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lundi 21 mai 2018

Comment est un jugement est vicié quand un juge se livre à un concours de crédibilité

Lepage c. R., 2017 QCCA 1570 (CanLII)

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[4]         Sans en expliquer les raisons, le juge n’accorde pas de crédibilité à l’appelant parce qu’il ne voit pas pourquoi la plaignante aurait inventé toute cette histoire. L’examen du jugement, dans son ensemble, révèle qu’il s’est livré à un concours de crédibilité, ce que la démarche proposée dans R. c. W.(D.) vise à éviter.
[5]         Cette erreur a eu pour effet d’imposer à l’appelant le fardeau de réfuter la version de la plaignante et comme « conséquence pratique [...] d’abaisser le fardeau de preuve du ministère public en le faisant passer d’une preuve hors de tout doute raisonnable à une preuve selon la prépondérance des probabilités »

mercredi 9 mai 2018

Le fardeau de preuve et la présomption d’innocence

R. c. Zampino, 2018 QCCQ 2782 (CanLII)

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[189]      Il est bien établi que toute personne inculpée d'une infraction criminelle est présumée innocente jusqu'à ce que le ministère public établisse sa culpabilité hors de tout doute raisonnable.  Les accusés n'ont pas à prouver qu'ils sont innocents.  Le Tribunal ne peut déclarer un accusé coupable que si, compte tenu de l'ensemble de la preuve, il est satisfait que le ministère public a établi sa culpabilité hors de tout doute raisonnable.  Si la preuve, l’absence de preuve, la fiabilité ou la crédibilité d’un ou plusieurs témoins laissent subsister un doute raisonnable sur la culpabilité d’un accusé, le Tribunal doit l'acquitter.
[190]           Dans R. c. Vuradin, au par. 21, la Cour suprême mentionne:
La question primordiale qui se pose dans une affaire criminelle est de savoir si, compte tenu de l’ensemble de la preuve, il subsiste dans l'esprit du juge des faits un doute raisonnable quant à la culpabilité de l'accusé : W. (D.), p. 758.  L’ordre dans lequel le juge du procès énonce des conclusions relatives à la crédibilité des témoins n’a pas de conséquences dès lors que le principe du doute raisonnable demeure la considération primordiale.  Un verdict de culpabilité ne doit pas être fondé sur un choix entre la preuve de l’accusé et celle du ministère public : R. c. C.L.Y.2008 CSC 2 (CanLII)[2008] 1 R.C.S. 5, par. 6‑8.  Les juges de première instance n’ont cependant pas l’obligation d’expliquer par le menu le cheminement qu’ils ont suivi pour arriver au verdict : voir R. c. Boucher,  2005 CSC 72 (CanLII)[2005] 3 R.C.S. 499, par. 29.
[191]         Le test que le Tribunal doit appliquer lorsque la crédibilité des témoins est en cause est défini par la Cour suprême dans l’arrêt W. (D.).  Premièrement, si le Tribunal croit le témoignage d’un accusé selon lequel il n'a pas commis la ou les infractions reprochées, il doit l'acquitter.  Deuxièmement, si le Tribunal ne croit pas l’accusé, mais que la preuve qu’il présente laisse néanmoins subsister un doute raisonnable quant à sa culpabilité, le Tribunal doit l'acquitter.  Troisièmement, même si le Tribunal n’a pas de doute à la suite de la déposition de l’accusé, cela ne signifie pas qu’il doit le déclarer coupable; le Tribunal doit alors se demander si, en vertu de la preuve qu’il accepte, il est convaincu hors de tout doute raisonnable de la culpabilité de chaque accusé.
[192]        Il est entendu que la culpabilité probable ou vraisemblable d’un accusé sera toujours jugée insuffisante aux fins du droit criminel.  Par ailleurs, dans les cas où la preuve est largement ou uniquement circonstancielle, le Tribunal doit se demander si la culpabilité de l’accusé est la seule inférence raisonnable ou rationnelle pouvant être tirée de la preuve.  Dans l’arrêt Villaroman, la Cour suprême précise que le Tribunal doit se demander si « la preuve circonstancielle, considérée logiquement et à la lumière de l’expérience humaine et du bon sens, peut étayer une autre inférence que la culpabilité de l’accusé ».  Si tel est le cas, un verdict d’acquittement doit s’ensuivre.

Les directives du juge relatives à la théorie de la défense

Hurtubise c. R., 2011 QCCA 337 (CanLII)

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[37]           Le juge a livré son résumé de la thèse des parties à partir des résumés soumis par les procureur/es des parties. Il est opportun de souligner que malgré sa demande à cet effet, les procureures de la défense ne lui ont pas d'emblée remis une liste des faits distinctifs entre les trois scènes de crime. Or, là réside aujourd'hui le reproche principal des appelants, celui d'un traitement inéquitable de leur théorie de la cause au regard de l'exposé des faits similaires.
[38]           Le devoir d'un juge présidant un procès devant jury est de traiter équitablement les deux parties et de s'assurer que le jury dispose des éléments nécessaires permettant de comprendre autant les prétentions de la défense que celles de la poursuite.  Son exposé n'a pas à constituer un sommaire exhaustif de toute la preuve :
30 It must also be stressed that the review described need not be exhaustive: R. v. John (1970), 1970 CanLII 199 (CSC)2 C.C.C. (2d) 157at 166 (S.C.C.). The trial judge is not expected to rehash each and every argument made by counsel. The charge is proper if it leaves the jury with a sufficient understanding of the evidence relating to the positions taken by the parties on the various issues.
[39]           Madame la juge Thibault, au nom de la Cour, s'exprimait ainsi dans l'arrêt Devillers[ :
65 Dans l'arrêt R. c. Charlebois, la Cour suprême a rappelé une règle séculaire quant au rôle du juge à l'égard de la thèse de la défense, en référant à l'extrait suivant de l'arrêt R. c. G.(R.M.) :
Lorsqu'il donne des directives au jury, il est essentiel que le juge du procès résume la thèse ou la position de la défense et qu'il mentionne les éléments essentiels qui influent sur cette défense de façon à permettre au jury de bien apprécier la preuve. [Je souligne.]
66 Ce principe fait aussi l'unanimité chez les auteurs qui y voient la consécration du devoir du juge du procès de s'assurer de la compréhension du jury de tous les éléments qui lui permettent de décider du verdict. Les directives n'ont pas à être parfaites, mais il est important qu'elles soient appropriées. En particulier, l'exposé du juge doit être "juste" et "adéquat".
[références de la Cour omises]
[40]           Le juge a, selon les informations qu'il avait et compte tenu des plaidoiries des avocates des appelants, présenté les éléments les plus pertinents de la thèse de la défense. Il a bien dirigé le jury sur la manière d'étudier la preuve circonstancielle, en portant une attention particulière à la preuve d'identification

La preuve d'identification (« recognition evidence ») est admissible lorsque le témoin est dans une meilleure position que le jury pour identifier l'accusé en fonction de 3 critères

Hurtubise c. R., 2011 QCCA 337 (CanLII)

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[15]           Par ailleurs, le premier juge s'est appuyé sur une décision de la Cour suprême de la Colombie-Britannique, R. v. Anderson, pour conclure qu'une preuve d'identification (« recognition evidence ») est admissible lorsque le témoin est dans une meilleure position que le jury pour identifier l'accusé en fonction des critères suivants : (1) la durée de la relation entre l'accusé et le témoin, (2) les circonstances entourant cette relation et (3) le caractère récent des contacts entre l'accusé et le témoin.

On ne saurait attaquer la crédibilité d'un témoin ou de la preuve qu'il apporte sans lui poser la moindre question sur le sujet

Hurtubise c. R., 2011 QCCA 337 (CanLII)

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[11]           Les reproches de contamination possible ne sont pas fondés. Le témoin Dyotte est le seul agent de libération conditionnelle qui a témoigné devant le jury et ce témoignage s'est limité à l'identification de Michel Mayer à partir des enregistrements vidéo réalisés sur la scène des vols. Parmi les trois agents appelés à témoigner à l'enquête préliminaire, Dyotte est celui qui connaissait le mieux l'accusé. En apercevant Mayer sur la scène du crime, il l'a identifié instantanément sans manifester quelque hésitation que ce soit. 
[12]           L'agent de libération conditionnelle Michel Dyotte connaissait l'appelant Mayer dans un contexte « professionnel », certes. Ceci ne veut pas dire que son témoignage ait été empreint d'un préjugé. Sa crédibilité, comme celle de tout témoin, pouvait être attaquée par le contre-interrogatoire. Or, l'appelant, qui s'était au départ opposé à son témoignage, a choisi de ne pas le contre-interroger en raison des dangers que cela pourrait présenter vu la nature de sa relation avec ce témoin. Ce n'est qu'au stade de la plaidoirie que l'hypothèse d'un préjugé défavorable a été soulevée.
[13]           Il était trop tard. On ne saurait attaquer la crédibilité d'un témoin ou de la preuve qu'il apporte sans lui poser la moindre question sur le sujet. C'est ce que l'on appelle le duty of fairness to the witness:
To my mind nothing would be more absolutely unjust than not to cross-examine witnesses upon evidence which they have given, so as to give them notice, and to give them an opportunity of explanation, and an opportunity very often to defend their own character, and, not having given them such an opportunity, to ask the jury afterwards to disbelieve what they have said, although not one question has been directed either to their credit or to the accuracy of the facts they have deposed to.
[14]           Il va sans dire, d'une part, qu'un accusé doit accepter les conséquences d'un choix stratégique et, d'autre part, que la relation accusé-agent correctionnel ne fait pas en soi l'objet d'une protection quelconque à titre de communication ou de connaissance privilégiée. Le fait que la personne qui identifie l'accusé comme l'individu ayant perpétré un crime soit un agent de libération conditionnelle est certes préjudiciable, comme l'est, en général, toute preuve à charge contre l'accusé, puisque l'objectif est de présenter au juge des faits des éléments suffisants pour conclure, hors de tout doute raisonnable, à la culpabilité. Cela ne rend pas pour autant cette preuve inadmissible lorsqu'elle revêt une valeur probante certaine, comme en l'espèce. En outre,  le jury n'a pas été informé de la nature précise des liens entre l'appelant Mayer et le témoin Dyotte

Les principes de droit applicables à l’analyse d’une requête en séparation de chefs d’accusation aux fins de procès

Takri c. R., 2015 QCCA 690 (CanLII)

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[10]   Les principes de droit applicables à l’analyse d’une requête en séparation de chefs d’accusation aux fins de procès, aux termes de 591 (3) a) C.cr. et relatifs à la norme de contrôle que doit appliquer une cour d’appel à l’égard d’un jugement rendu par un tribunal de première instance en cette matière ont été définis par la Cour suprême du Canada dans l’arrêt LastNous en avons récemment rappelé la substance dans l’arrêt Morasse :
[56]         Décider s’il y a lieu de donner suite à une demande de séparation de chefs d’accusation oblige le juge à se demander si les intérêts de la justice l’exigent ou pas : comme l’écrit la juge Deschamps dans Last, « les intérêts de la justice constituent le critère primordial. ». Ces intérêts englobent « le droit de l’accusé d’être jugé en fonction de la preuve admissible contre lui, ainsi que l’intérêt de la société à ce que justice soit rendue d’une manière raisonnablement efficace, compte tenu des coûts. ». Plusieurs facteurs doivent être pris en compte dont le préjudice causé à l’accusé, le lien juridique et factuel entre les chefs d’accusation, la question de savoir si l’accusé entend témoigner à l’égard d’un chef d’accusation, mais pas à l’égard d’un autre, le désir d’éviter la multiplicité des instances, l’utilisation de la preuve de faits similaires au procès et la durée du procès compte tenu de la preuve à produire.

[57]         Au moment d’évaluer l’intention déclarée de l’accusé de témoigner, le juge doit se préoccuper de la capacité de ce dernier à contrôler sa défense et, plus précisément, de son droit de décider s’il témoignera ou non à l’égard de chacun des chefs d’accusation. Cela dit, et bien que l’intention provisoire d’un accusé au sujet de son témoignage mérite qu’on lui accorde un poids important, elle n’est qu’un des facteurs qui doivent être soupesés. En ce sens, une intention déclarée et objectivement justifiable de témoigner à l’égard de certains chefs d’accusation seulement n’est pas nécessairement déterminante, car, comme l’écrit la juge Deschamps dans Last, « [e]lle peut être contrebalancée par d’autres circonstances qui, selon le juge, peuvent empêcher l’accusé de témoigner ou même peser moins lourd dans la balance que des facteurs qui démontrent que les intérêts de la justice exigent la tenue d’une instruction conjointe. ».

[58]         Les liens factuel et juridique entre les chefs d’accusation dont on demande la séparation constituent également un facteur pertinent, notamment lorsque la poursuite entend présenter une preuve de faits similaires : « [d]ans bien des cas, une décision accueillant une preuve de faits similaires favorisera la tenue d’une instruction conjointe car les éléments de preuve relatifs à l’ensemble des événements doivent être produits de toute façon. ».

[59]         Rappelons qu’au moment où il décide de la requête en séparation, le juge n’a pas à décider de l’admissibilité de la preuve de faits similaires dont il doit simplement, à ce stade, évaluer le sérieux.

[60]         Une Cour d’appel doit faire preuve de retenue et de déférence à l’égard de la décision du juge « tant que celui‑ci agit selon les normes judiciaires et que sa décision ne cause aucune injustice ».

[Références omises]

[11]        La prétention de l’appelant voulant que le jugement rendu le 1er mai 2012 soit, à la fois, contraire aux normes judiciaires applicables et cause d’une injustice dont il serait la victime ne résiste pas à l’analyse.
[12]        La juge détermine correctement les règles et les principes de droit applicables. Elle résume fidèlement les prétentions des parties. Elle analyse l’ensemble des données (facteurs favorables et défavorables à une séparation de procès) selon les enseignements de l’arrêt Last. Elle se préoccupe du risque de préjudice pour l’accusé, le cas échéant, constate qu’il se trouve devant juge seul et note que son contre-interrogatoire pourra être limité, au besoin, s’il choisit de témoigner dans un cas, mais non dans l’autre. Sans se prononcer sur l’admissibilité d’une preuve de faits similaires, mais en relatant la description qu’en fait le Ministère public qui a annoncé vouloir la présenter pour établir un modus operandi de l’accusé et ainsi rehausser la crédibilité des plaignantes, elle retient qu’elle ne peut pas conclure « que cette demande ne serait probablement pas accueillie ». Bref, le tout soupesé, elle conclut qu’il est dans l’intérêt de la justice de refuser la tenue de procès distincts.
[13]        La prétention de l’appelant, énoncée au paragraphe 19 de son mémoire, voulant que ce jugement soit cause d’une injustice à son égard parce que « [l]a juge de première instance a donc entendu les faits relatés par les deux plaignantes et il est vraisemblable que cela ait contaminé son esprit et ait influé sur la condamnation de l’appelant » est dénuée de fondement.
[14]        D’abord : dans le cas d’un procès devant juge seul où il annonce une preuve de faits similaires, que cette preuve soit jugée admissible ou non à l’issue de la preuve présentée par le Ministère public, le juge doit tout entendre, de toute manière, que les chefs d’accusation soient séparés ou qu’ils soient réunis aux fins de procès.
[15]      Ensuite : la juge connaît et rappelle son rôle et ses obligations dans l’hypothèse où, aux fins de rendre jugement, elle doit écarter une preuve entendue jugée inadmissible, faisant siens notamment, à ce sujet, les propos suivants de l’un de ses collègues : « [L]e juge du procès se voit souvent soumettre des éléments de preuve inadmissibles. Le fait d’en avoir pris connaissance ne compromet nullement son impartialité. Au final, il en fera abstraction s’il décide de les écarter. »
[16]      Enfin : la juge a conclu que la preuve de faits similaires était inadmissible et l’analyse à laquelle elle se livre, dans chaque cas, dans son jugement final ne permet pas de soutenir une prétention de contamination.

Référer au témoignage d’une plaignante aux fins d’évaluation de la crédibilité d’un accusé n’est pas une erreur en soi

Takri c. R., 2015 QCCA 690 (CanLII)

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[27]      La juge est bien au fait des enseignements de l’arrêt R. c. W.D. comme le révèlent ses propos en cours de procès, notamment lors de ses échanges avec les avocats au moment des plaidoiries, et le contenu de son jugement du 12 octobre 2012.
[28]      Référer, le cas échéant, au témoignage d’une plaignante aux fins d’évaluation de la crédibilité d’un accusé n’est pas une erreur en soi, comme l’a écrit récemment la juge en chef de la Cour :
Il peut arriver, comme en l'espèce, qu'un jugement comporte des références au témoignage de la plaignante pour les fins d'évaluation de la crédibilité d'un accusé. Cela ne signifie pas que le juge choisit, parmi les deux versions soumises, celle qui lui paraît la plus probable, ce qui constituerait un déplacement et une transformation du fardeau de la preuve et une erreur de droit. En l'espèce, le juge ne faisait que replacer le témoignage de l'appelant dans le contexte de l'ensemble de la preuve, ce qu'il peut, et même, se doit de faire […].

[29]        D’ailleurs, comme le note la Cour d’appel de l’Ontario dans Hoohing, le faire peut s’avérer nécessaire puisqu’un élément de preuve ne doit pas être examiné en vase clos :
The evidence of any witness, including an accused, may be believable standing on its own, but when other evidence is given that is contradictory, or casts doubt on the accuracy or reliability of the witnesses’ evidence, that evidence may no longer be believable, or in the case of an accused, may no longer raise a reasonable doubt.
[30]      À la lecture du jugement et des transcriptions de l’audience, il est manifeste que la juge de première instance avait pleinement conscience du fardeau de preuve que devait rencontrer la poursuite en l’espèce et qu’elle l’a correctement appliqué. 
[31]      Il ne fait aucun doute que la juge avait l’obligation de motiver.
[32]      Pour se décharger de cette obligation, elle devait révéler aux parties touchées par sa décision pourquoi elle avait été rendue, rendre compte devant le public de l’exercice du pouvoir judiciaire et permettre un examen valable de sa décision en appel. Des motifs qui remplissent ces trois fonctions seront jugés suffisants.
[33]      Il n’est pas requis qu’un juge analyse chaque élément de preuve en détail ni qu’il s’exprime quant à chacun des éléments de contradictions soulevés, car ni l’exhaustivité ni la perfection ne constituent la grille d’analyse à utiliser pour juger de la suffisance des motifs communiqués.
[34]      Comme l’écrit la juge en chef McLachlin dans l’arrêt R.E.M. :
49. Bien qu’il soit utile que le juge tente d’expo­ser clairement les motifs qui l’ont amené à croire un témoin plutôt qu’un autre, en général ou sur un point en particulier, il demeure que cet exercice n’est pas nécessairement purement intellectuel et peut impli­quer des facteurs difficiles à énoncer. […] Bref, l’appréciation de la crédibilité est un exercice dif­ficile et délicat qui ne se prête  pas toujours à une énonciation complète et précise.
50. Ce qu’on entend par des motifs suffisants concernant la crédibilité peut se déduire de l’ar­rêt Dinardo, dans lequel la juge Charron a statué que les conclusions sur la crédibilité doivent être tirées au regard des autres éléments de preuve (par. 23). Il faut peut-être pour cela que la preuve contradictoire soit à tout le moins mentionnée. Cependant, comme l’arrêt Dinardo le dit claire­ment, ce qui compte, c’est qu’il ressorte des motifs que le juge a saisi l’essentiel de la question en litige. […]
51. [L]e niveau de détails requis pour expliquer les conclusions relatives à la crédibilité peut aussi varier selon la preuve versée au dossier et la dynamique du procès. Il se peut que les facteurs en faveur ou en défaveur de la crédibilité ressortent clairement du dossier. En pareil cas, les motifs du juge du procès ne peu­vent être jugés déficients simplement parce qu’il ne les a pas énumérés.
57. Les cours d’appel doivent se poser la question cruciale formulée dans l’arrêt Sheppard : les motifs du juge du procès, considérés dans le contexte de la preuve versée au dossier, des questions en litige telles qu’elles sont ressorties au procès et des obser­vations des avocats, privent-ils l’appelant du droit à un véritable examen en appel? Pour procéder à un véritable examen en appel, la cour doit pouvoir discerner le fondement de la déclaration de culpa­bilité. Les conclusions essentielles sur la crédi­bilité doivent avoir été tirées, et les questions de droit fondamentales doivent avoir été résolues. Si la cour d’appel arrive à la conclusion que, compte tenu de l’ensemble du dossier, le juge du procès n’a pas tranché sur le fond les questions essentiel­les en litige (comme ce fut le cas dans Sheppard et Dinardo), elle peut alors, mais seulement alors, conclure que la déficience des motifs constitue une erreur de droit.

Le dédommagement à la victime doit toujours être envisagé lors de la détermination de la peine

Les déclarations d'un accusé à son complice ne sont pas du ouï-dire

R v Ballantyne, 2015 SKCA 107 Lien vers la décision [ 58 ]             At trial, Crown counsel attempted to tender evidence of a statement m...