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vendredi 25 janvier 2013

Les éléments constitutifs des infractions de voies de fait graves & de voies de fait armées

R. c. Martin Champoux, 2012 QCCQ 14905 (CanLII)

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[52]        Relativement à l'infraction de voies de fait graves, pour obtenir une déclaration de culpabilité, la poursuite doit établir hors de tout doute raisonnable que l'accusé a employé la force d'une manière intentionnelle et démontrer une prévision objective de lésions corporelles tel que décidé par la Cour suprême dans l'arrêt Godin. La poursuite n'a pas à prouver que l'accusé avait l'intention de causer les blessures ou de mettre la vie en danger.

[53]        Quant à l'infraction de voies de fait armées, la même intention d'emploi de la force de manière intentionnelle est requise. La poursuite devra aussi démontrer que l'accusé utilisait une arme lors de la commission des voies de fait.

Les éléments constitutifs de l'infraction de conduite dangereuse

R. c. Martin Champoux, 2012 QCCQ 14905 (CanLII)

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[67]        Dans l'arrêt Roy, la Cour suprême réitère les éléments de l'infraction de conduite dangereuse, dans un premier temps le tribunal saisi de la question doit examiner l'actus reus, soit la façon de conduire de l'accusé. Dans un deuxième temps, il doit examiner la mens rea, afin de déterminer si la façon dangereuse de conduire constitue un écart marqué par rapport à la norme que respecterait une personne raisonnable placée dans les mêmes circonstances.

[69]        Quant à l'intention, la Cour au paragraphe 38 dit ceci:
Certes, la preuve d'une mens rea subjective, c'est-à-dire, conduire délibérément de façon dangereuse, justifierait une déclaration de culpabilité pour conduite dangereuse, mais cette preuve n'est pas requise.
[70]        Le même raisonnement est appliqué par la juge Charron dans l'arrêt Beatty,lorsqu'elle dit au paragraphe 47:
Par exemple, si on fait la preuve qu'un conducteur a délibérément bifurqué dans la voie d'un véhicule circulant en direction inverse, d'une façon intentionnellement dangereuse, dans le but d'effrayer les passagers de ce véhicule ou d'impressionner par sa bravade une personne se trouvant dans son propre véhicule, l'exigence de mens rea serait aisément remplie.

Les paramètres à considérer pour évaluer adéquatement le plaidoyer de culpabilité à titre de facteur atténuant

 R. c. Blais, 2013 QCCS 25 (CanLII)


[166]     Un plaidoyer de culpabilité enregistré avec célérité constitue un facteur atténuant important. En conséquence, un plaidoyer enregistré rapidement mérite une sérieuse considération pour de nombreuses raisons. 

[167]     Selon le juge Ewaschuk (supra) 18 :0370, un tribunal accorderait généralement une réduction au bénéfice d’un accusé qui manifeste des remords, reconnaissant sa responsabilité et qui permettrait à l’administration de la justice d’éviter les coûts d’un procès. Cependant, un plaidoyer à la toute dernière minute avant le procès comme en l’espèce ne constitue pas un plaidoyer qui mérite une considération particulière dans la détermination de la peine :

« 18 :0370.  A court will generally impose a lesser sentence if the accused pleads guilty on the basis that this indicates remorse, acknowledgement of responsibility, and saves the community expense.
The credit to be given for a guilty plea cannot be reduced to any "mathematical formula", but varies with the circumstances of each case.
However, a guilty plea will not attract much of a discount where the circumstances are such that the guilty plea is offered in the face of overwhelming evidence of guilt, or made only at trial. The latter case does not constitute an "early guilty plea", which may attract a considerable reduction in sentence. In particular, a prompt guilty plea is considered a major mitigating factor, R. v. Sandercock (1985), 22 C.C.C. (3d) 79, [1986] 1 W.W.R. 291, 15 W.C.B. 82, 1985 CLB 99 (Alta. C.A.) at p. 86  but not a late guilty plea. »

L'état du droit concernant l'infraction de traite des personnes

Urizar c. R., 2013 QCCA 46 (CanLII)

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[71]        La notion d'exploitation est définie à l'article 279.04 C.cr.  Les agissements à la source de l'exploitation s'évaluent à l'aide d'un critère objectif.  La victime est amenée à fournir son travail ou ses services par des agissements dont il est raisonnable de s'attendre, compte tenu du contexte, à ce qu'ils fassent croire qu'un refus de sa part mettrait en danger sa sécurité ou celle d'une personne qu'elle connaît.

[72]        L'infraction peut être commise de différentes façons.  Il peut s'agir d'un geste isolé ou de gestes coordonnés pourvu que ces gestes soient posés en vue d'exploiter ou de faciliter l'exploitation de la personne.  Ainsi, celui qui recrute ou héberge pourra être accusé de la traite des personnes à la condition qu'il ait su que le geste posé l'avait été en vue d'exploiter ou de faciliter l'exploitation d'une personne.

[73]        Il n'est pas non plus nécessaire, pour que l'infraction soit consommée, qu'il y ait déplacement de personnes à proprement dit.  Dans sa Fiche de renseignements à l’intention des agents d’application de la loi en matière de traite des personnes, le ministère de la Justice précise que la traite des personnes peut se dérouler entièrement à l'intérieur des frontières canadiennes et qu'elle n'implique pas nécessairement le déplacement des victimes :

Il n’est pas nécessaire que les victimes aient franchi la frontière du Canada. La traite des personnes peut se dérouler entièrement à l’intérieur des frontières canadiennes.
Il n’est pas nécessaire que les victimes soient déplacées. Il suffit, par exemple, de les héberger ou d’exercer un contrôle, une direction ou une influence sur celles-ci afin de les exploiter ou de faciliter leur exploitation.
(je souligne)
[74]        Dans sa première partie, l'article 279.01 C.cr.utilise des termes qui reflètent une action précise : recrute, transporte, transfère, reçoit, détient, cache, héberge.  Le second segment de l'article suggère un état des choses qui découle d'une série d'agissements plutôt que d'un acte isolé : exerce un contrôle, une direction ou une influence sur les mouvements d'une personne.  Ces derniers termes évoquent la notion d'emprise, de mainmise, d'ascendant sur la personne et sur ses mouvements.

[75]        Ici, le législateur emploie les mêmes mots que ceux qu'il utilise en matière de proxénétisme à l'article 212(1)h) C.cr.: « aux fins de lucre, exerce un contrôle, une direction ou une influence sur les mouvements d'une personne…».  Dans l'arrêt Perreault c. R., notre Cour définit les éléments essentiels de cette infraction de la façon suivante :

L'élément contrôle réfère à un comportement envahissant, à une emprise laissant peu de choix à la personne contrôlée.  Ce comportement inclut par conséquent des actes de direction et d'influence.  Il y a exercice de direction sur les mouvements d'une personne lorsque des règles ou des comportements sont imposés.  L'exercice de direction n'exclut pas que la personne dirigée dispose de latitude ou d'une marge d'initiative.  L'exercice d'influence inclut des comportements moins contraignants.  Sera considérée comme une influence, toute action exercée sur une personne en vue d'aider, encourager ou forcer à s'adonner à la prostitution.

[76]        Il faut noter que le législateur reprend en matière de traite des personnes la même expression sans y ajouter d'éléments reliés à des déplacements forcés ou à des situations qui s'apparentent à celles d'un migrant.  Il ressort plutôt du texte de l'article 279.01 C.cr. que l'infraction peut être commise par des agissements qui, à degré variable, forment une contrainte sur les mouvements d'une personne en vue de l'exploiter ou de faciliter son exploitation.

[77]        Je conclus que l'interprétation de l'article 279.01 C.cr. proposée par l'appelant doit être rejetée.  Il ne ressort ni du texte de l'article ni des objectifs visés par le Parlement que l'infraction de traite des personnes soit confinée aux seuls cas de mouvements forcés qui s'apparentent à ceux d'un migrant.

[78]        En l'espèce, la preuve révèle que l'emprise d'Urizar sur la plaignante a pris différentes formes.  Il est important d'en saisir la gradation.

La défense peut présenter une requête en réouverture d'enquête tant que la sentence n'a pas été prononcée

Dallaire c. R., 2013 QCCA 83 (CanLII)


[70]        La défense peut présenter une requête en réouverture d'enquête tant que la sentence n'a pas été prononcée. Lorsque cette requête est présentée après que le verdict a été rendu, ce sont des critères plus stricts et similaires à ceux définis par la Cour suprême en matière d'admissibilité de preuve en appel qui s'appliquent :

(1) On ne devrait généralement pas admettre une déposition qui, avec diligence raisonnable, aurait pu être produite au procès, à condition de ne pas appliquer ce principe général de manière aussi stricte dans les affaires criminelles que dans les affaires civiles : voir M Martin c. La Reine,

(2) La déposition doit être pertinente, en ce sens qu’elle doit porter sur une question décisive ou potentiellement décisive quant au procès, 

(3) La déposition doit être plausible, en ce sens qu’on puisse raisonnablement y ajouter foi, et 

(4) Elle doit être telle que si l’on y ajoute foi, on puisse raisonnablement penser qu’avec les autres éléments de preuve produits au procès, elle aurait influé sur le résultat.
 
[71]        Si la requête en réouverture d'enquête n'est en définitive qu'une manière de renverser une décision stratégique prise lors du procès, elle sera rejetée et l'accusé devra vivre avec les conséquences de ses décision

Les éléments constitutifs de l'infraction de menace

Dallaire c. R., 2013 QCCA 83 (CanLII)

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 58]        L'article 264.1 C.cr. vise à assurer une protection contre la crainte et l'intimidation; il importe donc peu que la menace soit mise à exécution ou non.

[59]        L'actus reus de cette infraction consiste à proférer des menaces de mort ou de blessures graves

[60]        La mens rea de l'infraction, c'est « l'intention de faire en sorte que les paroles prononcées ou les mots écrits soient perçus comme une menace de causer la mort ou des blessures graves, c'est-à-dire comme visant à intimider ou à être pris au sérieux ». Il n'est pas nécessaire que la victime visée soit au courant de la menace; cela ne constitue pas un élément essentiel de l'infraction. Quant à l'identité de la victime, elle n'a pas nécessairement à être identifiée, mais il suffit qu'elle soit identifiable. 

[61]        Dans l'arrêt Clemente, la Cour suprême explique qu'il faut tenir compte des circonstances dans lesquelles les paroles s'inscrivent, de la manière dont elles ont été prononcées et de la personne à qui elles étaient destinées

Détermination de la peine relativement à l'infraction d'avoir omis, dans l'intention d'échapper à toute responsabilité civile ou criminelle et alors qu'il est impliqué dans un accident ayant causé des blessures corporelles, de s'arrêter et d'offrir de l'aide à cette victime qui en avait besoin

R. c. St-Louis, 2012 QCCQ 14901 (CanLII)

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[54]        Afin d'aider le Tribunal à déterminer la peine, le Directeur des poursuites criminelles et pénales soumet plus d'une dizaine de jugements en semblables matières.

[55]        Dans l'arrêt R. c. Goulet, l'accusé quitte la scène d'un accident après avoir blessé sérieusement une personne. La Cour d'appel de l'Alberta, après avoir examiné le contexte global dans lequel l'infraction est survenue, décide que l'emprisonnement dans la collectivité est possible pour une infraction de délit de fuite dans la mesure où la sécurité du blessé n'est pas aggravée par le fait que le délinquant quitte les lieux de l'accident. Conséquemment et puisque dans cette affaire il n'y avait pas aggravation des blessures par la fuite de l'accusé, elle confirme une peine de détention de 12 mois à être purgée au sein de la collectivité.

[56]        Dans R. c. Schmitt, la Cour de justice de l'Ontario impose à un conducteur de 18 ans, une peine de détention de 5 mois, parce qu'il ne s'est pas arrêté après avoir frappé mortellement un cycliste. La Cour décide que l'emprisonnement dans la collectivité n'est pas une solution envisageable, parce que l'accusé a fui la scène de l'accident sans savoir si quelqu'un d'autre s'est arrêté pour porter secours à la victime.

[57]        Dans R. c. Wieczorek, cette même Cour de justice ontarienne impose une peine d'emprisonnement de 5 mois, à un jeune conducteur qui omet de s'arrêter après avoir frappé mortellement un piéton. La Cour mentionne que dans cette affaire, une peine à être purgée dans la collectivité ne rencontre pas les facteurs de dénonciation et de dissuasion prévus aux articles 718 et suivants du Code criminel.

[58]        Dans R. c. Bruce, la Cour provinciale de l'Alberta condamne un conducteur à une peine d'incarcération de 5 mois, après que celui-ci ait écrasé une personne à la sortie d'un bar. La Cour est d'avis que les circonstances propres de cette affaire font en sorte qu'une sentence à être purgée au sein de la collectivité n'aurait pas rencontré les facteurs de dénonciation et de dissuasion et qu'une telle peine n'aurait pas été proportionnelle à la gravité de l'infraction et au degré de responsabilité de l'accusé.

[59]        Dans R. c. Ali , cette même Cour a également condamné un conducteur à une peine d'incarcération de 6 mois.

[60]        Dans R. c. Foley, la Cour suprême de la Nouvelle-Écosse condamne l'accusé à une peine de détention d'une année après avoir constaté la présence de nombreux facteurs aggravants. L'accusé avait notamment tenté de cacher son véhicule.

[61]        Dans R. c. Girard, la Cour du Québec impose, elle aussi, une peine d'emprisonnement d'une année à un homme de 25 ans, sans antécédent judiciaire, mais où les circonstances aggravantes éclipsent toutes les circonstances atténuantes. Le conducteur allait à une vitesse excessive et commettait un dépassement illégal. De plus, il y avait présence d'un risque de récidive.

[62]        Dans R. c. Fournier, la Cour du Québec a imposé une peine de 18 mois à un conducteur qui, après avoir frappé un piéton, quitte les lieux, nettoie son automobile et tente de cacher son délit en simulant un autre accident.

[63]        R. c. Langlais, la Cour du Québec impose une peine de 2 ans moins 1 jour à être purgée au sein de la collectivité.  L'accusé avait pris la fuite après avoir heurté un piéton.

[64]        R. c. Greer, la Cour du Québec impose une peine de détention ferme de 18 mois à un conducteur dont la preuve révèle qu'il était sous l'influence de l'alcool au moment de l'accident, et que par la suite, il ment aux policiers sur les circonstances de cet accident et cache son véhicule.

[65]        L'avocat de l'accusé a quant à lui soumis l'arrêt Camiréoù la Cour d'appel réduit une peine d'emprisonnement ferme en une peine de 30 mois à une peine de 23 mois à être purgée au sein de la collectivité.  La Cour d'appel reproche au juge de première instance d'avoir accordé une importance démesurée aux facteurs de dénonciation et de dissuasion.

[66]         Par ailleurs, le Tribunal a également considéré les décisions, R. c. Boudreau, R. c. Dhaliwal, R. c. Peragineet R. c. Alves.

[67]        Dans R. c. Boudreau, après avoir heurté deux piétons, l'accusé panique et prend la fuite, mais revient sur les lieux peu après. Le juge Dunnigan décide de surseoir au prononcé de la sentence.

[68]        Dans l'affaire Dhaliwal, l'accusé, après avoir frappé et traîné sur une courte distance la victime, la laisse au centre de la rue sans s'arrêter.  La Cour décide de suivre la position dans l'arrêt Schmittet déclare que l'accusé a commis une infraction comportant des sévices graves à la personne et a exclu l'emprisonnement dans la collectivité.

[69]        Dans le dossier Peragine,  la Cour analyse les circonstances de l'accident dans un contexte global, tel que décidé dans l'arrêt Goulet, et conclut que l'accusé a participé à l'aggravation des blessures à la victime.  Conséquemment, il lui impose une peine de détention de 5 mois.

[70]        Enfin, dans le jugement Alves, la Cour a imposé une peine de 4 mois de détention à un accusé qui avait un antécédent de conduite dangereuse causant des blessures corporelles.

[71]        De ce qui précède, le Tribunal retient que :
a)         Les peines infligées pour des infractions de délit de fuite sont généralement inférieures à 24 mois;
b)         Des peines de 12 à 18 mois sont infligées lorsqu'il y a des facteurs aggravants tels : le fait que l'accusé conduise à grande vitesse ou sous l'effet de l'alcool lors de l'accident ou encore lorsque l'accusé cache son véhicule ou simule un autre accident.
c)          Des peines de détention en milieu carcéral d'environ 6 mois s'appliquent lorsqu'il faut souligner l'importance des facteurs de dénonciation et de dissuasion;
d)         L'emprisonnement dans la collectivité constitue une peine appropriée dans la mesure où la conduite de l'accusé qui quitte les lieux d'un accident n'aggrave pas la situation de la victime.
[72]        Tel que mentionné dans l'arrêt Gouletprécité, la conduite de l'accusé doit être analysée dans un contexte global afin de déterminer la peine appropriée.

Le dédommagement à la victime doit toujours être envisagé lors de la détermination de la peine

Les délais préinculpatoires peuvent être considérés en vertu de la Charte

R. c. Ketchate, 2019 QCCA 557 Lien vers la décision [ 16 ]          Plus récemment, dans l’affaire  Hunt , il a été réitéré que les délais p...