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samedi 7 novembre 2009

Le contre-interrogatoire d'une personne au sujet de ses antécédents judiciaires peut être permis dans certains buts (et quand les exclure)

R. c. Charbonneau, 2006 QCCS 630 (CanLII)

Lien vers la décision

[7] L'article 12 (1) de la Loi sur la preuve au Canada énonce ce qui suit :

« Un témoin peut être interrogé sur la question de savoir s'il a déjà été déclaré coupable d'une infraction autre qu'une infraction qualifiée de contravention en vertu de la Loi sur les contraventions, mais incluant une telle infraction si elle aboutit à une déclaration de culpabilité par mise en accusation. »

[8] Dans R. c. Morris, la Cour suprême déclarait que le contre-interrogatoire d'une personne au sujet de ses antécédents judiciaires pouvait être permis dans le but de :

1. attaquer la crédibilité de l'accusé ;

2. démontrer la fausseté de son témoignage en chef à l'effet qu'il n'avait jamais été condamné et ;

3. réfuter une preuve de l'accusé à l'effet qu'il a une bonne réputation.

[9] Par ailleurs et contrairement à ce qu'allèguent les procureurs de l'accusé, je suis d'avis que les infractions de vol de la nature de celle révélée par le casier judiciaire de Charbonneau ont une connotation de malhonnêteté. C'est ce qu'affirmait la Cour d'appel de l'Ontario dans R. c. Brooks.

[10] Je constate ici que l'accusé, par l'intermédiaire du contre-interrogatoire que ses procureurs ont conduit de certains témoins de la poursuite, a tenté de démontrer qu'il avait une bonne réputation, qu'il n'était pas violent et que ceci n'était pas le cas des victimes dans la présente cause.

[11] Dans R. c. P. (G.F.), la Cour d'appel de l'Ontario suggère que le juge du procès considère ce qui suit afin d'en venir à sa décision d'exclure ou non les antécédents judiciaires d'un accusé :

1. la nature des antécédents en question ;

2. la similarité de ceux-ci par rapport aux infractions reprochées au procès à l'accusé et ;

3. la proximité ou l'éloignement dans le temps des condamnations antérieures.

Ce qu'est la séquestration au sens du Code criminel

N.D. c. R., 2006 QCCA 14 (CanLII)

[103] Le crime de séquestration prévu à l’article 279(2) est décrit comme suit :

(2) Quiconque, sans autorisation légitime, séquestre, emprisonne ou saisit de force une autre personne est coupable : … […]

[104] Selon la jurisprudence, pour qu’il y ait séquestration, il faut la preuve d’une contrainte privant la victime de sa liberté de mouvement d’une place à une autre et la preuve de l’intention de l’accusé d’ainsi restreindre cette liberté.

[105] Dans l’arrêt R. c. Tremblay, le juge LeBel, alors de notre Cour, a conclu que l’infraction de séquestration nécessite une restriction physique d’une personne, sans son consentement, l’empêchant de se déplacer d’un endroit à un autre.

[106] Dans l’arrêt Gratton, le juge Cory indique :

If, for any significant period of time, [the victim] was physically restrained contrary to her wishes so that she could not move about from place to place, then there was a confinement within the meaning of the section.

[107] Cette infraction est considérée comme un crime d’intention générale :

Physical restraint standing alone will satisfy the minimum intent to perform the act which constitutes the actus reus of unlawful confinement. Although the serious nature of the crime itself might be suggestive of the necessity of establishing an “ulterior intent”, over and above the minimal intent required for general intent offences, I am of the view that the minimal intent to effect deprivation of freedom of movement will suffice.

Principes que doivent suivre les tribunaux lorsqu’ils évaluent les motifs d’interception que pouvaient avoir les policiers

R. c. Larocque, 2008 CanLII 55543 (QC C.M.)

[58] La Cour d’Appel du Québec dans l’arrêt Guay c. R. (10-12-2004), 200-10-001467-039 a expliqué les principes que doivent suivre les tribunaux lorsqu’ils évaluent les motifs d’interception que pouvaient avoir les policiers.

« [35] L'appréciation de l'existence de motifs précis et raisonnables («articulable cause») pour lesquels l'interception est effectuée ne constitue qu'une étape dans la détermination de la légalité de cette interception, qui doit être étudiée selon toutes les circonstances de l'espèce (R. c. Simpson5). Ces motifs précis se définissent comme une constellation de faits objectifs et distincts de nature à susciter des soupçons raisonnables quant à la participation d'un prévenu à une infraction (R. c. Simpson).

[36] Il va de soi qu'une simple intuition ne suffit pas pour justifier l'interception, même si les faits ultérieurs devaient démontrer qu'elle était fondée. Il en va de même d'une information trop générale pour constituer un motif sérieux (Vigneault c. R.6).



[39] La Cour ne juge pas nécessaire d'énoncer d'opinion quant au flagrant délit d'infraction au Code de sécurité routière devant les agents Ferland et Bouffard sinon pour dire que, en toute autre circonstance, il y aurait eu là motif précis, légal et incontestable d'interception si les agents l'avaient invoqué pour justifier celle-ci.

[59] L’Honorable juge André Forget de la Cour d’Appel du Québec, dans une décision de R. c. Bilodeau, 200-10-001533-038, du 14 octobre 2004, disait ce qui suit sur les motifs raisonnables d’interception des policiers:

« [27] Les principes applicables en pareilles circonstances ont été énoncés principalement dans l'arrêt de la Cour suprême R. c. Dedman8 et celui de la Cour d'appel d'Ontario R. c. Simpson. Ils ont été repris tout récemment par la Cour suprême dans l'affaire R. c. Mann.



[54] Avant d'appliquer ces principes aux faits de l'espèce, j'entends formuler quelques remarques préliminaires.

[55] Premièrement: il est vrai qu'une intuition des policiers qui s'avère fondée par la suite n'a pas pour effet d'établir qu'ils avaient, avant d'agir, des motifs raisonnables15; en contrepartie, les motifs des policiers ne cessent pas d'être raisonnables parce que la suite des événements ne confirme pas ce qu'ils croyaient au départ. Dans Mulligan, Legault et Cotnoir, on croyait empêcher un vol ou porter assistance à un conducteur en détresse et on a trouvé une personne ivre au volant.

[56] Deuxièmement: on doit déterminer le caractère raisonnable des motifs en se plaçant dans les circonstances de temps, de lieu et d'urgence auxquels sont confrontés les policiers et non par une analyse sophistiquée que permet le recul du temps16.

[57] Troisièmement: les motifs raisonnables découlent souvent d'un ensemble de circonstances; il faut se garder de les disséquer et d'analyser chaque élément d'une façon séparée. Il peut arriver que chaque élément soit compatible avec une conduite innocente alors que l'ensemble pointe dans une toute autre direction.

[58] Quatrièmement: il n'est pas toujours possible de déterminer avec une précision absolue à quel moment les agents de la paix estiment avoir des motifs raisonnables. Avec égards, il me semble que le juge de la Cour supérieure – par une analyse a posteriori – attache une importance indue au fait que les policiers auraient décidé d'intervenir avant que le véhicule ne pénètre dans la deuxième entrée alors qu'on sait que tous ces événements se déroulent en très peu de temps. »

15 Ainsi que l'indique le juge Doherty dans l'affaire Simpson : «A "hunch" based entirely on intuition gained by experience cannot suffice, no matter how accurate that "hunch" might prove to be.»

16Je cite de nouveau le juge Doherty dans Simpson: «Finally, the evidence thus collected must be seen and weighed not in terms of library analysis by scholars, but as understood by those versed in the field of law enforcement.»

[60] De ces deux arrêts, on peut retenir le grand principe que les policiers doivent, dans leur fort intérieur, avoir un motif valable d’interception soit parce que les policiers croient sincèrement que la personne interceptée a commis une infraction à une loi soit parce qu’ils veulent procéder à une vérification suite à une présence suspecte dans certains lieux.

[61] Le caractère arbitraire de l’interception doit être apprécié en fonction de toutes les circonstances incluant l’écart entre la norme des motifs raisonnables et la sincérité de la croyance des motifs invoqué par l’agent de la paix.

Exposé juridique sur ce que constitue le refus de fournir un échnatillon d'haleine

Dubois c. R., 2006 QCCS 3692 (CanLII)

[21] L'infraction reprochée à l'appelant est spécifiquement prévue à l'article 254(5) du Code criminel:

Commet une infraction quiconque, sans excuse raisonnable, fait défaut ou refuse d'obtempérer à un ordre que lui donne un agent de la paix en vertu du présent article.

[22] Pour obtenir une déclaration de culpabilité, la poursuite doit prouver hors de tout doute raisonnable les éléments suivants:

1) L'existence d'un ordre d'un agent de la paix de fournir un échantillon d'haleine ou de sang;

2) Le défaut ou le refus de l'accusé de fournir un échantillon d'haleine ou de sang (actus reus);

3) L'intention de l'accusé de produire ce résultat (mens rea).

[23] Lorsque la preuve de ces éléments essentiels est faite, l'accusé est alors présumé avoir commis l'infraction à moins qu'il ne soulève une excuse raisonnable.

[24] Il ne faut pas confondre la preuve de l'intention coupable et celle de l'excuse raisonnable:

Lorsqu'il y a refus de se soumettre au test, l'intention coupable se présume et le juge doit se demander, à l'étape subséquente, si l'accusé a démontré, de façon prépondérante, une excuse raisonnable justifiant le refus.

Quant à celui qui ne souffle pas de façon adéquate, le juge doit d'abord se demander s'il subsiste un doute, eu égard à l'ensemble de la preuve, quant à la présence du troisième élément essentiel de l'infraction: l'intention. Si pareil doute existe, il doit acquitter, sinon, il passe à l'examen de l'explication raisonnable, dans l'hypothèse où pareille défense est soulevée.

[25] Dans cette affaire, le Tribunal (l'honorable Richard Grenier) souligne que les insuccès répétés ne font preuve que du deuxième élément essentiel de l'infraction: l'actus reus.

[26] Suivant un courant jurisprudentiel majoritaire, le fardeau de preuve imposé à l'accusé, lorsqu'il soulève une excuse raisonnable, est celui de la prépondérance de preuve.

* * *

[27] L' excuse doit être objectivement raisonnable.

[28] Selon la Cour d'Appel du Québec: "Il se peut fort bien que l'excuse donnée par une personne soit sincère mais le critère de la "raisonnabilité" ne doit pas s'apprécier en fonction de la sincérité de celui qui fournit l'excuse mais en fonction de ce qui est objectivement raisonnable comme excuse."

[29] L'excuse raisonnable consiste à la fois en une question de droit et en une question de fait:

The authorities make it clear that what can amount to reasonable excuse under Section 254(5) is a question of law. However, whether or not an accused person has established that excuse or has brought himself within the context of what is, in law, a reasonable excuse is, itself, a matter of fact to be determined by the Trial Judge.

[30] La Cour suprême du Canada a établi que l'excuse raisonnable soulevée à l'encontre d'une accusation de refus comporte un facteur extérieur aux exigences requises pour justifier une telle accusation.

[31] Selon la Cour d'appel du Nouveau-Brunswick, l'excuse raisonnable de l'article 254(5) doit consister en des circonstances qui rendent le fait d'obtempérer, extrêmement difficile ou dangereux pour la santé de la personne à qui l'ordre est donné:

In my judgment the "reasonable excuse" envisaged must be some circumstance which renders compliance with the demand either extremely difficult of likely to involve a substantial risk to the health of the person on whom the demand has been made.

[32] Ainsi, un simple inconfort ne saurait être qualifié d'excuse raisonnable. Par ailleurs, des risques ou des difficultés pour la personne à qui un échantillon d'haleine est demandé ou encore l'existence de problèmes de santé sérieux pourraient constituer une excuse raisonnable.

[33] Au passage, soulignons que lorsqu'un accusé présente une preuve d'excuse raisonnable afin de démontrer qu'il ne pouvait souffler malgré son intention de le faire, il court le risque, au cas où cette excuse est écartée, de voir le juge tirer une inférence quant à son intention de ne pas se conformer à l'ordre de l'agent de la paix, surtout lorsque la preuve de l'excuse raisonnable est étroitement reliée à la preuve de l'intention.

[34] C'est d'ailleurs la conclusion à laquelle en est arrivée la Cour d'Appel de la Saskatchewan dans l'arrêt Cody:

The inexorable inference is that the appellant intended to fail or to refuse to comply with the demand made by the police officer. The finding of intent, albeit through inference, is unequivocal.

vendredi 6 novembre 2009

Possibilité raisonnable de communiquer avec l’avocat de son choix

R. c. Cauchon, 2009 QCCQ 6604 (CanLII)

[14] Dans l’arrêt R. c. Dozois [1996] A.Q. no 3752, la Cour d’appel du Québec, sous la plume du juge Proulx, spécifie que la Cour suprême du Canada a souligné à maintes reprises que l’alinéa 10b) de la Charte impose aux policiers des obligations non seulement pour informer une personne arrêtée de ses droits, mais aussi quant à la mise en application de l’exercice de ses droits.

[15] Ainsi, lorsqu’une personne arrêtée a exprimé le désir d’exercer son droit à l’assistance d’un avocat après en avoir été dûment informée, deux obligations incombent à l’État : (1) fournir une possibilité raisonnable à la personne arrêtée d’exercer son droit et (2) surseoir à l’enquête ou s’abstenir de prendre d’autres mesures jusqu’à ce que la personne ait eu cette possibilité raisonnable. C’est ce qui a été réitéré dans R. c. Prosper, 1994 CanLII 65 (C.S.C.), [1994] 3 R.C.S. 236.

[16] Toutefois, ce droit n’est pas absolu. À moins que la personne détenue ne fasse valoir son droit et qu’elle ne l’exerce avec diligence, l’obligation correspondante des policiers de lui donner la possibilité raisonnable de l’exercer et de s’abstenir de tenter de lui soutirer des éléments de preuve, soit ne prendra pas naissance, soit sera suspendue : voir R. c. Bartle, 1994 CanLII 64 (C.S.C.), [1994] 3 R.C.S. 173, p. 192, le juge Lamer se référant à R. c. Tremblay, 1987 CanLII 28 (C.S.C.), [1987] 2 R.C.S. 435, p. 439 et R. c. Black, 1989 CanLII 75 (C.S.C.), [1989] 2 R.C.S. 138, p. 154‑155.

[17] Néanmoins, si l’avocat choisi ne peut être disponible dans un délai raisonnable, le détenu devra alors communiquer avec un autre avocat : voir R. c. Ross, 1989 CanLII 134 (C.S.C.), [1989] 1 R.C.S. 3, p. 11. L’enquête policière ne peut être suspendue indéfiniment.

[18] Dans l’arrêt R. c. Brydges, 1990 CanLII 123 (C.S.C.), [1990] 1 R.C.S. 190, p. 216, la Cour suprême est d’opinion « qu’il se peut qu’il soit déraisonnable de ne pas demander des conseils à l’avocat qui est disponible lorsque le seul disponible est un avocat de garde ou un avocat de l’aide juridique ».

Analyse quant à la détention pour fins d'enquête

R. c. Lelièvre, 2008 QCCQ 9317 (CanLII)

[75] En effet, une détention aux fins d'enquête exécutée conformément au pouvoir fondé sur la common law ne porte pas atteinte aux droits que l'article 9 de la Charte garantit à la personne détenue.

[76] De même, la fouille accessoire à cette détention légale n'est pas tenue pour contraire à l'article 8 de la Charte si elle est effectuée de façon raisonnable et qu'il existe des motifs raisonnables de croire que la sécurité du policier ou celle du public est en cause.

[77] Dans l'arrêt Mann, précité, Monsieur le juge Iacobucci écrit ce qui suit au paragraphe 34 :

« Il ressort de la jurisprudence plusieurs principes directeurs régissant l'utilisation du pouvoir des policiers en matière de détention aux fins d'enquête. L'évolution du critère formulé dans l'arrêt Waterfield, de même que l'obligation des policiers de disposer de motifs concrets établie dans l'arrêt Simpson, requiert que les détentions aux fins d'enquête reposent sur des motifs raisonnables. La détention doit être jugée raisonnablement nécessaire suivant une considération objective de l'ensemble des circonstances qui sont à la base de la conviction du policier qu'il existe un lien clair entre l'individu qui sera détenu et une infraction criminelle récente ou en cours. La question des motifs raisonnables intervient dès le départ dans cette détermination, car ces motifs sont à la base des soupçons raisonnables du policier que l'individu en cause est impliqué dans l'activité criminelle visée par l'enquête. Toutefois, pour satisfaire au deuxième volet du critère établi dans l'arrêt Waterfield, le caractère globalement non abusif de la décision de détenir une personne doit également être apprécié au regard de l'ensemble des circonstances, principalement la mesure dans laquelle il est nécessaire au policier de porter atteinte à une liberté individuelle afin d'accomplir son devoir, la liberté à laquelle il est porté atteinte, ainsi que la nature et l'étendue de cette atteinte. »

[78] Dans l'arrêt R. c. Clayton, précité, Madame la juge Abella décrit la nature de l'examen qui doit être fait, au paragraphe 31 :

« L'examen tiendra compte de la nature de la situation, y compris la gravité de l'infraction, des renseignements sur le suspect ou sur le crime dont disposaient les policiers et de la mesure dans laquelle la détention était une mesure raisonnablement adaptée à ces éléments, notamment en ce qui a trait à l'emplacement et au moment. Il faut donc mettre en balance l'importance du risque pour la sécurité du public en général ou d'une personne en particulier avec le droit à la liberté des citoyens, pour déterminer si l'interception n'a porté atteinte à la liberté que dans la mesure raisonnablement nécessaire pour faire face au risque. »

[79] À propos de la fouille accessoire à la détention pour fins d'enquête, Madame la juge Abella rappelle les principes applicables aux paragraphes 29 et 30 de l'arrêt Clayton, précité :

« 29 Rappelons que notre Cour a également précisé dans l'arrêt Mann que la fouille accessoire à la détention aux fins d'enquête peut être justifiée lorsque le policier croit, « pour des motifs raisonnables, que sa propre sécurité et celle d'autrui est menacée » :

La décision du policier de procéder à une fouille doit également être raisonnablement nécessaire eu égard à l'ensemble des circonstances. Des inquiétudes – vagues ou inexistantes – en matière de sécurité ne sauraient justifier une telle décision, et la fouille ne peut reposer sur l'instinct ou une simple intuition. [par. 40].

30 La justification de la décision de détenir une personne en particulier tient à «l'ensemble des circonstances» qui incitent le policier à croire cette détention «raisonnablement nécessaire». Ce principe a été dégagé dans l'arrêt Dedman puis interprété plus récemment dans l'arrêt Mann. Par exemple, des détails sur l'individu soupçonné de menacer la sécurité du public peuvent influencer la décision du policier de maintenir ou non la détention. Comme notre Cour l'a expliqué dans l'arrêt Mann, la fouille n'est autorisée que lorsque le policier a des motifs raisonnables de croire que sa sécurité ou celle d'autrui est menacée. »

[80] Quant à la notion de motifs raisonnables de soupçonner, dans l'affaire R. c. Lessard, [2007] J.Q. no 12140, Monsieur le juge Guy Cournoyer, J.C.S., s'exprime ainsi au paragraphe 40 de sa décision :

« Même si le critère des motifs raisonnables de soupçonner est un "critère clairement moins exigeant que les motifs raisonnables et probables requis pour qu'il y ait une arrestation légale", il s'agit d'une norme "à la fois objective et subjective". »

[81] Dans le présent dossier, les motifs des policiers pour procéder à l'interception du requérant ne sont pas plus probants, plus fiables ou plus « raisonnables » qu'ils ne l'étaient dans le cadre de l'examen sous l'article 495 (1) du Code criminel.

[82] Les seuls éléments dont disposent les policiers sont des renseignements transmis par le C.R.P.Q. qui datent de 2004 et qui sont pour le moins ambigus de l'aveu même des policiers.

[83] La transcription de la communication radio entre la répartitrice et les policiers révèle une situation équivoque, incohérente, inconsistante et nullement concluante.

[87] Enfin, les motifs soumis par les policiers sont également insuffisants parce que l'infraction soupçonnée, soit vol et recel de plaque d'immatriculation, n'est pas d'une gravité telle que la détention du requérant et la saisie de son véhicule constituent une mesure raisonnablement nécessaire, aux fins d'enquête, eu égard aux risques inhérents pour le public, dans les circonstances.

[89] À ce sujet, Monsieur le juge Iacobbuci dans l'arrêt Mann, précité, au paragraphe 37, souligne l'importance de maintenir une distinction entre les fouilles accessoires à une arrestation et les fouilles accessoires à une détention aux fins d'enquête. Ces dernières ne sauraient être utilisées par les policiers pour récolter les fruits d'une fouille sans mandat sans devoir effectuer une arrestation légale fondée sur des motifs raisonnables et probables.

[90] Au paragraphe 40 de l'arrêt Mann, précité, Monsieur le juge Iacobbuci écrit ce qui suit :

« Le devoir général des policiers de protéger la vie peut, dans certaines circonstances, faire naître le pouvoir de procéder à une fouille par palpation accessoire à une détention aux fins d'enquête. Un tel pouvoir de fouille n'existe pas de manière autonome; le policier doit croire, pour des motifs raisonnables, que sa propre sécurité ou celle d'autrui est menacée. Je rejette la suggestion voulant que le pouvoir de détention aux fins d'enquête justifie une fouille accessoire en toutes circonstances : voir S. Coughlan, « Search Based on Articulable Cause : Proceed with Caution or Full Stop? » (2002), 2 C.R. (6th) 49, p. 63. La décision du policier de procéder à une fouille doit également être raisonnablement nécessaire eu égard à l'ensemble des circonstances. Des inquiétudes – vagues ou inexistantes – en matière de sécurité ne sauraient justifier une telle décision, et la fouille ne peut reposer sur l'instance ou une simple intuition. »

[91] Or, en l'espèce, l'agent St-Amand n'affirme pas croire, pour des motifs raisonnables, que sa propre sécurité ou celle d'autrui est menacée le 9 janvier 2007 lorsqu'il procède à la fouille des vêtements du requérant.

jeudi 5 novembre 2009

Lignes directrices relatives aux fouilles à nu

R. c. Golden, 2001 CSC 83 (CanLII)

101 À cet égard, nous estimons que les lignes directrices relatives aux fouilles à nu énoncées dans les dispositions législatives britanniques de la P.A.C.E. correspondent aux exigences constitutionnelles de l’art. 8 de la Charte. Les questions suivantes, qui découlent des principes de la common law tout autant que des exigences énoncées dans les dispositions législatives britanniques, offrent à la police un cadre lui permettant de décider de la meilleure façon de procéder à une fouille à nu dans le respect de la Charte :

1. La fouille à nu peut-elle être effectuée au poste de police et, dans la négative, pourquoi?

2. La fouille à nu sera-t-elle effectuée d’une façon qui protège la santé et la sécurité de toutes les personnes en jeu?

3. La fouille à nu sera-t-elle autorisée par un agent de police agissant à titre d’officier supérieur?

4. A-t-on fait en sorte que le ou les agents de police chargés d’effectuer la fouille à nu soient du même sexe que la personne qui y est soumise?

5. Le nombre de policiers chargés de la fouille à nu se limitera-t-il à ce qui est raisonnablement nécessaire dans les circonstances?

6. Quelle est la force minimale nécessaire pour effectuer la fouille à nu?

7. La fouille à nu sera-t-elle effectuée dans un endroit privé où personne ne pourra l’observer, sauf les personnes chargées d’y procéder?

8. La fouille à nu sera-t-elle effectuée de la façon la plus expéditive possible et d’une manière qui fera en sorte que la personne ne soit jamais totalement nue?

9. La fouille à nu comportera‑t‑elle seulement une inspection visuelle des régions génitale et anale de la personne, sans contact physique?

10. Si l’inspection visuelle révèle la présence d’une arme ou d’un élément de preuve dans une cavité corporelle (à l’exception de la bouche), la personne détenue aura‑t‑elle le choix d’enlever elle-même l’objet ou de le faire enlever par un professionnel qualifié des services de santé?

11. Un procès-verbal des motifs et des modalités d’exécution de la fouille à nu sera-il dressé?

102 Les fouilles à nu ne devraient généralement être effectuées qu’au poste de police, sauf dans des situations d’urgence exigeant que le détenu soit soumis à une fouille avant son transport au poste de police. De telles situations d’urgence ne peuvent être établies que dans les cas où la police a des motifs raisonnables de croire qu’il est nécessaire d’effectuer la fouille sur les lieux plutôt qu’au poste de police. Les fouilles à nu sur les lieux ne peuvent être justifiées que lorsque sont établies la nécessité et l’urgence de trouver des armes ou des objets qui pourraient être utilisés pour menacer la sécurité de l’accusé, celle des agents procédant à l’arrestation ou celle d’autrui. Les agents de police doivent aussi établir pourquoi il aurait été dangereux de reporter la fouille à nu jusqu’à l’arrivée au poste de police plutôt que d’y procéder sur les lieux. Les fouilles à nu effectuées sur les lieux constituent une atteinte beaucoup plus grave à la vie privée et posent une plus grande menace pour l’intégrité physique de la personne détenue; voilà pourquoi les fouilles à nu effectuées sur les lieux ne peuvent être justifiées que dans des situations d’urgence.

Le dédommagement à la victime doit toujours être envisagé lors de la détermination de la peine

Le pouvoir d'amender un acte d'accusation ou une dénonciation expliqué par la Cour d'appel de l'Ontario

R. v. K.R., 2025 ONCA 330 Lien vers la décision [ 17 ]        The power to amend an indictment or information under  s. 601(2)  of the  Crim...