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lundi 28 juillet 2025

La juridiction territoriale & la détermination du lieu où le crime a été commis, particulièrement dans le cas de menaces par téléphone, la poste ou internet, lorsque les propos proviennent d’un endroit et sont reçus dans un autre

Roy c. R., 2022 QCCS 4726

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[27]        La juridiction pour entendre une affaire consiste en l'autorité légale de la Cour pour juger du pouvoir de décider dans quel district une affaire doit être entendue, malgré le choix initial de la poursuite[9].

[28]        Le Code criminel prévoit qu’une cour supérieure de juridiction criminelle est compétente pour entendre une affaire si le prévenu est trouvé, arrêté ou sous garde dans la juridiction territoriale du tribunal, en vertu de l’article 470 C.cr.

[29]        De surcroit, le dossier peut être entendu où les faits sont survenus ainsi qu’aux endroits précisés dans l’article 504:

504. Quiconque croit, pour des motifs raisonnables, qu’une personne a commis un acte criminel peut faire une dénonciation par écrit et sous serment devant un juge de paix, et celui-ci doit recevoir la dénonciation, s’il est allégué, selon le cas :

a) que la personne a commis, en quelque lieu que ce soit, un acte criminel qui peut être jugé dans la province où réside le juge de paix et que la personne :

(i) ou bien se trouve ou est présumée se trouver,

(ii) ou bien réside ou est présumée résider,

dans le ressort du juge de paix;

b) que la personne, en quelque lieu qu’elle puisse être, a commis un acte criminel dans le ressort du juge de paix;

c) que la personne a illégalement reçu, en quelque lieu que ce soit, des biens qui ont été illégalement obtenus dans le ressort du juge de paix;

d) que la personne a en sa possession, dans le ressort du juge de paix, des biens volés.

[30]        Il y a également l'article 476b) C.cr. qui précise que lorsqu’une infraction est commencée dans une circonscription et consommée dans une autre(« completed »), l’infraction est censée avoir été commise en n’importe laquelle de ces circonscriptions territoriales[10].

[31]        Du côté de la common law, on dénote qu’en principe, « l'accusé subi[t] son procès dans le district du lieu de la commission de l'infraction reprochée »[11].

[32]        Nous pouvons donc constater qu’une infraction peut se dérouler dans plus d’une division territoriale et faire l'objet d'une poursuite dans différents districts, comme le souligne l’auteur Ewaschuk:

The “venue of the offence” is where the offence entirely happened. Subject to a judicial “change of venue” order “changing the place of trial” to elsewhere in the province, the “venue of the trial” is generally held in the “territorial division” where the offence happened. However, the offence may have occurred in more than “one territorial division”, each having a “real and substantial link to the offence”, e.g., where any element, or part, of the offence takes place thereso that the “venue of the offence” may comprise “several territorial divisions” each having jurisdiction to try the offencewhich may be said to be “potential venues for the trial” depending on where the charges are laid. Furthermore, there are “statutory exceptions” giving jurisdiction over the offender in different territorial divisions, thereby permitting the holding of the trial elsewhere than the place where the offence happened. Thus, there may be more than one “venue of the offence” where different territorial divisions have jurisdiction to try the offence or offender, though there usually is only one final “venue of trial”[12].

[Soulignements ajoutés]

[33]        En résumé, lorsqu’il s’agit d’une situation où l’infraction est « commise » sur plusieurs territoires, la circonscription territoriale compétente sera celle où le poursuivant a déposé l’accusation, à sa discrétion, le tout sujet à une intervention de la Cour[13].

3.3  Illustrations jurisprudentielles

[34]        Les auteurs Manning, Mewett et Sankoff reconnaissent qu’il peut être difficile de déterminer où un crime a eu lieu, particulièrement dans le cas de menaces par téléphone, la poste ou internet, lorsque les propos proviennent d’un endroit et sont reçus dans un autre[14].

[35]        L’arrêt de principe Libman semble toutefois avoir résolu cette situation en appliquant la méthode du lien réel et substantiel entre une infraction et le Canada[15].

[36]        Il est important de noter que ce lien réel et substantiel n’est pas limité aux éléments essentiels de l’infraction[16].

[37]        Dans l’affaire Bigelow[17] où un enfant avait été enlevé en Ontario et retrouvé en Alberta, la Cour d’appel d’Ontario a conclu que les deux provinces étaient compétentes pour entendre l’affaire. Elle a notamment identifié ces trois exemples d’infractions interprovinciales : (1) si une continuité des opérations s’étend sur plusieurs provinces, (2) si un acte manifeste est commis dans cette province, et (3) si les effets de l’infraction commise dans une province sont ressentis dans une autre[18].

[38]        Dans l’arrêt Ibeaghala Cour d’appel du Québec mentionnait que selon les enseignements de Bigelow, il s’agit de déterminer si un fait pertinent pour prouver un élément essentiel s’y est produit. Elle a ainsi confirmé qu'il n’est pas nécessaire qu’un des éléments essentiels de l’infraction à proprement parler ait été commis dans une juridiction pour lui donner compétence[19].

[39]        Une précision a cependant été apportée dans Webber par la Cour d’appel de la Nouvelle-Écosse eu égard à la rédaction de l'acte d’accusation qui doit mentionner un lieu d'infraction concordant avec l'endroit où les accusations sont déposées. Dans cette affaire, on lisait que les actes avaient été commis au Nouveau-Brunswick alors que l'acte d'accusation avait été déposé en Nouvelle-Écosse, ce qui faisait obstacle à la compétence d’un juge de cette dernière province[20].

[40]        Dans l’affaire Hirsch[21], l’accusé avait affiché des menaces à l’endroit de son ex-conjointe sur son propre profil Facebook. La victime n’avait pas accès à la page Facebook de l’accusé, mais un ami l’a informée de la situation et lui a transmis des captures d’écran. L’accusé soulevait l’absence de juridiction en Saskatchewan alléguant qu’il aurait pu être à l’extérieur de la province lorsqu’il a affiché les messages.

[41]        Cet argument a été rejeté par la Cour d’appel de la Saskatchewan qui a rappelé qu’une infraction n’a pas à être commise sur un seul territoire. Un lien réel et substantiel entre l’infraction et le territoire où elle est poursuivie suffit. Ainsi, le seul fait que la victime ait reçu les menaces en Saskatchewan était suffisant pour conférer la compétence de cette province sur cette infraction.

[42]        Dans l’affaire Fournier, la Cour supérieure de la Colombie-Britannique a conclu que le fait de recevoir l’appel téléphonique menaçant en Colombie-Britannique suffisait à donner juridiction à cette province, malgré l’absence d’information sur le lieu d’origine de l’appel. La Cour a déterminé qu’une infraction de menaces peut avoir été commise à la fois au lieu où elles ont été proférées ainsi qu’au lieu de réception de l’appel menaçant[22].

[43]        Dans l'arrêt Bekar, la Cour d'appel d'Alberta a conclu que le lieu où les lettres de menaces avaient été reçues constituait l'endroit de la commission de l'infraction alléguée[23].

[44]        Enfin, dans Ross[24], il était reproché à l’accusée d’avoir publié un message sur Facebook dans lequel elle transgressait une ordonnance de non-publication. Le message a été rédigé au Nouveau-Brunswick, mais consulté notamment au Québec. La Cour du Québec a reconnu sa compétence puisque les effets de la transgression de l’ordonnance ont été ressentis au Québec, au sens de Bigelow[25].

[45]        À la lumière de ces exemples jurisprudentiels, je suis convaincue que la Cour supérieure a compétence pour entendre la présente affaire à Montréal.

[46]        Le fait que les messages aient été reçus par la plaignante dans le district judiciaire de Montréal crée un lien réel et substantiel suffisant pour confirmer la juridiction, quel que soit le lieu d’émission desdits messages.

[47]        Plus précisément, la réception des messages par la plaignante et l’effet qu’ils ont produit à son endroit sont des éléments factuels pertinents pour prouver un ou des éléments essentiels des infractions reprochées, soit le harcèlement criminel et l’intimidation d’une personne associée au système judiciaire[26].

dimanche 22 juin 2025

On n’a pas besoin d’un plaignant pour débuter une enquête criminelle

R. c. Lajoie, 2017 QCCQ 10228



[55]        Il est vrai, qu’habituellement, une victime communique avec les policiers qui mènent ensuite une enquête[19]. Toutefois, ce n’est pas l’unique voie. Comme le mentionne le juge Michel Babin de la Cour du Québec dans Gagnon c. R.[20], on n’a pas besoin d’un plaignant pour débuter une enquête criminelle. Dans cette affaire Gagnon, un policier est d’abord enquêté sur une question d’abus de confiance. Le tout conduit à une enquête sur un autre sujet (prévarication à l’égard de constats d’infraction), et ce, sans plaignant formel. Le juge rejette la requête du policier en abus de procédure.

[56]        En outre, selon l'article 504 C.cr. « Quiconque croit, pour des motifs raisonnables, qu’une personne a commis un acte criminel peut faire une dénonciation par écrit et sous serment devant un juge de paix, et celui-ci doit recevoir la dénonciation […] »[21]. La procédure pénale ne se limite donc pas à la victime.

dimanche 25 mai 2025

Le droit de déposer une plainte

Service de police de la Ville de Montréal c. Me A, 2020 QCCS 1830

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[18]      Dans l’arrêt Procureur général du Québec c. Lechasseur[6], le juge en chef Laskin rappelle la règle fondamentale du droit criminel canadien qui prévoit le droit de tout citoyen « victime d’un acte criminel, de faire une dénonciation contre l’auteur de l’acte »[7].

[19]      Comme il l’explique, « [l]e public s’est vu attribuer un rôle dans la mise en application de l’ordre public et son apport au processus pénal a été incorporé dans les règles canadiennes »[8] à l’article 504 du Code criminel.

[20]      En effet, l’article 504 « permet qu’une accusation d’acte criminel soit soumise à un juge de paix ou à un magistrat pour déterminer s’il y a lieu de délivrer une sommation ou un mandat en ce qui concerne l’accusation. Le processus pénal est ainsi mis en marche et cette mise en marche fait partie intégrante du processus »[9].

[21]      Dans l’arrêt Lacombe c. André[10], le juge Proulx de la Cour d’appel réitère que « le droit de déposer une dénonciation pour la commission d'un crime appartient à toute personne »[11] et qu’il ne peut être déroger à ce droit[12].

[22]      Ainsi, l’analyse de la protection accordée au secret professionnel, au privilège relatif au litige et au privilège relatif aux règlements doit tenir compte du « droit fondamental et historique du citoyen d’informer sous serment un juge de paix de la perpétration d’un acte criminel »[13]

[23]      De nos jours, la mise en œuvre de ce droit se réalise plus souvent par une plainte auprès d’un corps policier[14].

jeudi 25 juillet 2013

Les limites du principe de la territorialité

Libman c. La Reine, 1985 CanLII 51 (CSC)

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74.              Je pourrais résumer ainsi ma façon d'aborder les limites du principe de la territorialité. Selon moi, il suffit, pour soumettre une infraction à la compétence de nos tribunaux, qu'une partie importante des activités qui la constituent se soit déroulée au Canada. Comme l'affirment les auteurs modernes, il suffit qu'il y ait un "lien réel et important" entre l'infraction et notre pays, ce qui est un critère bien connu en droit international public et privé; voir Williams et Castel, ainsi que Hall, précités. Comme le professeur Hall le note (à la p. 277), cela n'exige aucun texte de loi. Après tout ce sont les tribunaux qui ont défini la façon dont le principe de la territorialité s'applique et le critère proposé équivaut simplement à rétablir la formulation antérieure de ce principe. C'est en réalité le critère qui s'accorde le mieux avec tous les arrêts. Les seuls arrêts qui n'y sont pas conformes sont ceux qui, à mon avis, ne doivent plus être suivis, tels les arrêts Harden et Rush.

mercredi 23 mai 2012

La question de la juridiction VS la compétence concurrente

R. c. Edwards, 2008 NBCP 40 (CanLII)

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[12] Les tribunaux ont interprété cet article d’une façon telle que, indépendamment de la règle générale voulant qu’une infraction soit instruite dans la [TRADUCTION] « circonscription territoriale » où elle a été commise, lorsqu’une infraction est commencée dans une circonscription territoriale et consommée dans une autre, chacune de ces circonscriptions territoriales a [TRADUCTION] « compétence concurrente » pour instruire l’infraction étant donné que l’on peut dire que, dans certaines circonstances, des crimes ont été perpétrés dans plus d’un endroit ou dans plus d’une province. Voir Re Bigelow and the Queen reflex, (1982), 69 C.C.C. (2d) 204 (C.A. Ont.); R. c. Gelinas 1994 CanLII 5891 (QC CA), (1994), 94 C.C.C. (3d) 69 (C.A.Q.).

[13] Dans l’arrêt Libman c. La Reine, 1985 CanLII 51 (CSC), [1985] 2 R.C.S. 178, 21 C.C.C. (3d) 206, la Cour suprême du Canada a statué que la « circonscription territoriale » dans laquelle la « matière » ou l’« élément essentiel » de l’infraction s’est produit n’a pas compétence exclusive pour instruire l’infraction. Il peut y avoir plusieurs États ou circonscriptions territoriales dans l’État qui ont compétence pour instruire l’infraction pourvu qu’il existe « un lien réel et important » entre l’État et l’infraction.

mercredi 2 mai 2012

Lorsqu’une infraction est commencée dans une circonscription territoriale et consommée dans une autre, chacune de ces circonscriptions territoriales a « compétence concurrente »

R. c. Edwards, 2008 NBCP 40 (CanLII)

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[12] Les tribunaux ont interprété cet article d’une façon telle que, indépendamment de la règle générale voulant qu’une infraction soit instruite dans la [TRADUCTION] « circonscription territoriale » où elle a été commise, lorsqu’une infraction est commencée dans une circonscription territoriale et consommée dans une autre, chacune de ces circonscriptions territoriales a [TRADUCTION] « compétence concurrente » pour instruire l’infraction étant donné que l’on peut dire que, dans certaines circonstances, des crimes ont été perpétrés dans plus d’un endroit ou dans plus d’une province. Voir Re Bigelow and the Queen reflex, (1982), 69 C.C.C. (2d) 204 (C.A. Ont.); R. c. Gelinas 1994 CanLII 5891 (QC CA), (1994), 94 C.C.C. (3d) 69 (C.A.Q.).

[13] Dans l’arrêt Libman c. La Reine, 1985 CanLII 51 (CSC), [1985] 2 R.C.S. 178, 21 C.C.C. (3d) 206, la Cour suprême du Canada a statué que la « circonscription territoriale » dans laquelle la « matière » ou l’« élément essentiel » de l’infraction s’est produit n’a pas compétence exclusive pour instruire l’infraction. Il peut y avoir plusieurs États ou circonscriptions territoriales dans l’État qui ont compétence pour instruire l’infraction pourvu qu’il existe « un lien réel et important » entre l’État et l’infraction.

lundi 5 mars 2012

L’assermentation d’une dénonciation par le juge de paix qui la reçoit est une procédure essentielle à sa validité

Vinet c. R., 2012 QCCQ 1178 (CanLII)

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[10] Dans R. c. Carrière, 2010 QCCQ 1524 (CanLII), 2010 QCCQ 1524, mon collègue le juge Perreault souligne que l’assermentation d’une dénonciation par le juge de paix qui la reçoit est une procédure essentielle à sa validité et précise qu’une erreur « cléricale » peut être corrigée par une preuve testimoniale. Aux paragr. 44 à 47, il s’exprime ainsi :

[44] Le serment prêté devant le juge de paix commence les procédures.

[45] La sommation n'a pas à être signée par le même juge de paix que celui qui a reçu la dénonciation sous serment.

[46] Une dénonciation non assermentée est de nullité absolue. Si une dénonciation a été assermentée, mais que le juge de paix a omis de l'indiquer sur celle-ci, cela ne la rend pas nulle.

[47] Dans Société Radio-Canada c. Montréal (Communauté urbaine) Service de police, [2000] J.Q. no. 1936 (C.S.), le juge Béliveau rappelle que la preuve testimoniale de l'assermentation d'un dénonciateur peut corriger l'erreur cléricale de ne pas avoir coché que cela avait été fait.

[11] Dans R. c. Champagne, [1999] J.Q. no. 1700, le juge Downs, de la Cour supérieure, était saisi d’une demande similaire. Dans cette affaire, le juge de paix avait affirmé avoir assermenté la dénonciation, mais avait toutefois omis de cocher la case appropriée. Le juge Downs a estimé que ce témoignage était suffisant pour corriger la lacune de la dénonciation.

[12] Traitant du formalisme en matière de droit criminel, le juge Downs considère qu’il y a lieu d’appliquer la maxime « omnia praesumuntur rite esse acta » traduite par « on présume que les formalités exigées par la loi ont été observées » (paragr. 9). Il conclut à la « présomption de validité d’une dénonciation signée par le dénonciateur et le juge de paix » (paragr. 10) et spécifie qu’il revient à l’accusé de démontrer par prépondérance de preuve que la dénonciation n’a pas été assermentée (paragr. 11).

[13] Bien que la défense ait signalé certaines faiblesses dans le témoignage de l’agent Côté sur l’heure où il s’est représenté devant la juge Hénault pour quérir les documents nécessaires afin que justice suive son cours, ou sur d’autres dénonciations relativement à d’autres accusés impliqués dans cette opération d’envergure, l'on ne peut écarter le fait qu’il a rencontré la juge de paix et lui a, à cette occasion, déclaré sous serment que la dénonciation contenait la vérité.

[14] À la lecture de l’article 504 du Code criminel, la juge de paix devait d’abord recevoir la dénonciation puisque le dénonciateur alléguait sous serment que les accusés avaient commis un acte criminel. « Dans un tel cas, le juge de paix ne peut exercer aucune discrétion », précise les juges Béliveau et Vauclair dans leur Traité général de preuve et de procédures pénales, 17e éd., 1010, p. 602-603, paragr. 1563, se référant à R. c. Ellis, 2009 ONCA 483 (CanLII), 2009 ONCA 483 (CanLII), paragr. 48.

[15] Une fois cette étape franchie, la juge de paix devait, en vertu de l’al. 507(1)a) du

Code criminel, entendre et examiner ex parte les allégations du dénonciateur et, si elle l’estimait utile, les dépositions des témoins aux fins de décerner une sommation ou un mandat d’arrestation obligeant l’accusé à comparaître pour répondre à l’inculpation. Bien que ces dispositions soient mandatoires, il a été décidé qu’elles n’étaient que d’ordre procédural. Par conséquent, le défaut de tenir une audition n’invalide pas la dénonciation et n’entraîne aucune perte de compétence sur l’infraction.

[16] Par ailleurs, dans R. c. Boucher, 2002 CanLII 37981 (QC CS), 2002 CanLII 37981 (QC CS), le juge Grenier, de la Cour supérieure, déclare valide une dénonciation ayant été autorisée par un substitut du Procureur général et, comme c’est le cas en l’espèce, dont le nom y apparaît. L’agent de liaison s’est ensuite présenté devant un juge de paix aux fins d’assermentation sans avoir pris connaissance du dossier au préalable. Au paragr. 12, il cite avec approbation les propos du juge Salhany, dans Canadian Criminal Procedure, édition du mois de novembre 2001, page 7-20, au sujet de la connaissance personnelle des faits par l’agent dénonciateur ou de l’absence de celle-ci :

« The person who lays the information may swear as to his personal knowledge of the facts if such is the case; if he does not have personal knowledge, then he may swear that he has reasonable grounds to believe that the offence named has been committed. »

[17] Aux paragr. 16 à 18 de sa décision, le juge Grenier conclut que la dénonciation a été autorisée conformément à la loi en ces termes :

[16] […] Il apparaît, à cette Cour, tout à fait conforme à la loi et à la réalité qu'un policier déclare avoir des motifs raisonnables de croire qu'une infraction a été commise, alors qu'il se base sur une dénonciation autorisée par un substitut du Procureur général.

[17] […] Il serait étonnant qu’un policier, sans formation juridique, décide qu’un procureur de la couronne ait erré, en autorisant une plainte, compte tenu qu’il évalue les faits tant à leur mérite qu’à la lumière du droit et de la jurisprudence. L'agent de liaison qui prend possession d'un dossier où la plainte a été autorisée par un procureur de la couronne, a sûrement des motifs raisonnables de croire que l'infraction mentionnée à la dénonciation a été commise.

[18] Le Tribunal est donc convaincu que le système en vigueur dans la province de Québec est conforme aux dispositions du Code criminel et qu'il a l'avantage de prévenir les abus et de protéger les citoyens contre des plaintes qui pourraient être portées, alors qu'il n'y a pas suffisamment de preuve, ou pas de preuve du tout.

mardi 28 février 2012

Le ressort du juge de paix prévu à l'article 504 Ccr signifie la province du juge de paix

R. v. Ellis, 2009 ONCA 483 (CanLII)

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[38] In my view, “territorial jurisdiction” in s. 504 of the Criminal Code refers to the entire province of Ontario.

[39] Pursuant to s. 17(1) of the Justices of the Peace Act, justices have jurisdiction throughout Ontario. The fact that the Courts of Justice Act divides Ontario into regions for administrative purposes does not alter the jurisdiction conferred on justices by s. 504 of the Criminal Code. As Aitken J. stated in Hackett at para. 15, “[t]he regions created under the Courts of Justice Act are created for administrative purposes related to the administration of justice in the province; they are not created for jurisdictional purposes.”

[40] Contrary to the Crown’s submission, interpreting “territorial jurisdiction” in s. 504 as the entire province of Ontario does not offend the principles of statutory interpretation. The Criminal Code is federal legislation, governing all of the provinces and territories. Adopting one interpretation for one province does not dictate such a result elsewhere in the country. In other parts of Canada, where legislative schemes governing the systems of court may be different, “territorial jurisdiction” may well have a different meaning. In my view, the phrase “territorial jurisdiction” in s. 504, like the definition of “territorial division” in s. 2 of the Criminal Code, provides the flexibility necessary to accommodate provincial and territorial differences: see Hackett at para. 10. Accordingly, interpreting “territorial jurisdiction” in s. 504 to mean the province of Ontario does not necessarily render that phrase redundant simply because the word “province” is used elsewhere in that section.

[43] I agree with the Crown that there are good administrative reasons to have cases that arise in a particular region tried in that region. However, I do not accept that interpreting “territorial jurisdiction” as the province of Ontario for the purposes of s. 504 of the Criminal Code offends this principle. The fact that an information is received in a particular region does not mean that any resulting criminal trial must take place in that region. Indeed, as Gentles makes clear, it does not necessarily mean that a pre-inquiry must proceed in that region.


[48] Finally, to the extent that the Crown’s opposition to a broad interpretation of “territorial jurisdiction” in s. 504 is based on a concern about forum shopping, I would simply add this. Section 504 is administrative in nature – as long as the preconditions are met, the justice must receive the information. Any concerns about forum shopping can surely be addressed at a later stage in the process: see Gentles at paras. 21, 33.

samedi 30 octobre 2010

L'état du droit concernant l'assermentation d'une dénonciation

R. c. Carrière, 2010 QCCQ 1524 (CanLII)

[43] L'assermentation d'une dénonciation par le juge de paix qui la reçoit est une procédure essentielle à la validité de celle-ci.

[44] Le serment prêté devant le juge de paix commence les procédures.

[45] La sommation n'a pas à être signée par le même juge de paix que celui qui a reçu la dénonciation sous serment.

[46] Une dénonciation non assermentée est de nullité absolue. Si une dénonciation a été assermentée, mais que le juge de paix a omis de l'indiquer sur celle-ci, cela ne la rend pas nulle.

[47] Dans Société Radio-Canada c. Montréal (Communauté urbaine) Service de police, [2000] J.Q. no. 1936 (C.S.), le juge Béliveau rappelle que la preuve testimoniale de l'assermentation d'un dénonciateur peut corriger l'erreur cléricale de ne pas avoir coché que cela avait été fait.

[48] Une dénonciation signée par le dénonciateur et le juge de paix et dont la case indique que l'assermentation a eu lieu doit être présumée valide. Celui qui prétend que la dénonciation n'a pas été assermentée doit renverser la présomption par la balance des probabilités.

[49] En l'espèce, le requérant doit donc établir par la balance des probabilités que l'assermentation n'a pas eu lieu malgré que l'agent Trudel et le juge de paix Garneau ont coché qu'elle avait eu lieu, s'il veut invoquer la nullité de la dénonciation.

[50] On peut faire état de deux décisions où on a conclu à l'absence d'assermentation même dans le cas où la preuve avait été faite que la procédure normale et habituelle était d'assermenter les dénonciateurs.

[51] Ainsi dans R. c. Tremblay, [1999] J.Q. no. 610, le juge Provost conclut que la preuve établit l'absence d'assermentation alors qu'aucune des cases prévues pour l'assermentation n'est cochée, même si la juge de paix, tout en admettant avoir oublié de cocher, affirme qu'elle procède toujours à l'assermentation des dénonciateurs bien qu'elle ne pouvait pas s'en souvenir précisément cette journée-là.

[52] Dans R. c. Côté, [2009] J.Q. no. 3900 (C.S.), le juge Brunton analyse la situation d'une dénonciation qui, à première vue, n'est pas assermentée en ce qu'aucune case n'est cochée et que le nom et la signature du juge de paix n'apparaissent nulle part. La dénonciation porte un nom de dénonciateur, mais le nom du dénonciateur et la date ont été changés. Le dénonciateur dont le nom apparaît explique quant à lui que, par sa façon normale de travailler, il peut être certain que chaque dénonciation est assermentée. Tout en voyant là un ensemble d'éléments qui font de ce cas un cas d'espèce où il n'y a pas lieu d'intervenir dans la décision du juge de première instance de conclure à l'absence d'assermentation, le juge Brunton n'endosse pas la position de ce dernier quant à son affirmation qu'un récit sur la façon de travailler d'une personne ne puisse être suffisant pour combler l'omission d'une signature.

[53] La définition de serment que fournit l'art. 35 de la Loi d'interprétation prévoit que les formulations comportant les verbes « déclarer » ou « affirmer » équivalent à l'expression sous serment lorsque la déclaration ou l'affirmation solennelle peut tenir lieu de serment. J'en comprends qu'il s'agit là d'un minimum requis.

Le dédommagement à la victime doit toujours être envisagé lors de la détermination de la peine

Comment le Tribunal doit se gouverner face à la demande d'un co-accusé d'avoir un procès séparé de ses complices

R. v. Zvolensky, 2017 ONCA 273 Lien vers la décision [245] It is difficult to underestimate the importance of a principled, case-specific ap...