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mercredi 28 juillet 2010

Résumé des peines rendues pour des transactions de cocaïne fait par le juge Conrad Chapdelaine

R. c. Deraspe, 2009 QCCQ 5645 (CanLII)

[10] Le 26 septembre 2007, notre collègue Conrad Chapdelaine effectuait un intéressant résumé des peines rendues pour des transactions de cocaïne. Nous reproduisons certains extraits de son jugement :

"R. c. Leboeuf : L'accusé avait été reconnu coupable de complot et de trafic de 500 grammes de cocaïne. Âgé de 34 ans et père d'un enfant, il avait plusieurs antécédents en semblable matière. Condamné à une peine de six ans en première instance, la Cour d'appel confirmait cette sentence, la considérant sévère, mais non déraisonnable.

R. c. Robitaille : L'accusé s'est vu imposer une peine de 24 mois moins 1 jour pour complot et trafic de 220 grammes de cocaïne. L'accusé servait d'intermédiaire dans la transaction et était un consommateur de stupéfiants. Il n'avait aucun antécédent judiciaire et bénéficiait d'un rapport présentenciel favorable, et il travaillait au moment de l'imposition de la sentence. La Cour d'appel confirme cette peine en rappelant que l'article 10.1 de la Loi sur les drogues et autres substances n'a pas modifié les principes des articles 718 et suivants du Code criminel.

R. c. Bessette et Rioux : Rioux a reçu une peine de trente mois de détention pour huit chefs de complot, trafic et possession dans le but de trafic de cocaïne, de crack, de résine de cannabis et de cannabis. Il était un fournisseur de drogue, avait plusieurs antécédents, dont certains en semblable matière. Consommateur de drogue, il avait suivi avec succès une thérapie au moment de l'imposition de la peine. Quant à Bessette, il s'est vu imposer une peine de 18 mois. Il agissait comme livreur et avait trois antécédents de possession simple de stupéfiants.

R. c. Girard : L'accusé a plaidé coupable à six accusations de complot, trafic et possession dans le but d'en faire le trafic. Considéré à un niveau élevé dans un réseau organisé, l'accusé se livrait à une véritable activité commerciale sur une période de plus de trois ans. Le juge de première instance, après examen des nombreuses décisions en semblable matière, principalement de la Cour d'appel, lui impose 36 mois de détention.

R. c. Boulanger : La Cour d'appel confirme, le 9 août 2007, une peine de trois ans de pénitencier imposée à l'accusée par le juge Côté pour avoir fait le trafic d'un kilo de cocaïne. L'accusée était sans antécédent judiciaire en semblable matière, agissait ponctuellement en remplacement de son ami trafiquant incarcéré à ce moment-là. Mme Boulanger faisait partie du même groupe que l'accusé, dont les activités étaient principalement le commerce de la cocaïne.

[29] R. c. Lafrance : Dans cette affaire, l'accusé s'était vu imposer une peine de 90 jours de détention, à être purgée de façon discontinue en première instance, pour une possession de 49 grammes de cocaïne, dans le but d'en faire le trafic. Il était sans antécédent judiciaire. La Cour d'appel confirme cette peine. Madame la juge Otis insiste sur le fait que, « lorsqu'une preuve particulièrement convaincante de la réhabilitation du prévenu est faite, elle peut parfois devenir un critère prééminent dans la détermination de la peine. »

R. c. Robert : L'accusé a plaidé coupable à la possession dans le but de trafic de cent grammes de cocaïne. Il avait des antécédents d'incendie criminel et de possession d'arme. Le juge de première instance lui impose vingt mois de détention dans la collectivité en insistant sur la réhabilitation de ce dernier et du fait qu'il ne constituait plus un danger pour la société.

R. c. Simard : L'accusé, ayant peu d'antécédents judiciaires et aucun en semblable matière, plaide coupable à des accusations de complot, trafic et possession dans le but d'en faire le trafic de cocaïne, de résine de cannabis et de cannabis ainsi qu'une accusation de recel de 47 000 $. Il a été condamné à une peine de deux ans moins un jour à purger dans la collectivité. Il opérait un réseau de distribution dans lequel trois autres personnes étaient impliquées.

R. c. Douglas : L'accusé a plaidé coupable à quatre accusations de trafic et de possession dans le but de trafic de cocaïne. Malgré un antécédent en semblable matière, le juge de première instance le condamne à une peine de 18 mois à purger dans la collectivité, cela en tenant compte de la collaboration de ce dernier (sans sa déclaration, aucune accusation n'était possible) et des efforts sérieux et sincères de réhabilitation de l'accusé.

R. c. Bennett : Dans cette affaire, Bennett faisait partie du même réseau que l'accusé. Il s'est vu imposer une peine d'une année suite à une suggestion commune des parties pour trafic et complot en vue de faire le trafic de cocaïne. Il aurait agi comme intermédiaire et il n'y avait pas de preuve qu'il trafiquait sur une base régulière."

[11] Pour sa part, notre collègue Maurice Galarneau condamnait Georges Lévesque à une peine de deux ans moins un jour à purger dans la communauté, après qu'il eut plaidé coupable à une accusation de possession en vue de trafic de 758 grammes de cocaïne, et de possession d'arme prohibée.

mardi 27 juillet 2010

La défense peut mettre en preuve la propension de la victime à commettre des actes de violence

Brousseau c. R., 2006 QCCA 858 (CanLII)

[19] Il est en effet reconnu depuis l'arrêt Scopelitti que la défense peut mettre en preuve la propension de la victime à commettre des actes de violence, et ce, indépendamment du fait que l'accusé n'avait pas connaissance de ces actes de violence antérieurs au moment où il allègue la légitime défense. Cette preuve sert non pas à démontrer l'état d'esprit de l'accusé et le caractère raisonnable de ses perceptions au moment de l'attaque, mais bien à supporter la preuve que la victime a effectivement violenté l'accusé. Comme le souligne le juge Martin:

Obviously, evidence of previous acts of violence by the deceased, not known to the accused, is not relevant to show the reasonableness of the accused's apprehension of an impending attack. However, there is impressive support for the proposition that, where self-defence is raised, evidence of the deceased's character (i.e., disposition) for violence is admissible to show the probability of the deceased having been the aggressor and to support the accused's evidence that he was attacked by the deceased.

[20] Un peu plus loin, le juge Martin poursuit:

We were not referred by counsel to any Canadian or Commonwealth decision on the question of the admissibility of evidence of the deceased's character (disposition) for violence, not known to the accused, as evidence of the probability of the deceased's aggression where self-defence is raised as an issue. However the admission of such evidence accords in principle with the view expressed by this Court that the disposition of a person to do a certain act is relevant to indicate the probability of his having done or not having done the act. The law prohibits the prosecution from introducing evidence for the purpose of showing that the accused is a person who by reason of his criminal character (disposition) is likely to have committed the crime charged, on policy grounds, not because of lack of relevance. There is, however, no rule of policy which excludes evidence of the disposition of a third person for violence where that disposition has probative value on some issue before the jury: see R. v. McMillan (1975), 23 C.C.C. (2d) 160 at p. 167, 7 O.R. (2d) 750, 29 C.R.N.S. 191; affirmed, 33 C.C.C. (2d) 360, 73 D.L.R. (3d) 759, [1977] 2 S.C.R. 824; R. v. Schell and Paquette (1977), 33 C.C.C. (2d) 422 at p. 426.

[21] Ce principe est maintenant bien établi en jurisprudence et il a reçu l'aval de la Cour suprême dans l'affaire Arcangioli, un arrêt unanime (j. Major) :

La production et l'utilisation d'une preuve au cours d'un procès criminel sont soumises à certaines restrictions. Bien qu'elle soit pertinente, une preuve peut être exclue pour des motifs de principe comme en témoigne la directive bien connue concernant la preuve de moralité, savoir qu'[TRADUCTION] «il n'est pas permis au ministère public de présenter une preuve de la mauvaise moralité de l'accusé, au moyen d'une preuve de sa réputation ou d'actes précis, à moins que l'accusé n'ait lui-même soulevé la question de sa moralité ou que cette preuve ne soit par ailleurs pertinente sur un point, comme par exemple la preuve d'actes similaires»: J. Sopinka, S. N. Lederman et A. W. Bryant, The Law of Evidence in Canada (1992), à la p. 454. Bien qu'une telle preuve puisse être pertinente, elle est exclue parce que son effet préjudiciable est susceptible de l'emporter sur sa valeur probante; le jury risque de déclarer l'accusé coupable en fonction de sa réputation et non de la preuve: McCormick on Evidence (4e éd. 1992), vol. 1, par. 190, à la p. 811.

Le risque d'une déclaration de culpabilité erronée n'existe pas, cependant, dans le cas où la preuve de moralité se rapporte non pas à l'accusé, mais à un tiers témoin. Par conséquent, [TRADUCTION] «[d]ans la mesure où elle est pertinente et où elle n'est pas par ailleurs exclue par une règle de preuve, la preuve de la mauvaise moralité d'un tiers peut être présentée par la défense» […]

[22] Récemment, dans l'arrêt Friolet c. R., cette Cour rappelait que :

[…] La preuve de propension de la victime à la violence est, en effet, une preuve circonstancielle qui peut établir la probabilité que la victime a agi d'une manière conforme à son habitude lors de l'incident.

Le paragraphe 265 (1)b) criminalise la menace ou la tentative d’employer la force dans un certain contexte marqué par la proximité des gestes posés avec l’emploi de la force et la crainte générée chez la victime

Hovington c. R., 2007 QCCA 1016 (CanLII)

[53] (...) Il ne faut pas confondre la tentative prévue à l’article 24 C.cr. et l’infraction de voies de fait qui inclut, à son paragraphe (1)b), la tentative ou la menace d’employer la force alors que l’agresseur est en mesure actuelle de mettre sa menace à exécution ou s’il porte la victime à croire, pour des motifs raisonnables, que tel est le cas. L’article 24 criminalise l’omission de faire quelque chose ou l’accomplissement de quelque chose dans le but d’atteindre une fin illégale, si cela dépasse le stade des actes préparatoires. En contrepartie, le paragraphe 265 (1)b) criminalise la menace ou la tentative d’employer la force dans un certain contexte marqué par la proximité des gestes posés avec l’emploi de la force et la crainte générée chez la victime. D’ailleurs, dans R. c. MacKay, 2005 CSC 79 (CanLII), [2005] 3 R.C.S. 725, la Cour suprême rappelle que les paragraphes 265 (1)a) et (1)b) C.cr. ne créent pas deux infractions distinctes, mais décrivent plutôt deux façons de commettre la même infraction, de sorte que la tentative du paragraphe (1)b) se distingue forcément de celle prévue à l’article 24.

[54] Par ailleurs, l’agression armée du paragraphe 267a) ne constitue pas non plus une infraction imparfaite, mais bien un type distinct et aggravé de voies de fait.

[55] Conséquemment, la combinaison des mécanismes de la menace d’employer la force et des voies de fait armées n’est d’aucune manière une extension déraisonnable du droit criminel.

Exposé exhaustif de la Cour d'appel concernant le contre-interrogatoire d'un accusé ou d'un témoin sur ses antécédents judiciaires / les règles utiles pour statuer sur l'admissibilité de cette preuve

Tremblay c. R., 2006 QCCA 75 (CanLII)

[17] L’article 12 de la Loi sur la preuve prévoit qu’un témoin peut être contre-interrogé relativement à ses condamnations antérieures. Dans R. c. Corbett, 1988 CanLII 80 (C.S.C.), [1988] 1 R.C.S. 670, la Cour suprême conclut que cette disposition ne contrevient pas aux articles 7 et 11(d) de la Charte canadienne des droits et libertés lorsqu’un accusé décide de témoigner pour sa défense. Cependant, le juge possède le pouvoir discrétionnaire de limiter le contre-interrogatoire lorsque la divulgation complète causerait un préjudice plus grand que la valeur probante de cette preuve. De plus, toute divulgation d’antécédents judiciaires doit être accompagnée d’une directive au jury quant à l'usage limité de cette preuve puisque qu'elle ne doit être utilisée que pour apprécier la crédibilité de l'accusé et non pour conclure à sa propension à commettre des actes criminels et, plus spécifiquement, l’acte criminel qui lui est reproché. Le juge en chef Dickson explique, dans Corbett, en quoi le casier judiciaire d’un accusé peut être pertinent pour apprécier sa crédibilité :

[…] Au Canada, il est permis de contre-interroger un accusé relativement à ses condamnations antérieures depuis que les accusés ont été habilités pour la première fois à témoigner pour leur propre compte en 1893: R. v. D'Aoust (1902), 5 C.C.C. 407 (C.A. Ont.). L'article 12 traduit l'opinion du législateur que les condamnations antérieures influent réellement sur la crédibilité d'un témoin. En décidant s'il croira un témoin donné, le jury, tout naturellement, prendra en considération divers éléments. Les jurés observeront le comportement du témoin pendant qu'il dépose, son apparence, le ton sur lequel il s'exprime et son attitude générale. De même, le jury tiendra compte de tous renseignements qu'il possède concernant les habitudes ou le mode de vie du témoin. Certes, on ne saurait nier que le casier judiciaire d'un témoin influe, du moins jusqu'à un certain point, sur sa crédibilité. Il est toutefois évident que ce n'est pas simplement parce qu'un témoin a déjà été déclaré coupable d'une infraction qu'on doit nécessairement le considérer comme indigne de foi, mais c'est là un fait dont un jury pourrait tenir compte en appréciant sa crédibilité.

Cette justification de l'art. 12 a été énoncée explicitement dans la jurisprudence. Voir, par exemple, l'arrêt R. v. Stratton, précité, à la p. 461, où le juge Martin affirme: [TRADUCTION] "Incontestablement, la théorie en vertu de laquelle les condamnations antérieures sont admises en preuve relativement à la crédibilité est celle selon laquelle la moralité du témoin, qui ressort de ses antécédents criminels, constitue un fait pertinent qu'on doit prendre en considération en appréciant la crédibilité du témoin." (p. 685)

[18] Par ailleurs le mépris persistant de la loi est pertinent pour apprécier la crédibilité d’un témoin. On peut inférer qu’un individu qui enfreint sans cesse la loi a peu de respect pour la vérité et est donc plus susceptible de mentir. Ainsi, dans R. c. Gibson, 153 C.C.C. (3d) 465 (B.C.C.A.), paragr. 30, la juge Ryan cite avec approbation l'extrait suivant de la décision du juge de première instance qui autorisait le contre-interrogatoire au moyen de l'ensemble des condamnations :

[…] His abiding and repeated contempt for the law is manifest in his persistent involvement in serious crimes. I take the whole of the relevant passage in R. v. Fengstad and Stewart as read and choose to quote here only this, and this quote from para. 27 of Fengstad and Stewart:

"In the context of this case, the evidence of the appellant records, which demonstrated a persistent involvement in serious crimes would properly alert the jury to the fact that these men had an abiding and repeated contempt for the laws of this land, a fact which the jury were entitled to consider in assessing the credibility of the appellants. To expunge a number of convictions or to order that no cross-examination could take place on the record at all, would be to leave the jury with a false impression as to the circumstances surrounding the reliability and veracity of the appellants."

[19] Il peut arriver que l’effet préjudiciable de l’admission en preuve du casier judiciaire d’un accusé fasse en sorte que le juge décide qu’il est préférable de taire au jury certaines condamnations. Dans R. c. Charland, [1996] A.J. no 819, la Cour d’appel de l’Alberta fait état du risque de préjudice lorsque les antécédents judiciaires sont divulgués au jury :

[17] In Corbett, the Supreme Court discussed the nature of the prejudice which could arise from the disclosure to the jury, of the previous criminal behaviour of the accused. The prejudice arises from the risk that the jury might improperly use the evidence admitted for the limited purpose of credibility, in deciding on the guilt of the accused. There is a risk that the jury will rely on unfounded and unreliable assumptions which arise from evidence of bad character, such as propensity: that an accused who previously committed a crime is more likely to commit other crimes, including the offence with which he is charged; […]

[20] Lorsqu’il s’agit de déterminer si une condamnation antérieure doit être exclue, le juge doit se demander si l’accusé a démontré, selon le poids des probabilités, que l’admissibilité de cette condamnation antérieure entraînerait pour lui un préjudice supérieur à la valeur probante de cette preuve. Il n’y a pas de règle absolue et cet exercice s'effectue en tenant compte de plusieurs facteurs et critères. Chaque décision constitue un cas d’espèce et dépendra des faits particuliers d’une affaire. Dans R. c. Corbett, précité, le juge Dickson précise, à la p. 697, que, dans le doute, l’admissibilité en preuve doit être privilégiée :

La valeur probante d'un élément de preuve peut être forte, faible ou nulle. En cas de doute, il vaut mieux pécher par inclusion que par exclusion et, à mon avis, conformément à la transparence de plus en plus grande de notre société, nous devrions nous efforcer de favoriser l'admissibilité, à moins qu'il n'existe une raison très claire de politique générale ou de droit qui commande l'exclusion.

[21] Les critères qui doivent être considérés pour décider d’autoriser ou non le contre-interrogatoire relatif aux antécédents judiciaires sont mentionnés par la Cour dans D.V. c. R., [2003] J.Q. no 478. Elle y reprend la liste de critères retenus par le juge Brossard dans R. c. Trudel , 1994 CanLII 5397 (QC C.A.), [1994] R.J.Q. 678 (C. A.) :

[38] Dans R. c. Trudel , le juge Brossard énonce les règles utiles pour statuer sur l'admissibilité de cette preuve :

- Il y aura lieu, cependant, de soupeser la valeur probante de cette preuve en regard du préjudice qu'elle est susceptible de causer à l'accusé [...];

- "[P]lus l'infraction qui a donné lieu à la condamnation antérieure ressemble à la conduite pour laquelle l'accusé subit son procès, plus le préjudice résultant de son admission en preuve risque d'être grand." Par ailleurs, un antécédent de fraude, de tromperie, ou de tricherie, indiquant un manque d'honnêteté ou d'intégrité, vise directement la crédibilité du témoignage de l'accusé [...];

- Le Tribunal doit donc être fort réticent à admettre en preuve une condamnation pour un crime antérieur similaire, dont la nature n'a rien à voir avec la crédibilité ou la véracité possible du témoignage de l'accusé;

- C'est donc la connexité entre la crédibilité et la nature de l'antécédent judiciaire qu'il faut considérer et non la connexité entre la nature de cet antécédent et la nature du crime en l'instance;

- La proximité dans le temps entre les deux infractions constitue également un facteur susceptible d'affecter soit sa pertinence, soit le degré de préjudice causé à l'accusé;

- Enfin, la preuve de cet antécédent constitue-t-elle un élément de preuve nécessaire ou utile à la Couronne au point que la résolution du litige peut en dépendre.

[22] Il faut également rappeler que, selon la jurisprudence, la limitation de la divulgation des antécédents judiciaires constitue l’exception et non la règle. Règle générale, le casier judiciaire d’un accusé qui témoigne est admissible en preuve sauf circonstances particulières. Par exemple, dans R. c. P. (N. A.) 2002 CanLII 22359 (ON C.A.), (2002), 171 C.C.C. (3d) 70 (C.A. Ont.), le juge Doherty écrit :

[20] On a Corbett application, however, the accused seeks to testify while at the same time withholding information from the jury that would be relevant to its assessment of the accused's credibility as a witness. There is no presumption against the admissibility of the accused's criminal record where he or she chooses to testify. To the contrary, as indicated by the majority in R. v. Corbett, supra, cross-examination on a criminal record of an accused who chooses to testify will be the usual course. […]

[23] Par ailleurs, comme il est permis de contre-interroger les autres témoins sur leurs antécédents judiciaires, le fait d’ «épurer » le casier judiciaire d’un accusé ou, pire, d’en taire complètement l’existence, peut avoir pour effet de donner au jury un portrait faussé de la réalité en lui laissant croire que seuls les témoins de la poursuite ont des antécédents et que leur crédibilité est donc affaiblie par rapport à celle de l'accusé qui, lui, n'en possède pas ou encore, en apparence, a été condamné moins souvent et pour des crimes différents de la réalité. Dans R. c. Charland 1996 CanLII 7284 (AB C.A.), (1996), 110 C.C.C. (3d) 300, (pourvoi rejeté par la Cour suprême, [1997] R.C.S. 1006), la Cour d'appel de l'Alberta indique qu’il ne faut pas donner faussement au jury l’impression que l’accusé a mené une vie exemplaire :

Generally, previous convictions for violent offences such as sexual assault do not directly reflect on honesty and truthfulness and, depending on the circumstances of the case, have limited probative value in assessing credibility. However, particularly in the context of a lengthy criminal record, such prior convictions have probative value that is greater than trifling because a jury could reasonably conclude that the convictions reflect a disregard for the laws and rules of society, making it more likely that the person who harbours such attitudes would lie. Here, excluding the sexual assault convictions from the cross-examination could leave the jury with an erroneous impression that the accused had not been convicted of any offences since 1988. The accused would have appeared to have lived a "crime free" life in the community for six years, when a substantial portion of that time was spent in jail. In the circumstances of this case, I cannot say that the trial judge's finding that the probative value of the accused's prior sexual assault convictions outweighed the prejudicial effect, constituted a clear or palpable error.

La preuve de l'identification de la voix est une preuve admissible

Ramkaran c. R., 2009 QCCA 852 (CanLII)

[30] Il importe de préciser que la preuve de l'identification de la voix est une preuve admissible. Comme l'indiquait le juge Finlayson dans R. c. Williams, [1995] O.J. No. 1012 (C.A. Ont.) :

Counsel took the court through the evidence of identification in the case on appeal and submitted that aside from previous familiarity with the appellant's voice (which was conceded) Spicer's identification was based on nothing else and that it would be unsafe to base a conviction upon it.

I cannot accept this submission. Despite his protestations to the contrary, counsel for the appellant is confusing admissibility with weight. I say this because he vacillated in his argument between complaining about the failure of the witness to testify with respect to the above factors and the failure of the trial judge to address them in his reasons for judgment. There was no obligation upon either of them to do so. If counsel for the appellant wished to challenge the reliability of Spicer's evidence of voice identification he was free to question Spicer as to any or all of the factors outlined above. They could have been put to the witness in cross-examination, but whatever the witness's response to them, his evidence would remain a part of the record for whatever weight it would carry.

[…]

An attempt to meld the distraction between weight and admissibility as they relate to voice identification was advanced and rejected by this court in R. v. Parsons (1977), 17 O.R. (2d) 465, 37 C.C.C. (2d) 497 (C.A.), in the context of wire taps. Dubin J.A., speaking for the court, held that once it is shown that the interception was carried out pursuant to a lawful authorization and in the manner authorized, the fact that the evidence falls short of identifying the voice does not render the interception inadmissible (at p. 471 O.R., p. 502 C.C.C.). It becomes a question for the trier of fact to determine the identity of the voice. Similarly in R. v. Braumberger (1967), 62 W.W.R. 295 (B.C.C.A.), the court held that the evidence of identity of an alleged robber given by a witness who had heard him speak during the perpetration of the robbery was properly admitted to be considered by the jury.

[31] Une personne peut identifier une voix en raison de sa familiarité avec celle-ci. Quant à la fiabilité de cette preuve, elle s'apprécie en regard des circonstances au cours desquelles le témoin a entendu cette voix. (...)

Quel est l’impact de l'état de santé de l'accusé sur la détermination de la peine? Revue de la jurisprudence par le juge Pierre Lortie sur cette question

R. c. D.B., 2007 QCCQ 12664 (CanLII)

Lien vers la décision

1) R. c. Grégory, [1994] A.Q. no 801 (C.A.)

[22] La gravité objective des infractions commises jointe à l'application des critères de dissuasion et de neutralisation qui sont prépondérants dans les cas de trafic de stupéfiants révèlent que la peine imposée par le juge de première instance n'est pas, en soi, sévère. Toutefois, nous sommes en présence de l'une de ces rares affaires où la motivation humaine guidera essentiellement la détermination de la peine. En effet, l'imposition d'une mesure carcérale est désormais vaine et ne servirait ni l'intérêt de protection sociale ni celui de réadaptation par une détention réflexive.

[23] L'appelante est atteinte d'une maladie dégénérative et incurable, qu'elle a vécue comme un outrage et qui la place dans une zone neutre où la mort imminente se substitue à toute réclusion sociale. À la lumière du rapport médical et du rapport d'évaluation, on peut raisonnablement penser que la société n'a plus à être protégée et que l'appelante, par commisération, n'a plus à être punie: Elle a déjà vécu 3 mois de détention préventive. Elle terminera, dans une maison de transition, les derniers mois de sa vie puisqu'il paraît souhaitable que l'ultime sentence s'accomplisse dans la dignité. Les autorités de la maison de transition détermineront le temps de séjour de l'appelante au sein de sa famille.

[24] En conséquence, je crois qu’il y a lieu d’accueillir l’appel, de surseoir au prononcé de la sentence et d’ordonner que l’appelante soit libérée selon les conditions prescrites dans l’ordonnance de probation […]

2) Colas c. R., J.E. 97-1759 (C.A.)

Juge Tourigny : Même si l'état de santé de l'appelant au moment des événements attire la sympathie, il faut dire que son procureur a affirmé devant nous qu'il n'y avait, pour le moment, aucun signe que le cancer qui l'avait affligé était encore source de problème.

Juge Biron : Je n'ignore pas que l'appelant souffre d'un cancer. Si on nous avait représenté qu'il était en phase terminale, ma conclusion aurait été différente. Or, ce n'est pas le cas.

3) Savard c. R., 2000 CanLII 6767 (QC C.A.), [2000] R.J.Q. 2262 (C.A.); J.E. 99-1455 (C.Q.)

[46] Pour les motifs qui précèdent, et compte tenu des représentations des deux parties qui soumettent que pour des raisons humanitaires liées à l'état de santé de l'appelant, l'imposition d'une mesure carcérale ne servirait pas les objectifs de la détermination de la peine, j'estime que pour éviter à l'appelant de purger la peine d'incarcération de 20 mois en conséquence du défaut, il y aurait lieu de rayer la clause d'emprisonnement ordonné à défaut de paiement.

[47] Quant à la période de 18 mois, au sujet desquels la question de l'applicabilité du sursis à l'emprisonnement ne se pose pas, je proposerais que cette peine soit remplacée par une ordonnance de sursis selon l'art. 742.1 C.cr.

Note : Le jugement de première instance relate que l'accusé est atteint d'un cancer incurable, que son expectative de vie est courte, soit un peu moins de deux ans, et que son état nécessite des traitements médicaux fréquents.

4) Champagne c. R., J.E. 2002-109 (C.A.)

[7] Enfin, en ce qui a trait au dernier argument afférent aux motifs humanitaires, bien que le Ministère public concède que l'appel devrait être accueilli et qu'une peine d'emprisonnement avec sursis devrait être imposée, la Cour est d'avis qu'elle ne peut souscrire à cette proposition pour le motif suivant : la perspective d'une opération chirurgicale prochaine et d'une convalescence de deux à quatre mois ne justifie pas le recours à une mesure exceptionnelle de clémence, comme ce fut le cas dans l'affaire [Savard].

5) R. c. L.L., J.E. 2002-798 (C.Q.)

[29] L'accusé a 60 ans; il est diabétique et souffre d'insuffisance rénale depuis septembre 2000, ce qui l'amène à subir une dialyse trois fois par semaine.

[30] Le Tribunal doit tenir compte de l'état de santé dans la détermination de la peine; mais cet état de santé ne peut soustraire complètement l'accusé à une peine qui autrement serait pleinement méritée; les tribunaux, tout en tenant compte de l'âge et de l'état de santé de certains accusés, ont néanmoins prononcé des peines d'emprisonnement en milieu carcéral quand les circonstances le justifiaient.

[31] La Cour Suprême du Canada dans l'arrêt R. c. R.N.S., 2000 CSC 7 (CanLII), [2000] 1 R.C.S. 149, a rétabli une peine d'emprisonnement en milieu carcéral de 9 mois même si l'accusé éprouvait des problèmes sérieux de santé; le juge du procès avait tenu compte de l'état de santé de l'accusé pour imposer une peine moins sévère, peine rendue déraisonnable par la Cour d'appel de la Colombie-Britannique en la transformant en peine d'emprisonnement avec sursis; l'accusé avait été déclaré coupable d'agression sexuelle sur une fillette de 5 ans. […]

[34] Les Cours d'appel de d'Ontario [R. c. Drudge, [1988] O.J. No 125 (C.A. Ont.)] de Colombie-Britannique [R. c. Maczynski, C.A.C.B., 120 C.C.C. (3d) 221, 30 octobre 1997], de Saskatchewan [R. c. S.(E.), C.A. Sask., 2001 S.K.C.A. 38, 12 mars 2001] et du Manitoba [R. c. R.(J.D.) C.A. Man., 126 Man. R. (2d) 253, 15 mai 1998] ont maintenu et même augmenté des peines en milieu carcéral en dépit de l'état de santé précaire et de l'âge avancé des accusés; l'état de santé tout en étant considéré, ne constituait pas un facteur décisif.

[36] N’eut été de son état de santé, le Tribunal aurait accédé à la demande du procureur de la poursuite et imposé une peine de pénitencier; le Tribunal est donc disposé à prononcer une peine moindre que celle réclamée par le ministère public.

[37] Toutefois, la peine ne pourra être purgée dans la collectivité, vu d’une part la présence de risques de récidive et la gravité du préjudice susceptible d’en découler et d’autre part une peine d’emprisonnement avec sursis dans la présente affaire ne rencontrerait pas l’objectif et les principes de détermination de la peine visés aux articles 718 à 718.2 du Code criminel : une peine d’emprisonnement avec sursis n’aurait pas l’effet dénonciateur et dissuasif suffisant puisque ces objectifs sont particulièrement pressants dans le présent dossier; de plus, la peine ne serait pas proportionnelle à la gravité de l’infraction et à la responsabilité de l’accusé qui est le principe fondamental dans la détermination de la peine.

[38] En conséquence, le Tribunal condamne l'accusé sur chacun des chefs d’accusation à deux ans moins un jour d’emprisonnement […]

6) R. c. P.M., [2002] A.N.-B. no 144 (Cour du Banc de la Reine du Nouveau-Brunswick)

[12] À la suite de l'accident, P.M. a subi un traumatisme médullaire, ce qui est décrit dans le rapport présentenciel comme une fracture-éclatement de la vertèbre T4 de la colonne vertébrale. Ce malheureux et tragique accident a provoqué la paralysie complète des membres inférieurs. Selon la documentation dont je dispose, P.M. est paralysé à partir de la poitrine. Il est en fauteuil roulant et nécessite quatre cathétérismes par jour. Comme il a de forts spasmes des membres inférieurs, il lui est difficile de rester assis pendant de longues périodes. En outre, il a subi de graves lésions aux deux mains. Deux doigts de la main gauche ont dû être amputés, et il a eu des greffes de peau aux deux mains. D'après les renseignements dont je dispose, il a encore de graves problèmes avec ses mains en raison de l'accident.

[13] Le rapport présentenciel indique qu'à la suite de l'accident P.M. a été hospitalisé pendant six semaines à l'hôpital de Moncton. Il a ensuite été admis au Centre de réadaptation Stan Cassidy, à Fredericton, où il a séjourné jusqu'au 20 septembre 2001. Son pronostic est incertain. On s'attend à ce que son état de santé général se détériore plus rapidement que la normale pour une personne de son âge. Il ne peut pas prendre soin de lui-même. Son épouse participe à ses soins, et je tiens à la féliciter de l'aide physique et de l'appui moral qu'elle semble apporter à son mari. Elle prend soin de lui et, en autant que je sache, elle l'aide de toutes les manières possibles lorsqu'elle ne travaille pas. Mme M. est cuisinière dans un restaurant de sa localité.

[14] Évidemment, les blessures très invalidantes que P.M. a subies me posent un problème dans la détermination de la peine. Nous tous ici présents sympathisons certainement avec P.M. en raison des malheureuses et permanentes blessures qui l'affligent aujourd'hui.

[…]

[21] Aujourd'hui, j'ai entendu la preuve présentée par la Couronne relativement aux installations médicales, au personnel médical et aux services médicaux des établissements fédéraux. Odette LeBlanc-Pellerin, chef des Services cliniques de Service correctionnel du Canada pour la région de l'Atlantique, a décrit les installations qui offrent des soins médicaux, le personnel médical en place et les services qui peuvent être offerts dans un établissement fédéral pour assurer des soins médicaux de qualité. Elle a soutenu que les soins sont offerts au besoin et qu'ils peuvent être assurés 24 heures par jour aux personnes handicapées ou qui ont de graves problèmes de santé. Elle est d'avis que les soins et les services médicaux offerts sont d'une grande qualité et qu'en plus de l'unité de soins de santé ordinaire, le pénitencier de Dorchester est doté d'une infirmerie qui offre des soins semblables à ceux offerts dans un hôpital pour les détenus qui ont de graves problèmes de santé. Elle a témoigné que le pénitencier a déjà accueilli et accueille encore à l'heure actuelle des personnes souffrant de problèmes médicaux semblables à ceux de P.M. Elle a témoigné que, selon l'importance des soins médicaux requis, P.M., s'il est incarcéré, sera sans doute placé dans une rangée de cellules ordinaire au pénitencier et que son état sera suivi de près et que les services médicaux sont offerts. Quoi qu'il en soit, d'après ce que je comprends du témoignage de Mme LeBlanc-Pellerin, des évaluations médicales seraient faites pour déterminer le degré d'incapacité de P.M. en vue de déterminer son placement. Comme je l'ai dit plus tôt, le pénitencier de Dorchester est doté d'une infirmerie qui offre au besoin des soins semblables à ceux qui sont offerts dans un hôpital.

[…]

[25] On a souligné que la jurisprudence dans des cas semblables établit deux principes de base. Premièrement, si l'établissement ne peut pas accueillir un détenu, la peine doit être différente de ce qu'elle serait normalement dans la situation. Deuxièmement, dans les cas où l'incapacité du détenu s'aggraverait même si les installations correctionnelles pouvaient l'accueillir, la peine doit là aussi être différente de ce qu'elle serait normalement.

[26] Plusieurs causes ont été mentionnées, et j'apprécie avoir eu la possibilité d'examiner cette jurisprudence avant l'audience. Les causes qui ont été mentionnées sont : R. c. Morin, [1998] O.J. No. 2040; R. c. Taylor, [1995] N.J. No. 301; R. c. Carlson, [1996] S.J. No. 123; R. c. Maczynski 1997 CanLII 2491 (BC C.A.), (1997), 120 C.C.C. (3d) 221; R. c. S. (L.J.) 1997 CanLII 1292 (ON C.A.), (1997), 116 C.C.C. (3d) 477; R. c. Shah 1994 CanLII 1290 (BC C.A.), (1994), 94 C.C.C. (3d) 45; R. c. E.M. (1993), 191 R.N.-B. (2e) 1.

[27] À la lumière de la jurisprudence et des principes qu'elle établit, le poursuivant fait valoir qu'il a été démontré à la Cour que les installations existantes peuvent accueillir P.M. et qu'il n'a pas été prouvé que l'état de P.M. se détériorera s'il est incarcéré. Le poursuivant souligne qu'il est en effet malheureux que P.M. ait subi ces graves blessures, mais que le milieu carcéral peut tout de même répondre à ses besoins malgré sa situation. Pour conclure, on soutient que la Cour ne doit pas modifier, en raison de l'incapacité et des blessures de P.M., ce qui serait autrement une peine juste.

[…]

[31] Relativement à la situation de P.M., je renvoie à l'affaire Morin. Dans cette affaire, l'accusé était atteint de sclérose en plaques, ce qui lui causait de graves problèmes de santé. Je cite ici le paragraphe 21 de cette décision du juge Salhany :

Me Mattson a fait valoir qu'une peine d'emprisonnement avec sursis ne poserait aucun risque pour la collectivité puisque M. Morin ne pose plus de risque. Il n'est plus motard. Il souffre de sclérose en plaques. Il a aussi fait valoir qu'il serait sévère d'infliger une peine d'emprisonnement à un accusé dont la santé se détériore. Il a critiqué le fait que Me Donnelly s'appuie sur la décision S.L.J., car il est d'avis que l'état de l'accusé dans cette cause n'était pas aussi grave que celui de l'accusé en l'espèce. Toutefois, le principe établit dans la décision S.L.J. et dans la récente décision de la Cour d'appel de la Colombie-Britannique dans l'affaire Maczynski 1997 CanLII 2491 (BC C.A.), (1998), 120 C.C.C. (3d) 221 (C.A.C.-B.) est clair. Selon ce principe, bien que l'état de santé d'un accusé puisse dans certains cas influencer la peine infligée, les tribunaux devraient hésiter à réduire, pour des raisons de mauvaise santé, ce qui serait normalement une peine correspondant à la gravité de l'infraction et aux circonstances du contrevenant. À moins qu'il ne soit clairement établi que l'incarcération nuirait à la santé d'un accusé au point de constituer pour ce contrevenant une peine plus sévère qu'elle ne le serait pour un autre dans des circonstances semblables, la Cour ne devrait pas faire d'exception pour le contrevenant en cause.

[…]

[41] […] Il est certain qu'il faut tenir compte de son état de santé. Il a subi des blessures dévastatrices dont les conséquences sont permanentes. […]

[42] J'ai considéré les principes de la détermination de la peine, la jurisprudence et les très graves infractions d'ordre sexuel qui ont été commises en l'espèce et je conclus qu'une peine d'emprisonnement avec sursis n'est pas appropriée en l'espèce. Une telle peine ne refléterait ni les principes ni les objectifs de la détermination de la peine. En considérant toutes les circonstances particulières de la présente cause, je conclus qu'une peine appropriée serait la suivante : Relativement au premier chef d'accusation, une peine d'emprisonnement de trois ans. Relativement au deuxième chef d'accusation, également une peine d'emprisonnement de trois ans, à purger concurremment.

7) J.-C. B. c. R., J.E. 2005-1377 (C.A.)

[26] Dans la présente affaire, faut-il le souligner, le Ministère public s'oppose à la demande de l'appelant, contrairement à ce qui s'était passé dans les arrêts Champagne et Savard.

[27] Par ailleurs, le médecin traitant de l'appelant a noté une bonne évolution, dans un rapport daté du 25 mars 2005.

[28] Dans les circonstances, je ne peux voir pourquoi la Cour acquiescerait à une telle mesure de clémence. D'ailleurs, comme l'a souligné l'avocate représentant l'intimée, les pénitenciers au Québec sont dotés d'infirmerie où l'appelant pourra être gardé et soigné, au besoin. En outre, si sa condition exige une hospitalisation, on peut présumer que les autorités pénitentiaires prendront les mesures requises à cette fin.

Note : L'accusé avait récemment subi une opération chirurgicale à la suite d'un anévrisme de l'aorte abdominale.

8) R. c. Provencher, J.E. 2005-1491 (C.Q.)

[30] Dans R. c. Shah […], le juge Finch de la Cour d'Appel de la Colombie-Britannique, ayant à examiner si le pauvre état de santé de l'accusé constitue, au motif de compassion, une raison pour réduire une sentence par ailleurs adéquate, décidait :

"Moreover, even where there is a risk that an accused may not outlive the time he is required to serve, the compassion that would evoke is not a controlling or decisive factor in deciding on the appropriate sentence. It is one of many factors to be taken into account in sentencing."

[31] Ainsi, ce facteur devra être examiné conjointement avec les autres sans toutefois y accorder une plus grande importance.

Note : L'accusé a plaidé coupable à une accusation de voie de faits causant des lésions corporelles à l'endroit de sa conjointe. Il souffrait de diabète et avait subi une chirurgie de la hanche. Le juge a reçu une preuve des soins apportés en milieu carcéral. Une peine de neuf mois est imposée.

9) R. c. Furlong, J. E. 2006-574 (C.Q.)

[44] Quant à l'état de santé de l'accusé, signalons qu'il ne s'agit pas d'une maladie incurable dont la mort est prévisible à brève échéance. La défense n'ayant pas fait la preuve que l'accusé ne peut recevoir de traitements ou de soins appropriés alors qu'il se trouverait sous la garde d'une institution carcérale, il n'y a pas lieu d'en tirer une inférence négative.

[45] Il s'agit d'un accident grave et tragique ayant nécessité une amputation. Tout en tenant compte de cette situation, nous n'y accordons pas une importance capitale et ce facteur est examiné avec les autres.

Note : L'accusé a été reconnu coupable d'avoir en sa possession des biens criminellement obtenus et d'escroquerie. À la date fixée pour les représentations sur sentence, l'accusé avait subi un accident de motocyclette ayant occasionné l'amputation d'un pied. Une peine totale de trente mois est imposée.

10) R. c. Lafleur, J.E. 2006-862 (C.Q.)

[46] Nombreuses sont les décisions traitant des motifs humanitaires invoqués pour obtenir compassion et clémence des tribunaux lors de l'imposition des sentences.

[47] Cependant, rares sont les cas où la réduction de la période d'incarcération ou le choix d'imposer la peine à être purgée dans la collectivité ont été retenus, accordant plutôt l'importance aux facteurs de dénonciation, d'exemplarité et de dissuasion générale et individuelle.

[48] Ainsi, n'ont pas été retenus comme motifs humanitaires pour éviter l'incarcération :

1) des problèmes diabétiques et d'insuffisance rénale nécessitant une dialyse trois fois par semaine (R. c. L.L., 22 février 2002, C.Q. Honorable Carol Richer, no. 700-01-034525-017);

2) un cancer nécessitant des traitements de chimiothérapie (Colas c. R., C.A Qc, 200-10-000025-952, 27 août 1997, J.E. 97-1759);

3) la perspective d'une opération chirurgicale prochaine et d'une convalescence de deux à quatre mois (R. c. Champagne, C.A. Qc, no. 200-10-001057-004, 28 décembre 2001);

4) l'âge avancé (72 ans) et une récente opération chirurgicale à la suite d'un anévrisme de l'aorte abdominale (J.-C. B. c. R., C.A. Qc, no. 200-10-001500-037, 13 juin 2005).

[49] La présence d'infirmeries, de médecins traitants et l'accès aux hôpitaux, le cas échéant, suppléent aux arguments qui mettent de l'avant les problèmes de santé des accusés ( cf. J.-C. B. précité).

[50] Au même effet, R. c. R.N.S. 2000 CSC 7 (CanLII), [2000] 1 R.C.S. 149 et R. c. Shah 94 C.C.C. (3d) 45. Dans ce dernier arrêt, le juge Finch de la Cour d'Appel de la Colombie Britannique, ayant à examiner si le pauvre état de santé de l'accusé constitue, au motif de compassion, une raison pour réduire une sentence par ailleurs adéquate, décidait :

«Moreover, even where there is a risk that an accused may not outlive the time he is required to serve, the compassion that would evoke is not a controlling or decisive factor in deciding on the appropriate sentence. It is one of many factors to be taken into account in sentencing.»

[51] Ce n'est que dans des cas rares où des mesures exceptionnelles de clémence seront retenues pour alléger la sévérité d'une sentence par ailleurs méritée.

[52] À titre d'exemple, R. c. Savard [2000] R.J.Q. no. 2262 et Gregory c. R., C.A. Qc, no. 500-10-00084-945, 7 octobre 1994, une accusée, ayant contracté le virus du sida de son mari et vouée à une mort évidente, ayant été déclarée coupable de trafic de stupéfiants.

[53] Ainsi, à moins d'une situation extrême, les tribunaux ne retiendront pas comme facteur atténuant le piètre état de santé d'un accusé.

[54] Mais signalons que l'ensemble de ces décisions traite des problèmes physiques nécessitant des soins qualifiés et non pas de problèmes de santé mentale d'un accusé qui requiert une surveillance constante.

[55] En matière de maladie mentale, notre cour d'Appel soulignait dans R. c. Chan, no. 500-10-000152-924, 20 janvier 1993, que les critères usuels utilisés sur sentence ne sont pas d'une grande utilité et les facteurs d'exemplarité et de punition sont d'une importance beaucoup réduite (voir également R. c. Valiquette 1990 CanLII 3048 (QC C.A.), [1990] 60 C.C.C. (3d) 325).

[56] Or, quant à la situation de l'accusé dans la présente affaire, hormis le témoignage de l'accusé lors de la demande de remise en liberté où il a invoqué des problèmes au dos, aucune autre preuve n'existe quant à une situation où la santé physique de l'accusé nécessiterait la clémence de la Cour.

[57] Au contraire, preuve a été faite que l'accusé bénéficie des services de l'infirmerie de la prison où il se trouve en permanence et une médication appropriée lui est fournie.

[58] Cependant, une preuve largement convaincante a été faite, par le dépôt de toutes les expertises médicales mentionnées antérieurement, que l'accusé est atteint d'une maladie mentale dégénérative qui l'isole et qui, à plus ou moins brève échéance, nécessitera son admission en institution spécialisée.

[59] C'est sur cet aspect bien particulier que doit être pris en compte la situation de l'accusé, car le Tribunal ne peut pas ignorer le fait que toute sentence rendue envers l'accusé n'aura aucun effet dissuasif ou punitif et que l'élément réhabilitation est absent. […]

[95] La sombre perspective de son avenir, en perte d'autonomie et voué au placement en institution, à plus ou moins brève échéance, ne doit pas, cependant, l'emporter sur les facteurs aggravants.

Note : L'accusé a été déclaré coupable de négligence criminelle ayant causé la mort. Il souffre de déficits cognitifs, ce qui suggère une maladie dégénérative de type démentiel. Cette maladie était installée lors des événements en cause. Une peine de 36 mois est imposée.

11) P.L. c. R., J.E. 2006-1829 (C.A.)

[15] Par ailleurs, l’état de santé de l’appelant ne permet pas de conclure, comme le souligne le juge de première instance, que, pour cette raison, il y ait lieu de privilégier l’emprisonnement avec sursis.

Note : Prêtre condamné à une détention de douze mois pour une agression commise sur un adolescent.

12) R. c. Alcius, J.E. 2007-549 (C.A.)

[53] Moreover, as the case-law shows, there has to be a considerable degree of medical misfortune or disability in place before health factors can be considered as a compassionate basis to impose a sentence of incarceration less than what it might be otherwise, especially as it relates to a crime of violence such as this one11. Such is not the case of Mr. Alcius. Quite simply, the trial judge ought not to have taken this factor into account as an attenuating factor.

11 See, for example, R. v. Shah, 1994 CanLII 1290 (BC C.A.), (1994), 94 C.C.C. (3d) 45 (B.C.C.A.), where the B.C. Court of Appeal declined to reduce an eight-year term of imprisonment in a case of forgery and criminal negligence causing death where the offender suffered from diabetes, hypertension and heart disease; R. v. R. (A), 1994 CanLII 4524 (MB C.A.), (1994) 88 C.C.C. (3d) 184 (Man. C.A.), where the Manitoba Court of Appeal eliminated a sentence of 30 months imprisonment in the case of a 71 year-old man who suffered from debilitating muscular dystrophy and who had been convicted of a sexual assault on his daughter that occurred over 20 years earlier; and, R. v. Andrews, 2004 MBCA 60 (CanLII), (2004), 183 C.C.C. (3d) 321 (Man. C.A.), where the Manitoba Court of Appeal reduced a sentence of four years of incarceration to one of two years less one day in the case of a man with a terminal illness who had been convicted of possession of cocaine for the purpose of trafficking.

Note : L'accusé avait été déclaré coupable d'homicide involontaire d'un enfant de trois ans. Durant les procédures, l'accusé subit un infarctus, nécessitant un ajournement du procès. Le juge de première instance impose une peine de deux ans moins un jour, prenant en considération les problèmes cardiaques de l'accusé. Selon la Cour d’appel, il s’agit d’une erreur de droit. Toutefois, la peine est maintenue.

13) R. c. Daye, [2007] J.Q. no 4331 (C.Q.)

[40]… h) l'accusé a des problèmes de santé majeurs. Le plus important est une insuffisance rénale grave. Il est sous dialyse à l'hôpital de St-Jérôme trois jours par semaine. Il est diabétique. Il a des problèmes d'estomac et de pression sanguine. Il souffre d'apnée du sommeil et doit recourir à un appareil spécial pour dormir la nuit. Il a subi, il y a quelques années une importante opération au dos. Il doit s'astreindre à une consommation quotidienne d'un nombre effarant de médicaments (22). […]

[50] Je dois accorder ici une importance particulière à l'état de santé précaire de l'accusé.

[51] La peine doit être individualisée. Je dois me demander si la peine de prison ferme que je devrais normalement imposer à l'accusé constitue une peine injuste et disproportionnée compte tenu de son état.

[52] M. Daye doit séjourner à l'hôpital au moins trois jours semaine pour ses traitements d'hémodialyse. Il n'a plus aucune qualité de vie. Son dossier médical SD-1 relève de l'encyclopédie médicale, tellement sa santé est hypothéquée.

[53] Même s'il était incarcéré, les autorités carcérales devraient l'escorter toutes les semaines, trois jours à l'hôpital, pour y passer la journée, et ceci, sans compter les visites médicales nécessaires avec d'autres spécialistes.

[54] Même détenu, l'accusé passerait le plus clair de son temps en dehors du milieu carcéral et pour le peu de temps passé en milieu carcéral, il devrait certes être confiné à l'infirmerie vu sa médication particulière et la nécessité d'un appareil pour contrer son apnée.

[55] Condamner l'accusé à l'emprisonnement ferme dans les circonstances particulières de la présente affaire m'apparaît non concordant avec une saine justice. Son état de santé exceptionnel, à lui seul, justifierait une peine à être purgée dans la collectivité.

[56] Mais, il y a plus, toute récidive criminelle apparaît hautement improbable.

[57] Et, en définitive, la société risquerait d'être plus défavorisée que l'accusé par une peine d'emprisonnement ferme.

Note : L'accusé avait plaidé coupable à une accusation d’incendie criminel. Le Tribunal impose une peine de deux ans moins un jour à être purgée dans la collectivité.

14) R. c. Bourré, C.Q. Alma, Chambre criminelle et pénale, no 160-01-000139-014, 14 mai 2007

L'accusé a été déclaré coupable d’une fraude de l’ordre de 20 000 $. Le juge impose une ordonnance de sursis de vingt mois. Il a qualifié de circonstance atténuante le facteur suivant :

[…] la situation actuelle de l'accusé qui vit de rentes d'invalidité (rentes du Québec), qui reçoit des soins, traitements et suivis réguliers pour son cancer et qui n'est pas en mesure de fonctionner adéquatement; [paragraphe 55]

15) R. c. J.P., C.A. Québec, no 200-10-002085-079, 19 octobre 2007

L'accusé a été déclaré coupable de quatre chefs d’accusation d’agression sexuelle, d’attentat à la pudeur et de voies de fait. Le premier juge le condamne à une peine unique combinée de six mois d’emprisonnement ferme et de 17 mois d’emprisonnement à être purgés dans la collectivité. Il s’agit là d’une erreur de droit. La Cour d’appel condamne l'accusé à neuf mois sur certains chefs plus, sur certains autres, à trois mois dans la collectivité. La Cour d’appel teint compte de certains facteurs atténuants « tels la reconnaissance des actes et l’état de santé précaire de l’intimé ».

lundi 26 juillet 2010

Le paragraphe 21(1) du Code criminel est destiné à rendre juridiquement sans importance la différence entre le fait d'aider et d'encourager à commettre une infraction et le fait de la commettre personnellement

R. c. Thatcher, [1987] 1 R.C.S. 652

Le paragraphe 21(1) du Code criminel est destiné à rendre juridiquement sans importance la différence entre le fait d'aider et d'encourager à commettre une infraction et le fait de la commettre personnellement. Il prévoit que chaque mode de perpétration d'une infraction entraîne la même culpabilité et, en fait, qu'une personne commette personnellement ou qu'elle aide ou encourage seulement, elle est coupable de cette infraction, en l'espèce, de meurtre, et non d'une quelconque infraction distincte. Il n'est pas nécessaire que le ministère public précise dans l'acte d'accusation la nature de la participation de l'accusé à l'infraction. Lorsque des éléments de preuve soumis à un jury indiquent qu'un accusé a commis un crime personnellement ou qu'il a aidé ou encouragé une autre personne à le commettre, pourvu que le jury soit convaincu hors de tout doute raisonnable que l'accusé a agi d'une manière ou de l'autre, il n'est pas important de savoir ce qui s'est réellement produit. Il en découle que l'art. 21 empêche d'exiger que le jury soit unanime quant à la nature précise de la participation de l'accusé à l'infraction.

Le dédommagement à la victime doit toujours être envisagé lors de la détermination de la peine

La réoption n'est pas un événement imprévisible ou inévitable

R. v. Long, 2023 ONCA 679 Lien vers la décision [ 62 ]        I would also observe that the appellant re-elected a trial in the OCJ on Febru...