lundi 28 juin 2010

Les principes juridiques relatifs à l’ordonnance de dédommagement

Legault c. R., 2008 QCCA 1228 (CanLII)

[7] L’ordonnance de dédommagement fait partie du processus de détermination de la peine. Elle émane d’un pouvoir discrétionnaire qui doit être exercé avec circonspection.

[8] En général, une « cour d’appel est assujettie à une norme élevée de retenue à l’égard de la peine imposée par le juge de première instance » et elle ne doit pas « remettre en question la décision du juge qui prononce la peine à moins que celle-ci ne soit manifestement inappropriée ».

[10] Les principes qui prévalent en matière de dédommagement sont exposés par l'auteur François Dadour:

1. L’ordonnance de dédommagement doit être rendue avec circonspection ;

2. Cette ordonnance fait partie intégrante de la détermination de la peine en ce qu’elle participe à la sanction du contrevenant, lie ce dernier au dédommagement de la victime, le prive du fruit de l’infraction qu’il a commise et facilite la remise en état de la victime ;

3. Le juge d’instance doit considérer l’objectif visé par le créancier du dédommagement, de même que l’existence de procédures civiles ;

4. L’ordonnance de restitution n’est pas un substitut à ces procédures civiles ;

[...]

9. Le dédommagement en double peut être évité par le recours aux juridictions civiles ;

10. L’ordonnance de dédommagement peut être indiquée lorsqu’un jugement civil est inexécutoire suite à la faillite du débiteur.

[11] L’auteur ajoute :

Il est à noter que le juge d’instance a le pouvoir de rendre une ordonnance de dédommagement pour un montant inférieur aux dommages causés. En effet et en lien avec un commentaire similaire quant au quantum des amendes, il n’est ni souhaitable ni approprié qu’une ordonnance de dédommagement mette en péril les chances de réhabilitation du contrevenant par la destruction de son patrimoine.

[12] L’auteur Ruby partage le même avis :

A compensation order which would ruin the offender financially, thus impairing chances of rehabilitation, should not be imposed; neither should one be made where compliance would be particularly onerous or impossible, nor where enforcement would be difficult or impossible. The totality principle applies to the whole of the sentence, including the order of restitution.

[13] La jurisprudence a également établi que le juge qui rend l’ordonnance de dédommagement doit tenir compte des ressources financières de l’accusé, même si la capacité ne doit pas toujours être le facteur déterminant. Comme l'explique le juge Doherty, s'exprimant pour la Cour d’appel de l’Ontario, dans Taylor:

[5] It has been stated many times that restitution is a discretionary order. It should only be made with restraint and caution and not only in order to avoid putting the victim through the extra legal expense of going to the civil courts or as a substitute for civil procedure.

[6] As stated by Martin J.A., speaking for this court, in R. v. Scherer reflex, (1984), 16 C.C.C. (3d) 30 at 38:

It may be that in some cases it would be inappropriate to make a compensation order in an amount that is unrealistic to think that the accused could ever discharge.

[7] In his reasons, the trial judge said:

The only possible way to complete that part of his rehabilitation is through penal consequences. Because of the magnitude of the crime, the duration of the crime, there is no other way to compensate the victims other than his family, then by a penitentiary term [emphasis added].

[8] He then ordered restitution. The restitution order appears to have been added as an afterthought to permit the victim to avoid the costs of a civil action. The Crown had not asked for a restitution order.

[9] The relevant factors and objectives to the imposition of a restitution order have been discussed by this court in R. v. Devgan 1999 CanLII 2412 (ON C.A.), (1999), 136 C.C.C. (3d) 238 and R. v. Biegus 1999 CanLII 3815 (ON C.A.), (1999), 141 C.C.C. (3d) 245. An order for restitution must also bear some reality to the circumstances of the appellant and must be directly associated with the sentence imposed as the public reprobation of the offence. In the circumstances of this case, the overriding factor is the means of the appellant. There is no ability, as noted by the trial judge, to pay even the most minute part of this staggering amount, with no expiry date. It would kill all hope for the appellant for the future and it would likely impair his chances of rehabilitation. The order is clearly excessive and futile and the trial judge erred in that regard.

[10 ]It remains open to the victim to take proceedings in the civil court, if so advised.

[14] En conclusion, une ordonnance de dédommagement doit être rendue avec pondération et circonspection afin de remplir les objectifs et principes de la détermination de la peine soit, plus particulièrement, la réparation des torts, la conscience de la responsabilité, la dénonciation et la dissuasion. Cette ordonnance ne constitue pas le substitut à un recours civil. Lorsque la capacité de payer est absente, comme en l’espèce, il est déraisonnable de rendre une ordonnance de dédommagement de plus d’un million de dollars. Il importe de souligner que l’ordonnance de dédommagement survie à la libération d’un failli. En l'espèce, le montant du dédommagement est si excessif que le délinquant ne pourra jamais l'acquitter, ce qui met en péril le principe de réinsertion sociale.

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