R. c. DeSousa, [1992] 2 RCS 944
Lien vers la décision
Il semble qu'au Canada et ailleurs un principe général veuille qu'en l'absence d'indication expresse dans la loi, l'élément moral d'une infraction ne se rattache qu'à l'infraction sous‑jacente et non aux circonstances aggravantes (Colvin, op. cit., à la p. 57). Cette assertion a été confirmée par notre Cour dans nombre de causes, dont celles où elle a décidé que l'agression sexuelle exige une intention seulement à l'égard de l'agression et non à l'égard de quelque circonstance aggravante (voir les arrêts R. c. Chase, 1987 CanLII 23 (CSC), [1987] 2 R.C.S. 293, et R. c. Bernard, précité, aux pp. 888 et 889). Exiger une faute relativement à chaque conséquence d'une action lorsqu'il s'agit d'établir la responsabilité pour avoir causé cette conséquence équivaudrait à bouleverser les notions admises en matière de responsabilité criminelle. Un tel résultat ne ressort pas de l'aversion, consacrée dans la Constitution, pour les sanctions qui frappent des personnes moralement innocentes. Une personne n'est pas moralement innocente simplement parce qu'elle n'avait pas prévu une conséquence particulière d'un acte illégal. En punissant pour des conséquences imprévisibles, le droit ne punit pas ceux qui sont moralement innocents, mais ceux qui causent un préjudice en commettant une action illégale qu'ils pouvaient éviter. Ni les principes fondamentaux du droit pénal, ni les exigences de la justice fondamentale ne commandent nécessairement une intention relativement aux conséquences d'un acte par ailleurs blâmable
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mercredi 6 juin 2012
mercredi 25 mai 2011
Le risque objectif de lésions corporelles doit s'apprécier in concreto et les circonstances de chaque cas sont pertinentes, voire décisives
R. c. Tremblay, 2011 QCCA 292 (CanLII)
[12] Revenons à l'article 269 du Code criminel. Pour conclure à la responsabilité d'avoir illégalement causé des lésions corporelles, il doit y avoir un lien de cause à effet entre l'infraction sous‑jacente commise et le préjudice causé. Le moyen avancé par le ministère public est lié à la mens rea de l'infraction prévue à l'article 269 C. cr., à son élément moral. Le ministère public doit démontrer l'élément moral de l'infraction sous-jacente ainsi que la prévisibilité objective des lésions corporelles. Dans l'arrêt R. c. DeSousa, une affaire dans laquelle une femme a été blessée sérieusement par les éclats d'une bouteille de bière lancée sur un mur au cours d'une bagarre, la Cour suprême du Canada se penche sur l'article 269 C. cr. :
[…] le critère est celui de la prévision objective des lésions corporelles en ce qui concerne toutes les infractions sous-jacentes. L'acte doit être à la fois illégal, tel que ce terme a été défini plus haut, et de nature à soumettre une autre personne à un risque de préjudice ou de lésions corporelles. Ces lésions corporelles ne doivent pas être de nature passagère ou sans importance et doivent, dans la plupart des cas, comporter un acte violent commis délibérément à l'endroit d'autrui. […] Pour ne pas déplacer indûment l'accent, il est préférable de se demander si une personne raisonnable se rendrait inévitablement compte que l'acte illégal sous-jacent ferait courir à autrui le risque de lésions corporelles, plutôt que de s'écarter du sujet et de se pencher sur une question touchant la qualification de l'infraction.
[13] Dans leur Traité de droit pénal canadien, les auteurs Côté-Harper, Rainville et Turgeon écrivent, au sujet de l'élément mental requis en matière d'infractions criminelles :
La mens rea subjective, c'est-à-dire celle qui requiert la preuve de la conscience qu'a l'accusé de l'acte reproché, ou à tout le moins sa conscience de la vraisemblance de certaines conséquences, demeure la norme pour la plupart des infractions. C'est le sens que l'on a traditionnellement attribué à cette notion de mens rea. On note cependant que la Cour suprême du Canada, dans une série de décisions, a développé la responsabilité de l'inculpé reposant sur une faute objective en matière de certaines infractions de conséquence et de crimes de négligence en vertu de laquelle la faute repose sur un écart marqué de la norme de diligence qu'observerait une personne raisonnable dans les mêmes circonstances. Ainsi, dans de telles situations, on n'exigera pas la preuve de l'état d'esprit subjectif de l'accusé, son comportement s'appréciant en fonction d'une norme objective. Conséquemment, la poursuite n'aura pas à prouver la conscience subjective de l'inculpé pour obtenir une déclaration de culpabilité. Cependant, la personne accusée pourra se disculper en soulevant un doute raisonnable quant à savoir si une personne raisonnable aurait été consciente des risques soulevés par son comportement, ou qu'il n'y a pas d'écart marqué par rapport à la norme de diligence.
[17] Le risque objectif de lésions corporelles doit s'apprécier in concreto. Les circonstances de chaque cas sont pertinentes, voire décisives. Le juge a considéré le risque de lésions corporelles associé à la présence de la grille installée près de la sortie du bar et il a fait bénéficier l'intimé du doute raisonnable. Sa démarche est adéquate et sans reproche. Rien ne permet de croire qu'un autre facteur de risque a été porté à l'attention du juge de première instance et qu'il aurait été occulté dans l'application du critère de la prévision objective des lésions corporelles.
[18] Il est vrai que ce ne sont pas les blessures subies par la victime qui doivent être prévisibles objectivement, mais plutôt le risque de lésions corporelles qui ne sera pas de nature passagère ou sans importance, comme l'a rappelé la Cour d'appel de l'Alberta dans l'arrêt R.c. Dewey. Mais il faut dire que dans cette affaire, l'accusé « pushed the complainant more forcefully than would cause a stumble ». Le premier juge n'est pas parvenu à une semblable conclusion de fait.
[12] Revenons à l'article 269 du Code criminel. Pour conclure à la responsabilité d'avoir illégalement causé des lésions corporelles, il doit y avoir un lien de cause à effet entre l'infraction sous‑jacente commise et le préjudice causé. Le moyen avancé par le ministère public est lié à la mens rea de l'infraction prévue à l'article 269 C. cr., à son élément moral. Le ministère public doit démontrer l'élément moral de l'infraction sous-jacente ainsi que la prévisibilité objective des lésions corporelles. Dans l'arrêt R. c. DeSousa, une affaire dans laquelle une femme a été blessée sérieusement par les éclats d'une bouteille de bière lancée sur un mur au cours d'une bagarre, la Cour suprême du Canada se penche sur l'article 269 C. cr. :
[…] le critère est celui de la prévision objective des lésions corporelles en ce qui concerne toutes les infractions sous-jacentes. L'acte doit être à la fois illégal, tel que ce terme a été défini plus haut, et de nature à soumettre une autre personne à un risque de préjudice ou de lésions corporelles. Ces lésions corporelles ne doivent pas être de nature passagère ou sans importance et doivent, dans la plupart des cas, comporter un acte violent commis délibérément à l'endroit d'autrui. […] Pour ne pas déplacer indûment l'accent, il est préférable de se demander si une personne raisonnable se rendrait inévitablement compte que l'acte illégal sous-jacent ferait courir à autrui le risque de lésions corporelles, plutôt que de s'écarter du sujet et de se pencher sur une question touchant la qualification de l'infraction.
[13] Dans leur Traité de droit pénal canadien, les auteurs Côté-Harper, Rainville et Turgeon écrivent, au sujet de l'élément mental requis en matière d'infractions criminelles :
La mens rea subjective, c'est-à-dire celle qui requiert la preuve de la conscience qu'a l'accusé de l'acte reproché, ou à tout le moins sa conscience de la vraisemblance de certaines conséquences, demeure la norme pour la plupart des infractions. C'est le sens que l'on a traditionnellement attribué à cette notion de mens rea. On note cependant que la Cour suprême du Canada, dans une série de décisions, a développé la responsabilité de l'inculpé reposant sur une faute objective en matière de certaines infractions de conséquence et de crimes de négligence en vertu de laquelle la faute repose sur un écart marqué de la norme de diligence qu'observerait une personne raisonnable dans les mêmes circonstances. Ainsi, dans de telles situations, on n'exigera pas la preuve de l'état d'esprit subjectif de l'accusé, son comportement s'appréciant en fonction d'une norme objective. Conséquemment, la poursuite n'aura pas à prouver la conscience subjective de l'inculpé pour obtenir une déclaration de culpabilité. Cependant, la personne accusée pourra se disculper en soulevant un doute raisonnable quant à savoir si une personne raisonnable aurait été consciente des risques soulevés par son comportement, ou qu'il n'y a pas d'écart marqué par rapport à la norme de diligence.
[17] Le risque objectif de lésions corporelles doit s'apprécier in concreto. Les circonstances de chaque cas sont pertinentes, voire décisives. Le juge a considéré le risque de lésions corporelles associé à la présence de la grille installée près de la sortie du bar et il a fait bénéficier l'intimé du doute raisonnable. Sa démarche est adéquate et sans reproche. Rien ne permet de croire qu'un autre facteur de risque a été porté à l'attention du juge de première instance et qu'il aurait été occulté dans l'application du critère de la prévision objective des lésions corporelles.
[18] Il est vrai que ce ne sont pas les blessures subies par la victime qui doivent être prévisibles objectivement, mais plutôt le risque de lésions corporelles qui ne sera pas de nature passagère ou sans importance, comme l'a rappelé la Cour d'appel de l'Alberta dans l'arrêt R.c. Dewey. Mais il faut dire que dans cette affaire, l'accusé « pushed the complainant more forcefully than would cause a stumble ». Le premier juge n'est pas parvenu à une semblable conclusion de fait.
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