R. c. Fisher, 2005 BCCA 444
Lien vers la décision
(3) Pour l’application de la présente loi :
a) une personne est en possession d’une chose lorsqu’elle l’a en sa possession personnelle ou que, sciemment :
(i) ou bien elle l’a en la possession ou garde réelle d’une autre personne,
(ii) ou bien elle l’a en un lieu qui lui appartient ou non ou qu’elle occupe ou non, pour son propre usage ou avantage ou celui d’une autre personne;
b) lorsqu’une de deux ou plusieurs personnes, au su et avec le consentement de l’autre ou des autres, a une chose en sa garde ou possession, cette chose est censée en la garde et possession de toutes ces personnes et de chacune d’elles.
[20] La possession peut donc être une possession personnelle, une possession de droit, ou une copossession. Dans un extrait souvent cité de l’arrêt Rex c. Hess (No. 1) (1948), 1948 CanLII 349 (BC CA), 94 C.C.C. 48, 8 C.R. 42 [cité au C.C.C.], aux par. 50 et 51 (C.A.C.-B.), sur la possession personnelle d’un stupéfiant, le juge d’appel O’Halloran a déclaré ce qui suit :
[TRADUCTION]
Pour constituer la « possession » au sens du droit pénal, il faut, à mon sens, que lorsqu’il y a, comme en l’espèce, manipulation d’une chose, il y a en même temps connaissance de la nature de la chose, et ces deux éléments doivent exister ensemble avec un certain acte de contrôle (hormis le cas de l’obligation publique). Lorsque ces trois éléments existent ensemble, je pense que l’on doit concéder que, en vertu de l’art. 4(1)d), il n’importe pas alors que la chose soit détenue pour une fin innocente.
Selon Beaver c. The Queen, 1957 CanLII 14 (SCC), [1957] R.C.S. 531, 118 C.C.C. 129 [cité au C.C.C.], à la p. 140, il s’agit d’un énoncé correct du droit.
[21] Dans Rex c. Colvin and Gladue (1942), 1942 CanLII 245 (BC CA), 78 C.C.C. 282, 58 B.C.R. 204 [cité au C.C.C.], notre Cour s’est penchée sur le sens du terme [TRADUCTION] « consentement » dans le contexte de la copossession ainsi qu’il est employé dans un prédécesseur de l’al. 4(3)b). Dans cette affaire, les deux accusés se trouvaient avec un tiers dans la chambre de ce dernier où il y avait aussi de la morphine. Au procès, ils ont été acquittés au motif que, bien qu’ils aient su qu’il y avait de la drogue dans la pièce, il incombait au ministère public de démontrer qu’ils avaient le droit d’exercer un certain contrôle à son égard et leur simple acquiescement n’établissait pas ce droit. Le juge d’appel O’Halloran a fait la déclaration suivante à la p. 287 lorsqu’il a confirmé leur acquittement :
[TRADUCTION]
[...] « la connaissance et le consentement » ne peuvent exister sans qu’il y ait en même temps un certain contrôle sur le bien en cause. S’il y a pouvoir de consentir, il y a également pouvoir de refuser et vice versa. Dans l’un ou l’autre cas il existe un pouvoir ou une autorité appelé ici contrôle, sans quoi la nécessité d’exercer ces pouvoirs ne pourrait ni se présenter ni être invoquée.
Cet extrait a été homologué dans R. c. Terrence, 1983 CanLII 51 (CSC), [1983] 1 R.C.S. 357, 4 C.C.C. (3d) 193 [cité au C.C.C.], à la p. 198. Dans cet arrêt, un passager qui avait accepté de prendre place dans une voiture volée avec le voleur avait été accusé de possession d’un bien volé. Il a été reconnu coupable, mais sa déclaration de culpabilité a été annulée au motif que le ministère public n’avait pas démontré qu’il y avait copossession étant donné qu’il n’avait pas établi que l’appelant avait exercé un certain contrôle sur la voiture. Lorsqu’il a rejeté un autre appel, le juge Ritchie, s’exprimant au nom de la cour, a fait la déclaration suivante, à la p. 198 :
[TRADUCTION]
[...] un des éléments essentiels constitutifs de la possession au sens [de l’al. 4(3)b)] du Code criminel est un certain contrôle sur le bien en cause de la part de la personne réputée être en possession aux termes de cet article.
[22] La question du sens attribué au contrôle dans le cadre d’une allégation de possession de droit d’un stupéfiant a été soumise à notre Cour dans R. c. Smith (1973), 1973 CanLII 1546 (BC CA), 10 C.C.C. (2d) 384, [1973] 3 W.W.R. 81 [cité au C.C.C.]. La police a trouvé l’accusé écrasé au sol dans une cabine de toilette publique. La porte de la cabine était ouverte. La police a trouvé des capsules d’héroïne et des articles pour la consommation de drogues sur le réservoir de la toilette. L’appelant avait nombre de marques d’aiguilles sur son bras, dont une récente. Lorsqu’il a rejeté un appel interjeté à l’encontre de la déclaration de culpabilité, le juge d’appel Taggart a, aux pages 390 et 391, (le juge d’appel Bull souscrivant aux motifs), adopté l’extrait suivant tiré des motifs du juge d’appel Allen, de la Cour suprême de l’Alberta (Division d’appel), dans R. c. Caldwell (1972), 1972 ALTASCAD 33 (CanLII), 7 C.C.C. (2d) 285, [1972] 5 W.W.R. 150 [cité au C.C.C.], à 29091, et a dit qu’il s’appliquait à la possession de droit :
[TRADUCTION]
[...] alors que la possession visée par la définition prévue au Code criminel est une question qui doit être tranchée suivant les faits de chaque cause, lorsque les biens en question ne sont pas en la possession physique d’un accusé, pour constituer une possession de droit elle doit aller au-delà de la connaissance passive et faire état d’un certain contrôle ou droit de contrôle sur les biens.
Voir le juge d’appel Bird dans R. c. Bunyon (1954), 1954 CanLII 423 (BC CA), 110 C.C.C. 119, à la p. 123; le juge Cartwright (tel était alors son titre) dans Beaver c. The Queen, [1957 CanLII 14 (SCC), 118 C.C.C. 129], à la p. 140; le juge d’appel O’Halloran dans R. c. Colvin and Gladue (1942), 1942 CanLII 245 (BC CA), 78 C.C.C. 282, [1943] 1 D.L.R. 20, [1942] 3 W.W.R. 465; et le juge d’appel Roach dans R. c. Lou Hay Hung (1946), 1946 CanLII 118 (ON CA), 85 C.C.C. 308, [1946] 3 D.L.R. 111, [1946] O.R. 187.
Le juge d’appel Branca était dissident, mais seulement quant à la question de savoir si la preuve faisait état du contrôle nécessaire.
[24] Comme il appert de mon résumé du droit, ni la possession de droit ni la copossession ne nécessite une preuve de manipulation. Pour établir qu’il y avait possession de droit, il incombait au ministère public de prouver hors de tout doute raisonnable que l’appelant était au fait de la présence de la cocaïne et qu’il avait un certain contrôle sur son emplacement. Pour établir qu’il y avait copossession, il incombait au ministère public de démontrer qu’une personne autre que l’appelant avait possession de la cocaïne, à sa connaissance et avec son consentement, et qu’il avait un certain contrôle sur la cocaïne.