mercredi 20 avril 2011

Est-ce que le refus de fournir un échantillon d'haleine doit être formel et irrévocable?

R. c. Lessard, 2008 QCCQ 1392 (CanLII)

[107] Sur cette question, deux approches distinctes ont été établies par les tribunaux. Une première est à l’effet que dès qu’il y a refus communiqué par l’accusé, l’infraction est commise. Ainsi, dans l’arrêt la Reine c. Rowe, il est écrit :

“In my opinion the answer to the question propounded by the stated case ought to have been answered in the negative, and I base that on what is to me the clear language of section 235(2) itself. That section does not speak of final refusal or any other kind of refusal; it speaks of a refusal.”

[108] D’autres décisions procèdent à une analyse plus contextuelle et parleront de refus formel et irrévocable. Ainsi, seront considérés les circonstances du refus, le délai écoulé entre la sommation et l’acceptation de même que la disponibilité de l’appareil et du technicien.

[109] L’auteur Karl-Emmanuel Harrison écrit :

« Une personne ne commet une infraction de refus d’obtempérer à un ordre de fournir un échantillon d’haleine nécessaire pour une analyse convenable de l’alcoolémie tant qu’elle n’a pas refusé de manière claire par des paroles ou des gestes. (…)

Dans le cas ou une personne énonce un changement d’idée dans un court laps de temps par rapport à ce qui, à première vue, pouvait être considéré comme un refus, et que rien n’empêche de réaliser la prise de l’échantillon d’haleine, le Tribunal doit examiner de manière conciliante les circonstances. »

[110] Puis, il cite le juge McDonald dans l’arrêt R. c. Bowman[11] :

“There can be no doubt that the recipient of a demand is entitled to reasonable time in which to decide whether or not he is going to comply. Once, however, he decides he is not going to comply with the demand and makes such decision known to the peace officer the offence of refusal is complete. It is no defence to the charge that he later changed his mind and offered to supply a breath sample. I would, however, add to the foregoing the following caveat. If a person refused to comply with a s. 235(1) demand but immediately thereafter indicated a change of mind and a willingness to take the test then since the refusal and the subsequent change of heart occurred almost simultaneously, both really comprise the reply of the demand, i.e., form one transaction, and there would not therefore, in my view, be a refusal in law.”

[111] Ainsi, quand tout se passe dans un très court laps de temps, dans un flot quasi-ininterrompu, il y a lieu de considérer l’acceptation faite après avoir exprimé en tout premier lieu un refus. Qu’en est-il des faits dans le présent dossier? Tous les témoins indiquent qu’après la poursuite qui venait d’avoir lieu, tout le monde était sous pression et quelque peu énervé. L’agente Caron indiquera elle-même avoir adopté un ton de voix « extrême » avec l’accusé. L’accusé, lui, rapporte qu’elle criait après lui. Sitôt les demandes faites et les refus exprimés, l’agent Petit s’adresse à l’accusé sur un ton de voix posé et immédiatement l’accusé accepte de se soumettre à ce test. Il est ici question de secondes. Le Tribunal croit sincère le changement d’opinion intervenu chez l’accusé. Le Tribunal ne peut écarter l’hypothèse que l’accusé ait tout d’abord refusé en réaction aux circonstances, soit la manière dont il avait été sommé. L’acceptation, si peu de temps après le refus, n’impliquait aucune démarche supplémentaire que celle qui aurait, de toute façon, dû être effectuée si l’accusé avait obtempéré à la première demande : l’accusé devait de toute façon être amené au poste, un technicien devait de toute façon être appelé. L’acceptation quelques secondes après le premier refus n’entraînait aucune démarche supplémentaire pour les policiers et/ou le technicien.

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