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samedi 2 octobre 2010

Revue de l'état du droit concernant l'analyse de la crédibilité et la fiabilité des témoins

R. c. Boisvert, 2010 QCCQ 6312 (CanLII)

Lien vers la décision

[319] L'honorable juge Estey dans l'arrêt White (1947) R.C.S., page 268, s'exprime ainsi:

« La question de la crédibilité en est une de fait qui ne peut être déterminée par l'application d'un ensemble de règles qui à ce qui est suggéré devrait avoir force de loi. Des juges éminents ont parfois indiqué certains guides qui se sont révélés être d'une grande utilité mais mes recherches m'indiquent qu'on n'a jamais tenté d'indiquer tous les facteurs susceptibles d'entrer en jeu. C'est une question où trop de caractéristiques humaines tant positives que négatives doivent être prises en considération. L'intégralité générale de l'intelligence du témoin, ses facultés d'observation, la capacité de sa mémoire et l'exactitude de sa déposition sont des facteurs importants. Il est important également de déterminer s'il essaie de bonne foi de dire la vérité, s'il est sincère et franc ou s'il a des préjugés ou s'il est réticent ou évasif. Toutes ces questions entre autres peuvent recevoir une réponse d'après l'observation de la conduite et du comportement général du témoin en déterminant la crédibilité. »

[320] Comme nous le savons tous, ces propos ont résisté à l'épreuve du temps et sont toujours d'actualité.

[321] Dans la décision Cedras c. Sa Majesté la Reine (1994) 31 Criminal Reports 4e édition page 305, le regretté et honorable juge Michel Proulx de la Cour d'appel du Québec écrit :

« Aucun texte de loi n'établit pour les Juges de faits les critères qui servent à évaluer la crédibilité d'un témoin. Chacun grâce à son expérience, son bagage de connaissance et son sixième sens note à travers ce prisme qui est le sien les indices déterminants de la fiabilité ou du discrédit propre à chaque témoin. »

(p. 312)

[322] Le 12 février 1999, la Cour d'appel dans l'affaire Jean-Pierre Hamelin c. Sa Majesté la Reine, dossier greffe de Québec, portant le numéro 400-01-001295-030 rappelle que la cohérence parfaite n'est pas un facteur de garantie absolue :

« Il appartient alors au Juge de première instance d'apprécier la crédibilité de chaque témoin en particulier ainsi que le poids de l'ensemble de la preuve à l'intérieur de la grille prescrite par la jurisprudence. Lorsque la preuve est incohérente il doit intervenir et au besoin une Cour d'appel le fera comme cela est arrivé dans l'affaire Mayrand. Cependant il ne faut pas conclure que seule la cohérence parfaite d'une preuve testimoniale permet de la considérer comme crédible. La preuve doit plutôt être évaluée dans la totalité de ses qualités et de ses défauts avec attention dans ces éléments particuliers comme dans son ensemble pour déterminer précisément si le standard du droit de la preuve criminelle est respecté. »

[323] Aussi, il n'est pas superflu de rappeler un article rédigé par l'honorable juge François Doyon maintenant juge à la Cour d'appel du Québec alors qu'il siégeait comme membre de la Cour du Québec: L'évaluation de la crédibilité des témoins publiée en 1999, 4 Canadian Review D.P. page 331 dans lequel il précise que fiabilité et crédibilité sont deux concepts différents. À ce sujet, il s'exprime ainsi:

« La crédibilité se réfère à la personne et à ses caractéristiques, par exemple son honnêteté, qui peuvent se manifester dans son comportement. On parlera donc de la crédibilité du témoin. La fiabilité se réfère plutôt à la valeur du récit relaté par le témoin on parle de fiabilité de son témoignage autrement dit il a un témoignage digne de confiance. Ainsi il est bien connu que le témoin crédible peut honnêtement croire que sa version de faits est véridique alors qu'il n'en est rien et ce tout simplement parce qu'il se trompe. La crédibilité du témoin ne rend donc pas nécessairement son récit fiable. »

[324] Comme l'enseigne depuis longtemps la Cour d'appel du Québec et la Cour suprême du Canada, le Tribunal peut rejeter certaines parties d'un témoignage et en accepter d'autres.

L'intoxication involontaire est recevable à l'encontre d'une accusation de conduite de véhicule alors que la capacité de conduire est affaiblie par l'alcool ou la drogue

R. c. Veillette, 2010 QCCQ 7728 (CanLII)

[47] Comme le rappelle l'auteur HARRISON dans son volume Capacités affaiblies, l'intoxication involontaire est recevable à l'encontre d'une accusation de conduite de véhicule alors que la capacité de conduire est affaiblie par l'alcool ou la drogue (Arrêt King 1962 CanLII 16 (S.C.C.), (1962) R.C.S. 746). Dans cette affaire, l'accusé avait reçu une injection chez le dentiste et avait subi son procès sur une accusation de conduite avec les facultés affaiblies. La Cour suprême a décidé qu'une personne ayant reçu une injection de drogue chez un dentiste et n'ayant pas eu une connaissance de ses effets sur sa capacité de conduire ne peut être reconnue coupable. La Cour émet certains principes, rappelant que le fardeau repose sur la poursuite qui doit prouver l'intention et l'actus reus.

[50] Comme le rappelle la Cour d'appel dans l'affaire Geoffroy ((2004) CanLii, 209) :

La mens rea, un élément essentiel de l'infraction reprochée, est présumée lorsqu'une personne conduit une automobile alors que ses facultés sont affaiblies à cause de la consommation d'alcool ou d'une drogue. Cette situation est censée résulter d'actes accomplis volontairement.

La culpabilité peut être écartée, si une preuve soulève un doute raisonnable sur la capacité qu'avait cette personne, au moment où elle a décidé de conduire, de réaliser le caractère sérieux et inadéquat de son état sans une faute de sa part.

[52] La défense doit soulever un doute raisonnable et pour ce faire, elle doit rendre plausible l'effet de cette intoxication. Le juge n'est pas un expert et donc, n'a pas la capacité d'induire les effets d'un médicament absorbé en même temps que de l'alcool. Comme de dit le juge Deblois dans l'affaire Auclair 2004 CanLII 15525 (QC C.S.), (2004 CanLii 15525):

▪ Il est établi en droit pénal canadien que l'intoxication involontaire est assimilée à l'automatisme sans aliénation mentale. Or, dans les arrêts la Reine c. Stone de la Cour suprême et Carignan c. la Reine de la Cour d'appel du Québec, il est clairement et spécifiquement reconnu que pour présenter une défense d'automatisme, la défense ne peut se contenter de la simple version de l'accusé, de sorte qu'une preuve par expert pour appuyer cette affirmation est nécessaire. L'honorable juge Gendreau de la Cour d'appel dans l'arrêt Carignan ( 2003 CanLII 32932 (QC C.A.), [2003] R.J.Q. 1022) écrit:

Il ressort d'un examen de la jurisprudence que, pour s'acquitter de la charge de présenter une défense applicable à l'automatisme, l'accusé doit alléguer qu'il a agi involontairement au moment pertinent. Comme je l'ai dit précédemment, une simple allégation de caractère involontaire ne suffit pas.

▪ Et le juge Gendreau continue à la page 184:

En plus d'alléguer le caractère involontaire, la défense doit présenter une preuve d'expert en psychiatrie à l'appui de son allégation.

▪ Et il termine à la page 187:

Pour satisfaire à la charge de présentation ou d'établissement des fondements, une allégation du caractère involontaire appuyée d'une preuve psychiatrique est nécessaire dans tous les cas. Toutefois, cette charge exigera généralement plus qu'une allégation de caractère involontaire de la part de l'accusé, confirmée par une preuve d'expert que l'automatisme est plausible (…)

[53] L'avocat de la défense a habilement plaidé que comme la substance n'avait pu être déterminée, l'expertise devenait impossible à réaliser. Peut-être, mais dans ce cas, la défense a failli à son fardeau de soulever un doute raisonnable. Une expertise devait être produite pour rendre plausible l'intoxication involontaire.

[55] Même si une expertise avait démontré que Veillette ne pouvait raisonnablement s'attendre aux effets de la médication lorsqu'il a décidé de conduire son véhicule, la preuve a démontré que lorsqu'il s'est rendu compte qu'il avait les facultés affaiblies, il tout de même décidé de continuer sa route.

[56] Pourtant, lorsque le conducteur réalise par ses propres constatations ou lorsqu'il est informé par un tiers qu'il n'est pas en état de conduire, la défense d'intoxication involontaire ne peut s'appliquer. En effet, dans ces circonstances, l'élément intentionnel de l'infraction est prouvé.

[57] Dans l'affaire Geoffroy précitée, la Cour dit ceci:

Le fait pour l'accusé d'être conscient de l'affaiblissement de sa capacité de conduire au moment d'entrer dans le véhicule, ou son aveuglement volontaire à cet égard, est suffisant pour retenir sa culpabilité, et ce, bien qu'à l'origine, il puisse s'être intoxiqué involontairement.

[62] Pourtant, il est de sa responsabilité de connaître les conséquences de la prise du médicament en même temps que l'alcool. C'est lui qui prend de l'alcool après le médicament. C'est sa responsabilité de savoir s'il peut le faire. Le médecin ne peut présumer qu'à la sortie de son cabinet, le patient va ingurgiter une grosse bière.

[63] Comme le rappelle le juge Morand dans l'affaire Danis Dionne 2010 QCCQ 253 (CanLII), (2010 QCCQ 253, 8 février 2010):

La personne qui reçoit une ordonnance pour la délivrance d'un médicament doit faire diligence raisonnable pour s'enquérir des informations pertinentes pour faire un usage éclairé de la substance.

Lorsqu'un policier n'est pas en mesure de respecter les exigences de l'article 254(2), il doit faire le nécessaire pour faciliter la consultation avec un avocat, y compris lui demander s'il a un téléphone cellulaire

R. c. Gauthier, 2010 QCCQ 7725 (CanLII)

[7] Dans l'affaire Orbanski, la Cour suprême établit que même si le droit à l'assistance d'un avocat garanti par l'article 10 (b) de la Charte pourrait être violé lorsque sont prises les mesures de détection pour déterminer la sobriété d'un accusé, cela est raisonnable et nécessaire. L'objectif étant de réduire le carnage attribuable à l'alcool au volant, le recours à des mesures de détection raisonnables est rationnel compte tenu de l'objectif poursuivi et compte tenu également des faits limités auxquels peut servir l'élément de preuve auto-incriminant.

[12] Dans l'affaire Grant, la Cour suprême détermine qu'un délai de 30 minutes entre la détection de l'odeur d'alcool et le test de dépistage est trop long. Il y a alors violation du droit de l'accusé à l'assistance d'un avocat pendant cette période de détention.

[13] Bien sûr, les policiers n'ont pas l'obligation d'avoir l'appareil de dépistage avec eux en toutes occasions. Le texte de l'article 254(2) prévoit que l'agent de la paix qui a des motifs raisonnables de soupçonner qu'une personne a de l'alcool dans son organisme peut ordonner à cette personne de fournir immédiatement un échantillon convenable pour le test de l'appareil de détection.

[14] En certaines circonstances exceptionnelles, notamment lorsque des policiers sont appelés sur une scène d'accident, la jurisprudence reconnaît qu'il est normal que les policiers donnent la priorité aux personnes blessées. En conséquence, après s'être exécutés, les policiers sont bien fondés d'administrer le test de dépistage puisqu'il est alors raisonnablement possible de le faire.

[16] Dans l'affaire Higgins, la Cour d'appel du Manitoba précise que le facteur déterminant dans l'appréciation du délai de l'article 254(2) n'est pas tant la longueur du délai - qui doit tout de même être très court - mais plutôt, la raison du délai. Dans cette affaire, l'ordre a été considéré avoir été donné "immédiatement" lorsque la prise d'échantillon est effectuée 14 minutes après que l'ordre ait été donné, parce que l'agent de la paix a dû attendre sur les lieux de recevoir l'appareil de détection approuvé et que l'accusé ne pouvait avoir d'opportunité réelle de contacter un avocat.

[17] Dans l'affaire George, la Cour d'appel de l'Ontario précise que lorsqu'un policier n'est pas en mesure de respecter les exigences de l'article 254(2), il doit faire le nécessaire pour faciliter la consultation avec un avocat, y compris lui demander s'il a un téléphone cellulaire.

[18] L'auteur Karl-Emmanuel Harrison est également de cette opinion:

Dans la mesure où s'écoule un délai entre l'ordre et la prise d'un échantillon d'haleine, notamment lorsque les agents de la paix n'ont pas en leur possession

un appareil de détection approuvé, des mesures raisonnables doivent être prises pour faciliter le droit à l'avocat de la personne détenue. D'une part, ils doivent aviser la personne détenue de son droit à l'avocat. D'autre part, ils doivent alors vérifier s'il existe une possibilité réelle d'exercice du droit à l'avocat. Pour ce faire, ils peuvent vérifier la possession par la personne détenue d'un cellulaire, la présence d'un téléphone public environnant ou se rendre à un poste de police situé à proximité. À moins que le prélèvement ne soit effectué immédiatement, la disponibilité d'un téléphone impose l'obligation d'informer le détenu de son droit à l'avocat. S'il existe une possibilité réelle d'exercice du droit à l'avocat entre le moment où l'ordre de soumettre à un test de dépistage est donné et la prise d'échantillon d'haleine, l'ordre est invalide et la violation du doit constitutionnel à l'avocat ne constitue plus une limite raisonnable.

[19] En fait, l'omission du droit à l'avocat dans le cas de tests de dépistage en bordure de la route est justifiée en autant que le test soit administré immédiatement.

[20] À compter du moment où, comme en l'espèce, le test n'est pas administré immédiatement, il doit y avoir dénonciation du droit à l'avocat, ce qui n'a pas été le cas en l'espèce.

vendredi 1 octobre 2010

Le non-respect des exigences relativement au délai dans lequel une dénonciation doit être présentée à la suite d'une promesse de comparaître rend cette dernière caduque

R. c. Demeule, 2009 QCCA 325 (CanLII)

[5] Le juge a commis une erreur. La jurisprudence prévoit, en effet, que le non-respect des exigences de l'article 505 C.cr. relativement au délai dans lequel une dénonciation doit être présentée à la suite d'une promesse de comparaître rend cette promesse caduque, mais elle n'entraîne pas une perte de compétence du Tribunal. En l'absence de dénonciation, le Tribunal n'acquiert aucune compétence et, s'il n'a pas cette compétence, il peut difficilement la perdre.

L'alinéa 11 a) de la Charte n'impose aucune formalité particulière à la communication de l'information à l'accusé concernant l'infraction qu'on lui reproche

R. c. Delaronde, 1996 CanLII 6332 (QC C.A.)

L'alinéa 11 a) de la Charte enchâsse le droit d'un inculpé d'être «informé» de l'infraction qu'on lui reproche. L'exécution du mandat d'arrestation remplit certainement, de manière optimale, l'obligation qui est impartie au ministère public. Toutefois, cette obligation pourrait être accomplie par d'autres moyens que les modes d'interpellation judiciaire prévus aux art. 504 à 514 C.cr.

L'alinéa 11 a) de la Charte n'impose aucune formalité particulière à la communication de l'information: il exige simplement que l'inculpé soit instruit de l'infraction précise qu'on lui reproche. Les modes de télécommunication (télécopieur ou téléphone) pourraient même être utilisés sous réserve, toutefois, de la preuve de la réception de l'information par l'inculpé incombant au ministère public. La diminution considérable des ressources dont bénéficie l'administration jointe à l'augmentation du volume des transactions criminelles permettent de justifier l'utilisation de ces modes de télécommunication.

jeudi 30 septembre 2010

Une objection au dépôt en preuve d'un certificat d'analyse des échantillons d'alcool doit avoir lieu au moment où la preuve est présentée et non lors des plaidoiries à la fin du procès

R. c. Thelisma, 2010 QCCS 3420 (CanLII)

[9] La question est donc de savoir si l'appelant pouvait, lors de ses observations à la fin du procès, formuler des objections à l'égard de l'admissibilité du certificat déjà déposé en preuve.

[10] La jurisprudence sur cette question est unanime.

[11] Dans R. c. C.(L.), le juge Rochette écrit ce qui suit:

Si l'appelant entendait soulever l'absence de motifs raisonnables tant au plan du Code criminel que de la Charte, il aurait dû s'objecter au dépôt des résultats d'analyse de l'alcootest et forcer le ministère public à faire la démonstration de tels motifs. Il aurait dû soulever cette prétendue lacune dans la preuve et forcer l'administration d'une preuve additionnelle, ou faire lui-même cette preuve. Il aurait dû le faire assez tôt pour que le poursuivant puisse répliquer efficacement.

[12] Dans l'arrêt R. c. Gundy, le juge Rosenberg de la Cour d'appel de l'Ontario énonce l'approche suivante lorsque la question de l'admissibilité des résultats d'un alcootest est en cause:

To summarize, on a charge of "over 80" or impaired driving, where an issue arises as to the admissibility of the results of the Intoxilizer/Breathalyzer analysis, the trial court should proceed as follows:

Generally

1. If the accused does not challenge the admissibility of the results of the Intoxilizer/Breathalyzer analysis on the basis that the accused's rights under the Charter were violated, the Crown is not required to establish that the officer had reasonable and probable grounds to make the s. 254(3) demand.

2. Any objection to the admissibility of the results of the analysis should ordinarily be made, at the latest, when the Crown tenders the evidence either through a certificate under s. 258(1)(g) or by way of oral testimony.

3. Where the accused intends to object to the admissibility of the results of the analysis on the basis of a violation of the Charter, the accused should comply with Rule 30 of the Rules of the Ontario Court of Justice in Criminal Proceedings, although a trial judge has a discretion to dispense with notice in a proper case.

Charter challenge because of lack of reasonable and probable grounds

4. Where the accused objects to the admissibility of the results of the analysis pursuant to ss. 8 and 24(2) of the Charter that the officer lacked reasonable and probable grounds to make the demand, the burden is on the Crown to establish the requisite grounds.

5. Reasonable and probable grounds involve an objective and subjective test. Where the grounds depend upon a "fail" from an approved screening device, the Crown must prove that the officer reasonably believed that he or she was using an approved device.

6. In the absence of credible evidence to the contrary, the officer's testimony that he or she made a demand with an approved screening device is sufficient evidence that the officer had the requisite reasonable belief. The officer is not required to give the particular model number or otherwise identify the device. Obvious errors such as incomplete reference to the model number do not undermine the officer's testimony that the device was an approved screening device.

7. Where the officer did not have the requisite reasonable and probable grounds, the warrantless seizure of breath samples for analysis in an Intoxilizer or breathalyzer is an unreasonable seizure within the meaning of s. 8 and the results may be excluded under s. 24(2) of the Charter.

[13] Le juge Rosenberg examine aussi spécifiquement la question de la tardiveté d'une objection au dépôt en preuve d'un certificat d'analyse des échantillons d'haleine.

[14] Il formule les observations suivantes:

Defence counsel took no objection to the admissibility of the results of the Intoxilizer tests either when the certificate was tendered during the evidence of Constable Twilley or during the testimony of the Intoxilizer operator, Constable Cormier. He also did not object to Constable Cormier's testimony about the results of the tests or the admissibility of the Subject Test Reports that also showed the results of the Intoxilizer tests. Further, no objection was taken to the admissibility of any of this evidence at the close of the Crown's case. Finally, the defence expert referred to this evidence during his testimony. The first inkling that there was any concern about the admissibility of this part of the Crown's case came a month later during submissions. In my view, the objections came too late.

[…]

In my view, the trial judge erred in permitting the defence to challenge the admissibility of the certificate and the results of the Intoxilizer test at the completion of the trial. Allowing the argument at that stage did not serve the interests of justice. I do not agree that the Crown was not prejudiced by the manner in which the challenge to the evidence unfolded. Had timely objection been taken, Crown counsel would have had the option of calling additional evidence. A month later, the case was closed and presumably the witnesses were gone. As it turned out, the trial judge dismissed the objection, but the Crown could have been unfairly prejudiced because of the defence's failure to make a timely objection. These observations do not relate solely to the Charter issue but apply to all of the other objections to the admissibility of the Intoxilizer results that were taken by counsel for the first time at the end of the case.

[15] Il réfère aussi à la décision de la Cour d'appel de Saskatchewan dans R. c. Enden où le juge Sherstobitoff écrit ce qui suit:

It is trite law that an objection to the admissibility of evidence must be made when the evidence is tendered. See R. v. Pelletier 1995 CanLII 3923 (SK C.A.), (1995), 97 C.C.C. (3d) 139, 128 Sask. R. 214 (Sask. C.A.) and R. v. Kutynec reflex, (1992), 70 C.C.C. (3d) 289, 7 O.R. (3d) 277 (Ont. C.A.). To allow the delay argument at the final argument stage of the trial would deprive the Crown of the opportunity to lead evidence relevant to the issue. It is further noted in this respect that the respondent did not cross-examine the Crown witnesses respecting delay, and did not take up the Crown on its offer to put the officer who accompanied the arresting officer on the stand for cross-examination.

[16] Finalement, dans l'affaire R. c. Charrette, le juge Moldaver écrit ceci:

I am further satisfied that as a matter of policy and sound criminal procedure, the Rilling principle should apply equally to s. 258(1)(c) as it does to s. 258(1)(g). When one considers the carnage and destruction caused by impaired drivers, I do not think we should be promoting "trial by ambush" in "over 80" trials. In Gundy, this court made it clear that the notice requirements for Charter applications should, as a rule, be adhered to and that non-Charter motions to exclude evidence should be raised before or when the evidence is proffered (see Gundy at paras. 19-24 and 50).

[17] Toutes ces décisions établissent le même principe. Une objection au dépôt en preuve d'un certificat d'analyse des échantillons d'alcool doit avoir lieu au moment où la preuve est présentée et non lors des plaidoiries à la fin du procès.

Les obligations du juge d'instance, lorsque l’accusé n’est pas représenté par avocat

Deneault c. R., 2010 QCCS 4234 (CanLII)

[52] Il faut souligner que « la perspective d'entreprendre ou de poursuivre un procès sans que l'accusé ne soit représenté par avocat n'est guère réjouissante tant pour le juge que pour l'avocat de la Couronne, mais c'est une perspective qui existe ».

[53] Le défi est ainsi décrit par la juge Michelle Fuerst :

Whatever the reason for his or her status, the self-represented accused is usually ill‑equipped to conduct a criminal trial. He or she comes to court with a rudimentary understanding of the trial process, often influenced by misleading depictions from television shows and the movies. His or her knowledge of substantive legal principles is limited to that derived from reading an annotated Criminal Code. He or she is unaware of procedural and evidentiary rules. Even once made aware of the rules, he or she is reluctant to comply with them, or has difficulty doing so. The limitations imposed by the concept of relevance are not understood or are ignored, and the focus of the trial is often on tangential matters. Questions, whether in examination-in-chief or cross-examination, are not framed properly. Rambling, disjointed or convoluted questions are the norm. The opportunity to make submissions is viewed as an opportunity to give evidence without entering the witness box.

[54] Toutefois, lorsqu'on examine le caractère équitable d’un procès impliquant un accusé non représenté, il est utile de garder à l'esprit les remarques de Lord Woolf dans son rapport intitulé Access to Justice même s’il est question dans ce rapport des règles qui s'appliquent lors d'un procès civil :

Only too often the litigant in person is regarded as a problem for judges and for the court system rather than the person for whom the system of civil justice exists. The true problem is the court system and its procedures, which are still too often inaccessible and incomprehensible to ordinary people.

[55] Ces remarques peuvent certainement être appliquées à la justice criminelle.

[56] Les obligations du juge d'instance, lorsque l’accusé n’est pas représenté, ont été résumées ainsi par le juge Chamberland dans R. c. Guénette:

La situation des justiciables qui se présentent seuls à leur procès, sans l'assistance d'un avocat, est toujours délicate et ce, peu importe le stade du processus judiciaire. Au stade du procès, le juge a le devoir de s'assurer que l'accusé ne soit pas privé de son droit à un procès juste et équitable en raison de son ignorance des règles de la procédure criminelle. Il expliquera donc sommairement à l'accusé le déroulement de la procédure pour que ce dernier puisse faire des choix éclairés en temps utile; il prêtera aussi à cet accusé une aide raisonnable pour qu'il puisse faire valoir toute défense qu'il peut avoir, tout en évitant d'agir comme son avocat, au risque de perdre l'impartialité essentielle à l'exercice de ses fonctions. (Pierre BÉLIVEAU et Martin VAUCLAIR, Traité général de preuve et des procédures pénales, 8e éd., Éditions Thémis, 2001, par. 389; voir également R. c. McGibbon, 1988 CanLII 149 (ON C.A.), (1988) 45 C.C.C. (3d) 334, à la page 347 (C.A. Ontario); Verdun (Ville de) c. Sureau, C.A. Montréal 500-10-001660-990, le 16 janvier 2001, les juges Proulx, Fish et Chamberland)).

Ce devoir a toutefois ses limites, le juge ne pouvant jouer à la fois le rôle de l'avocat et celui de l'arbitre impartial du débat qui se déroule devant lui. L'accusé qui se présente seul à la cour ne jouit cependant pas de privilèges particuliers (R. c. Fabrikant, 1995 CanLII 5384 (QC C.A.), (1995) 97 C.C.C. (3d) 544, à la page 574 (C.A. Québec)). Le juge n'est pas tenu de conseiller l'accusé à toutes les étapes du procès, comme un avocat l'aurait fait (R. c. Taubler, reflex, (1987) 20 O.A.C. 64, à la page 71 (C.A. Ontario) et R. c. Rain, 1998 ABCA 315 (CanLII), (1998) 130 C.C.C. (3d) 167 (C.A. Alberta)). Le juge ne peut pas prendre de décisions stratégiques en faveur, et à la place, de l'accusé; par exemple, la décision de poursuivre un contre-interrogatoire ou celle de témoigner (Pierre BÉLIVEAU et Martin VAUCLAIR, Traité général de preuve et des procédures pénales, précité, par. 1126).

Tout est donc question de mesure, d'équilibre. Il faut reconnaître au juge du procès une bonne mesure de discrétion en cette matière. Chaque cas doit être étudié à la lumière des circonstances qui lui sont propres afin de déterminer s'il y a eu atteinte au droit de l'accusé à un procès juste et équitable (R. c. Hardy, 1991 CanLII 2720 (AB C.A.), (1991) 69 C.C.C. (3d) 190 (C.A. Alberta)).

[62] La question qui se pose n’est pas de savoir si l’appelant a indiqué qu’il souhaitait se représenter seul, mais plutôt de savoir si on l’a informé d’une manière appropriée, du désavantage que cela constituait, afin qu’il prenne une décision éclairée quant à la question de savoir s’il voulait se représenter seul.

[63] Dans R. c. Torres, la Cour d’appel écrit ce qui suit :

Dans la présente affaire, le juge de première instance s'est contenté, au début du procès, d'expliquer à l'appelant comment serait effectué l'interrogatoire des témoins. Il aurait été bon de souligner aussi à l'appelant qu'il serait en situation désavantageuse en procédant sans l'aide d'un avocat et qu'il avait droit à une telle assistance. Le juge aurait dû, en outre, expliquer que c'est la Couronne qui avait le fardeau d'établir une preuve hors de tout doute raisonnable et que l'appelant pouvait en conséquence décider de ne pas produire de défense, s'il jugeait que la Couronne ne s'était pas déchargée de son fardeau. Dans le même cadre, le cas échéant, le juge aurait dû souligner à l'appelant qu'il n'était pas tenu de répondre à des questions de la Couronne (de fait, celle-ci n'a pas interrogé l'appelant). Enfin, le juge aurait dû indiquer à ce dernier que s'il décidait de faire une preuve, celle-ci devait normalement viser à fournir une excuse légitime expliquant pourquoi il ne s'était pas conformé à la promesse qu'il avait faite, d'autant plus que l'acte d'accusation ne contenait pas les mots "sans excuse légitime" que l'on trouve à l'alinéa 145 (5.1) a) du Code criminel.

[64] Dans l’arrêt McKibbon, le juge Carthy écrit ce qui suit :

The trial judge, of course, has a duty to the accused to see that he or she has a fair hearing and that duty will generally cast upon the judge an obligation to point out to the accused that he or she would be at a distinct disadvantage in proceeding without the assistance of competent counsel and that the accused is entitled to have such counsel. Where the accused expressly desires counsel, it is clear that unless the accused has deliberately failed to retain counsel, or has discharged counsel, with the intent of delaying the process of the court, the trial judge should afford the accused an opportunity to retain counsel either at his expense or through the services of Legal Aid. If Legal Aid will not fund counsel it may be necessary at least in long complicated trials to stay the proceedings until counsel is funded

[65] Bien entendu, on peut affirmer que la remarque du juge qui invite l’appelant à consulter un avocat est une manière d’informer l’appelant qu’il sera désavantagé. Le juge qui fixe la date du procès de l'appelant est certainement animé de cette préoccupation lorsqu’il formule sa suggestion à l’appelant.

[66] De l’avis du Tribunal, c’est une chose que d’inviter un accusé à faire des démarches pour parler à un avocat, cela en est une autre de lui dire qu’il sera en situation désavantageuse s’il procède sans avocat. Il n’y a pas là qu’une distinction sémantique ou un formalisme procédural sans conséquence. Il s’agit d’une simple obligation d’information qui est substantielle et qui n’est pas onéreuse pour l’administration de la justice.

[67] En l’espèce, l’appelant n’a donc jamais été informé, contrairement à une jurisprudence constante, qu’il serait dans une situation désavantageuse en procédant seul.

[68] Dans R. c. Persaud, le juge Hill énonce les éléments de procédure criminelle qui devraient être expliqués à l’accusé:

While it may not be necessary in every case, the appellant was not informed by the court, prior to the start of trial, as to some of the rudiments of criminal procedure, including:

(1) The elements of the offence charged which the Crown was required to prove beyond a reasonable doubt in order to establish guilt.

(2) The nature of the Crown's production of its case including the calling of witnesses with in-chief examination without leading questions, the accused's right to cross‑examine, and the Crown's right to re-examine.

(3) The purpose of cross-examination with the accused cautioned not to give evidence in the asking of questions.

(4) The authority of the accused to object to prosecution questions as not relevant or as inadmissible according to the laws of evidence.

(5) The mechanics of entering exhibits.

At the conclusion of the prosecution case, in asking the appellant whether he planned on testifying on his own behalf, the court quite properly informed him that he was not obliged to but could if he wished. The appellant was not informed, however, that he would be subject to cross-examination and that his evidence could be considered for or against him in the determination of guilt and innocence. Further, the appellant was not informed that a defence might be given less weight where witnesses for the defence were called to testify in advance of the appellant himself. Indeed, in this case, the appellant's alibi witness was called to testify prior to the appellant himself.

[69] La liste des éléments énoncés par le juge Hill n’est ni limitative ni obligatoire. Une jurisprudence constante confirme cependant la sagesse de fournir ces explications préliminaires.

[70] Le procès d’un accusé non représenté qui débute, sans les explications de base sur le fonctionnement d’un procès, est bien mal amorcé. Une telle omission n’est pas nécessairement fatale en soi dans l’évaluation du caractère équitable du procès mais elle doit s'apprécier dans le contexte de l'ensemble du procès.

Le dédommagement à la victime doit toujours être envisagé lors de la détermination de la peine

Le droit applicable à la preuve de la conduite postérieure à l’infraction

R. c. Cardinal, 2018 QCCS 2441 Lien vers la décision [ 33 ]             L’essentiel du droit applicable à la preuve de la conduite postérieu...