R. c. Bouchard, 2009 QCCQ 14454 (CanLII)
[30] L'article 254 (5) du Code criminel stipule ce qui suit :
(5) Omission ou refus d'obtempérer — Commet une infraction quiconque, sans excuse raisonnable, omet ou refuse d'obtempérer à un ordre donné en vertu du présent article.
[31] Selon le Tribunal, la version française du texte semble réductrice lorsque comparée à la version anglaise qui stipule :
(5) Failure or refusal to comply with demand — Everyone commits an offence who, without reasonable excuse, fails or refuses to comply with a demand made under this section.
[32] La version anglaise semble faire référence indirectement à un échec lorsque l'accusé se soumet au test. D'ailleurs dans l'affaire R. v. Schwartz, 2009 ABPC 120 (CanLII), 2009 ABPC 120[1], le juge fait cette nuance importante, lorsqu'il écrit au paragraphe 7 de son jugement :
As will be later discussed, there is no question that the accused failed to produce the required sample of his breath. He did not refuse to provide a sample, but his efforts were a failure.
[33] C'est exactement la situation dans le cas présent : l'accusé n'a pas refusé d'obtempérer à l'ordre de fournir un échantillon, il a échoué. En ce sens, il s'agit à la limite d'une omission.
[34] Dans la collection de droit du Barreau, à la page 143 du volume 12[2], les auteurs écrivent :
[…] Les éléments essentiels de l'infraction sont une sommation valide et un refus de se soumettre, auquel vient s'ajouter bien sûr l'intention de refuser. […]
[35] À la page 144, les auteurs complètent et écrivent :
L'article 254 (5) du C.cr. prévoit la possibilité pour l'accusé de faire valoir une excuse raisonnable à l'encontre d'une accusation lui reprochant d'avoir refusé d'obtempérer aux ordres de l'agent de la paix. Ce concept est distinct de la mens rea de l'infraction et de l'erreur de fait raisonnable.
[36] Ces deux extraits réfèrent à la cause Lewko, affaire dans laquelle la Cour d'appel de la Saskatchewan s'est prononcée sur les éléments essentiels de l'infraction en plus de déterminer quand entre en jeu la présentation de l'excuse raisonnable, le cas échéant. Ainsi, la Cour écrit au paragraphe 9 :
The elements of the offence that the Crown must prove beyond a reasonable doubt are three. First, the Crown must prove the existence of a demand having the requirements of one of the three types mentioned in ss. (2) and (3). Second, the Crown must prove a failure or refusal by the defendant to produce the required sample of breath or the required sample of blood (the actus reus). Third, the Crown must prove that the defendant intended to produce the failure (the mens rea).
The proof by the Crown of the three elements (and the defendant's questioning of that proof by combatting the allegations of the prosecution without introducing any further issue) may be looked upon as the first stage of the proceedings. Once the Crown has established the three elements of the offence in question, the defendant is presumed guilty and must be so found, unless the defendant raises a defence. That brings us to what may be looked upon as the second stage of the proceedings, namely, the presentation by the defendant of his/her justifications or excuses – his/her defences (I use the term "defence" in the narrow sense – for the distinction between the broad and the narrow senses see Glanville Williams, Textbook of Criminal Law (London: Stevens & Sons, 1983) (2d ed.) at 50-51.) In the case of the subject offence, a defendant is able to present not only a defence ordinarily cognisable by law, but a defence constituted by any excuse that is "reasonable". This is the effect of the use of the phrase " without reasonable excuse" in the context of s. 254 (5).
[37] Dans l'affaire Lewko, la Cour rétablit le jugement de première instance entre autres, en refusant l'argument de la défense à l'effet que le juge avait inféré la mens rea en appliquant la règle de prépondérance de la preuve. Le juge peut par inférence conclure hors de tout doute raisonnable, à la mens rea.
[38] L'analyse du Tribunal sur le caractère plausible de l'excuse raisonnable ne vient donc que s'il est convaincu hors de tout doute raisonnable que l'accusé a sciemment échoué ou refusé. C'est à dire s'il est convaincu que l'accusé avait la mens rea. Nous ne sommes pas en matière statutaire, de responsabilité stricte, faut-il le souligner.
[39] Si l'accusé argumente l'élément intentionnel, il n'a aucun fardeau de persuasion, il n'a qu'à soulever un doute suffisant. S'il avance une excuse raisonnable, il doit l'établir par prépondérance de preuve telle qu'explicitée par les auteurs à la page 154 :
Selon une jurisprudence majoritaire, le fardeau de démontrer l'excuse raisonnable repose sur l'accusé qui doit, le cas échéant, l'établir par prépondérance de preuve, et ce, bien que le législateur n'ait pas explicitement renversé le fardeau de la preuve quant à cette notion.
[40] La poursuite doit donc prouver hors de tout doute raisonnable :
a) un ordre valide en vertu de la loi;
b) l'échec de fournir l'échantillon d'haleine suffisant pour l'analyse (actus reus);
c) l'intention de l'accusé de causer cet échec (mens rea);
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