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jeudi 10 octobre 2024

Une preuve circonstancielle peut démontrer hors de tout doute raisonnable que l’arme utilisée lors d'une infraction répond à la définition d’une arme à feu

R. v. Willis, 2007 ONCJ 605

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[31]      I agree with Mr. Genua’s submission that where a firearm is not recovered, the case law requires more than just a reference in conversation to a gun, or a mere depiction of one in an image, in order to come to a reasonable conclusion that the gun is an operable firearm.  Other factors such as the circumstances of its use, its description, the conversation or images surrounding its possession, or any expert evidence tendered must permit a jury to conclude beyond a reasonable doubt that it was a real firearm.  In short, the totality of the circumstances and evidence must be taken into account.  In this regard, I have considered the following cases provided by the Crown and defence:  R. v. Charbonneau, 2004 CanLII 9527 (ON CA)[2004] O.J. No. 1503 C.A.); R. v. Richards, 2001 CanLII 21219 (ON CA)[2001] O.J. No. 2286 (C.A.);  R. v. Abdullah, [2006] O.J. No. 3936 (C.A.);  R. v. Carlson, [2002] O.J. No. 1884 (C.A.)R. v. Fakomi et al. (unreported decision of Hackett J., Ontario Court of Justice, released February 28, 2007) and upheld on review by Trafford J. in R. v. Campbell, [2007] O.J. No. 2578 (S.C.J.);  R. v. Wilson, [2006] O.J. No. 3065 (O.C.J., Lipson J.)R. v. Mills, [2001] O.J. No. 3675 (S.C.J.)R. v. Guzzo, 2007 CanLII 36639 (ON SC)[2007] O.J. No. 3306 (S.C.J.);  R. v. Sibbeston, 1991 CanLII 13201 (NWT SC)[1991] N.W.T.J. No. 85 (S.C.); and R. v. Osiowy, [1997] A.J. No. 98 (C.A.).

 

[32]      I agree with Lipson J. in the Wilson case that the principle which emerges from the case law was succinctly stated by Eberhard J. in R. v. Mills when he said:

 

            Where all the circumstances lead to an inference that the item looking like a firearm is a

firearm, it is open to the trier of fact to draw such an inference.

Une preuve circonstancielle peut permettre de conclure qu’une arme non expertisée est une arme à feu prohibée ou à autorisation restreinte

R. c. Boivin, 2024 QCCQ 5477

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[22]      En somme, afin qu’une arme soit qualifiée d’arme à feu prohibée ou à autorisation restreinte, la preuve doit établir, hors de tout doute raisonnable, les deux éléments qui suivent :

  L’arme est une arme à feu, en ce qu’elle est munie d’un canon qui permet de tirer du plomb, des balles ou tout autre projectile et en ce qu’elle est susceptible d’infliger des lésions corporelles graves ou la mort à une personne;

  L’arme est une arme de poing, en ce qu’elle est une arme à feu destinée, par sa construction ou ses modifications, à permettre de viser et tirer à l’aide d’une seule main.

[23]      En lien avec tous ces éléments, lorsque la qualification d’une arme non expertisée est l’objet d’un litige, comme en l’espèce, le test de l’œil de cochon ne s’applique pas. Dès lors, la jurisprudence et la doctrine enseignent qu’une preuve circonstancielle peut permettre de conclure qu’une arme non expertisée est une arme à feu prohibée ou à autorisation restreinte[12]. Voici le résumé de quelques décisions analysant une preuve circonstancielle au soutien de telles qualifications :

         Dans l’arrêt St-Pierre[13], notre Cour d’appel conclut que la preuve circonstancielle ne démontre pas la fonctionnalité d’une arme à titre d’arme à feu prohibée. Toutefois, elle réitère que le comportement d’un accusé à l’égard d’une arme à feu alléguée peut, en certaines circonstances, permettre de conclure qu’elle est fonctionnelle. Ainsi, dit-elle, la façon dont l’accusé manipule une arme lors de la commission d’une infraction, les propos qu’il tient en présence de témoins et sa participation à des activités criminelles sont autant d’éléments qui sont retenus par les tribunaux au moment de conclure au bon fonctionnement d’une arme à feu[14];

         Dans l’arrêt Robbie[15], la Cour d’appel d’Alberta renverse un verdict d’acquittement à l’égard d’une infraction reprochant l’utilisation d’une arme à feu durant la perpétration d’une autre infraction. Elle conclut que l’arme utilisée répond à la définition d’arme à feu, selon une preuve circonstancielle prima facie, non démentie, en recensant les indices qui suivent. L’accusé séquestre sa conjointe et place d’abord un couteau sous sa gorge. Il récupère ensuite un fusil, puis des munitions, et le charge. Laissant de côté le couteau, il utilise ensuite le fusil pour intimider sa conjointe, pendant plusieurs heures. Après avoir chargé l’arme, il discute de ses préarrangements funéraires, ce qui permet d’inférer que le fusil est fonctionnel;

         Dans l’arrêt Lay[16], la Cour d’appel d’Alberta conclut que l’arme pointée vers des agents correctionnels dans le contexte d’une extorsion est une arme de poing, s’agissant de la seule inférence logique émanant de la preuve, en raison des circonstances suivantes : d’abord, les agents croient avoir vu une véritable arme à feu; de plus, lors d’une conversation enregistrée entre l’accusé et sa conjointe pour planifier son évasion d’une prison, il lui demande si elle a vu son « boom stick »; sa conjointe répond positivement, ajoutant que l’arme est comme celle qu’elle a vue au club de tirs;

         Dans l’arrêt Abdoulkader[17], la Cour d’appel de l’Ontario conclut que l’arme braquée lors d’un vol qualifié dans une banque est une arme de poing véritable, et non une imitation, puisqu’une employée l’a cru, la décrivant comme étant noire lustrée et en métal, puis ayant entendu l’accusé charger l’arme (« rack the gun »);

         Dans l’affaire Alberts[18], une Cour de justice de l’Ontario conclut qu’une arme qui a toutes les apparences d’une arme à feu répond à la définition du Code, puisqu’elle est saisie en même temps que des munitions trouvées au même endroit, que l’accusée la décrit à un agent comme une petite arme à feu, et non comme une imitation ou une arme non fonctionnelle, qu’elle transporte pour sa protection. Le juge précise ceci : « Its protective value would be highly limited if it was not capable of discharging the ammunition that it was found in association with. »;

         Dans l’arrêt Carlson[19], la Cour d’appel de l’Ontario conclut que les éléments de la preuve supportent raisonnablement la qualification d’une arme de poing à titre d’arme à feu véritable, puisque durant le vol qualifié, l’accusé brandit l’arme, la braque derrière la tête du commis en criant « hold-up » et en demandant l’argent; plusieurs témoins la décrivent petite et noire, munie d’un canon de 6 à 8 pouces; enfin, selon un complice et son épouse, l’accusé avait accès à des armes;

         Dans l’arrêt Charbonneau[20], la Cour d’appel de l’Ontario conclut que l’arme utilisée par l’accusé est une arme à feu véritable, parce que la victime l’a cru, la décrit comme telle, en expliquant que l’accusé la tenait et se comportait comme s’il s’agissait d’une arme fonctionnelle, en la menaçant de tirer. De plus, la cour note l’absence d’une preuve contraire;

         Dans Ranieri[21], la Cour d’appel de l’Ontario conclut que l’arme pointée par l’accusé est une arme à feu, la preuve suffisant à l’inférer en raison de la description qu’en font les témoins, qui l’ont vu être chargée, de la violence de l’agression et des menaces proférées, dont celle voulant que l’accusé mentionne qu’il reviendra dans quelques jours les tuer dans leurs résidences;

         Dans l’arrêt O.A.[22], la Cour d’appel de l’Ontario, après avoir considéré une vidéo de surveillance montrant l’appelant pointer ce qui ressemble à une arme de poing vers un véhicule, la version d’un témoin qui affirme avoir entendu un bruit qui ressemble à un tir d’arme à feu, une vidéo montrant la foule se disperser rapidement par la suite et la découverte de marques sur le véhicule qui aurait été la cible du tir, cohérentes avec l’impact d’une balle de fusil, conclut que la seule inférence raisonnable possible dans les circonstances est la culpabilité de l’accusé au regard des infractions reliées aux armes à feu qui lui sont reprochées;

         Enfin, dans l’arrêt Gordon[23], la Cour d’appel de l’Ontario conclut que le juge peut inférer que l’accusé brandit une arme à feu lorsqu'au cours d’un vol qualifié, pour maîtriser les victimes, il pointe un objet qui ressemble à une arme à feu en leur direction et menace de tirer, puis que les victimes croient qu'il s'agit d'une vraie arme à feu et que les voleurs agissent comme si c'était le cas.

Une preuve circonstancielle peut démontrer que l'arme utilisée lors de la perpétration d'une infraction est une arme à feu en l’absence d’une preuve contraire

R. v. Charbonneau, 2004 CanLII 9527 (ON CA)

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[3]               It is true that the complainant was equivocal on the question of whether she could tell for certain whether the gun was real or fake.  However, the trial judge also had before him the evidence of the complainant’s clear belief that it was a gun, her description of the object, the appellant’s conduct in relation to it and his use of it together with the appellant’s threat to shoot while holding it.  Moreover, there was a complete absence of evidence to the contrary.  Taken together, this is a sufficient foundation for the trial judge’s finding that it was a handgun.

dimanche 6 octobre 2024

Est-ce qu'un feu d’artifice est une arme à feu au sens de l’article 2 du Code criminel

R. c. Lavoie, 2024 QCCQ 3591

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[30]        Chefs 1 et 4 : Le poursuivant a‑t‑il fait une preuve hors de tout doute raisonnable que le feu d’artifice que l’accusée tient à la main en pointant les policiers situés en dessous du viaduc est une arme à feu au sens de l’article 2 du Code criminel?

[56]        Il est intéressant de noter que le fusil à balles de peinture (un paint gun) peut devenir une arme à feu au sens de l’article 2 du Code criminel[8]. Pourtant il est utilisé lors d’un jeu où on marque l’adversaire avec une tache de peinture pour l’éliminer.

[57]        Nulle personne raisonnable ne viendrait affirmer qu’il est évident que la bille propulsée à l’extérieur du canon du paint gun est susceptible de causer des lésions corporelles graves.

[58]        De ce fait, l’utilisation par un expert du test de l’œil de cochon pour établir la vélocité du paint gun semble la meilleure façon, voire la seule façon de faire la preuve hors de tout doute raisonnable qu’il peut causer des lésions corporelles graves ou la mort.

[59]        Qu’en est‑il du feu d’artifice? Dans Plasko[9], le juge semble dire que dans le cas du feu d’artifice, les lésions corporelles graves sont de connaissance judicaire: « such a contrivance which emits such fireballs is obviously capable of causing bodily injury directly. Fireball of the kind described could cause direct damage to eyesight, and fire by its nature can cause burns » et rejette l’idée qu’un témoin expert doive venir témoigner de ce fait.

[60]        Le Tribunal ne croit pas avoir à statuer quant à la connaissance judiciaire qu’un feu d’artifice est susceptible de causer des lésions corporelles graves dans le présent dossier puisqu’un expert a témoigné à cet effet. Il est évident selon lui que le feu d’artifice peut causer des brûlures et des ecchymoses. Pour aller plus loin quant aux conséquences, plusieurs facteurs environnementaux seront pris en compte. Ça dépendra s’il fait froid ou encore s’il y a du vent, etc.

L’expert aurait‑il dû ajouter que la vélocité de l’arme est égale ou supérieure à 246 pieds par seconde afin que le poursuivant puisse prétendre avoir fait une preuve hors de tout doute raisonnable de lésions corporelles graves?

[61]        Dans Simard[10], le juge Perreault doit trancher quant à un pistolet .177 et le poursuivant alléguait que l’arrêt Hills[11] avait tranché qu’en soi les fusils à balles BB entraient dans la définition d’arme à feu de l’article 2 du Code criminel; ce qui n’est absolument pas le cas; d’où sa référence à l’arrêt Hills[12] « qui souligne que les tribunaux recourent au test de l’œil de cochon ». [soulignements ajoutés]

[63]        Elle reprend le test de l’œil de cochon pour conclure qu’avec le résultat de ce test, il se pourrait :

[15]      […] qu’une personne délinquante soit déclarée coupable pour avoir utilisé des dispositifs qui, […] n’ont pas une puissance meurtrière, tels les fusils de paintball. Comme je l’explique, cette possibilité sous‑tend la fragilité constitutionnelle de la peine minimale obligatoire en litige dans la présente affaire.[14]

[64]        Le Tribunal comprend que reprenant l’arrêt Hills[15], le juge Perreault refuse l’allégation du poursuivant et lui rappelle qu’il lui appartient toujours de faire la preuve que l’objet peut causer des lésions corporelles graves afin qu’il puisse déclarer qu’il s’agit d’une arme à feu. Il ne dit pas qu’un test de vélocité doit être fait dans tous les cas ou encore si le test de l’œil de cochon est le seul moyen de faire la preuve de lésions corporelles graves.

[65]        À noter que dans Simard[16], aucune preuve n’avait été présentée relativement aux lésions possibles.

[66]        La poursuite a plaidé que ce n’est pas le Code criminel qui a exigé le test de l’œil de cochon, et de prouver la vélocité du projectile pour conclure aux lésions corporelles graves. Ce sont plutôt les tribunaux qui ont accepté cette manière d’en faire la preuve.

[67]        En effet, il n’en est aucunement question à l’article 2 du Code criminel. Les seules mesures trouvées sont à l’article 84(3) du Code criminel qui définit les « Armes réputées ne pas être des armes à feu » et s’appliquent aux infractions prévues aux articles 91 à 9599 à 101103 à 107 et 117.03 du Code criminel et aux dispositions de la Loi sur les armes à feu.

[69]        On peut donc se retrouver avec un pellet gun qui remplira la définition de l’article 2 du Code criminel mais qui pourra être obtenu librement sans avoir besoin d’obtenir un permis[17].

[70]        De cet article, le Tribunal ne peut faire un lien avec l’obligation ou non de procéder uniquement avec le test de l’œil de cochon pour faire une preuve hors de tout doute raisonnable de lésions corporelles graves. L’utilisation d’un test de vélocité est toutefois un excellent moyen de présenter une preuve convaincante.

[71]        Dans Eyre[18], l’accusé avait été condamné pour avoir possédé une arme prohibée, soit une réplique d’arme alors qu’il lui était interdit de le faire.

[72]        L’accusé plaidait qu’il ne s’agissait pas d’une réplique, mais bel et bien d’une arme à feu (pellet gun). Vu la nature de l’accusation, il appartenait au poursuivant de faire la preuve qu’il s’agissait d’une réplique au sens de l’article 84(1) du Code criminel et dès lors devait faire la preuve que l’arme saisie ressemblait avec grande précision à une arme à feu et qu’elle ne pouvait pas causer des lésions corporelles graves ou la mort, soit le contraire de ce qui doit être fait dans le dossier de l’accusée Lavoie.

[73]        Un policier expérimenté, un caporal, a témoigné à l’effet qu’il s’est servi du Firearms Reference Table (FRT) pour affirmer que « this pellet gun is classified as exempt from being a firearm in Canada due to the muzzle velocity of the pellets ». Le FRT est une base de données développée par la GRC pour assister les agents chargés de l’application de la loi.

[74]        Le juge Frankel écrivant pour la Cour, mentionne :

[30]      […] To prove a particular pellet gun is a firearm the Crown will often tender evidence from an expert who test‑fired that gun to establish that it has a muzzle velocity sufficient to cause serious bodily injury or death: see […]

[31]      It is open to the Crown to prove a pellet gun is not capable of causing serious bodily injury or death other than by tendering opinion evidence from an expert who test‑fired that gun. […][19]

[soulignements ajoutés]

[75]        Il apparaît donc clair qu’il n’y a nul besoin de faire le test de l’œil de cochon pour établir la vélocité et conclure affirmativement ou négativement aux lésions corporelles graves, bien que ce fut souvent le choix du ministère public de procéder de cette façon.

[76]        Pour clore avec Eyre[20] : au procès, le ministère a tenté de prouver ce fait au moyen d’un rapport d’un expert qui a fondé son opinion uniquement sur les informations contenues dans le FRT et le ministère public a admis que le policier ne s’est pas prononcé sur la vitesse réelle du canon à plombs ou sur sa capacité à causer des blessures.

[78]        Bien que la meilleure façon dans certains cas soit de procéder via le test de l’œil de cochon, d’où son utilisation régulière, le Tribunal conclut que ce n’est pas une obligation; la seule étant de prouver hors de tout doute raisonnable les lésions corporelles graves ou la mort.

Le témoignage de l’expert au présent dossier permet‑il de conclure à des lésions corporelles graves?

[79]        Dans la Collection de droit du Barreau[22], où il est précisé que l’arrêt McCraw[23] peut aider à comprendre ce que signifie l’expression « lésions corporelles graves », il est suggéré de retenir « toute blessure ou lésion qui nuit d’une manière sérieuse ou importante à l’intégrité physique ou au bien‑être du plaignant ». Ces blessures pouvant être tant physiques que psychologiques.

[80]        Vu les conclusions du rapport de l’expert et de son témoignage quant aux blessures susceptibles d’être causées par le feu d’artifice, le Tribunal conclut que dans le présent dossier le feu d’artifice est susceptible d’infliger des lésions corporelles graves au sens de l’article 2 du Code criminel. L‘ajout du qualificatif « graves » met l’accent sur le sérieux des blessures. Suivant les enseignements pertinents de McCraw[24], le Tribunal conclut que des brûlures et des ecchymoses nuisent de manière sérieuse ou importante à l’intégrité physique ou au bien‑être du plaignant.

[82]        Preuve est faite hors de tout doute raisonnable que le feu d’artifice est une arme à feu au sens de l’article 2 du Code criminel. Preuve est également faite que cette arme à feu a été braquée sur des agents de la paix (article 87(2)a) C.cr.) et que l’accusée a dissimulé une arme à feu au sens de l’article 90(2)a) du Code criminel.

Le dédommagement à la victime doit toujours être envisagé lors de la détermination de la peine

La théorie de l'objet à vue (plain view)

R. c. McGregor, 2023 CSC 4   Lien vers la décision [ 37 ]                          L’admission des éléments de preuve inattendus découverts ...