R. c. L'Écuyer, 2010 QCCQ 9173 (CanLII)
[15] La communication de la preuve est un élément essentiel dans l’application du droit criminel. Dans R. c. Taillefer, on mentionne :
P. 313 : « Dégagée par une jurisprudence née de la common law, explicitée à l’aide des principes constitutionnels de la Charte canadienne des droits et libertés, consacrée par l’arrêt prononcé par notre Cour dans R. c. Stinchcombe, [1991]3 R.C.S. 326, cette obligation a pris rang parmi les règles essentielles de la procédure pénale canadienne. Elle facilite le déroulement du procès, mais, d’abord, contribue à assurer la protection du droit des prévenus à une défense pleine et entière. D’ailleurs, dans le passé, une conception de la divulgation de la preuve comme un acte de bonne volonté et de coopération du ministère public a contribué à des erreurs judiciaires désastreuses. À ce propos, il suffit de rappeler que la Commission royale sur la poursuite de Donald Marshall Jr. a identifié l’omission de divulguer toute la preuve pertinente comme l’une des causes de l’erreur judiciaire qui a privé Donald Marshall de sa liberté durant 11 ans pour un crime qu’il n’avait pas commis (Royal Commission on the Donald Marshall, Jr., Prosecution : Findings and Recommendations (1989), vol. 1, p. 238 et suiv.). »
[16] Les principes généraux de la communication de la preuve se retrouvent dans l’arrêt R. c. Stinchcombe. De cette décision, on peut retenir entre autres les principes suivants :
« La divulgation de la preuve fait partie du droit de l’accusé de présenter une défense pleine et entière selon l’article 7 de la Charte.
La poursuite a l’obligation de divulguer tous les renseignements pertinents.
La poursuite a l’obligation de divulguer tout fait substantiel connu de la poursuite qui soit favorable ou non à l’accusé (si le ministère public pèche, ce doit être par inclusion).
Il est bien entendu que l’obligation de divulguer n’est pas absolue. La poursuite peut refuser de divulguer certains documents pour absence de pertinence. »
[17] Quant à la pertinence, la Cour Suprême mentionne à la page 345 :
« Si les renseignements présentent une certaine utilité, alors ils sont pertinents et c’est à la défense et non à la poursuite de décider s’il s’agit d’une utilité suffisante pour qu’ils soient produits en preuve. »
[18] La Cour mentionne de plus à la page 339 :
« Si le ministère public pèche, ce doit être par inclusion. Il n’est toutefois pas tenu de produire ce qui n’a manifestement aucune pertinence. »
[19] Dans R. c. Taillefer, déjà cité, à la page 334, la Cour Suprême s’exprime ainsi :
« Les règles encadrant l’obligation de divulgation de la preuve incombant au ministère public, après une période de développement graduel par les cours d’appel provinciales dans les dernières décennies, ont été précisées et consolidées par notre Cour dans l’arrêt Stinchcombe. Ces règles se résument en quelques propositions. Le ministère public doit divulguer à l’accusé tous les renseignements pertinents, qu’ils soient inculpatoires ou disculpatoires, sous réserve de l’exercice du pouvoir discrétionnaire du ministère public de refuser de divulguer des renseignements privilégiés ou encore manifestement non pertinents. La pertinence s’apprécie tant à l’égard de l’accusation elle-même que des défenses raisonnablement possibles. Les renseignements pertinents doivent être divulgués, que le ministère public ait ou non l’intention de les produire en preuve et ce, avant que l’accusé n’ait été appelé à choisir son mode de procès ou à présenter son plaidoyer. »
[20] Dans R. c. Chaplin, la Cour Suprême mentionne à la page 743 :
« Par pertinence, il faut entendre qu’il y a possibilité raisonnable que ces renseignements puissent aider l’accusé à présenter une défense pleine et entière. »
[21] Dans R. c. Dixon, la Cour citait à la page 257 l’arrêt R. c. Egger, [1993]2 R.C.S. 451 sur la pertinence, page 467 :
« Une façon de mesurer la pertinence d’un renseignement dont dispose le ministère public est de déterminer son utilité pour la défense. S’il y a une certaine utilité, il est pertinent et devrait être divulgué – Stinchcombe précité à la page 345. Le juge qui effectue le contrôle doit déterminer si l’accusé peut raisonnablement utiliser la communication des renseignements pour réfuter la preuve et les arguments du ministère public, pour présenter un moyen de défense ou autrement pour parvenir à une décision susceptible d’avoir un effet sur le déroulement de la défense comme par exemple de présenter ou non une preuve. »
[22] Plus loin, à la page 257, la Cour mentionne :
« Manifestement, le critère préliminaire fixé pour la divulgation est fort peu élevé et par conséquent, une vaste gamme de documents qu’ils soient disculpatoires ou inculpatoires sont assujettis à la communication. »
Page 258 : « Ainsi, lorsque l’accusé démontre l’existence d’une possibilité raisonnable que les renseignements non divulgués auraient été utilisés pour réfuter la preuve du ministère public, pour présenter un moyen de défense ou par ailleurs, pour prendre une décision qui aurait pu avoir une incidence sur la façon de présenter la défense, il se trouve également à établir l’existence d’une atteinte aux droits à la divulgation que garantit la charte. »
Page 258 : « Le droit à la communication de tous les documents pertinents est large et vise les documents qui peuvent n’avoir qu’une importance secondaire par rapport aux questions fondamentales au litige. »
Page 260 : « Pour réduire au minimum le risque de non-divulgation par inadvertance, le ministère public pourrait bien choisir de divulguer même les déclarations de témoins qui ne semblent pas pertinents au départ. Évidemment, la défense connaît mieux sa preuve que le ministère public et quelque chose qui semble non pertinent au ministère public pourrait avoir de l’importance pour la défense. »
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