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mercredi 14 mai 2025

Le rôle du juge de paix lors d'une demande de prolongation du délai de détention des biens saisis sous l'article 490 (2)

R. c. Palanivel, 2013 QCCQ 21021 

Lien vers la décision


[13]      Ainsi, la question à trancher par le juge, en vertu de l'article 490 (2), est assez limitée. Tel qu'énoncé par la Cour suprême dans R. c. Raponi[5] : « le juge de la Cour provinciale ne doit trancher qu'une question, soit celle de savoir si la prolongation de la détention du bien est requise pour les besoins d'une procédure engagée ou d'une enquête ». Dans le cadre limité de la question devant le Tribunal en vertu de l'article 490 (2), il ne revient pas au juge de déterminer si les objets saisis sont légitimes ou le fruit d'une activité criminelle.

[14]      Il y a lieu de noter que l'affaire Roberge, citée par l'intimé, traite de l'article 462.38 du C.cr. qui concerne une ordonnance de confiscation de biens lorsque la preuve établit hors de tout doute raisonnable qu'il s'agit de produits de la criminalité. Quant à l'article 490 (9), dont il est question dans R. c. West, il s'agit du régime applicable pour la disposition des choses saisies et les modalités de leur retour au propriétaire légitime. Or, dans le cas présent, le Tribunal n'est saisi ni d'une requête selon 490 (9) ni d'une requête selon 462.38 du C.cr.

[15]      La seule question présentement en litige est de déterminer si la détention des biens saisis est justifiée compte tenu de la nature de l'enquête. De plus, l'article 490 (2) n'exige aucune preuve de la complexité de l'enquête qui serait un critère à examiner pour une détention de plus d'un an selon une requête en vertu de l'article 490 (3). En fait, sous l'article 490 (2) la poursuite assume le fardeau de convaincre le juge de paix ou le juge de la Cour provinciale de la nécessité d'ordonner la détention pour une période additionnelle jusqu'à un maximum de 12 mois « compte tenu de la nature de l'enquête ». Le Tribunal doit donc considérer la nature de l'enquête en cours et doit évaluer si la prolongation demandée est appropriée. Le juge doit contrebalancer les intérêts du propriétaire du bien avec l'intérêt du public de procéder à une enquête, sans toutefois usurper la discrétion qu'exerce les enquêteurs et les procureurs dans la poursuite de leur enquête.

[16]      Dans R. c. Tennina[6], la Cour d'appel de l'Ontario confirmait la décision et le raisonnement du juge Corbett de la Cour supérieure, siégeant en appel d'un refus de prolonger la détention des biens saisis. Le juge Corbett résume les quatre étapes à suivre par le juge saisi d'une requête selon 490 (2)[7] :

        premièrement, le juge soit déterminer s'il y a une enquête en cours. Il ne suffit pas d'alléguer la simple ouverture d'un dossier mais bien de démontrer qu'il y a vraiment une situation qui est activement enquêtée;

        deuxièmement, le juge doit évaluer si les choses saisies sont toujours nécessaires à l'enquête en cours, sinon aucun prolongement ne sera accordé. Le seuil pour cette évaluation n'est pas difficile à franchir. Il n'appartient pas aux tribunaux de revoir la discrétion et le jugement des enquêteurs. Une explication logique de la nécessité de retenir les biens suffira pour justifier le prolongement;

        troisièmement, s'il y a une enquête en cours pour laquelle les objets saisis sont requis, le juge devra évaluer le progrès de l'enquête afin de déterminer la durée de la période additionnelle de détention nécessaire pour compléter l'enquête. Lors de cette évaluation, le juge ne doit pas se prêter à une enquête quant à l'efficacité ou le bien fondé de l'enquête policière, mais il doit plutôt évaluer pendant combien de temps les biens saisis seront encore requis. Cette détermination est prospective et non rétrospective;

        quatrièmement, dans le cas d'une deuxième demande de prolongation, le Tribunal devra vérifier pourquoi l'enquête n'a pas pu être terminée dans la période projetée. Puisque le premier juge aura déjà accordé le prolongement et calculé le temps requis pour l'enquête, une certaine justification devra expliquer la demande de temps supplémentaire. Cependant, une déférence importante s'impose quant à l'opinion des enquêteurs qui ne connaissent pas toujours l'ampleur de l'enquête dès le début.

[17]      La Cour d'appel, dans Tennina, reconnaît qu'une déférence s'impose quant à l'opinion des enquêteurs au sujet de la durée et de l'ampleur de l'enquête en cours[8].

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