[57] La Cour d’appel de l’Ontario, dans R. c. Tat (1997), 1997 CanLII 2234 (ON CA), 117 C.C.C. (3d) 481, a analysé la question de preuve de l’identification antérieure et a identifié deux situations où les déclarations d’identification extrajudiciaires peuvent être admises. Voici les conclusions de Doherty J.A. :
[35] My review of the Canadian case law reveals two situations in which out-of-court statements of identification may be admitted. Firstly, prior statements identifying or describing the accused are admissible where the identifying witness identifies the accused at trial. The identifying witness can testify to prior descriptions given and prior identifications made. Others who heard the description and saw the identification may also be allowed to testify to the descriptions given and the identifications made by the identifying witness: [...]
[41] The second situation in which out-of-court statements of identification have been admitted arises where the identifying witness is unable to identify the accused at trial, but can testify that he or she previously gave an accurate description or made an accurate identification. In these circumstances, the identifying witness may testify to what he or she said or did on those earlier occasions and those who heard the description given by the witness or witnessed the identification made by the witness may give evidence of what the witness said or did.
[58] La Cour suprême dans R. c. Starr, 2000 CSC 40 (CanLII), [2000] 2 R.C.S. 144, par. 221, 222, a fait état de la portée du deuxième volet de l’identification antérieure examinée dans R. c. Tat, précité :
La portée de l’exception de l’«identification antérieure» à la règle du ouï‑dire a récemment été examinée en profondeur dans les motifs clairs du juge Doherty dans l’arrêt Tat,
[…]
Une partie du raisonnement qui sous‑tend le deuxième volet de l’exception veut que le témoignage qui est admis pour compléter celui du témoin auteur de l’identification ne constitue pas vraiment du ouï‑dire. Si le témoin peut au moins affirmer qu’à un moment donné il a fait une identification exacte, le témoignage dans lequel un policier affirme l’avoir vu procéder à l’identification constitue alors une preuve originale que le témoin auteur de l’identification a vraiment désigné une personne en particulier et que cette personne est l’accusé. Cependant, pour que ce raisonnement s’applique, le témoin auteur de l’identification doit confirmer que la personne qu’il a identifiée en présence du policier est la personne qui a commis un acte pertinent dans le cadre de l’instance en cause. La déposition du témoin auteur de l’identification peut donc avoir sa propre composante de ouï-dire, mais cette question excède la portée du présent pourvoi: voir H. Stewart, «Prior Identifications and Hearsay: A Note on R. v. Tat» (1998), 3 Rev. can. D.P. 61. Il reste qu’une fois que le témoin a déposé quant à l’identification elle‑même, le témoignage du policier devrait simplement indiquer la personne identifiée par le témoin et la raison pour laquelle l’identification est pertinente en l’espèce.
[59] La Cour suprême semble traiter de cette question comme une exception de l’identification antérieure à la règle du ouï-dire. Cependant, selon Doherty J.A., dans Tat (par. 38, 51-55), cette preuve ne revêt pas un caractère de ouï-dire; voir aussi, S. Casey Hill, David M. Tanovich et Louis P. Strezos, McWilliams’ Canadian Criminal Evidence, 4e éd., Toronto (Ont.), Canada Law Book, 2012, Partie III, ch. 7, par. 7:30.30.30; ch. 11, par. 11 :40.20.10.
[60] Dans R. c. X., 2010 QCCA 1627, par. 98-122; demande d’autorisation d’appel à la Cour suprême rejetée, G.R.D. c. R., 2011 CanLII 9266, notre Cour d’appel a tranché la question de l’identification antérieure d’un accusé, relativement au même événement survenu au Bar Aria, ainsi qu’avec les mêmes témoins - Cindy Mittelhammer, Xavier Lamoureux et David Bergeron. Toutefois, l’arrêt traite d’un autre accusé impliqué dans la bagarre. Quoique la preuve soit quelque peu différente, la situation ressemble beaucoup au présent cas.
[61] La Cour d’appel (par. 116-120), a reconnu, généralement, le caractère de ouï-dire, des déclarations extrajudiciaires, et, sauf exception, leur irrecevabilité. La Cour d’appel a indiqué que si le but est de confirmer un témoignage, il s'agit d'une preuve préconstituée - self-serving evidence.
[62] Par contre, la Cour d’appel a décidé que la Couronne peut faire la preuve de toute identification antérieure faite par un témoin dans le cas où le témoin qui, tout en étant incapable de reconnaître l'auteur de l'infraction en salle d'audience, affirme l'avoir identifié dans le passé. Le témoignage de personnes qui ont assisté à cette identification est également permis.
[63] Par conséquent, selon la Cour d’appel, la preuve des témoins Lamoureux et Bergeron, de même que celle de la policière Mittelhammer, étaient recevables pour établir l'ensemble des circonstances de l'identification antérieure. Les documents faisant état des observations de messieurs Lamoureux et Bergeron, lors de la parade d’identification photographique, pouvaient faire preuve de la véracité de ce qu’ils rapportaient.
[64] La défense fait référence au rapport Sophonow (Peter deCarteret Cory, The Inquiry Regarding Thomas Sophonow: The Investigation, Prosecution and Consideration of Entitlement to Compensation, Winnipeg : Manitoba Justice, 2001. Ce rapport énumère d’excellentes recommandations relativement à l’identification des suspects. Par contre, le rapport ne fait pas partie de nos lois, et l’omission par des policiers, de suivre les recommandations, n’a pas forcément pour résultat, l’exclusion d’une preuve; R. c. Doyle, 2007 BCCA 587, par.12, 13; R. c. Aulakh et Gill, 2006 BCSC 1257, par. 40-41.
[65] Sur la question du poids et de l’admissibilité d’une preuve d’identification, la Cour d’appel de l’Ontario, dans R. c. Wang (2001), 2001 CanLII 20933 (ON CA), 153 C.C.C. (3d) 321 (C.A. Ont.), a dit :
[26] In my opinion, the appellants are over-reaching with respect to the first issue as to whether the trial judge erred in failing to exclude the identification evidence. However frail the identification evidence, it was open for the jury to consider this evidence and decide how, if at all, to make use of it. The issue in this case was one of weight, not one of admissibility. [...]
[33] Accordingly, in the case at bar, the admissibility of the identification evidence should not have been an issue at trial. All the concerns about changes of position by the witnesses, contradictory evidence, conflicting out-of-court identifications, and witness tainting were matters properly left for the jury: see Labrosse J.A. in R. v. Buric (1996), 1996 CanLII 1525 (ON CA), 106 C.C.C. (3d) 97 (Ont. C.A.) at 112, affirmed 1997 CanLII 380 (CSC), [1997] 1 S.C.R. 535, 114 C.C.C. (3d) 95.
voir aussi, R. c. Grant, 2005 ABCA 222.
[66] Me Kling fait référence aux règles de past recollection recorded qui proviennent de Wigmore on Evidence (Chadbourn rev. 1970), vol. 3, c. 28, §744 et seq. Dans R. c. Meddoui (1990), 1990 CanLII 2592 (AB CA), 61 C.C.C. (3d) 345 (C.A. Alta.), p. 352, Kerans J.A. a exposé ces règles:
1. The past recollection, must have been recorded in some reliable way.
2. At the time, it must have been sufficiently fresh and vivid to be probably accurate.
3. The witness must be able now to assert that the record accurately represented his knowledge and recollection at the time. The usual phrase requires the witness to affirm that he "knew it to be true at the time".
4. The original record itself must be used, if it is procurable.
voir aussi, R. c. Richardson (2003), 2003 CanLII 3896 (ON CA), 174 O.A.C. 390, par. 24, demande d’autorisation d’appel rejetée, [2004] 3 R.C.S. vii.
[67] En ce qui concerne les témoins Lamoureux et Bergeron, Me Kling admet que les trois premières règles ont été respectées, mais il plaide le non respect de la quatrième.
[68] McWilliams’ Canadian Criminal Evidence, précité, Partie IV, ch. 18, par. 18:20.20.50 - 18:20.20.50.80, donne des qualifications à ces règles :
1. The bulk of authority holds that evidence of past recollection recorded is only admissible where the witness no longer has a current memory of the facts in issue. This requirement is not mentioned in the often-quoted Meddoui recitation, but Kerans J.A. was nonetheless absolutely clear that it applies in Canada.
2. The requirement pertaining to original documents is simply a subset of the precondition that the record be reliably recorded. It will be discussed as part of that precondition, and not as a separate item.
3. The record should only become evidence where its contents would be admissible if presented as the oral evidence of the witness. That is, the evidence cannot infringe any other rule of exclusion. [Le Tribunal souligne.]
McWilliams’ continue (par. 18:20.20.50.30) :
A witness's memory must be exhausted before a party can introduce evidence of past recollection recorded. However, it is not necessary to establish that all aspects of the matter in issue have been forgotten by the witness. What must be shown is that the witness no longer has any memory of the particular fact sought to be admitted as past recollection recorded. It is enough that that portion of the record can no longer be recalled.
Where a witness is not being truthful about a "failure" to recall the event, his or her memory is arguably not exhausted, and this requirement is thus not met. The record may be admissible under the principled exception, but does not constitute past recollection recorded.
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