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samedi 7 juin 2025

Quel est le traitement que doit réserver un juge à une suggestion commune?

Plourde c. R., 2023 QCCA 361

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[13]      C’est ici que le bât blesse : le traitement fait à la recommandation commune.

[14]      Bien qu’il y ait lieu de croire que la juge avait pleinement conscience du critère fixé par l’arrêt R. c. Anthony-Cook[3], elle ne semble pas l’avoir traité avec toute l’importance qu’il revêt. Cette importance fut de nouveau mise en relief dans un arrêt plus récent encore, R. c. Nahanee[4]. Bien sûr, on ne peut faire reproche à la juge d’avoir passé ce dernier fait sous silence, car son jugement du 22 avril 2022 précède de quelques mois l’arrêt Nahanee. Mais en appel, il doit en être tenu compte, d’autant que la jurisprudence la plus récente de la Cour d’appel se situe très nettement dans le sillage de cette jurisprudence de la Cour suprême du Canada.

[15]      Rappelons succinctement le message d’abord livré par l’arrêt Anthony-Cook (c’est le juge Moldaver qui tient la plume dans cette décision unanime) :

[32]      Selon le critère de l’intérêt public, un juge du procès ne devrait pas écarter une recommandation conjointe relative à la peine, à moins que la peine proposée soit susceptible de déconsidérer l’administration de la justice ou qu’elle soit par ailleurs contraire à l’intérêt public. Mais que signifie ce seuil? Deux arrêts de la Cour d’appel de Terre‑Neuve‑et‑Labrador sont utiles à cet égard.

[33]      Dans Druken, par. 29, la cour a jugé qu’une recommandation conjointe déconsidérera l’administration de la justice ou sera contraire à l’intérêt public si, malgré les considérations d’intérêt public qui appuient l’imposition de la peine recommandée, elle [traduction] « correspond si peu aux attentes des personnes raisonnables instruites des circonstances de l’affaire que ces dernières estimeraient qu’elle fait échec au bon fonctionnement du système de justice pénale ». Et, comme l’a déclaré la même cour dans R. c. B.O.22010 NLCA 19, par. 56 (CanLII), lorsqu’ils examinent une recommandation conjointe, les juges du procès devraient [traduction] « éviter de rendre une décision qui fait perdre au public renseigné et raisonnable sa confiance dans l’institution des tribunaux ».

[34]      À mon avis, ces déclarations fermes traduisent l’essence du critère de l’intérêt public élaboré par le comité Martin. Elles soulignent qu’il ne faudrait pas rejeter trop facilement une recommandation conjointe, une conclusion à laquelle je souscris. Le rejet dénote une recommandation à ce point dissociée des circonstances de l’infraction et de la situation du contrevenant que son acceptation amènerait les personnes renseignées et raisonnables, au fait de toutes les circonstances pertinentes, y compris l’importance de favoriser la


 

certitude dans les discussions en vue d’un règlement, à croire que le système de justice avait cessé de bien fonctionner. Il s’agit indéniablement d’un seuil élevé — et à juste titre, comme je l’explique ci‑après.[5]

[16]      « [Faire] échec au bon fonctionnement du système de justice pénale », « croire que le système de justice [a] cessé de fonctionner », ne sont pas de vains mots, et c’est avec raison que dans l’arrêt Nahanee, le juge Moldaver, écrivant cette fois pour les juges majoritaires, ajoute que « [c]e critère place à dessein la barre très haut »[6]. Les considérations d’ordre systémique que relève le juge Moldaver dans les lignes qui suivent ce dernier extrait militent fortement en faveur de l’acceptation d’une recommandation commune lorsqu’elle se situe dans la fourchette des peines justes et appropriées – et que cette peine soit clémente ou sévère[7]. Or, c’est le cas ici, bien qu’en effet la peine s’inscrive dans la partie plus clémente de l’échelle.

[17]      Aussi doit-on conclure en l’occurrence, comme le fit une formation unanime de la Cour dans l’arrêt Gallien c. R., que la juge de première instance, à l’instar de l’un de ses collègues dans cette dernière affaire, s’est méprise sur la portée de la jurisprudence fixée et réitérée en Cour suprême. La formation en question écrivait :

[11]      Avec beaucoup d’égards, le juge de première instance n’a pas suivi ces enseignements. Sa prémisse, selon laquelle la peine suggérée est trop clémente, l’a empêché de se concentrer sur la seule question qu’il devait se poser : la suggestion commune des parties a-t-elle pour effet de déconsidérer l’administration de la justice ou d’être contraire à l’intérêt public? Cette omission du juge constitue une erreur de droit, qui l’a amené à rendre une sentence plus sévère que celle suggérée par les parties, à la suite d’un exercice classique de détermination de la peine basé sur les facteurs aggravants et atténuants, les objectifs pénologiques, la gravité des infractions et les peines imposées pour des cas semblables.

[12]      Ainsi, le juge n’explique pas en quoi la peine suggérée par les parties est contraire à l’intérêt public, sauf pour écrire qu’il la considère trop clémente. Il occulte totalement les avantages d’intérêt public associés à la suggestion commune des parties et il se concentre uniquement sur la longueur de la peine suggérée qu’il considère trop clémente dans le contexte spécifique du dossier.[8]


 

[18]      La situation est la même en l’espèce et il y a donc lieu de faire droit à l’appel pour rétablir la recommandation conjointe des avocates de l‘appelant et de l’intimé.

dimanche 1 juin 2025

Les tribunaux reconnaissent que « la décision de plaider coupable se prend fréquemment dans des circonstances difficiles » et que cela ne suffit pas à invalider le plaidoyer

R. v. Carty, 2010 ONCA 237 

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[37]         However, the circumstances in which the appellant found himself were hardly unique, and are shared by many who must decide whether to plead guilty to criminal charges.  That decision by its very nature must be made when individuals are under considerable pressure.  That pressure is often the product of the grim realization that there is no viable alternative to a guilty plea, and that the consequences of a guilty plea will be immediate, serious and far-reaching.  The pressures inherent in the nature and timing of the decision to plead guilty cannot in and of themselves invalidate a guilty plea on appeal.  People are capable of deciding what is in their best interests even when they are under considerable pressure and none of the available options are attractive. 

Le droit applicable au retrait de plaidoyer de culpabilité

R. c. J.C., 2022 QCCQ 9407



[22]        Pour être valide, un plaidoyer de culpabilité doit être libre, volontaire, non équivoque et éclairé[1].

1.            Le caractère volontaire d’un plaidoyer

[23]        Comme l’indique le juge Jean-François Buffoni dans la décision R. c. Ghazi[2] :

[73]      Un plaidoyer est volontaire s’il procède d’une décision consciente de l’accusé de plaider coupable pour des raisons qu’il juge appropriées. Que la décision de l’accusé de plaider coupable ait été judicieuse, rationnelle ou dans son meilleur intérêt est sans pertinence à cet égard.

[74]      Pour qu’un plaidoyer soit considéré volontaire, l’accusé doit avoir des capacités cognitives minimales, équivalentes à celles requises pour être jugé apte à subir son procès. En vertu de ce critère, l’accusé doit être en mesure de comprendre le processus, de communiquer avec son procureur et de faire un choix conscient.

[75]      Un plaidoyer de culpabilité enregistré par un accusé en salle d’audience, alors qu’il est représenté par avocat, est présumé volontaire. Cette présomption peut toutefois être repoussée par une preuve contraire.

[76]      Il peut s’agir, par exemple, d’une preuve établissant que l’état mental ou émotionnel dans lequel se trouvait l’accusé au moment de plaider coupable était tel que celui-ci était incapable de faire un choix conscient. Il pourrait aussi s’agir d’une preuve démontrant que l’accusé a été forcé par son procureur à plaider coupable. En effet, un plaidoyer ne peut être considéré volontaire s’il est le fruit de la contrainte, de menaces, d’intimidation ou de toute autre incitation inappropriée à plaider coupable.

[77]      L’anxiété et la pression inhérentes à la décision de plaider coupable ne sont toutefois pas des motifs suffisants pour nier le caractère volontaire d’un plaidoyer de culpabilité. La décision de plaider coupable se prend fréquemment dans des circonstances difficiles.

[78]      En d’autres termes, le fait qu’un accusé se sente sous pression ne suffit pas pour vicier le caractère volontaire de son plaidoyer de culpabilité, sauf si une preuve crédible et convaincante établit que la pression exercée sur lui était telle qu’elle l’empêchait de faire le choix conscient de plaider coupable.

[79]      Le processus de négociation de plaidoyer et le fait que l’avocat recommande à l’accusé d’accepter une entente proposée par le ministère public n’ont pas non plus pour effet d’invalider le caractère volontaire du plaidoyer.

[24]        En ce qui concerne la « dépression », la Cour d’appel de l’Ontario indique :

[47]      (…) Anxiety, depression, chronic pain, anger management issues and difficulty in communicating are very real problems. However, they establish neither an inability to understand the nature of the criminal proceedings in which the appellant was involved, nor an inability to make an effective choice as to the plea to be entered on the charges. The “limited cognitive capacity” criterion does not demand wise or even rational decisions, but only the ability to make a conscious decision as to the plea to be entered[3].

[25]        De même, dans la décision R. c. Hubert, la juge Julie Riendeau souligne que :

[19]      L’anxiété et la pression inhérentes à la décision de plaider coupable ne sont toutefois pas des motifs suffisants pour nier le caractère volontaire d’un plaidoyer de culpabilité. La décision de plaider coupable se prend fréquemment dans des circonstances difficiles.  

[20]      Le fait qu’un accusé se sente sous pression ne suffit ainsi pas pour vicier le caractère volontaire de son plaidoyer de culpabilité, sauf si une preuve crédible et convaincante établit que la pression exercée sur lui est telle qu’elle l’empêche de faire le choix conscient de plaider coupable[4].

2.            Le caractère informé d’un plaidoyer

[26]        Par ailleurs, la juge Alexandra Marcil souligne dans l’affaire R. c. R.P. que:

[59]     Pour qu’un plaidoyer soit informé ou « éclairé », l’accusé doit être au courant de la nature des allégations faites contre lui, ainsi que des effets et des conséquences de son plaidoyer. Il doit avoir connaissance des conséquences pénales et des conséquences indirectes qui sont juridiquement pertinentes, c’est-à-dire qui touchent ses intérêts juridiques. Un plaidoyer de culpabilité devrait être écarté si le Tribunal est d’avis que l’accusé ne comprend pas la nature de l’accusation ou les conséquences du plaidoyer[5].

3.            Les présomptions applicables

[27]        Lorsqu’un accusé plaide coupable et qu’il est représenté par un avocat, il existe une présomption :

   Que son plaidoyer est valide[6];

   Que son plaidoyer est non équivoque[7];

   Que son plaidoyer est volontaire[8];

   Qu’il est informé de toutes les conséquences entourant son plaidoyer[9].

[28]        Également, lorsqu’un accusé plaide coupable personnellement, cela tend à démontrer le caractère non équivoque du plaidoyer[10]. Le fait qu’un accusé soit familier avec le système de justice pénale est aussi un facteur devant être considéré[11].

4.            Le fardeau du requérant

[29]        Le principe du caractère définitif des plaidoyers est fondamental et essentiel à l’intégrité du processus en matière criminelle[12].

[30]        Pour cette raison, un plaidoyer de culpabilité est présumé valide[13].

[31]        Le retrait d’un plaidoyer est une chose sérieuse, ne devant pas être autorisé à la légère[14].

[32]        Il ne doit être permis que dans des cas exceptionnels[15].

[33]        L’octroi d’un retrait de plaidoyer est soumis à des conditions rigoureuses et ne doit être accordé que lorsqu’un accusé ne comprend pas la nature de l’accusation ou les conséquences possibles du plaidoyer ou s’il n’a pas véritablement consenti au plaidoyer[16].

[34]        Tant qu’il n’a pas prononcé la peine, le Tribunal a un pouvoir discrétionnaire d’accorder ou non une requête en retrait de plaidoyer[17]. En cette matière, chaque cas est un cas d’espèce[18].

[35]        Il appartient à l’accusé de démontrer que son plaidoyer de culpabilité est invalide[19].

[36]        Il doit faire valoir, selon la balance des probabilités[20], un ou des motifs sérieux et valables[21] justifiant le retrait de son plaidoyer de culpabilité.

[37]        À cet égard, le facteur primordial est celui du déni de justice[22]. Lorsqu’un accusé était représenté par avocat au moment de son plaidoyer, son fardeau est plus lourd[23]. De même, lorsqu’un accusé met en cause son état d’esprit mental, son fardeau est très élevé[24].

[38]        Le fait pour un accusé de ressentir de la crainte face à la peine qui lui sera imposée ne justifie pas un retrait de plaidoyer[25]. Également, l’insatisfaction subséquente devant la manière dont les choses se destinaient ou quant à la peine infligée ne peut suffire pour qu’un accusé obtienne un retrait de plaidoyer[26], surtout quand rien n’indique que sa décision n’était pas libre et faite en toute connaissance de cause[27].

[39]        Par ailleurs, le retrait d’un plaidoyer ne peut être autorisé s’il tient d’une manœuvre délibérée pour retarder les conséquences du plaidoyer ou pour la simple raison que l’accusé a changé d’idée après plus ample réflexion[28]. De même, il est entendu qu’une demande de retrait de plaidoyer ne doit pas être faite dans le but de manipuler le système judiciaire[29].

L’assistance du mis en cause et son impact sur l’équité du procès ou les verdicts

Lajoie c. R., 2021 QCCA 1631

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[11]      Dans André c. R.[5], la Cour décrit le fardeau qui incombe à un accusé qui se pourvoit en appel en alléguant l’assistance inadéquate de l’avocat qui le représentait en première instance. La partie qui invoque un tel moyen doit faire la preuve prépondérante des gestes qu’elle reproche à son avocat. Il lui faut ensuite établir que ces gestes se situent à l’extérieur du vaste éventail de la représentation adéquate. Enfin, il est nécessaire de démontrer que cette assistance inadéquate a été source d’une erreur judiciaire, soit parce qu’elle a eu pour effet de compromettre l’équité du procès ou soit parce que, sans cette assistance inadéquate, il existe une possibilité raisonnable[6] que le verdict aurait été différent.

[12]      L’erreur judiciaire peut résulter de l’omission de l’avocat de consulter son client à propos de la stratégie de défense et la manière de la mettre en œuvre. L’avocat doit se préparer adéquatement pour le procès et étudier le dossier de l’accusé avec ce dernier afin de déterminer les défenses qui peuvent être soulevées. Le défaut de faire cet exercice peut entacher la fiabilité du verdict[7] ou l’équité du procès[8]. Il est certes préférable que l’avocat rencontre son client autrement que brièvement au palais de justice avant l’audience[9], mais l’essentiel demeure que l’avocat se prépare adéquatement au procès et qu’il s’assure de recueillir les instructions et la version des faits de son client.

Il n’est pas idéal qu’un avocat qui gère un nombre important de dossiers ne rencontre ses clients qu’au palais de justice, immédiatement avant les audiences visant à enregistrer un plaidoyer de culpabilité

R v L.W., 2006 CanLII 7393 (ON CA)

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[46]         Mr. Burgess denied that he never told the appellant that he could receive a custodial sentence.  He also denied that his meetings with the appellant were no more than five minutes.  Unfortunately, there is very little documentation in the lawyer’s file concerning his discussions with his client.  On this issue there is very little, if anything, that is helpful.  What emerges from the record is that Mr. Burgess is an extremely busy criminal lawyer who testified in cross-examination that he handles as many as eight to ten cases a day in the Peterborough court.  He did not challenge the appellant’s assertion that all of their meetings were at the courthouse at times when the charges against the appellant were before the court to be spoken to. 

[47]         On the other hand, it is clear from the record that trial counsel believed, and rightly so, that there was no viable defence to the charges of making and distributing child pornography.  Counsel’s focus was on his attempt to negotiate a plea bargain, which would keep the appellant out of jail.  His discussions with the Crown attorney were directed towards either a conditional discharge or a conditional sentence.  A conditional discharge was out of the question.  He could not get the Crown to commit to any position on sentence until the Crown saw the presentence report.  In the result, if there was to be a plea it would take place before they knew the Crown’s position on sentence.

[48]         What appears to have happened is that both lawyer and client, in their discussions, were placing most of their attention on a conditional sentence with the result that jail was not uppermost in either person’s mind. The lawyer’s communication with his client could have been much better.  Brief meetings at the court house are not the most satisfactory way to communicate, particularly when counsel is handling as many as eight or ten cases a day.  Nevertheless, I am not persuaded that Mr. Burgess did not tell the appellant that there was a risk of his going to jail.  The onus is on the appellant in this respect. 

Le dédommagement à la victime doit toujours être envisagé lors de la détermination de la peine

Les prescriptions inhérentes à la présentation d'une requête par un accusé alléguant la violation de l'un des ses droits constitutionnels

R. c. Lecompte, 2019 QCCS 5099 Lien vers la décision E-          La réponse de la poursuite à une requête sous le par. 24(2) de la Charte [ ...