.

▪ R. c. Tremblay, 2008 QCCS 5923 (CanLII), [2008] J.Q. no 13065, 2008 QCCS 5923.

Tremblay s'était rendu à Montréal, muni d'une arme à feu, pour compléter une transaction de stupéfiants. La transaction n'a pas été complétée car la victime, Séguin, a plutôt choisi de lui voler l'argent qu'il lui avait demandé d'amener avec lui pour acheter le cannabis. Séguin a sorti une arme à feu pour la pointer vers Tremblay qui lui a donné un coup sur le bras et une balle a été tirée dans la jambe de Tremblay. Profitant du fait que l'arme de Séguin s'était enrayée, Tremblay, qui croyait pour sa vie, a utilisé sa propre arme, tirant à deux reprises sur Séguin. Tremblay est un père de famille qui a la garde partagée d'une petite fille de 2 ans. Il est charpentier-menuisier à l'emploi d'un entrepreneur de sa région. Il se décrit comme une victime dans un contexte de légitime défense. Il a été incarcéré en détention préventive durant quatre mois. Les antécédents de Tremblay sont mineurs et il n'y a aucune information concernant une implication criminelle depuis sa remise en liberté. La défense suggère le sursis d'emprisonnement et la poursuite réclame l'imposition d'une peine de sept ans. Monsieur le juge Cournoyer, de cette Cour, y écrit, entre autres :

« [51] Une peine sévère doit être imposée en raison de la dénonciation nécessaire, de l'exigence de dissuasion générale et spécifique, de même qu'en raison de la gravité de l’infraction et du degré de responsabilité de M. Tremblay.

[52] Une peine sévère est nécessaire en vertu du principe de l'harmonisation des peines en semblables matières. Il faut se rappeler que la peine qu'impose le Tribunal ne doit pas s'écarter « de façon marquée et substantielle des peines qui sont habituellement infligées à des délinquants similaires ayant commis des crimes similaires ». »

Il conclut qu'une peine de six ans d'emprisonnement doit être imposée, de laquelle il déduit la période de détention provisoire, laissant une période d'emprisonnement de cinq ans et quatre mois.

[42] Les procureurs de l'accusé ont soumis quelques décisions que nous avons aussi considérées :

▪ R. c. Mazzara, 2009 QCCS 836 (CanLII), 2009 QCCS 836 (CanLII).

Cette affaire illustre un cas de rage au volant. Excédé par l'attitude de la victime qui lui avait préalablement bloqué le chemin dans le stationnement d'un restaurant, l'accusé était sorti de son véhicule et avait utilisé un bâton de baseball pour frapper la victime qui est décédée des coups qui lui ont été portés et qui avaient provoqué de sérieuses fractures. L'accusé était gradué de l'université et avait vécu dans une famille qui supportait de bonnes valeurs. Il n'avait aucun passé d'utilisation de drogue non plus que d'abus d'alcool et ne possédait aucun antécédent judiciaire. Notre collègue, madame la juge Charbonneau, a considéré qu'une peine de quatre ans et demi d'emprisonnement de laquelle il fallait déduire une détention préventive de six mois était, dans les circonstances, une peine appropriée.

▪ R. c. Blanchard, 1992 CanLII 3744 (QC C.A.), 1992 CanLII 3744 (QC C.A.).

À l'occasion d'un vol de dépanneur, Blanchard utilise une arme à feu. À la suite d'un faux mouvement, un coup de feu est tiré presque accidentellement. Blanchard était âgé de 26 ans et ne possédait aucun antécédent judiciaire. La Cour d'appel a accepté de réduire la peine de quinze ans qui avait été imposée à une période de cinq ans d'emprisonnement. La Cour d'appel mentionne que :

« (…) On peut constater que deux des quatre principes sont satisfaits par la conduite de l'accusé pendant les sept années précédant son procès. En effet, le besoin de protection de la société ne requiert pas une mise à l'écart et, en second lieu, sa réhabilitation est, sinon accomplie, du moins aussi près qu'on puisse imaginer du but recherché par une sentence. »

▪ R. c. Laroche, 415-01-008489-013, 11 février 2003.

Cette affaire expose la situation malheureuse où un jeune homme, confronté à de multiples problèmes existentiels, en est venu, exaspéré en raison des injures répétées et outrancières de son père, à décharger une arme à feu sur lui. Notre collègue, monsieur le juge Grenier, a accepté la suggestion commune des parties et a fixé la peine à une période d'emprisonnement de six ans.

▪ R. c. Quévillon, 1999 CanLII 13599 (QC C.A.), 1999 CanLII 13599 (QC C.A.).

Dans cette affaire particulière où la victime est décédée après avoir été happée par le véhicule conduit par Quévillon, et traînée sur plus de 28 kilomètres, notre Cour d'appel a réduit à cinq ans la peine d'emprisonnement qui avait été fixée à dix ans par le juge du procès.

[43] Toutes ces décisions étant ainsi exposées, il faut retenir qu'un délinquant verra sa peine fixée en considérant qu'il a droit à une peine similaire à celles qui ont été imposées dans des circonstances similaires, chaque cas étant, toutefois, un cas d'espèce.

Les précédents dans le cadre de la détermination de la peine relativement à une condamnation pour voies de fait grave

R. c. Lebrun, 2008 QCCQ 8927 (CanLII)

[20] Dans l'affaire Dany Rioux, notre Cour d'appel fixe à cinq ans et quatre mois la peine à un accusé sans antécédent judiciaire qui avait plaidé coupable à une accusation de voies de fait graves occasionnant à la victime de sévères blessures entraînant un mois dans le coma, et nécessitant deux mois d'hospitalisation. Le geste n'était ni prémédité, ni planifié.

[21] Dans cette décision, la Cour réfère à certaines décisions, notamment l'affaire Allard. Âgé de 18 ans au moment des événements, l'accusé a été reconnu coupable de tentative de meurtre sur deux personnes qui avaient voulu intervenir afin de faire cesser une bagarre à l'extérieur d'un bar aux petites heures du matin. L'attaque avec un couteau avait entraîné des blessures graves surtout chez l'une des victimes qui avait eu besoin de traitements prolongés en psychiatrie, et subi la perte d'un rein et des séquelles physiques permanentes à la victime. La Cour d'appel avait cassé le verdict de culpabilité quant aux deux chefs de tentative de meurtre, et réduit de neuf à cinq ans la peine imposée en déclarant Allard coupable de voies de fait graves.

[22] On fait aussi allusion à la décision Jackson. Est confirmée alors une peine de cinq ans de pénitencier après la tenue d'un procès où l'accusé est reconnu coupable de voies de fait graves. L'incident s'était produit à la sortie d'un bar, et l'accusé s'était servi d'un couteau.

[23] Le 15 août dernier, la juge Marie-France Bich de notre Cour d'appel écrivait : "En matière de voies de fait graves, sans usage d'une automobile, la fourchette des peines, qui va là encore de la sentence suspendue à l'incarcération, est assez vaste mais la jurisprudence n'est pas avare d'affaires où des peines de 3 à 5 ans sont imposées". Était alors confirmée une peine de cinq ans de détention à un individu qui intentionnellement avait foncé par deux fois, avec sa voiture, sur un abribus où se trouvaient les victimes. L'une d'entre elles avait été grièvement blessée, une autre assez gravement, deux dernières ayant subi des blessures plus légères.

[24] Le plus haut tribunal du pays nous répétera récemment que nous devons ''pondérer les principes normatifs prévus par le législateur aux art. 718, 718.1 et 718.2 du Code criminel.'' On rappelle aussi aux tribunaux de première instance que ''l'objectif premier d'une peine de prison demeure le châtiment bien que sa durée soit tempérée par plusieurs facteurs dont la gravité de l'infraction, le niveau de responsabilité du délinquant, le principe de la parité, et la possibilité d'une sanction moins contraignante.''

[25] Nous avons imposé une peine de six ans de détention à un individu qui, par jalousie, avait battu un jeune homme de 25 ans dormant dans sa résidence. La victime restera handicapée le reste de ses jours, mais est aujourd'hui lucide, et son état peut laisser place à amélioration. Les procureurs nous ont cité dans leurs plaidoiries respectives plusieurs autres décisions que nous résumons en annexe.

Peine - possession de 9,7 gr de pot et 0,33 gr de cocaïne - Absolution rejetée par le juge alors qu'il s'agissait d'une suggestion commune

R. c. Roy, 2009 QCCQ 1175 (CanLII)

[1] Adam Roy a plaidé coupable devant moi à deux accusations : possession de 9,7 gr de marijuana et 0,33 gr de cocaïne.

[4] Les procureurs, par voie de suggestion commune, me demandent de le libérer inconditionnellement.

[5] L’accusé a déjà versé ou s'apprêtait à verser au greffe une somme de 100 $ pour une œuvre charitable.

[6] Pour obtenir cette libération, le procureur de l’accusé invoque que son client a à peine 18 ans (il en avait 19 ½ lors de l'arrestation), qu’il est sans antécédents judiciaires, qu’il aura un casier judiciaire si le Tribunal le déclare coupable et que s’il avait été arrêté (1 ½ an) plus tôt, il n'aurait pas eu... de dossier!

[7] Le Tribunal s’est d’abord montré peu ou pas enclin à suivre cette recommandation suggérant même aux procureurs de lui fournir d’autres motifs, d’élaborer davantage.

[22] Outre la possession de marijuana, il y a également possession d'une petite quantité de drogue dure : cocaïne. Cette drogue, qui crée une dépendance et qui est dispendieuse, est susceptible de se retrouver dans l'organisme d'un conducteur de machinerie lourde.

[23] Cette drogue, ne pousse pas sur le rebord d'une fenêtre comme la marijuana. C'est cette drogue qui entretient la guerre en Colombie depuis ô combien d’années, qui est à l'origine de milliers de morts au Mexique et qui incite ceux qui s'y adonnent à voler, à défoncer pour satisfaire leurs besoins, sans compter la violence qu'elle génère au Canada.

[24] Je ne peux passer sous silence les arrestations de 60 personnes reliées au trafic de stupéfiants au cours de la semaine dernière. Je considère que ces faits sont de connaissance judiciaire. Le temps où seuls ceux qui savaient lire étaient informés est révolu.

[25] Pour un vendeur, souvent associé à un gang de rue ou à un groupe criminel, un jeune homme de 19 ans qui commence à travailler est un terrain fertile.

[26] Banaliser la consommation, c'est promouvoir la vente et la distribution.

[27] Quel message le prononcé d'une libération inconditionnelle véhiculera chez les amis de l'accusé? « C’pas grave! Il a versé 100 $ à une œuvre charitable. Il n'aura pas de casier judiciaire. »

[28] Quel message véhiculera une décision de cette nature auprès d'un public bien informé? Quelle incidence aura une telle décision sur l'image de la justice? Poser la question, c'est y répondre!

[29] Cet énoncé ne signifie pas qu’une absolution totale ne doit jamais être prononcée dans un cas de possession de cocaïne.

[30] Il appartient cependant à l'accusé de démontrer que la sentence imposée entraînera un casier judiciaire qui, eu égard à la gravité de l’offense commise, aura des conséquences négatives disproportionnées.

[31] Cette preuve n'a pas été apportée.

[32] condamne Adam ROY à verser une amende de 50 $ sur le chef de possession de marijuana et de 250 $ pour la possession de cocaïne; sans frais et sans suramende;

L'impact de l'ampleur de la couverture médiatique dans le cadre de la détermination de la peine - Avocat condamné (facteur aggravant)

R. c. Dumont, 2008 QCCQ 9625 (CanLII)

[105] Par surcroît, la comparution médiatisée de l'accusé, sa perte d'emploi, de prestige et la période difficile qui s'ensuit sont de nature à dissuader quiconque d'abuser de son statut de personne affectée à l'administration de la justice ou à un poste de responsabilité.

[106] L'exemplarité est par le fait même atteinte en l'occurrence, bien qu'elle ne doit pas faire obstacle à l'application d'une absolution lorsque l'accusé rencontre les critères requis. Il ne faut pas perdre de vue que chaque cas doit être discuté à son mérite, dans le respect de l'individualisation des sentences et de la juste proportionnalité entre la faute commise et la peine qui en découle.

[107] Quant à l'ampleur de la couverture médiatique en l'espèce, la Cour réfère au propos du juge Béliveau dans l'affaire Rozon :

Par. 73 « On pourrait donc considérer que dans la mesure où le crime reproché en l'espèce est « relativement mineur et non prémédité », l'ampleur de la couverture médiatique, plus particulièrement celle qui a été irresponsable, a contribué à punir(sic) l'appelant plus sévèrement qu'un autre individu. Si ce dernier n'avait pas été Gilbert Rozon, l'affaire n'aurait évidemment reçu aucune publicité ».

Par. 74 « Mais plus fondamentalement, le soussigné considère qu'il faut tenir compte du stigmate indélébile que cette couverture a infligé à l'appelant et de la dénonciation dans le public de l'infraction qu'il a commise. »

[135] À cette décision, le Tribunal doit citer les propos de l'honorable juge Claire l'Heureux-Dubé alors qu'elle siégeait à la Cour d'appel et qui sont repris par l'honorable juge Bastarache de la Cour Suprême :

« 34 Enfin, lorsque le délinquant est un avocat, les juges doivent déterminer scrupuleusement la peine, de manière à dissiper toute crainte de partialité. Les avocats doivent non seulement être traités de la même manière que toute autre personne déclarée coupable d’un crime semblable, mais également être perçus comme l’ayant été. Quoique les tribunaux doivent se garder de singulariser les avocats en leur infligeant des peines plus sévères qu’aux autres délinquants se trouvant dans des circonstances comparables, il leur faut néanmoins éviter de donner l’impression qu’ils font montre d’une plus grande indulgence à leur endroit (R. c. Ryan, précité; R. c. Shandro reflex, (1985), 65 AR.. 311 (C.A.)). À cet égard, je ferais mien le raisonnement qu’a exposé ma collègue le juge L’Heureux-Dubé, lorsqu’elle était juge à la Cour d’appel du Québec, dans l’arrêt Marchessault c. La Reine, C.A. Montréal, no 500-10-000035-848, 12 juillet 1984:

Sur le plan subjectif, il est évident que chaque fois qu’un crime est commis par un personnage public, une personne en autorité, vedette, etc., tous les facteurs qu’on nous souligne, ou à peu près, sont présents: le crime et le châtiment reçoivent une plus grande publicité, la honte et l’opprobre sont d’autant amplifiés, la perte financière résultant de la perte d’emploi est fonction du revenu élevé [...] La sagesse populaire fait dire que plus on tombe de haut, plus on se fait mal [...] le fait que plus le personnage occupe un rang ou une fonction élevée dans la société plus il est connu, plus légère devra être la peine et, a contrario, plus humble ou obscur est le personnage, plus sévère sera-t-elle. Je n’accepte pas cette proposition : les plateaux de la balance ne sauraient s’accommoder de ces mesures inégales. La justice doit être la même pour tous, grands ou petits, riches ou pauvres. »

[136] Donc, avec raison, le procureur de la Défense a précisé au Tribunal que l'avocat qui reçoit une peine pour un crime doit l'être comme tout autre individu. Par contre, lors de l'analyse des facteurs aggravants, le Tribunal se doit de considérer que l'accusé était un officier de justice et des conséquences négatives de son crime sur l'ensemble de la profession. Par conséquent, le présent dossier se distingue de celui de la peine prononcée par la Cour d'appel d'Ontario qui confirma la peine de quatre ans de pénitencier imposée dans l'arrêt R. c. Creighton

Détermination de la peine concernant un avocat condamné pour possession de cocaïne - Exposé sur l'absolution

R. c. Grenier, 2006 QCCQ 4526 (CanLII)

[1] Michel Grenier, 41 ans, a reconnu sa culpabilité à l'accusation d'avoir été en possession de cocaïne, le 7 avril 2005.

[2] L'accusation est portée par voie sommaire.

[16] Avant tout, il importe de déterminer les principes qui régissent une demande d'absolution conditionnelle ou inconditionnelle.

[17] La disposition pertinente se trouve à l'article 730 du C. cr., laquelle fait partie du chapitre du Code criminel consacré à la détermination de la peine.

[18] Aux termes du paragraphe 1 de cette disposition, le Tribunal peut, s'il considère qu'il est de l'intérêt manifeste d'un accusé sans nuire à l'intérêt public, prescrire par ordonnance une absolution conditionnelle ou inconditionnelle.

[19] Cette ordonnance ne peut être rendue dans les cas d'infractions comportant une peine minimale ou si l'infraction est punissable d'un emprisonnement de 14 ans ou à perpétuité.

[20] L'absolution entraîne donc l'absence de casier judiciaire pouvant compromettre les projets d'avenir d'un accusé.

[21] Dans une décision récente rendue le 25 novembre 2005, La Reine c. Mansour, monsieur le juge Denis Lavergne résume ainsi les principes de base établis par la jurisprudence:

« [34] Il est bien établi que cette mesure dont l'effet évite au contrevenant le stigmate d'une condamnation n'a rien d'exceptionnelle et n'exclut aucune infraction au-delà des limites mentionnées précédemment; essentiellement, elle vise à éviter qu'une condamnation ait des conséquences disproportionnées ou démesurées au regard, d'une part, de la faute commise par le contrevenant, et d'autre part, au regard de d'autres contrevenants coupables d'infractions semblables4. L'intérêt de l'accusé au sens où l'entend l'article 730 du Code ne saurait donc se réduire au seul préjudice que constitue une condamnation créant un casier judiciaire.

[35] Si la condamnation seule, et partant un casier judiciaire, suffisait pour établir l'intérêt de toute personne à obtenir une absolution inconditionnelle ou conditionnelle, il n'y aurait pas été nécessaire que l'article 730 le précise expressément d'autant plus d'ailleurs que la disposition ajoute le qualificatif véritable. »

[22] Tel qu'énoncé par la juge Michèle Toupin, Cour du Québec. dans l'affaire La Reine c. Gollain, « la preuve de l'intérêt véritable de l'accusé est généralement facile à prouver, particulièrement lorsque l'individu à sentencer n'a pas d'antécédent judiciaire et est de bonne moralité. Il est évident que la possession d'un casier judiciaire, quoique dans certains cas fatals, peut représenter un empêchement ou une conséquence sérieuse, à la recherche d'un emploi, au maintien de ce dernier, à l'obtention de cautionnement et au déplacement à l'étranger par affaires ou par pur plaisir. »

[23] Dans le même sens, monsieur le juge Béliveau, dans Rozon c. La Reine, écrit:

« Par ailleurs, l'intérêt véritable de l'accusé suppose que ce dernier est une personne de bonne moralité, qu'il n'a pas d'antécédent judiciaire, quoique cela ne soit pas déterminant (R. c. Chevalier), qu'il n'est pas nécessaire d'enregistrer une condamnation pour le dissuader de commettre d'autre infraction ou pour qu'il se réhabilite et que cette mesure aurait à son égard des conséquences particulièrement négatives. »

[24] « La perspective de complications futures suffit ».

[25] Ce qui importe, c'est de déterminer si une condamnation aurait pour effet d'entraîner pour l'accusé des conséquences négatives disproportionnées par rapport à la faute commise.

[26] C'est la règle d'or établie par la Cour d'appel dans Abouabdellah c. La Reine, savoir:

« La règle d'or en la matière est qu'un justiciable ne doit pas, dans les faits, subir un châtiment qui n'a aucune mesure avec sa faute. »

[27] C'est en somme le critère de la juste proportionnalité qui doit prévaloir.

[28] Quant au critère de l'intérêt public, monsieur le juge Béliveau définit ainsi ce concept dans l'affaire Rozon précitée:

« 41. Quant à la notion d'intérêt public, elle doit prendre en cause l'objectif de la dissuasion générale, la gravité de l'infraction, son incidence dans la communauté, l'attitude du public à son égard et la confiance de ce dernier dans le système judiciaire (R. c. Elsharawy, par. 3). Cela étant, il faut se rappeler que dans l'arrêt R. c. Meneses, (1976) 25 C.C.C. (2d) 115, la Cour d'appel de l'Ontario a précisé que l'arrestation et la comparution d'un délinquant peuvent constituer une mesure de dissuasion efficace à l'égard de personnes qui ne sont pas criminalisées, lesquelles sont justement celles qui sont candidates à une absolution.

42. Dans ce même arrêt, la Cour d'appel de l'Ontario a indiqué que l'intérêt public comporte également le fait que l'accusé ait la possibilité de devenir une personne utile dans la communauté et qu'elle puisse assurer sa subsistance et celle de sa famille. On avait accordé une libération, selon la terminologie de l'époque, à une dentiste immigrante des Philippines qui désirait être admise à la pratique de cette profession au Canada. »

[29] À ce propos, monsieur le juge Narcisse Proulx mentionne ce qui suit dans La Reine c. Durocher:

« Deuxièmement, l'intérêt public exige qu'on accorde une attention particulière à la dissuasion générale, à la gravité de l'infraction, à son incidence dans la communauté, à l'attitude du public à son égard et à la confiance de ce dernier dans le système judiciaire. De plus, il est important d'examiner si la personne peut être utile pour la société, de vérifier si elle peut assurer sa subsistance et celle de sa famille. »

[30] La Cour d'appel dans La Reine c. Moreau[9], soulignait que l'absolution de l'article 730 du Code criminel ne doit pas être appliquée de façon exceptionnelle.

[31] Chaque cas est un cas d'espèce qui doit être évalué à sa juste valeur et à son mérite.

[32] C'est le principe de l'individualisation des sentences reconnu en jurisprudence et doctrine.

[33] À ce sujet, les commentaires de monsieur le juge René de la Sablonnière, dans l'affaire La Reine c. Caron, sont particulièrement significatifs.

[34] Le juge de la Sablonnière n'a pas retenu l'argument de la poursuite selon lequel accorder une peine d'emprisonnement dans la communauté ne ferait qu'encourager d'autres agresseurs à procéder de la même façon, afin d'obtenir une peine moindre. Il précise qu'en matière de sentence, chaque cas est un cas d'espèce qui doit être traité au fond. Il ajoute qu'un accusé ne peut se voir priver du bénéficie d'application d'une disposition du Code criminel, sous prétexte que d'autres pourraient s'en servir ultérieurement à mauvais escient.

[44] Une condamnation d'où s'ensuit par le fait même un casier judiciaire pourrait être de nature à présenter un risque de compromettre d'une part sa carrière professionnelle tout en l'empêchant, dans l'immédiat, à faire du transport transfrontalier pour subvenir à ses besoins et poursuivre ses études au niveau de la maîtrise.

[45] La Cour d'appel, dans l'arrêt Landry c. La Reine, cite un passage du juge de première instance pertinent en l'espèce, soit:

« Il est clair qu'une condamnation dans ce dossier-ci risque de vous faire perdre votre droit de pratique comme avocat, bien que ce ne soit pas absolu, mais c'est une possibilité dont le Tribunal doit tenir compte. »

[46] La Cour d'appel a fait droit à l'appel et rétablit la décision du juge Chevalier.

[47] Ce premier critère étant bien établi, reste à déterminer si une absolution nuirait à l'intérêt public.

[48] Dans cet ordre d'idée, il faut se demander si le public pourrait perdre confiance dans la crédibilité du système judiciaire.

[49] À cet égard, « le critère doit être apprécié en déterminant ce que penserait la personne raisonnable et renseignée suite à l'octroi d'une absolution conditionnelle ou inconditionnelle ».

[50] D'entrée de jeu, la possession de cocaïne, bien que ça ne soit pas un délit d'une gravité absolue, ne doit pas être banalisée pour autant.

[51] C'est une substance interdite considérée comme nocive.

[52] De plus, comme facteur aggravant, l'accusé, lors de la commission du délit, exerçait la fonction de procureur de la Couronne, district de Québec. C'est un poste de responsabilité dont la société s'attend à ce que le titulaire ait une conduite exemplaire en tout temps.

[53] Par contre, ce n'est pas parce que l'accusé était alors procureur de la Couronne qu'il ne peut par le fait même bénéficier d'une absolution.

[54] Tel qu'énoncée précédemment, l'absolution n'est pas une mesure exceptionnelle et il n'existe pas de règle spéciale pour telle catégorie d'emploi, de fonction.

[55] Aucun justiciable n'est exclu en fonction de sa profession, de sa fonction ou de son travail.

[56] Tout individu doit recevoir une sentence méritée, mais juste et appropriée dans le respect du principe de l'individualisation des sentences, tout en considérant les autres critères tels la réhabilitation, la réinsertion sociale, l'exemplarité et la dissuasion.

[57] Tout justiciable a droit de bénéficier d'une absolution, s'il rencontre les critères requis énoncés précédemment.

[58] Dans cet ordre d'idée, il appert que des personnes occupant des postes de confiance, de responsabilité, d'autorité ont pu bénéficier d'une libération conditionnelle ou inconditionnelle.

[59] Voici à titre d'exemples uniquement quelques cas de cet ordre:

▪ Rozon a été absout inconditionnellement suite à une accusation d'agression sexuelle de moindre degré.

▪ Absolution conditionnelle pour un policier dans le cas d'une accusation de voies de fait dans l'exécution de ses fonctions.

▪ Absolution conditionnelle pour un policier de la Gendarmerie Royale ayant détourné des sommes d'argent qui lui avait été confiées dans le cadre de ses fonctions.

▪ Absolution inconditionnelle concernant un policier pour la commission de 2 voies de fait dans l'exécution de son travail.

▪ Libération inconditionnelle pour un policier qui a conseillé un collègue d'inscrire une mention inexacte dans un rapport d'événement relatif à un test d'ivressomètre concernant son gendre.

▪ Absolution conditionnelle pour fraude d'une somme de 5 000,00 $ par un avocat de l'aide juridique à l'égard de son syndicat.

▪ Absolution inconditionnelle pour un agent de la paix ayant posé des voies de fait à l'égard d'un citoyen. On a précisé que cette mesure sentencielle ne comportait pas de règle spéciale pour les officiers de paix.

▪ Absolution conditionnelle pour un agent de bureau du ministère de la Sécurité public qui a exhibé ses organes génitaux.

▪ Libération inconditionnelle d'un éducateur spécialisé qui a utilisé une force excessive envers un handicapé mental.

▪ Absolution conditionnelle dans le cas d'agressions sexuelles (2 touchés et 1 fellation) d'un accusé qui occupait un emploi d'agent de sécurité.

▪ Absolution conditionnelle pour un policier déclaré coupable d'avoir agressé sexuellement une collègue (touché d'un sein sous le soutien-gorge).

[86] Soit dit en passant, c'est très rare qu'un individu se soumet de son plein gré à une thérapie dans le cas d'une accusation de possession de substance illicite, alors qu'il n'a aucun antécédent en cette matière.

[87] Il y a lieu de reconnaître la pleine portée et les effets de la démarche thérapeutique à laquelle l'accusé s'est astreint volontairement, tel que la Cour d'appel nous l'enseigne

[88] Dans le présent dossier, le ministère public a choisi de procéder par déclaration sommaire. Dans ce cas, le délit est passible d'une amende de 1 000,00 $ maximum ou de 6 mois d'emprisonnement.

[89] La décision sur sentence en matière de possession de cocaïne ou de marihuana de quantité non significative se traduit généralement, pour un individu sans antécédent judiciaire pertinent, par une amende et parfois, si c'est requis et le cas est approprié, par une absolution conditionnelle ou inconditionnelle.

[90] Les sentences monétaires dans le cas de possession de cocaïne sont un peu plus substantielles que celles relatives à la marihuana, eu égard à la nature de la drogue. Ça représente de façon générale des amendes de l'ordre de quelque 100,00 $ plus ou moins

[103] En l'occurrence, il appert indubitablement que l'arrestation, la comparution et tout le processus judiciaire fort médiatisé «constituent une mesure de dissuasion extrêmement forte » pour l'accusé.

[104] Comme le soulignait monsieur le juge Richard Grenier, Cour supérieure, dans l'affaire Bodet, « la dissuasion générale n'apparait pas un élément décisif dans le présent dossier. Un citoyen bien renseigné sur ce qu'a vécu l'accusé trouverait sa punition globale bien lourde, même s'il bénéficiait d'une absolution».

[105] Par surcroît, la comparution médiatisée de l'accusé, sa perte d'emploi, de prestige et la période difficile qui s'ensuit sont de nature à dissuader quiconque d'abuser de son statut de personne affectée à l'administration de la justice ou à un poste de responsabilité.

[106] L'exemplarité est par le fait même atteint en l'occurrence, bien qu'elle ne doit pas faire obstacle à l'application d'une absolution lorsque l'accusé rencontre les critères requis. Il ne faut pas perdre de vue que chaque cas doit être discuté à son mérite, dans le respect de l'individualisation des sentences et de la juste proportionnalité entre la faute commise et la peine qui en découle.

[107] Quant à l'ampleur de la couverture médiatique en l'espèce, la Cour réfère au propos du juge Béliveau dans l'affaire Rozon:

Par. 73 « On pourrait donc considérer que dans la mesure où le crime reproché en l'espèce est « relativement mineur et non prémédité », l'ampleur de la couverture médiatique, plus particulièrement celle qui a été irresponsable, a contribué à punirr l'appelant plus sévèrement qu'un autre individu. Si ce dernier n'avait pas été Gilbert Rozon, l'affaire n'aurait évidemment reçu aucune publicité ».

Par. 74 « Mais plus fondamentalement, le soussigné considère qu'il faut tenir compte du stigmate indélébile que cette couverture a infligé à l'appelant et de la dénonciation dans le public de l'infraction qu'il a commise. »

[110] Enfin, soulignons que l'accusé est sans antécédent judiciaire. Préalablement à l'audition sur sentence, il a déposé une somme de 250,00 $ pour un organisme communautaire Pignon Bleu, bien qu'il soit sans ressource financière.

[111] « L'intérêt public comporte également le fait que l'accusé ait la possibilité de devenir une personne utile dans la communauté et qu'il puisse assurer sa subsistance et celle de sa famille » selon le cas

[112] La Cour n'a aucune hésitation à conclure qu'une personne raisonnable et renseignée considèrerait qu'il n'est pas nécessaire qu'il y ait une condamnation monétaire d'où s'en suivrait un casier judiciaire. Si tel était le cas, ce serait vouloir à ce que l'accusé subisse des conséquences fort négatives qui n'ont aucune mesure avec la faute commise, eu égard à toutes les circonstances présentes.

[113] En l'espèce, une absolution ne peut porter atteinte à la crédibilité du système judiciaire.

[114] La Cour croit approprié de citer la conclusion de monsieur le juge Proulx dans l'affaire Durocher:

« Tout en reconnaissant que la sanction de ce crime requiert de considérer les facteurs d'exemplarité et de dissuasion, il n'en demeure pas moins que la Cour suprême a récemment reconnu que le simple passage d'un accusé à la Cour (sans condamnation) pouvait satisfaire, pouvait pallier à ces deux facteurs.

Nous croyons qu'une personne raisonnable bien informée et respectueuse de l'esprit du Code criminel et de la Charte des droits assumerait qu'une condamnation constituerait un châtiment n'ayant aucune mesure avec la faute commise.

La justice sans clémence est injustice. »

[119] Une absolution inconditionnelle est la mesure appropriée.

mercredi 17 février 2010

L'impact qu'a le défaut du ministère public de donner avis de son intention de demander une « peine plus sévère », en application du par. 727

R. c. McCoy, 2006 NBBR 329 (CanLII)

[11] Avec égards, je suis d’avis que le juge du procès a commis une erreur de principe en omettant de tenir compte des condamnations antérieures de McCoy. Par conséquent, l’imposition d’une amende était manifestement insuffisante dans les circonstances. Il semble que le défaut du ministère public de donner avis de son intention de demander une « peine plus sévère », en application du par. 727(1) du Code criminel, ait influencé la décision du juge du procès. L’effet de cette disposition a fait l’objet d’un examen dans bon nombre de décisions.

[12] Dans R. c. Branscombe (1989), 97 R.N.-B. (2e) 206, le juge Harper de la Cour provinciale du Nouveau-Brunswick a dit ce qui suit aux par. 30 et 31 :

[TRADUCTION]

[…] [I]l faut noter qu’une telle situation n’oblige pas la Cour à traiter le défendeur comme un délinquant primaire, si un dossier judiciaire antérieur était également admis ou prouvé, mais elle ne fait qu’obvier aux sentences minimales obligatoires devant être infligées par une cour en vertu de l’actuel art. 255 du Code, surtout en ce qui a trait aux condamnations antérieures reliées à la conduite en état d’ébriété.

Cela mis à part, la Cour peut (et devrait) tenir compte de toutes les condamnations antérieures pour toute infraction criminelle (y compris celles qui sont reliées à la conduite en état d’ébriété) en infligeant la sentence dans une situation donnée, y compris dans la présente affaire.

[13] Dans R. c. Norris reflex, (1988), 41 C.C.C. (3d) 441, le juge Côté de la Cour d’appel des Territoires du Nord-Ouest a traité comme suit, aux pages 447 et 448, de la question des condamnations antérieures dans des cas où n’a été donné aucun avis qu’une peine plus sévère serait demandée :

[TRADUCTION]

[S]i, dans une affaire de conduite en état d’ébriété, le ministère public ne donne aucun avis en application du par. 592(1) [aujourd’hui le par. 727(1)], lorsque le contrevenant est déclaré coupable, le juge du procès peut lui infliger toute peine appropriée qui est plus sévère que la peine minimale prévue à l’al. 239a)(i) pour une première infraction. (La peine maximale ne varie plus selon le nombre de condamnations antérieures, comme elle le faisait avant; elle dépend maintenant plutôt de la question de savoir si l’infraction est poursuivie par mise en accusation ou par procédure sommaire.) Lorsqu’il détermine la peine à infliger, le juge peut examiner tous les renseignements pertinents relatifs au caractère de la personne déclarée coupable, y compris ses condamnations antérieures relatives au même type d’infraction ou à d’autres types d’infractions. Une condamnation antérieure pour conduite avec facultés affaiblies est pertinente, tout comme le serait une condamnation antérieure pour intoxication publique, pour vandalisme avec facultés affaiblies ou pour conduite dangereuse. Un casier judiciaire vierge serait par ailleurs tout aussi pertinent.

Bref, le fait de donner ou non un avis en application de l’art. 592 détermine tout simplement la limite minimale du pouvoir du juge de déterminer la peine à infliger. Entre cette limite et la peine maximale prévue par la loi, le juge doit toujours peser tous les facteurs pertinents et déterminer où placer la peine sur l’échelle.

[14] Dans R. c. Johnson (N.S.C.A.), [1994] N.S.J. No. 154, la Cour d’appel de la Nouvelle-Écosse a souscrit aux conclusions tirées dans R. c. Norris, précité, et s’est rangée à l’avis du juge Scanlan, du tribunal inférieur, dont la décision est publiée à [1993] N.S.J. No. 485, où il a dit ce qui suit, aux par. 13 et 14 :

[TRADUCTION]

Dans toute affaire relative à la détermination de la peine, le ministère public a le droit de présenter des observations sur les condamnations antérieures. Toutes les infractions sont susceptibles d’entraîner une peine plus sévère si le contrevenant a des antécédents judiciaires importants. […]

[…] Si le ministère public donne avis qu’une plus forte peine sera demandée du fait des condamnations antérieures en vertu de l’article 665, cela ne servira qu’à établir la peine minimale que le tribunal pourra infliger. Le juge chargé de la détermination de la peine aura toujours le pouvoir d’infliger une peine se situant entre la peine minimale et la peine maximale, qu’il s’agisse d’une première infraction ou non. Comme je l’ai déjà mentionné, le juge du procès a le droit d’examiner tous les facteurs pertinents pour déterminer la peine appropriée, y compris les condamnations antérieures.

[15] Le défaut du ministère public de donner avis qu’une peine plus sévère serait demandée n’entraîne pas la conclusion que l’accusé devrait être assimilé à un délinquant primaire.

[16] Au lieu d’assimiler McCoy à un délinquant primaire, le juge chargé de la détermination de la peine aurait dû tenir compte de [TRADUCTION] « tous les facteurs pertinents pour déterminer la peine appropriée », notamment :

1. la dissuasion générale;

2. les antécédents judiciaires;

3. la dissuasion particulière;

4. l’art. 255.1 du Code criminel.

1. Dissuasion générale

[17] Dans Regina c. McVeigh 1985 CanLII 115 (ON C.A.), (1985), 22 C.C.C. (3d) 145 (C.A. Ont.), le juge McKinnon, juge en chef adjoint, a signalé l’importance de l’intérêt public, à la p. 150 :

[TRADUCTION]

Personne ne prend le volant après avoir bu en pensant à la possibilité que quelqu’un soit tué de ce fait. Les peines infligées devraient rendre beaucoup moins attrayante la conduite d’un véhicule après avoir bu. Le public ne devrait pas avoir à attendre que des gens soient tués pour que les tribunaux condamnent catégoriquement le comportement qui a causé leur mort.

[…]

Dans de tels cas, la dissuasion générale devrait être l’objectif prédominant, et cet objectif ne peut pas être atteint si l’on insiste trop sur le fait que la dissuasion particulière est rarement nécessaire après que la conduite en état d’ébriété a mené à un résultat tragique.

[18] Dans R. c. Bourhill, [1999] O.J. No. 5071 (C.S. Ont.), le juge Donnelly a reconnu l’importance de l’intérêt public dans la détermination de la peine à infliger dans les cas de conduite avec facultés affaiblies. Il s’est exprimé ainsi, au par. 20 :

[TRADUCTION]

Cette reconnaissance vaste et formelle de l’intérêt public par rapport à la conduite avec facultés affaiblies touche directement le système judiciaire. L’objectif fondamental de la détermination de la peine est la protection de la société. Les tribunaux n’ont pas à suivre étroitement la conscience sociale. Ils doivent être conscients des préoccupations légitimes et universelles relatives à la sécurité publique et y être réceptifs. La perception du public à l’égard du système judiciaire souffrirait du défaut des tribunaux de première instance de reconnaître ces valeurs. Ainsi, l’administration de la justice serait susceptible d’être déconsidérée.

2. Antécédents judiciaires

[19] Comme je l’ai mentionné, McCoy a été déclaré coupable de conduite avec facultés affaiblies quatre fois déjà et il a été condamné à des peines d’emprisonnement totalisant plus de 30 mois. Son avocat soutient que, en déterminant la peine, la Cour ne devrait accorder que peu ou pas de poids à ces condamnations antérieures parce qu’il s’est écoulé plus de quinze ans depuis la dernière des infractions en question. Je ne suis pas d’accord. Lorsqu’une personne intoxiquée conduit un véhicule et cause la mort d’une autre personne, aucune période de temps ne peut réparer le mal qui a été fait et le passage du temps ne devrait jamais empêcher qu’il soit tenu compte de l’infraction.

3. Dissuasion particulière

[20] L’avocat de la défense a informé la Cour des efforts déployés par McCoy pour s’abstenir de consommer de l’alcool. Bien que ces efforts soient sans doute louables, il convient de souligner que ce n’est pas tant le fait que McCoy boit qui préoccupe la Cour, c’est plutôt le fait qu’il conduit lorsqu’il a bu. Il semble avoir besoin qu’on lui rappelle que la société ne tolérera pas qu’il conduise lorsque ses facultés sont affaiblies et, avec égards, une amende de 1 500 $ n’est à mon avis pas suffisante.

mardi 16 février 2010

Jurisprudence en matière de peine à Terre -Neuve dans les cas de fraude de plus de 5 000 $

R. c. Desormeau, [2001] N.J. No. 341 (C.S. – 1ère inst.)
Peine d’emprisonnement de huit mois – capitaine des forces armées ayant fraudé
son employeur pour une somme de 70 000 $

M. Desormeau, un capitaine des forces armées dont s’était la première infraction, a plaidé coupable d’avoir fraudé le gouvernement pour un montant d’environ 70 000 $. Il avait demandé à d’autres soldats de présenter des demandes de frais de déplacement en laissant en blanc le montant de la réclamation. Ensuite, il a rempli les documents en indiquant de faux renseignements. Il a remis aux soldats concernés une partie des sommes ainsi obtenues. D’âge moyen, il avait pris sa retraite des forces armée après vingt ans de service. La Cour a refusé de prononcer une condamnation avec sursis parce que l’infraction impliquait un abus de confiance, des fonds publics, la participation d’autres personnes, des montants appréciables et le refus, par l’accusé, de la responsabilité de ses actes.

La Cour lui a infligé une peine d’emprisonnement de huit mois, assortie d’une
ordonnance de dédommagement.

R. c. Wheeler, [2001] N.J. nº 240 (C.S. – 1ère inst.)
Peine d’emprisonnement de quatre ans et demi – fraude de centaines de personnes,
représentant 3 M$ par le truchement d’un faux système de placements

M. Wheeler, qui en était à sa première infraction, a reconnu avoir fraudé des centaines de personnes pour environ 3 millions de dollars. Il avait organisé un faux système de placement promettant des taux de rendement fabuleux. Il a confessé son crime. Il était d’âge moyen et avait trois enfants. Toute sa vie, il avait exploité une station service, mais il l’avait perdue et avait fait l’objet d’une requête de mise en faillite. La Cour avait précédemment décidé de ne pas prononcer d’ordonnance de dédommagement pour plusieurs raisons, notamment parce qu’il était difficile d’évaluer le montant exact de la fraude par rapport à toutes les victimes.

La Cour a décidé que l’objectif de dissuasion générale exigeait le prononcé d’une peine d’emprisonnement de 4 ½ ans. Elle a indiqué qu’elle lui infligeait six mois d’emprisonnement de plus parce que l’ordonnance de dédommagement n’était pas réalisable.

R. c. Quinlan (1999), 133 C.C.C. (3d) 501 (C.A. T.-N.)
Peine d’emprisonnement avec sursis de six mois – vol et fraudes représentant une
somme de 12 000 $ et fraudes pour l’achat de cocaïne

M. Quinlan a plaidé coupable à un chef d’accusation de vol et à deux chefs d’accusation de fraude à l’égard de deux employeurs différents. Le vol et les fraudes se montaient à 12 000 $ au total. Il a commis ces infractions pour pouvoir se payer de la cocaïne. Il a demandé de recevoir un traitement pour sa toxicomanie et a, depuis, été engagé dans une entreprise familiale. Il avait déjà été condamné pour vol, mais aucun autre détail n’ait été fourni au tribunal de première instance à ce sujet. Il avait 29 ans, était marié et père d’un enfant. Il a témoigné pour dire qu’il pouvait verser 500 $ par mois comme dédommagement. Le ministère public et la défense ont présenté des observations conjointes en faveur d’une peine d’emprisonnement avec sursis de six mois assortie d’une ordonnance de dédommagement. Le juge du procès a statué qu’il n’était pas convaincu qu’un dédommagement pouvait être fait et a infligé une peine d’emprisonnement de six mois et prononcé une ordonnance de dédommagement.

M. Quinlan a été remis en liberté sous caution en attendant l’appel et a versé un
dédommagement chaque semaine comme l’exigeait l’ordonnance de mise en liberté sous
caution. La Cour d’appel a conclu que le juge du procès avait commis une erreur parce
que le dédommagement était possible. Elle a modifié la peine, la faisant passer à une
peine d’emprisonnement avec sursis de six mois, assortie d’une probation de trois ans et d’une ordonnance de dédommagement intégral.

R. c. Oliver, [1997] N.J. nº 248 (C.S. – C.A.)
Peine d’emprisonnement avec sursis de sept mois – commis de banque ayant commis une fraude de 27 614 $ à l’endroit de son employeur

M. Oliver, un commis, a plaidé coupable d’avoir fraudé son employeur pour 27 614,23 $.
L’infraction a été commise sur une période de près de deux ans. Cette fraude a entraîné le congédiement d’un employé et la réduction des heures de travail d’un autre. Le juge du procès a mentionné qu’une peine d’incarcération était indiquée, mais a prononcé une peine d’emprisonnement avec sursis, assortie d’une probation de trois ans et d’une ordonnance de dédommagement. Au moment de l’appel, M. Oliver n’avait encore versé aucun dédommagement. Les dispositions sur la condamnation avec sursis étaient entrées en vigueur depuis le procès. La Cour d’appel a statué qu’une peine d’incarcération s’imposait et l’a condamné à un emprisonnement de sept mois avec sursis.

Tiré de :
Peines infligées dans les cas de fraude de plus de 5000$
Sharon Stewart Guthrie
Ministère de la Justice, Bureau régional de l’Ontario
Decembre 2004

Le dédommagement à la victime doit toujours être envisagé lors de la détermination de la peine

Il incombe à la défense de préciser ses demandes de communication de la preuve supplémentaires et cela doit être fait en temps opportun

R. v. Atwell, 2022 NSSC 304 Lien vers la décision [ 8 ]              The Crown has a duty to make disclosure of all relevant information to ...