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samedi 11 décembre 2010

Les principes qui prévalent en matière de récusation des juges - Examen détaillé de la question par la juge France Charbonneau

R. c. Mazzara, 2008 QCCS 6591 (CanLII)

[17] Le droit à une audition impartiale devant un tribunal indépendant est enchâssé aux articles 7 et 11 de la Charte canadienne des droits et libertés ainsi qu'à l'article 23 de la Charte des droits et libertés de la personne.

[18] L'article 11d) de la Charte exige que l'accusé soit jugé par un tribunal indépendant et impartial au cours d'un procès équitable. Le critère applicable, tant à l'indépendance qu'à l'impartialité de la magistrature, est de savoir si le tribunal peut raisonnablement être perçu comme tel.

[19] Le droit d'être jugé par un tribunal indépendant et impartial fait partie intégrante des principes de justice fondamentale visés à l'art. 7 de la Charte canadienne et la garantie constitutionnelle du tribunal indépendant et impartial inclut le concept de l'impartialité institutionnelle.

[20] La Cour suprême dans Bande indienne Wewaykum v. Canada, 2003 CSC 45 (CanLII), [2003] 2 R.C.S. 259, mentionne que la confiance du public dans notre système juridique prend sa source dans la conviction fondamentale selon laquelle ceux qui rendent jugement doivent non seulement toujours le faire sans partialité ni préjugé, mais doivent également être perçus comme agissant ainsi.

[21] La Cour suprême mentionne dans cette même affaire que l'impartialité du juge doit être présumée et le fardeau de la preuve appartient à la partie qui soulève la violation réelle ou appréhendée de l'obligation d'impartialité. Il lui faut établir soit la partialité réelle soit l'apparence raisonnable de partialité.

[22] Dans Mugesera c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2005 CSC 39 (CanLII), [2005] 2 R.C.S. 91, la Cour suprême a expliqué que l’obligation d’impartialité exige que le juge aborde tout dossier avec un esprit ouvert (voir par. 13).

[23] De plus, les principes de déontologie judiciaire prévoient que l'apparence d'impartialité doit être évaluée en fonction de la perception d'une personne raisonnable, impartiale et bien informée, que les juges se récusent chaque fois qu'ils s'estiment incapables de juger impartialement, que les juges se récusent chaque fois qu'ils croient qu'une personne raisonnable, impartiale et bien informée aurait des motifs de soupçonner qu'il existe un conflit entre leur intérêt personnel (ou celui de leurs proches parents, de leurs amis intimes ou de leurs associés) et l'exercice de leur fonction.

[24] Enfin, les principes de déontologie judiciaire prévoient également qu'il n'est pas à propos de se récuser si selon le cas, a) l'élément laissant croire à la possibilité de conflit est négligeable ou ne permettrait pas de soutenir de manière plausible que la récusation s'impose; b) il est impossible de constituer un autre tribunal qui puisse être saisi de l'affaire ou en raison de l'urgence d'instruire la cause, l'omission d'agir pourrait entraîner un déni de justice.

[25] La Cour suprême dans R. c. S. (R.D.), 1997 CanLII 324 (C.S.C.), [1997] 3 R.C.S. 484, par. 34. enseigne la nécessité de distinguer l’impartialité de la neutralité.

[26] Le justiciable s’attend à être jugé par une personne capable de trancher selon la preuve :

« La véritable impartialité n’exige pas que le juge n’ait ni sympathie ni opinion. Elle exige que le juge soit libre d’accueillir et d’utiliser différents points de vue en gardant un esprit ouvert. »

[27] Comme l’établit la Cour suprême, la réponse à donner à la question « y a-t-il crainte raisonnable de partialité» découle de l’application d’un test consistant à se demander à quelle conclusion en arriverait une personne bien renseignée qui étudierait la question en profondeur, de façon réaliste et pratique : «croirait-elle que, selon toute vraisemblance, le décideur, consciemment ou non, ne rendra pas une décision juste?»

[28] La crainte doit être objective et s’inférer de motifs sérieux. Comme l’écrit l’honorable juge Delisle de la Cour d’appel, «dans l’analyse de ce critère, il faut être plus exigeant selon qu’il y aura ou non enregistrement des débats et existence d’un droit d’appel».

[29] La crainte doit provenir d'une personne qui est un membre informé et sensé de la collectivité qui aborde la question de savoir s’il y a crainte raisonnable de partialité avec une compréhension nuancée et contextuelle des éléments en litige.

[30] Comme l’écrit la Cour suprême dans R. c. S.(R.D.), précité, à la page 532 :

« 113. Peu importe les mots précis utilisés pour définir le critère, ses diverses formulations visent à souligner la rigueur dont il faut faire preuve pour conclure à la partialité, réelle ou apparente. C’est une conclusion qu’il faut examiner soigneusement car elle met en cause un aspect de l’intégrité judiciaire. De fait, l’allégation de crainte raisonnable de partialité met en cause non seulement l’intégrité personnelle du juge, mais celle de l’administration de la justice toute entière. »

[31] Cette rigueur découle de l'existence de la présomption d'impartialité tel que mentionné aux pages 532 et 533 :

« 116. Le serment que prononce le juge lorsqu’il entre en fonctions est souvent le moment le plus important de sa carrière. À la fierté et à la joie se mêle en ce moment le sentiment de la lourde responsabilité qui accompagne cette charge. C’est un moment empreint de solennité, un moment déterminant qui restera gravé dans la mémoire du juge. Par ce serment, il s’engage à rendre la justice avec impartialité. Ce serment marque la réalisation des rêves d’une vie. Il n’est jamais prononcé à la légère. Durant toute leur carrière, les juges canadiens s’efforcent d’écarter les préjugés personnels qui sont le lot commun de tous les humains pour faire en sorte que les procès soient équitables et qu’ils paraissent manifestement équitables. Leur taux de réussite dans cette tâche difficile est élevé.

117. Les tribunaux ont reconnu à juste titre l’existence d’une présomption voulant que les juges respectent leur serment professionnel. Voir R. c. Smith & Whiteway Fisheries Ltd. 1994 CanLII 4057 (NS C.A.), (1994), 133 N.S.R. (2d) 50 (C.A.), et Lin, précité. C’est l’une des raisons pour lesquelles une allégation d’apparence de partialité doit être examinée selon une norme rigoureuse.»

[32] Comme l’a affirmé l'honorable Alan B. Gold, alors juge en chef, dans l'affaire Gestion Huguette Barry Inc. c. Lavoie, «il n’y a aucune raison de présumer et encore moins de croire qu’un juge décidera de l’issue d’une cause sur la base d’une preuve inadmissible. De fait, la présomption est sûrement à l’effet contraire»

[33] Ainsi, il s’agit essentiellement de procéder à une analyse au «cas par cas», sans raccourci possible, sans solution facile, essentiellement tributaire des faits et du contexte spécifique de l’affaire.

[34] De son côté, la Cour d'appel, appelée à statuer en matière civile, sur le jugement rendu par la juge Marie St-Pierre, j.c.s., dans l'affaire Peter Widdrington c. Elliot C. Wighthman et al du le 9 octobre 2007, souligne les principes applicables en matière de récusation (paragraphe 50). Soulignons que, dans cette affaire, les enfants de la juge sont salariés dans un cabinet qui est en partie impliqué dans l'affaire qui s'instruit devant elle:

« [50] Dans un jugement récent, la Cour d’appel de la Colombie-Britannique résume les enseignements de la Cour suprême du Canada dans l’arrêt Wewaykum Indian Band v. Canada au regard des principes qui prévalent en matière de récusation des juges. Ces principes sont les suivants :

(i) a judge's impartiality is presumed;

(ii) a party arguing for disqualification must establish that the circumstances justify a finding that the judge must be disqualified;

(iii) the criterion of disqualification is the reasonable apprehension of bias;

(iv) the question is what would an informed, reasonable and right-minded person, viewing the matter realistically and practically, and having thought the matter through, conclude;

(v) the test for disqualification is not satisfied unless it is proved that the informed, reasonable and right-minded person would think that it is more likely than not that the judge, whether consciously or unconsciously, would not decide fairly;

(vi) the test requires demonstration of serious grounds on which to base the apprehension;

(vii) each case must be examined contextually and the inquiry is fact-specific.»

[35] La Cour d'appel mentionne également à son paragraphe 52 qu'une requête en récusation ne doit, sous aucun prétexte, devenir un moyen à la disposition des parties pour influer sur le choix du décideur :

« [52] […]

[…] It is the duty of a judge to hear cases that come before him or her, and a party should not be able to unilaterally choose not to have a matter heard by a particular judge simply because that party would prefer that another judge hear the case. If one party, without sound reason, is able to unilaterally determine that a particular judge will not hear a case, it also tends to bring the administration of justice into disrepute.

[…]

[56] Dans cet ordre d’idées, il ne serait pas raisonnable d’interpréter la notion de conflit d’intérêts de manière que la restriction posée par l’article 234, paragr. 9 C.p.c., s’applique à tout le personnel d’un cabinet d’avocats. Outre le cas évident de l’avocat qui occupe pour une partie et qui a un lien de parenté suffisamment étroit avec le juge, cet article vise les parents associés aux avocats mandatés par une partie, parce que seuls ces associés ont véritablement un intérêt dans l’issue des litiges, leurs revenus étant directement reliés aux profits et à la réputation du cabinet au sein duquel ils exercent leur profession. »

[36] La Cour d'appel est d'accord avec l'abondante jurisprudence qui illustre le principe selon lequel un juge n'a pas à se récuser pour le seul motif qu'il est parent avec un avocat employé d'un cabinet qui intervient dans une cause qu'il entend, à condition que cet avocat s'abstienne d'intervenir de quelque façon que ce soit dans le dossier en question. :

« [57] Dans ce dossier-ci, les deux enfants de la juge de première instance sont employés à titre de salariés par le cabinet Stikeman Elliott. Par conséquent, l’unique cause de récusation qui pouvait être invoquée contre la juge était la crainte raisonnable de partialité prévue par l’article 234, paragr. 10 C.p.c.

[…]

[59] Un juge de la Cour suprême de Colombie-Britannique a récemment refusé de se récuser alors que son fils était l’employé d’un cabinet de 56 avocats mandaté pour représenter l’un des trois défendeurs dans une cause que présidait ce même juge. S’appuyant sur le Code de procédure civile du Québec, le juge constate dans ses motifs: « I note that I am not related to any partner in the law firm .». Puis, il conclut ainsi

29 My son is employed in a law firm with more than 50 lawyers. He has no role in this case. If he was working on the file, other considerations may apply. Chief Justice Esson rejected the suggestion that a mere relationship with a law firm without more was grounds for disqualification. Chief Justice McEachern concurred in his conclusion. The test requires a demonstration of serious grounds on which the bias is based. In this case, there are none. An informed, reasonable and right minded person viewing the matter realistically and practically, and having thought through the matter, would not conclude that it is more likely than not that I would consciously or unconsciously not decide the case fairly because my son is associated with one of the law firms.

[…]

[61] Les requérants font état d’une pratique qui serait reconnue au Québec, selon laquelle les juges s’abstiennent « généralement » d’entendre des causes défendues par un cabinet où travaille l’un de leurs enfants. Peut-être existe-t-il une telle habitude au Québec, quoiqu’il soit difficile de le vérifier et qu’aucune preuve n’ait été faite à cet égard en première instance, mais si cette pratique repose sur un examen incomplet des considérations pertinentes, rien n’oblige les tribunaux à s’y conformer dans tous les cas. Comme le rappelait le juge Esson dans l’affaire précitée, il arrive que, par souci d’économie de temps et parce que les circonstances de l’espèce s’y prêtent, un juge se dessaisisse d’un dossier sans pour autant se prononcer sur le fond de la demande de récusation qui lui est faite. Il n’en demeure pas moins que, lorsqu'une demande de récusation est contestée, il est du devoir du juge d'entendre l'affaire qui lui est attribuée si la demande en question n'est pas fondée en droit.

[62] Les requérants accordent beaucoup d’importance au fait que la juge de première instance s’est antérieurement abstenue de siéger dans des causes où le cabinet Stikeman Elliott représentait une partie. Ce n’est pas parce que la juge a agi de la sorte dans le passé - probablement, encore une fois, pour des raisons de simple commodité - qu’il faut lui reprocher aujourd’hui d’agir en conformité avec la loi et la jurisprudence.

[63] Sous cet angle, la situation survenue en Cour supérieure est à rapprocher de l’affaire Canada (M.R.N.) c. Mathers. Invité à se récuser parce que sa conjointe était la collègue d’une avocate au dossier, un protonotaire de la Cour fédérale du Canada, Division de première instance, rejette la demande qui lui est faite en précisant pourquoi le lien entre sa conjointe et la partie devant lui est trop ténu pour lui imposer de se récuser. Ce faisant, il commente une espèce inédite où un juge de la Cour supérieure du Québec s’était dessaisi d’une affaire pendante devant lui en apprenant qu’un grand cabinet où sa conjointe était associée représenterait certains témoins appelés à y témoigner : 42. Au départ, l'on note que cette situation implique des avocates de pratique privée qui étaient associées dans une même firme. De plus, on ne peut écarter que la Cour a alors choisi de prendre l'option qui s'avérait la plus facile. On ne peut toutefois conclure qu'une telle avenue est forcément la bonne dans tous les cas, le tout tel que le laissent clairement voir les propos suivants tirés de Propos sur la conduite des juges, Conseil canadien de la magistrature, mars 1991, en page 62 : « Pour le juge, la réponse la plus facile et la plus tentante à toutes les questions de cette nature est, bien entendu, de s'abstenir de siéger dans cette cause. Mais la réponse facile n'est pas nécessairement la bonne. »

[64] Aux États-Unis et en Angleterre, une abondante jurisprudence illustre le principe selon lequel un juge n’a pas à se récuser pour le seul motif qu’il est parent avec un avocat employé d’un cabinet qui intervient dans une cause qu’il entend. Il est par ailleurs admis de toute part que cet avocat doit s’abstenir d’intervenir de quelque façon que ce soit dans le dossier en question. Cette jurisprudence trace une distinction claire entre les employés (associates) et les associés (partners) d’un cabinet. Le critère à retenir est celui de l’intérêt dans l’issue du litige, et l’on estime que seuls les associés partagent cet intérêt :

The fears of judicial bias that might result from an offspring’s active participation in a proceeding do not merit automatic disqualification of the law firm to which the relative belongs. The “financial interest” provision might apply if the district judge’s son were a partner in the firm. But his status as an associate removes that fear.

[65] En Angleterre, les demandes de récusation commandent un examen particulièrement rigoureux de la situation :

In any case where the judge’s interest is said to derive from the interest of a spouse, partner or other family member the link must be so close and direct as to render the interest of that other person, for all practical purposes, indistinguishable from an interest of the judge himself. »

[37] Appliquant ces principes à la présente affaire, le Tribunal souligne que la juge du procès ne connaît pas le témoin. Aucun lien ne la lie directement avec l'une ou l'autre des parties. La juge du procès n'a jamais vu ou parlé au témoin Racicot en dehors d'une cour de justice. Simplement, la juge entretient des liens amicaux avec les beaux‑parents du témoin qu'elle fréquente à raison de deux ou trois fois par année.

[38] Ce lien est suffisamment éloigné pour qu'un justiciable raisonnablement informé ne puisse conclure dans les circonstances qu'il y a partialité ni même apparence de partialité de la part du juge du procès.

[39] Le juge du procès n'a aucun intérêt dans l'affaire sinon, celui que justice soit rendue dans les règles de l'art en toute équité et impartialité, avec un esprit ouvert et que justice paraisse avoir été rendue aux yeux de tous les observateurs raisonnables.

vendredi 10 décembre 2010

Les sources des différents pouvoirs conférés aux agents de la paix

Hallé c. R., 2010 QCCA 2229 (CanLII)

[17] Même si l'appelant n'a pas été l'objet d'une véritable prise en chasse, rien n'empêchait les agents d'enquêter sur les infractions qu'ils venaient tout juste de constater.

[18] La Loi sur la police prévoit que :

48. Les corps de police ainsi que chacun de leurs membres ont pour mission de maintenir la paix, l'ordre et la sécurité publique, de prévenir et de réprimer les crimes et, selon leurs compétences respectives énoncées aux articles 50 et 60, les infractions aux lois et aux règlements pris par les autorités municipales et d'en rechercher les auteurs.

[19] Il s'infère de cette disposition que rechercher les auteurs des infractions criminelles ou pénales relève du mandat général des agents de la paix. La loi prévoit aussi que la Sûreté du Québec a compétence pour prévenir et réprimer les infractions aux lois sur l'ensemble du territoire du Québec. À ces pouvoirs statutaires s'ajoutent ceux que la common law reconnaît aux policiers aux fins de l'exercice de leur devoir. L'auteur Maurice Gabias écrit :

Le mandat général confié aux agents de police par le biais de l'article 48 de la Loi sur la Police décrit précédemment recoupe certaines obligations imposées aux forces policières par la common law. Malgré que ces obligations n'aient pas encore été délimitées distinctement par les tribunaux, la Cour suprême a statué, dans l'arrêt Dedman qu'elles comprenaient la préservation de la paix, la prévention du crime et la protection des biens et de la vie des personnes.

[20] Notre Cour dans l'arrêt Ladouceur a ainsi identifié les sources des différents pouvoirs conférés aux agents de la paix, dont celui de faire enquête :

[28] Les pouvoirs conférés aux policiers afin d'exercer utilement leurs fonctions, y compris leur pouvoir d'enquête, émanent de plusieurs sources : du Code criminel, qui énumère les pouvoirs octroyés aux agents de la paix et détermine les règles à suivre; des diverses lois qui créent les corps policiers (par exemple, la Loi de police, L.R.Q., c. P-13, aux articles 37, 38 et 39), ainsi que de certaines lois provinciales spéciales (par exemple, le Code de la sécurité routière, L.R.Q. c. C-24.2); et enfin, de la common law qui accorde aux policiers les pouvoirs ancillaires à l'exercice de leurs devoirs statutaires, par exemple la continuation possible de l'enquête, le pouvoir d'arrestation et la fouille accessoire à cette arrestation.

[21] Je conclus de ce qui précède que le pouvoir de faire enquête est intimement lié aux devoirs conférés par la loi et la common law aux agents de la paix. Cependant, l'exercice de ceux-ci est assujetti au respect des droits protégés par la Charte.

[22] Les dispositions du Code de procédure pénale et du Code de sécurité routière ne prévoient pas de façon spécifique la manière dont les agents de la paix doivent exercer leur pouvoir d'enquête. En pareil cas, il est nécessaire de se référer aux principes de la common law pour déterminer l'étendue de la mesure policière permise :

[45] […] La portée de la conduite justifiable des policiers ne sera pas toujours définie par des termes explicitement prévus dans la loi, mais plutôt selon l’objet du pouvoir policier en question et en fonction des circonstances particulières de son exercice. Ainsi, il faudra inévitablement invoquer les principes de la common law pour déterminer la portée des mesures policières permises aux termes de toute loi […].

[23] Afin d'apprécier le caractère raisonnable de l'intervention d'un agent de la paix, la Cour suprême dans l'affaire Dedman c. R. cite avec approbation ce passage de la Cour d'appel anglaise dans la célèbre affaire R. v. Waterfield :

[TRADUCTION] Dans la plupart des cas, il est probablement plus facile de se demander ce que l'agent faisait en réalité et notamment si sa conduite constitue de prime abord une atteinte illégale à la liberté personnelle ou à la propriété. Si tel est le cas, il y a lieu de rechercher a) si cette conduite entre dans le cadre général d'un devoir imposé par une loi ou reconnu par la common law et b) si cette conduite, bien que dans le cadre général d'un tel devoir, a comporté un emploi injustifiable du pouvoir découlant de ce devoir. Ainsi, comme on peut affirmer en termes généraux que les agents de police ont le devoir d'empêcher le crime et le devoir, lorsqu'un crime a été perpétré, de traduire le délinquant en justice, il est également évident, selon la jurisprudence, que lorsque l'accomplissement de ces devoirs généraux comporte des atteintes à la personne ou aux biens d'un particulier, les pouvoirs des policiers ne sont pas illimités.

[24] À la lumière des circonstances du présent dossier, je suis d'accord avec les conclusions du juge de première instance. Il n'y a pas ici atteinte illégale au droit de propriété de l'appelant et encore moins une atteinte à sa liberté. L'enquête des agents de la paix intervient à l'occasion de l'exercice d'un devoir qui leur est conféré par la loi et la common law. Leur conduite ne laisse voir aucun « emploi injustifiable du pouvoir découlant de ce devoir ».

[25] Je souligne que les faits à l'origine de l'intervention des agents portent uniquement sur l'application du Code de la sécurité routière – vitesse excessive contrôlée par radar et passage sur un feu rouge.

Revue par la Cour d'appel concernant les principes juridiques de la prise en chasse

Tétard c. R., 2010 QCCA 2235 (CanLII)

[15] Dans R. c. Macooh, le juge en chef Lamer adopte la définition suivante de la prise en chasse :

Généralement, l'essence de la prise en chasse est qu'elle doit être continue et effectuée avec diligence raisonnable, de façon à ce que la poursuite et la capture, avec la perpétration de l'infraction, puissent être considérés comme faisant partie d'une seule opération.

[16] L'exception au principe de l'inviolabilité du domicile applicable en cas de prise en chasse est fondée sur un certain nombre de justifications qui en expliquent la raison d’être.

[17] Le juge en chef Lamer énonce ces justifications dans Macooh que nous pouvons résumer ainsi:

1. Il n'est pas acceptable que des policiers s'apprêtant à procéder à une arrestation tout à fait légitime en soient empêchés du seul fait que le contrevenant s'est réfugié dans sa maison ou dans celle d'un tiers. On ne saurait forcer les policiers à mettre fin à une poursuite au seuil de la demeure du contrevenant, sans faire de cette demeure un véritable sanctuaire.

2. Il n'est pas souhaitable d'encourager les contrevenants à chercher refuge chez eux ou chez un tiers, car des dangers importants peuvent être associés à de telles fuites et aux poursuites qui peuvent en résulter.

3. Le policier, dans le cadre d'une prise en chasse, peut avoir une connaissance personnelle des faits qui justifient l'arrestation, ce qui diminue grandement les risques d'erreur.

4. La fuite indique généralement une certaine conscience de culpabilité de la part du contrevenant.

5. Il peut être difficile d'identifier le contrevenant sans l'arrêter immédiatement.

6. La preuve de l'infraction qui a donné lieu à la poursuite ou la preuve d'une infraction connexe peut être perdue (par exemple, des signes d'ébriété).

7. Il y a un risque que le contrevenant fuie de nouveau ou commette une infraction, et l'on ne peut exiger des policiers qu'ils assurent indéfiniment la surveillance de sa demeure au cas où ce dernier se déciderait à sortir.

[19] Dans l'arrêt R. c. Feeney, la Cour suprême a conclu « qu'en général un mandat est requis pour effectuer une arrestation dans une maison d’habitation ». Toutefois, la Cour précise aussi que l'exception de prise en chasse demeure valide. Le juge Sopinka s’exprime ainsi :

En résumé, les conditions ci-après doivent généralement être remplies pour qu’une arrestation relative à un acte criminel dans une maison privée soit légale: un mandat doit être obtenu sur la foi de motifs raisonnables et probables d’effectuer une arrestation et de croire que la personne recherchée se trouve dans les lieux en question, et une annonce régulière doit être faite avant d’entrer. Cette règle souffre une exception dans le cas d’une prise en chasse.

[20] Contrairement à la prétention implicite de l'appelant, l'adoption des articles 529 et suivants du Code criminel n'a pas eu pour conséquence l'abolition de l'exception de la prise en chasse. Renee Pomerance (elle n'était pas alors juge) en explique la raison :

The drafters of Bill C-16 were careful not to oust or limit other authority which would permit warrantless entry of a dwelling. The preamble explicitly declares that "nothing in this Act is intended to limit or restrict the circumstances under which peace officers may be justified in entering a dwelling-house for the purposes of arrest or apprehension, in the absence of prior judicial authorization, under this or any other Act or law".[46] Thus, while the Bill makes no reference to hot pursuit, the police have authority to enter on this basis, as a result of the decision in Feeney. Similarly, the legislation leaves it open to the courts to consider and recognize other types of exigent circumstances, on a case-by-case basis.

[22] Dans le présent dossier, la principale particularité est que la perpétration de l'infraction par l'appelant est constatée par un citoyen qui communique avec la police, qui le suit et le prend en chasse.

[23] Est-ce que cela affecte la conclusion que l'arrestation de l'appelant a été effectuée dans le cadre d'une prise en chasse au sens de l'arrêt Macooh? Pour répondre à cette question, il est nécessaire d'examiner les pouvoirs d'arrestation du citoyen et des policiers prévus au Code criminel.

[25] Conformément à l'al. 494(1)a) C.cr., le conducteur impliqué dans l'accident avec l'appelant aurait pu procéder à son arrestation, car il trouve l'appelant en train de commettre un acte criminel, soit la conduite d'un véhicule avec les facultés affaiblies (art. 253 C.cr.) et le défaut d'arrêter lors d'un accident (art. 252 C.cr.).

[26] De plus, les policiers appelés sur les lieux avaient le pouvoir d'arrêter l'appelant conformément soit à l'al. 494(1)b) C.cr., soit à l'al. 495(1)a) C.cr.

[27] D'une part, les informations communiquées par le conducteur fournissaient aux policiers des motifs raisonnables de croire que l'appelant avait commis une infraction criminelle, qu'il était en train de fuir une personne légalement autorisée à l'arrêter et qu'il était immédiatement poursuivi par le conducteur.

[28] D'autre part, les policiers avaient des motifs raisonnables de croire que l'appelant avait commis un acte criminel. L'arrestation sans mandat de l'appelant était autorisée en raison de la nécessité de l'identifier, de recueillir ou conserver une preuve de l'infraction et d'empêcher que l'infraction se poursuive ou se répète.

[29] La seule question qui se pose est de savoir si une distinction doit être établie dans les cas où la prise en chasse initiale a été effectuée par un citoyen plutôt que par un policier. La reconnaissance d'une telle distinction serait artificielle et illogique.

[30] Il importe peu que la poursuite ait été entreprise par un témoin avant que la police ne se présente sur les lieux. À cet égard, le juge Lamer affirme, dans Macooh, que les policiers peuvent continuer une poursuite déjà engagée :

Il est intéressant de noter qu'en l'espèce l'infraction a été commise en présence des policiers conformément à l'exigence mentionnée par Foster et Magnet. Je ne crois toutefois pas qu'il soit opportun d'imposer strictement cette condition au droit d'entrer dans le contexte d'infractions autres que des actes criminels. Cette condition est trop restrictive. Les policiers qui arrivent peu après la perpétration de l'infraction, et voient fuir le contrevenant, devraient en effet pouvoir le suivre jusque dans des locaux privés, tant dans le contexte d'une infraction provinciale que dans celui d'un acte criminel. Ce pouvoir d'entrer devrait également être donné aux policiers qui continuent une poursuite déjà engagée

[31] Selon la Cour d'appel de la Colombie-Britannique, dans R. v. Haglof, il est possible d'être en présence d'un cas de prise en chasse même lorsque les policiers n'ont pas été témoins des événements donnant lieu à l'infraction :

In my opinion, the case at bar represents a situation of hot pursuit notwithstanding that the officers did not in fact see the accident occur or the appellant enter the house. The time between the accident and the arrest was only some 35 minutes. Within approximately fifteen minutes of the accident, Constable King arrived at the Ethel Residence. This represented the length of time it took to locate the suspect. The remaining 20 minutes were spent at the premises of the appellant attempting to and finally succeeding in effecting an arrest. In my view, these events are sufficiently proximate to be considered as forming part of a single transaction.

[32] Contrairement à la situation dans l'arrêt R. v. Van Puyenbroek[18] de la Cour d'appel de l'Ontario, soumis par l'appelant, la prise en chasse a, ici, été continue, effectuée avec diligence raisonnable, dans une chronologie factuelle qui peut être considérée comme une seule opération. Dans l'affaire Van Puyenbroek, les policiers, qui n'ont pas constaté l'infraction, se sont présentés au domicile du suspect plus de 90 minutes après l'appel initial.

[33] Dans la mesure où il s'agit d'une seule opération, l'exception à la règle du mandat d'arrestation dans les cas de prise en chasse s'applique même si la prise en chasse initiale est celle d'un citoyen et qu'elle est complétée et finalisée par un policier. Dans un tel cas, l'arrestation d'un suspect n'exige pas un mandat d'entrée pour effectuer l'arrestation d'un suspect dans une maison d'habitation.

[34] Dans le présent dossier, la nécessité d'empêcher la destruction d'une preuve était une préoccupation légitime. L’arrestation de l’appelant était nécessaire afin de procéder avec célérité à un alcootest, éviter l'absorption supplémentaire d'alcool et empêcher qu’il reprenne le volant.

[35] La conclusion est la même si on applique l'al. 529.3(2)b) C.cr.. La situation à laquelle les policiers étaient confrontés rendait difficilement réalisable l'obtention d'un mandat d'entrée et la préservation de la preuve exigeait une intervention immédiate.

III - Conclusion

[36] Les policiers pouvaient procéder à l'arrestation de l'appelant dans son domicile sans obtenir un mandat d'arrestation. L'arrestation de l'appelant n'était pas arbitraire au sens de l'article 9 de la Charte canadienne des droits et libertés. Même en tenant pour acquis que l'arrestation de l'appelant l'était, l'arrêt des procédures qu'il recherche ne pouvait être prononcé.

jeudi 9 décembre 2010

La requête de type Corbett

Charette c. R., 2010 QCCA 2211 (CanLII)

[25] (...) Comme le souligne le juge en chef adjoint O'Connor dans R. c. Bomberry (2010), 258 C.C.C. (3d) 117 (C.A. Ont.), dans une affaire de meurtre au deuxième degré :

47 In my view, the trial judge erred in admitting the appellant's record of convictions for the four assault charges. Those convictions would not add anything to the jury's analysis of the appellant's credibility. The balance of the appellant's criminal record, as edited, together with the other evidence that had been admitted about her background and lifestyle, was more than enough to alert the jurors that they should exercise great caution in assessing the appellant's credibility.

[27] L’article 12 de la Loi sur la preuve prévoit qu’un témoin peut être contre-interrogé à l'aide de ses condamnations antérieures. Dans R. c. Corbett, 1988 CanLII 80 (C.S.C.), [1988] 1 R.C.S. 670, la Cour suprême expose que cette disposition ne contrevient pas aux articles 7 et 11(d) de la Charte canadienne des droits et libertés lorsqu’un accusé décide de témoigner pour sa défense. Cependant, le juge du procès peut, dans l'exercice de son pouvoir discrétionnaire, limiter le contre-interrogatoire lorsque la divulgation complète causerait un préjudice plus grand que la valeur probante de cette preuve. De plus, toute divulgation de condamnations antérieures doit être accompagnée d’une directive au jury quant à l'usage limité de cette preuve puisqu’elle ne doit être utilisée que pour évaluer la crédibilité de l'accusé et non pour conclure à sa propension à commettre des crimes et, plus spécifiquement, l’acte criminel qui lui est reproché. Le juge en chef Dickson explique, dans Corbett, en quoi le casier judiciaire d’un accusé peut être pertinent pour apprécier sa crédibilité :

[…] Au Canada, il est permis de contre-interroger un accusé relativement à ses condamnations antérieures depuis que les accusés ont été habilités pour la première fois à témoigner pour leur propre compte en 1893: R. v. D'Aoust (1902), 5 C.C.C. 407 (C.A. Ont.). L'article 12 traduit l'opinion du législateur que les condamnations antérieures influent réellement sur la crédibilité d'un témoin. En décidant s'il croira un témoin donné, le jury, tout naturellement, prendra en considération divers éléments. Les jurés observeront le comportement du témoin pendant qu'il dépose, son apparence, le ton sur lequel il s'exprime et son attitude générale. De même, le jury tiendra compte de tous renseignements qu'il possède concernant les habitudes ou le mode de vie du témoin. Certes, on ne saurait nier que le casier judiciaire d'un témoin influe, du moins jusqu'à un certain point, sur sa crédibilité. Il est toutefois évident que ce n'est pas simplement parce qu'un témoin a déjà été déclaré coupable d'une infraction qu'on doit nécessairement le considérer comme indigne de foi, mais c'est là un fait dont un jury pourrait tenir compte en appréciant sa crédibilité.

[28] Par ailleurs, le mépris persistant des lois est pertinent dans l'évaluation de la crédibilité d’un témoin. On peut certes inférer qu’un individu qui enfreint sans cesse la loi a peu de respect pour la vérité et est donc plus susceptible de mentir : R. c. Gibson, 153 C.C.C. (3d) 465 (B.C.C.A.), paragr. 30.

[29] Il peut par ailleurs arriver que l’effet préjudiciable de la preuve du casier judiciaire d’un accusé fasse en sorte que le juge décide de taire au jury certaines condamnations. Dans R. c. Charland, 1996 CanLII 7284 (AB C.A.), (1996), 110 C.C.C. (3d) 300, à la page 309, (pourvoi rejeté par la Cour suprême, [1997] R.C.S. 1006), la Cour d’appel de l’Alberta décrit ainsi le risque de préjudice lorsque les antécédents judiciaires de l'accusé sont divulgués au jury :

In Corbett, the Supreme Court discussed the nature of the prejudice which could arise from the disclosure to the jury, of the previous criminal behaviour of the accused. The prejudice arises from the risk that the jury might improperly use the evidence admitted for the limited purpose of credibility, in deciding on the guilt of the accused. There is a risk that the jury will rely on unfounded and unreliable assumptions which arise from evidence of bad character, such as propensity: that an accused who previously committed a crime is more likely to commit other crimes, including the offence with which he is charged; […]

[30] Dans R. c. Tremblay, 2006 QCCA 75 (CanLII), 2006 QCCA 75; (2006), 209 C.C.C. (3d) 212, j'écrivais ce qui suit :

[20] Lorsqu’il s’agit de déterminer si une condamnation antérieure doit être exclue, le juge doit se demander si l’accusé a démontré, selon le poids des probabilités, que l’admissibilité de cette condamnation antérieure entraînerait pour lui un préjudice supérieur à la valeur probante de cette preuve. Il n’y a pas de règle absolue et cet exercice s'effectue en tenant compte de plusieurs facteurs et critères. Chaque décision constitue un cas d’espèce et dépendra des faits particuliers d’une affaire. Dans R. c. Corbett, précité, le juge Dickson précise, à la p. 697, que, dans le doute, l’admissibilité en preuve doit être privilégiée.

[31] Dans R. c. Trudel, 1994 CanLII 5397 (QC C.A.), [1994] R.J.Q. 678 (C. A.), aux pages 682-683, mon collègue le juge Brossard dresse une liste de facteurs à considérer :

- Il y aura lieu, cependant, de soupeser la valeur probante de cette preuve en regard du préjudice qu'elle est susceptible de causer à l'accusé [...];

- "[P]lus l'infraction qui a donné lieu à la condamnation antérieure ressemble à la conduite pour laquelle l'accusé subit son procès, plus le préjudice résultant de son admission en preuve risque d'être grand." Par ailleurs, un antécédent de fraude, de tromperie, ou de tricherie, indiquant un manque d'honnêteté ou d'intégrité, vise directement la crédibilité du témoignage de l'accusé [...];

- Le Tribunal doit donc être fort réticent à admettre en preuve une condamnation pour un crime antérieur similaire, dont la nature n'a rien à voir avec la crédibilité ou la véracité possible du témoignage de l'accusé;

- C'est donc la connexité entre la crédibilité et la nature de l'antécédent judiciaire qu'il faut considérer et non la connexité entre la nature de cet antécédent et la nature du crime en l'instance;

- La proximité dans le temps entre les deux infractions constitue également un facteur susceptible d'affecter soit sa pertinence, soit le degré de préjudice causé à l'accusé;

- Enfin, la preuve de cet antécédent constitue-t-elle un élément de preuve nécessaire ou utile à la Couronne au point que la résolution du litige peut en dépendre.

[32] Par ailleurs, comme la défense peut avoir contre-interrogé les témoins de la poursuite à l'aide de leur casier judiciaire, le fait d’ «épurer » celui de l'accusé ou, pire, d’en taire complètement l’existence, peut avoir pour effet de donner au jury un portrait faussé de la réalité. En effet, le jury pourrait alors croire que seuls les témoins de la poursuite ont des antécédents judiciaires et que leur crédibilité est donc affaiblie par rapport à celle de l'accusé qui, lui, n'en possède pas ou encore, en apparence, a été condamné moins souvent et pour des crimes différents de la réalité. Dans R. c. Charland, précité, la Cour d'appel de l'Alberta indique qu’il ne faut pas donner au jury la fausse impression que l’accusé a mené une vie exemplaire :

Generally, previous convictions for violent offences such as sexual assault do not directly reflect on honesty and truthfulness and, depending on the circumstances of the case, have limited probative value in assessing credibility. However, particularly in the context of a lengthy criminal record, such prior convictions have probative value that is greater than trifling because a jury could reasonably conclude that the convictions reflect a disregard for the laws and rules of society, making it more likely that the person who harbours such attitudes would lie. Here, excluding the sexual assault convictions from the cross-examination could leave the jury with an erroneous impression that the accused had not been convicted of any offences since 1988. The accused would have appeared to have lived a "crime free" life in the community for six years, when a substantial portion of that time was spent in jail. In the circumstances of this case, I cannot say that the trial judge's finding that the probative value of the accused's prior sexual assault convictions outweighed the prejudicial effect, constituted a clear or palpable error.

(...) Or, lorsque l'on invoque la légitime défense, la décision de ne pas témoigner peut certes avoir des impacts dévastateurs.

[38] Les condamnations qui sont reliées à des actes de violence sont pertinentes dans le contexte où l'accusé a soulevé lors de son interrogatoire par l'enquêteur Alain Moreau la légitime défense pour justifier son geste.

[40] Par exemple, dans Tremblay, la défense avait attaqué la crédibilité des deux témoins de la poursuite en les contre-interrogeant en détail sur leurs antécédents judiciaires et leur mode de vie. Il fallait donc éviter, comme je le disais précédemment, de laisser croire au jury que seuls les témoins de la poursuite avaient un mode de vie douteux alors que l'accusé était blanc comme neige, ce qui aurait été injuste pour la poursuite. Or, le juge démontre par son jugement que cela ne pouvait, ici, être le cas :

[31] L'accusé a attaqué la crédibilité d'un témoin important pour la Couronne, Donavan Duguay, la victime présumée concernée par le deuxième chef de l'accusation en le questionnant sur ses antécédents judiciaires et ceux de son père. Même si la réponse était négative, il peut toujours en rester quelque chose dans l'esprit du jury.

[41] Les deux témoins n'avaient donc pas d'antécédents judiciaires, de sorte que le déséquilibre envisagé dans Tremblay ne pouvait survenir. Par ailleurs, pour pouvoir affirmer qu'il pourrait « toujours en rester quelque chose dans l'esprit du jury », il faut en même temps croire que le jury ne suivra pas les directives du juge. Ce n'est pas l'état du droit.

[42] Toujours dans Tremblay, l'accusé voulait qu'une condamnation antérieure d'homicide involontaire coupable qui lui avait valu une peine de douze ans d'emprisonnement soit cachée au jury. Le juge de première instance avait noté que, si tel devait être le cas, le jury pourrait croire, erronément, que l'appelant avait mené une vie exemplaire pendant cette longue période. Ce n'est pas le cas en l'espèce. Le nombre de condamnations antérieures et la demande de la défense ne pouvaient avoir pour conséquence que le jury croie que l'accusé avait eu une vie exemplaire pendant une longue période de temps. En réalité, les quelque 60 condamnations qui demeurent suffisaient amplement pour que le jury ait un tableau franc et complet de la situation, tout en protégeant l'appelant contre un verdict fondé sur un raisonnement à proscrire.

[43] Selon les paragraphes 36 et 37 de sa décision, le juge de première instance estimait que l'ensemble des condamnations antérieures pouvait permettre au jury de constater le manque de respect de l'accusé pour la vérité. J'estime que les antécédents qui devaient demeurer auraient été suffisants pour atteindre cet objectif.

[44] Je suis conscient qu'un tribunal d'appel doit faire preuve de déférence à l'égard d'une telle décision, qui relève au premier chef de l'exercice d'un pouvoir discrétionnaire. Par contre, les motifs retenus par le juge et les circonstances du dossier me convainquent que sa décision n'est pas le résultat d'un exercice judicieux de son pouvoir discrétionnaire. Si l'arrêt Corbett doit avoir un sens, le simple fait que tout le procès tourne autour de la crédibilité des témoins ne saurait justifier le refus du juge. C'est pourtant ce qui s'est produit ici, selon les termes mêmes de sa décision. À mon avis, l'appelant avait démontré que ses antécédents de violence devaient être exclus de son contre-interrogatoire au motif que leur valeur probante était beaucoup trop faible par rapport au préjudice qu'ils pouvaient lui causer.

[52] Il s'agissait donc, là aussi, d'une question que le juge Proulx abordait de manière purement subsidiaire. Enfin, je ne peux m’empêcher de souligner qu'il mentionnait que l'appelant s'en était pris à la réputation et au comportement de la victime, de sorte que tous ses antécédents récents devaient être divulgués pour éviter le déséquilibre dont j'ai fait état précédemment.

[54] D'une part, la jurisprudence, notamment R. c. Underwood, [1989] 1 R.C.S. 77, considère que le moment opportun pour trancher cette question se situe après la fin de la preuve de la poursuite.

[55] D'autre part, l'ampleur, la portée et l'intensité du contre-interrogatoire auquel auront été soumis les témoins de la poursuite font partie des considérations dont doit tenir compte le juge du procès en décidant de la requête. Il me paraîtrait donc incohérent d'exiger que le juge rende jugement avant le contre-interrogatoire des témoins de la poursuite. Par contre, le simple fait de contre-interroger les témoins de la poursuite sur la véracité et la fiabilité de leur récit ne justifie pas le rejet de la demande de type Corbett, comme cela est d'ailleurs mentionné dans Bomberry, précité :

50 In any event, the appellant's trial counsel did not challenge the good character of any of the Crown witnesses, including Detectives Turner and Aherns. Defence counsel only challenged the accuracy and reliability of the evidence of the Crown witnesses, not their good character. There is a distinction. Questioning witnesses' accounts of events and challenging the accuracy of those accounts does not create the potential for the kind of imbalance discussed in Corbett: R. v. W.B. 2000 CanLII 5750 (ON C.A.), (2000), 145 C.C.C. (3d) 498, at paras. 46-47.

La requête en non-lieu / verdict imposé d'acquittement

Charette c. R., 2010 QCCA 2211 (CanLII)

[18] Quoique le critère pour déterminer si une requête en non-lieu, ou en verdict imposé d'acquittement, doit être accueillie soit identique à celui qui permet de déterminer s'il doit y avoir renvoi à procès après une enquête préliminaire, là s'arrête la comparaison. Si le juge qui préside une enquête doit évaluer la preuve dans son ensemble : R. c. Arcuri, 2001 CSC 54 (CanLII), [2001] 2 R.C.S. 828; R. c. Belleville, J. E. 2008-79; 2007 QCCA 1704 (CanLII), 2007 QCCA 1704, il n'en est pas de même pour le juge qui préside un procès. L'accusé doit connaître l'infraction à laquelle il doit répondre avant d'être appelé à décider s'il présente ou non une défense. Comme l'écrit l'auteur Tim Quigley :

At some time, the crown will have to introduce its entire case. Once this has been indicated to the court, the defence may respond. Before electing whether or not to call defence evidence, the defence may make a motion to the trial judge to dismiss the case at that point. This motion is called a directed verdict or non-suit motion. It involves an assertion that the crown has not offered a case to meet and that therefore there should be a directed verdict of acquittal.

[19] E.G. Ewaschuk note plus précisément qu'il ne faut pas attendre de savoir si l'accusé présentera une défense; il faut plutôt que le juge décide de la requête immédiatement. Il souligne que l'accusé ne peut être forcé de décider avant de prendre connaissance de la décision du juge :

Thus, an accused cannot be put "to his election" whether or not to call evidence until after the trial judge decides to disallow the motion for nonsuit for lack of a prima facie case.»

[20] Pierre Béliveau et Martin Vauclair font valoir pour leur part que :

En sus, la common law a dégagé une conséquence procédurale importante du principe de la présomption d'innocence qui attribue à l'État la charge de la preuve. En effet, après la preuve de la poursuite au procès et avant que l'accusé n'ait décidé de présenter ou non une défense, il doit exister devant le tribunal suffisamment de preuve pour qu'un jury correctement instruit puisse fonder un verdict de culpabilité. En l'absence de preuve relativement à l'un des éléments essentiels de l'accusation, l'accusé peut présenter, à la fin de la démonstration de la poursuite, une requête en non-lieu ou encore une requête pour verdict imposé d'acquittement

Détermination de la peine relativement à l'infraction de trafic et possession aux fins de trafic de crack

R. c. Frappier, 2010 QCCQ 10365 (CanLII)

[60] Une revue de la jurisprudence permet de constater qu’en matière de trafic et possession aux fins de trafic de crack, l’emprisonnement avec sursis est envisageable, bien que peu fréquemment retenue. Quoi qu’il en soit, chaque cas est un cas d’espèce qui doit être évalué au mérite. La peine doit être individualisée à la situation particulière de l’accusé.

[61] Depuis longtemps, la Cour d’appel dénonce le fléau que représente le trafic de crack. Dans l’arrêt Dorvilus précité ci-haut, le juge Baudoin écrit :

(…) les tribunaux ont le devoir de se montrer sévères et non complaisants en matière de trafic de crack, eu égard surtout au fait que la substance crée une grande dépendance et une dépendance quasi immédiate, qu’elle est une drogue bon marché à la portée donc de la bourse des enfants et des adolescents.

[62] C’est pourquoi les juges Baudoin et Rothman ont maintenu la sentence de deux (2) ans moins un (1) jour d’emprisonnement prononcé contre l’accusé qui était un trafiquant sans antécédent, père de famille, âgé de 34 ans et lui-même consommateur de drogue. Dorvilus avait vendu, à deux (2) reprises, quatre (4) roches de crack à un agent double.

[63] Le juge Proulx, bien que dissident sur la durée de la peine, partage le commentaire ci-haut de son collègue. Par ailleurs, il précise qu’il faut distinguer la situation du trafiquant mercantile, de celle du trafiquant-toxicomane. La culpabilité de ce dernier est moins grande que celle du non-utilisateur insensible.

[64] Dans l’arrêt R. c. Blagrove, la Cour d’appel a fait passer la sentence de 14 mois à 30 mois d’emprisonnement. L’accusé avait plaidé coupable à cinq (5) chefs de trafic de petites quantités de crack (2 à 3 roches). La Cour d’appel reproche au juge de première instance de ne pas avoir tenu compte du rapport présententiel et des réponses de l’accusé qui semblaient manquer de conviction et qui, à la lumière des autres observations de l’agente de probation, ont fait conclure à la Cour d’appel que la conclusion du premier juge quant à la réhabilitation de l’accusé n’étaient pas supportées par la preuve.

[65] Dans R. v. Stanislaus, la Cour d’appel a maintenu une peine d’emprisonnement de 15 mois à un individu ayant plaidé coupable à un chef de trafic de crack (3 g) et un chef de possession aux fins de trafic de trois (3) roches de crack. L’accusé avait 20 ans, n’avait pas d’antécédent, était retourné aux études, s’était engagé dans sa communauté et avait un emploi à temps partiel. L’accusé souhaite obtenir un emprisonnement avec sursis. Voici ce qu’écrit la Cour d’appel au paragraphe 10 de l’arrêt :

Considering that at the time he committed the offences, Appellant was a member of a community drug distribution network; that he was a non-user who admitted engaging in the crimes strictly for economic gains; the particular narcotic involved, cocaine base (crack); and the principles established in our judgments in R. v. Blagrove, C.A.Q. 500-10-000582-963, August 30, 1996; Dorvilus v. R., C.A.Q. 500-10-000111-904, July 4, 1990; Farfan v. R., C.A.Q. 500-10-000369-957, January 22, 1996;

[66] Dans R. c. Blais, la Cour d’appel rejette une requête pour permission d’appeler d’une sentence de 54 mois de pénitencier. La Cour rappelle que «[l]’emprisonnement est la règle en matière de trafic de stupéfiants, sauf circonstances exceptionnelles (…)». En l’espèce, l’accusé avait démontré «une motivation de lucre et d’appât du gain sans effort.» Comme l’écrit le juge Robert :

Ici, nous sommes en présence d’un véritable commerçant et non pas d’un intermédiaire occasionnel qui aurait agi par complaisance ou d’une victime de la drogue qui se serait livrée au commerce pour pourvoir combler ses propres besoins. Le critère primordial est donc celui de l’exemplarité.

[67] Revoyons maintenant quelques décisions rendues par la Cour du Québec au cours des dernières années :

a) R. c. Bessette : L’accusé Rioux a plaidé coupable à huit (8) chefs de complot pour trafic, trafic et possession en vue de faire le trafic de crack, de cocaïne, de cannabis (marijuana) et résine de cannabis (haschich). Bessette, lui, a plaidé coupable à 4 chefs de complot, de trafic et de possession en vue de faire le trafic de crack et possession en vue de faire le trafic de cocaïne. On a retrouvé 18 roches de crack sur Bessette et 112 roches sur Rioux. Ce dernier fournissait la drogue à Bessette, lequel la livrait. Leur organisation était donc structurée. Le juge Galarneau effectue une revue de la jurisprudence. Le juge tient compte des antécédents nombreux (dont certains en semblable matière) des accusés et de leurs âges : Rioux avait 35 ans et Bessette 42 ans. Le juge Galarneau impose une peine de 30 mois d’incarcération à Rioux et 18 mois à Bessette.
Il repousse la possibilité que Bessette purge sa peine dans la collectivité.

b) R. c. Graham : L’accusé est trouvé coupable de possession de crack aux fins de trafic et de possession de cocaïne aux fins de trafic. Les quantités sont les suivantes : 6.85 g de crack (de 40 à 68 roches) et 2 g de cocaïne. Des munitions ont été saisies chez l’accusé. Graham avait de nombreux antécédents. Il n’était pas un toxicomane. L’accusé n’a pas démontré qu’il pouvait être réhabilité. La juge Westmoreland-Traoré lui a imposé une peine de 30 mois de détention en tenant compte d’une détention préventive de
11 mois calculée en double.

c) R. c. Napoléon: L’accusé s’est notamment reconnu coupable d’avoir trafiqué deux (2) roches de crack, d’avoir eu en sa possession de la marijuana. Napoléon faisait partie d’un réseau. Il trafiquait pour l’argent. Napoléon avait quelques antécédents à l’époque alors qu’il était mineur.
Vu la faible quantité de crack, le juge Chevalier condamna l’accusé à une peine d’emprisonnement d’une année. Il refusa le sursis, notamment en raison des antécédents judiciaires de l’accusé. Napoléon avait déjà été condamné pour avoir trafiqué des stupéfiants.

d) R. c. Cene : L’accusé était sans antécédent judiciaire. Il était âgé de
24 ans. Il a plaidé coupable à des accusations de trafic de crack (à deux (2) reprises : total de neuf (9) roches) et de possession en vue de trafic
(5 roches). Cene était organisé. Le juge Vauclair relève peu de facteurs atténuants, à part l’âge et l’absence d’antécédents. Cene n’avait pas d’introspection, n’avait aucun programme de réinsertion et les risques de récidive étaient élevés. Le juge Vauclair imposa donc une peine de 10 mois de détention pour les infractions liées à la drogue.

e) R. c. Leduc : Leduc et Montreuil ont plaidé coupable à trois (3) chefs de trafic de crack, deux (2) chefs de possession en vue de faire le trafic de crack et de cocaïne. Leduc recevait les commandes et en faisait la livraison. Il a été impliqué dans trois (3) trafics totalisant six (6) roches de crack. Lors de son arrestation, il avait en sa possession 1,25 g de cocaïne et huit
(8) roches de crack. Montreuil, lui, entreposait la drogue contre rémunération. Les policiers ont trouvé 200 roches de crack et 21,25 g de cocaïne divisés en 85 quarts de gramme. Leduc était âgé de 55 ans et Montreuil de 37 ans. Les deux n’avaient aucun antécédent. Ils ont été motivés par l’appât du gain. Ils ont exprimé des remords. Leduc et Montreuil avaient une conjointe et des enfants. Le juge Vauclair refusa à Leduc un emprisonnement avec sursis. Il lui imposa une peine d’emprisonnement de 18 mois moins deux (2) jours d’emprisonnement provisoire. Quant à Montreuil, le juge Vauclair lui a imposé une peine de 36 mois moins huit
(8) jours d’emprisonnement provisoire.

f) R. c. Topey : L’accusé, âgé de 21 ans, est notamment trouvé coupable de possession de crack en vue de faire le trafic (100 roches); possession de cannabis (marijuana) en vue de faire le trafic (1000 g de cannabis et deux (2) g de marijuana). Topey trafiquait depuis plusieurs mois. Il était motivé par l’appât du gain. Il a déchargé une arme à feu en direction d’un policier qui le pourchassait. Topey n’avait aucun antécédent et il a été blessé par le policier qui lui a tiré dessus. Le juge Denis Lavergne condamna Topey à une peine de deux (2) ans pour les infractions liées à la drogue. Ladite sentence devait être purgée consécutivement à la sentence imposée pour les infractions liées à l’utilisation d’une arme chargée contre un policier.

[68] Ce survol de la jurisprudence permet de constater qu’une peine supérieure à 24 mois est habituellement imposée lorsque la quantité de crack est importante, que l’accusé est motivé par l’appât du gain, qu’il exerce une activité organisée, que l’accusé a des antécédents pertinents ou que les facteurs atténuants sont peu nombreux.

[70] La nature de la drogue, la quantité importante trouvée dans le véhicule de M. Frappier, la planification et l’organisation de celui-ci, le caractère mercantile motivant ses crimes, son âge mûr, son insensibilité, ses antécédents judiciaires récents, dont un en semblable matière, sont autant de facteurs jouant en défaveur de l’accusé.

[81] Dans R. c. Dubé-Pelletier, le juge Martin Vauclair a imposé une peine d’emprisonnement avec sursis d’une durée de 21 mois à un accusé âgé de 22 ans ayant notamment plaidé coupable à un chef de trafic de cocaïne-base (crack), un chef de possession de cette drogue pour en faire le trafic et un chef de possession de cocaïne pour en faire le trafic. L’accusé avait transigé deux (2) roches de crack avec un agent double et lors de son arrestation, il avait en sa possession neuf (9) roches additionnelles, quatre (4) quarts de cocaïne et 195 $.

[82] Au paragraphe 13 de sa décision, le juge Vauclair écrit :

[13] Enfin, rappelons que dans un cas de trafic de cocaïne-base, il n’est généralement pas approprié de surseoir au prononcé de la peine pour imposer une période de probation. Nul besoin de rappeler les méfaits de cette drogue parmi la population et la criminalité indirecte qu’elle entraîne. Le présent dossier l’illustre parfaitement. L’emprisonnement est la peine sans aucun doute appropriée dans la plupart des cas. Quant à la durée, la jurisprudence démontre qu’une peine de prison n’est pas déraisonnable et qu’un emprisonnement avec sursis n’est pas déraisonnable dans les circonstances appropriées.

[83] Le juge Vauclair réfère aux arrêts : R. c. Dorvilus et R.c. Prokos. L’emprisonnement avec sursis a été retenu par le juge Vauclair pour les raisons suivantes : l’accusé était un jeune homme ayant eu une enfance difficile, il était aux prises avec le problème de consommation de crack; Francis Dubé-Pelletier s’est montré sincère et réaliste; l’accusé voulait s’en sortir; il était sur le point de devenir père; il avait un plan de réhabilitation sérieux; les antécédents de l’accusé étaient compatibles avec une criminalité acquisitive pour subvenir à sa consommation de drogue.

[85] Les peines d’emprisonnement de neuf (9) mois (trafic de cocaïne-base) et 27 mois (possession de la cocaïne-base (crack) dans le but d’en faire le trafic) devront être purgées concurremment.

mercredi 8 décembre 2010

La détention et la restitution des biens saisis

R. c. Robert Vienneau, 2010 NBCP 5 (CanLII)

10. L’article 489.1 prévoit la restitution des biens saisis par un agent de la paix. Si l’agent de la paix est convaincu qu’il n’existe aucune contestation quant à la possession légitime des biens saisis dans les situations où un mandat de perquisition avait été décerné ou encore dans les situations où les dispositions des articles 487.11 ou 489 du Code criminel s’appliquent, il doit, dans les plus brefs délais, remettre les biens à la personne qui a droit à leur possession légitime à moins qu’il soit de l’avis que la détention de ces biens soit nécessaire pour les fins d’une enquête, d’une enquête préliminaire, d’un procès ou de toute autre procédure. S’il n’est pas convaincu de ces deux choses, les biens saisis doivent être emmenés devant le juge ou encore l’agent de la paix doit faire un rapport au juge dans lequel il explique qu’il a saisi les biens et qu’il les détient ou qu’il veille à ce qu’ils soient détenus. Dans l’une ou l’autre de ces instances, si les biens ne sont pas remis au propriétaire, ils doivent être gouvernés par l’article 490 du Code criminel.

11. En autant que l’article 489.1 prévoit le retour des biens saisis, l’article 490 traite de leur détention. Selon le paragraphe 490(1), lorsque l’agent de la paix fait son rapport au juge en vertu de l’article 489.1 du Code criminel au sujet des biens saisis, le juge doit ordonner que les biens soient retournés au propriétaire légitime ou à la personne qui a droit à leur possession légitime à moins qu’il soit convaincu que leur détention soit nécessaire aux fins d’une enquête, d’une enquête préliminaire, d’un procès ou d’une autre procédure. Le paragraphe 490(2) prévoit que les biens saisis ne peuvent être détenus pour une période d’au-delà de trois mois après la saisie à moins que le juge ordonne autrement ou que des procédures aient été engagées au cours desquelles les biens peuvent être requis. Si l’agent de la paix demande une ordonnance de prolongation pour la détention des biens, le juge doit être convaincu, à la suite d’une demande sommaire, que la personne qui en avait la possession au moment de leur saisie a reçu un avis, de trois jours francs, de la nature de l’application. Il ne peut rendre l’ordonnance sollicitée à moins qu’il soit convaincu que la prolongation de leur détention soit justifiée.

12. Le paragraphe 490(3) prévoit que plus d’une ordonnance de prolongation de détention des biens saisis peut être obtenue, mais seulement selon les exigences de l’article en question.

13. Selon le paragraphe 490(6), lorsque les périodes de détention ordonnées par le juge sont expirées et qu’aucune procédure pour laquelle les biens auraient pu être requis n’a été engagée, le poursuivant ou l’agent de la paix peut demander au juge de rendre une ordonnance à l’égard des biens. Ces ordonnances sont décrites aux paragraphes 490(9) et (9.1). Celle obtenue en vertu du paragraphe 490(9) vise généralement le retour des biens au propriétaire légitime ou à toute autre personne ayant droit à la possession légitime. L’ordonnance visée par le paragraphe 490(9.1) autorise une détention pour une période supplémentaire. Cette dernière serait ordonnée seulement si le juge était convaincu que les intérêts de la justice le justifient, que des procédures pour lesquelles les biens détenus peuvent être requis n’ont pas été engagées et que la prolongation de la détention pour la période ordonnée est nécessaire aux fins d’une enquête, d’une enquête préliminaire, d’un procès ou d’une autre procédure. Je note finalement qu’il n’existe aucune limitation temporelle en ce qui concerne l’application en vertu du paragraphe 490(9.1) du Code criminel : il s’agit tout simplement que les périodes de détention autorisées soient expirées.

14. Les paragraphes 490(7) et (10) autorisent la personne nommée de déposer une demande pour le retour des biens saisis.

Le dédommagement à la victime doit toujours être envisagé lors de la détermination de la peine

Le droit applicable à la preuve de la conduite postérieure à l’infraction

R. c. Cardinal, 2018 QCCS 2441 Lien vers la décision [ 33 ]             L’essentiel du droit applicable à la preuve de la conduite postérieu...