mardi 2 avril 2013

En matière de fraude, la loi n'exige pas une relation entre le fraudeur et la victime

Laroche c. R., 2011 QCCA 1891 (CanLII)

Lien vers la décision

[298] En matière de fraude, la loi n'exige pas une relation entre le fraudeur et la victime :

La différence fondamentale qui différencie, à ce sujet, la supercherie et le mensonge d'avec les autres moyens dolosifs, vient d'être exposée. L'inexistence de relation entre le fraudeur et sa victime ne fait pas, en principe, obstacle à une inculpation de fraude. La décision de la Cour d'appel de l'Ontario rendue en 1983 dans R. c. Kirkwood nous livre trois enseignements. La présence de contacts entre l'accusé et la victime n'est pas obligatoire. Il n'est pas non plus nécessaire que la victime ait été amenée à agir à son détriment ni même qu'elle ait connu le fraudeur.

En vérité, le fraudeur peut lui-même ne pas connaître l'identité précise de sa victime et cette dernière ne jamais avoir été induite en erreur du fait du comportement de l'accusé. Dans ces hypothèses, la fraude vient sanctionner un comportement qui relève également souvent du vol.

[299] Les auteurs rappellent néanmoins qu'il ne faut pas oublier les exigences relatives au lien de causalité et à la mens rea :

La possibilité de condamner pour fraude un individu qui n'ayant entretenu aucun contact avec sa victime ne doit pas faire oublier les exigences traditionnelles en matière de causalité et de mens rea. Le tribunal doit s'assurer que le moyen dolosif employé par l'accusé a bien une relation de cause à effet avec la privation ressentie par la victime. Cette exigence est d'autant plus importante que l'accusé n'a pas traité directement avec la victime alléguée. La preuve de la mens rea ne doit pas non plus être éludée. L'accusé doit avoir prévu que la victime éprouverait un risque de préjudice d'ordre pécuniaire du fait de son comportement. Il n'est pas nécessaire qu'il identifie cette victime dès lors qu'il sait qu'il est vraisemblable que les intérêts patrimoniaux d'autrui seront affectés.

[300] Les motifs du juge Proulx dans l'arrêt R. c. Pereira vont dans le même sens :

Depuis l'arrêt Olan, il faut dire que l'actus reus de la fraude se compose de la privation et de la malhonnêteté. Ces deux éléments doivent coexister et un rapport causal doit être établi entre eux: la malhonnêteté doit entraîner ou causer la privation [Vézina et Côté c. R., 1986 CanLII 93 (CSC), [1986] 1 R.C.S. 2, p. 19].

Il n'est donc plus nécessaire de démontrer (1) une représentation auprès de la victime et (2) l'agir de la victime en conséquence de cette représentation. Il suffit d'établir que des moyens frauduleux (commis même à l'insu de la victime) ont entraîné la perte ou le risque de perte.

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