Le dédommagement à la victime doit toujours être envisagé lors de la détermination de la peine

L'état du droit quant au dédommagement à la victime - arrêt de principe qui rappelle l'importance pour le juge de se pencher sur cette question

R. c. Simoneau, 2017 QCCA 1382 Lien vers la décision [ 18 ]          Lorsqu’une ordonnance de dédommagement est envisagée, la capacité de pa...

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dimanche 4 mars 2018

La requête en cassation de l’acte d’accusation direct


R. c. Quan, 2016 QCCQ 170 (CanLII)

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[39]        Il y a lieu dans un premier temps de rappeler la norme d’intervention lorsqu’on demande à un tribunal d’examiner le comportement de la poursuite dans l’exercice d’un pouvoir discrétionnaire.
[40]        À cet effet, récemment, dans l’arrêt Anderson, la Cour suprême du Canada vient justement de préciser ce qu’englobe le pouvoir discrétionnaire de la poursuite et les circonstances pouvant en justifier l’examen et le contrôle.
[41]        Parlant pour la Cour, le juge Moldaver mentionne spécifiquement que le pouvoir de procéder par voie de mise en accusation directe fait partie de l’exercice du pouvoir discrétionnaire de la poursuite (para. 44).
[42]        Il rappelle cependant que l’exercice de ce pouvoir ne permet pas au poursuivant de se libérer de ses obligations constitutionnelles (para. 45).
[43]        Bien que ce pouvoir ne soit pas à l’abri de toute surveillance, le juge Moldaver rappelle que les tribunaux doivent faire preuve de grande déférence envers l’exercice de celui-ci et s’abstenir de le remettre en cause systématiquement. Cette déférence permet le respect du principe du partage des pouvoirs de notre système démocratique et garantit l’efficacité du système de justice criminelle et pénale, ce pouvoir se prêtant particulièrement mal à l’exercice du contrôle judiciaire (para. 46).
[44]        Pour ces raisons, le pouvoir discrétionnaire de la poursuite ne doit faire l’objet d’une intervention judiciaire que dans les seuls cas où il y a abus, c'est-à-dire lorsqu’il est démontré que la conduite du poursuivant est inacceptable et compromet sérieusement l’équité ou l’intégrité du système de justice (para. 50 et 51). Le fardeau de faire la preuve d’un tel comportement par prépondérance, reposant sur les épaules du requérant (para. 52).
[45]        Qu’en est-il en l’espèce?
[46]        La défense a bien précisé qu’elle ne reproche aucune mauvaise foi ou malhonnêteté au poursuivant, plaidant plutôt que le motif invoqué par la poursuite pour justifier le dépôt d’un acte d’accusation direct n’étant pas l’un des motifs énoncés dans la ligne directrice du SPPC, elle a donc été illégitimement privée de l’enquête préliminaire, ce qui amène une violation de ses droits justifiant la réparation demandée.
[47]        Le Tribunal n’est pas de cet avis. La ligne directrice du SPPC mentionne dans la section Énoncé de principe qu’il pourra y avoir dépôt d’un acte d’accusation direct que dans des circonstances impliquant des violations graves de la loi et lorsqu’il est dans l’intérêt public de procéder ainsi.
[48]        Elle énonce, entre autres circonstances, qu’il est dans l’intérêt public de déposer un acte d’accusation direct lorsque le droit de l’accusé d’être jugé dans un délai raisonnable pourrait être compromis ou lorsqu’il est nécessaire d’accélérer les procédures afin de maintenir la confiance du public dans l’administration de la justice.
[49]        À première vue, les circonstances du présent dossier en mai 2013 pouvaient permettre à la poursuivante de considérer qu’il était dans l’intérêt public de procéder par acte d’accusation direct. Les procédures avaient commencé deux ans auparavant, la question des honoraires retardait toujours le dossier, les délais s’étiraient.
[50]        Il n’y a donc pas lieu, en l’absence de preuve prépondérante d’abus, de pousser plus loin l’examen de l’exercice de la discrétion de la poursuivante.
[51]        Lors de ses représentations, la défense a mis beaucoup d’emphase sur l’utilité de l’enquête préliminaire, ce qui n’est pas contesté en l’instance.
[52]        Elle a abondamment plaidé la décision de Guimond de la Cour supérieure par laquelle l’acte d’accusation direct avait été cassé. Cependant, cette décision fut renversée en appel, justement parce que la preuve d’abus de la part de la poursuivante n’avait pas été faite.
[53]        Accepter la proposition de la défense, que même en l’absence d’abus, de mauvaise foi ou de malhonnêteté, lorsqu’un acte d’accusation direct ne respecte pas les lignes directrices il doit être cassé car privant alors de façon illégitime la défense de l’enquête préliminaire, serait aller à l’encontre des enseignements de la Cour suprême dans Anderson.
[54]        Dans un premier temps, il faut se rappeler qu’en soi, l’utilisation d’un acte d’accusation direct ne contrevient pas à l’article 7 de la Charte (R. c. Ertel (1987) 1987 CanLII 183 (ON CA)35 C.C.C.(3d) 398 (OCA)) et que le droit à la tenue d’une enquête préliminaire n’est pas un principe de justice fondamentale (R. c. Arviv (1985) 1985 CanLII 161 (ON CA)19 C.C.C.(3d) 395 (OCA)). Simplement plaider qu’une enquête préliminaire aurait été utile n’est pas un argument suffisant.
[55]        Au surplus, en l’instance, la démonstration de l’atteinte aux droits constitutionnels des accusés est insuffisante.

lundi 20 juin 2016

L'acte d'accusation direct et la divulgation de la preuve

Canada (Procureure générale) c. Bélair, 1991 CanLII 3486 (QC CA)

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Je ne crois toutefois pas que la Procureure générale puisse toujours, et dans n'importe quelles circonstances, utiliser la procédure de mise en accusation directe.  Cet instrument procédural doit rester une exception, car son usage peut entraîner certains abus de procédure ou une violation du droit à un procès équitable et à une défense pleine et entière, garantis par l'article 7 de la Charte canadienne des droits et libertés, principalement lorsque l'accusé n'a pas reçu communication de l'essentiel de la preuve de la Couronne (R. c. Wood, (1990) 51 C.C.C. (3d) 201 (Ont. C.A.); Stinchcombe c. R., Cour suprême du Canada, 7 novembre 1991; Voir aussi, en général "Poursuites pénales: les pouvoirs du Procureur général et des procureurs de la Couronne". Ottawa 1990. Commission de réforme du droit du Canada.

dimanche 12 mai 2013

La présentation d'un acte d'accusation directe & le refus de consentir à une ré-option de la part de la Couronne

R. c. Paradis, 2007 QCCS 671 (CanLII)

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[19]            La présentation d'un acte d'accusation directe requiert un procès par jury sauf ré-option avec le consentement écrit de la Couronne (article 565(2)):  R. vs Tapaquon (Cour suprême) (1993) 87 C.C.C.(3) page 1:
«Section 574 is the provision which authorizes the prosecutor to prefer an indictment in the ordinary course of events.  Under this section no special consent is required.  This can be contrasted with s.577 which provides for the preferring of "direct" indictments.  Section 566 unequivocally states that s.577 does not apply to judge alone proceedings…» (page 18)
[20]            R. vs Jones (Ont.C.A.) (1997) 113 C.C.C.(3) page 225:
«…The trial of charges set out in a direct indictment will be before a jury regardless of the accused's election, unless the Crown agrees to a non-jury trial:  Criminal Code ss.565(2)566(3).» (page 232)
[21]            J'estime aussi qu'avec le consentement des parties, le procès pourrait se tenir devant un juge seul de la Cour supérieure, selon l'article 473.
[22]            Tel que déjà mentionné, le simple refus de consentir à une ré-option de la part de la Couronne, même non motivé, n'est pas abusif.  Il faut démontrer de façon prépondérante qu'il s'agit d'un exercice capricieux, inapproprié d'un pouvoir discrétionnaire.
[23]            Ainsi que je le mentionnais à l'audience, j'estime que la Couronne avait raison de ne pas consentir.  Il s'agit d'une affaire où le verdict de douze citoyens sera certainement plus socialement acceptable que s'il s'agissait de la décision d'un juge unique.
[24]            Toutefois, le fait demeure que l'accusé est justifié de se plaindre des vacillements de la poursuite dans l'élaboration finale de sa théorie de la fraude.  Il est vrai que la Couronne est tenue de prouver les ingrédients de l'offense et non pas sa théorie:  R. vs Groot (Ont.C.A.) (1998) 129 C.C.C.(3) page 293, paragraphe 15 (permission d'appel à la Cour suprême refusée 131 C.C.C.(3) page vi).
[25]            Toutefois, l'attitude de la poursuite ne peut changer au gré des informations que l'accusé lui révèle dans l'espoir de déjudiciariser les accusations formulées contre lui:  R. vs Hogg (Ont.C.A.) (2000) 148 C.C.C.(3) page 86:
«…The Crown cannot attempt to discredit the defence by having a totally different theory of culpability thrown into the mix at the last moment.  If it was not prepared to stand or fall on the complainant's version of what took place in the car that evening, then it should have attempted to build its case from the outset on drug dependency and vitiated consent.» (par. 21)
[26]            Comment remédier à cette situation?  Tout d'abord, il faut écarter toute suggestion d'ordonner un arrêt des procédures pour les raisons invoquées par le juge LeBel dans R. vs Regan (Cour suprême) (2002) 161 C.C.C.(3) page 97, paragraphes 53 et suivants.  Les inconvénients subis par l'accusé ne sont pas tels que seul l'arrêt des procédures s'avère être un remède adéquat.
[27]            En effet, il existe une autre façon d'atténuer sinon effacer complètement les inconvénients causés par les changements survenus dans la thèse de la poursuite.  Je m'inspire, par analogie, du remède proposé par monsieur le juge Doherty au sujet de la destruction d'une importante pièce à conviction, le véhicule automobile, lors d'une accusation d'ivresse au volant ayant causé des lésions corporelles où l'accusé affirmait ne pas être le conducteur:  R. vs Bero (Ont.C.A.) 151 C.C.C.(3) page 545:
«The Charter has not diminished defence counsel's forensic arsenal.  The defence is still entitled to demonstrate inadequacies or failures in an investigation and to link those failures to the Crown's obligation to prove its case beyond a reasonable doubt.  In this case, the trial judge prohibited that line of defence.» (par. 58)
«…If a witness testified that had forensic testing been done, it could have revealed that traces of blood and that the location of that blood could have been important in determining the identity of a driver, those are "facts" which are in evidence.  Those facts could support a defence submission that in the absence of such evidence the jury should not be satisfied that the Crown had proved the driver's identity beyond a reasonable doubt.» (par. 64)
«Where the failure to preserve evidence results in a breach of an accused's s.7 rights and where the defence has exercised reasonable diligence in attempting to preserve the evidence, I think the trial judge should also instruct the jury that the Crown was under an obligation to preserve the evidence and failed to do so, and that the defence cannot be faulted for not gaining access to the evidence before it was destroyed.  These instructions would place the burden for the loss of evidence on the Crown, where it belongs.  These instructions may also help the jury assess the overall reliability of the investigative process which produced the evidence relied on by the Crown, and help the jury decide the significance, if any, of the absence of evidence that may have been available had the prosecution preserved all relevant evidence.» (par. 67)
[28]            Dans la présente affaire, l'accusé peut, s'il le juge opportun, informer les jurés des changements survenus dans la théorie de la poursuite et les zones grises qui persistent quant au montant exact de la fraude qu'on lui reproche.
[29]            En définitive, comme ce doit être toujours le cas, les directives finales seront influencées par la preuve présentée au procès

mercredi 4 février 2009

Mise en accusation directe

La mise en accusation directe est prévue à l'article 577 du Code criminel, qui explique comment le procureur général ou le sous-procureur général peut renvoyer une affaire directement pour procès sans la tenue préalable d'une enquête préliminaire ou après qu'un prévenu a été libéré lors de l'enquête préliminaire.

La mise en accusation directe établit l'ultime responsabilité constitutionnelle du procureur général, qui est de traduire en justice ceux qui doivent l'être. Le procureur général ou le sous-procureur général peuvent, pour de nombreuses raisons, estimer qu'un acte d'accusation est dans l'intérêt de la bonne administration de la justice pénale.

Le facteur déterminant dans toutes les affaires est de savoir si l'intérêt public nécessite que l'on s'écarte de la procédure habituelle de mise en accusation lorsqu'une ordonnance de subir un procès est rendue lors de l'enquête préliminaire.

Il peut être dans l'intérêt public de procéder à une mise en accusation directe, notamment dans les circonstances suivantes :

1. lorsque le prévenu est libéré lors de l'enquête préliminaire en raison d'une erreur de droit, d'une erreur de compétence, ou d'une erreur évidente concernant les faits de l'affaire;

2. lorsque le prévenu est libéré au terme de l'enquête préliminaire et que de nouveaux éléments de preuve sont par la suite décelés, qui, s'ils avaient été présentés à l'enquête préliminaire, auraient probablement donné lieu au renvoi à procès;

3. lorsqu'on ordonne à l'accusé de subir son procès pour l'infraction imputée et qu'une nouvelle preuve est par la suite obtenue qui justifie la poursuite du prévenu concernant une infraction différente ou plus grave pour laquelle aucune enquête préliminaire n'a eu lieu;

4. lorsque la tenue du procès est grandement retardée en raison, par exemple, de nombreuses demandes accessoires pendant les procédures avant procès, au point que le droit d'être jugé dans un délai raisonnable que l'alinéa 11b) de la Charte canadienne des droits et libertés garantit à l'accusé pourrait être compromis;

5. lorsqu'il y a un motif raisonnable de croire qu'une menace pèse sur la vie, la santé ou la sécurité des témoins ou des membres de leur famille et que cette menace pourrait être considérablement réduite si le procès avait lieu immédiatement, sans enquête préliminaire;

6. lorsque les procédures intentées contre l'accusé doivent être accélérées pour maintenir la confiance du public dans l'administration de la justice, notamment lorsque la détermination de la culpabilité ou de l'innocence de l'accusé revêt une importance particulière aux yeux du public;

7. lorsque la mise en accusation est nécessaire pour éviter de multiples procès -- par exemple, lorsqu'on a ordonné à un prévenu de subir un procès à la suite d'une enquête préliminaire, et qu'un deuxième prévenu accusé de la même infraction vient tout juste d'être arrêté ou extradé au Canada;

8. lorsque l'âge, la santé ou d'autres circonstances des témoins nécessitent que leur témoignage soit entendu devant le tribunal le plus tôt possible;

9. lorsque la tenue d'une enquête préliminaire serait déraisonnablement onéreuse pour les ressources de la poursuite, de l'organisme chargé des enquêtes ou de la cour.

Les circonstances dans une affaire pour laquelle une mise en accusation directe est recommandée doivent respecter les critères qui régissent le dépôt des accusations, notamment la probabilité raisonnable de condamnation et l'intérêt public.

Ce texte est tiré:
Le Guide du Service fédéral des poursuites
http://www.canada-justice.ca/fr/dept/pub/fps/fpd/ch17.html