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dimanche 13 août 2023

La possibilité d’utiliser un appareil téléphonique portable (« cellulaire ») est-elle pertinente à l’évaluation du délai raisonnable avant d’avoir accès à un avocat?

 R. c. Tremblay, 2021 QCCA 24

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[35]      Cet appel doit échouer. En ce qui a trait à la première question, je suis d’avis que l’appelante veut amener la Cour à intervenir sur une question de fait sous-jacente à la question de droit qu’elle soulève. Comme j’en traiterai plus loin, le juge de la Cour du Québec a conclu, sur la base de la preuve et de l’ensemble des circonstances, qu’un appel téléphonique confidentiel et sécuritaire aurait été possible à la fois dans le véhicule de police et dans le véhicule de l’intimée ou, à tout le moins, que les policiers, dans les  circonstances, devaient envisager cette possibilité. Il s’agit de conclusions de fait qui n’ont rien à voir avec le droit et l’appelante ne peut contester, comme elle le fait, la conclusion du juge selon laquelle les raisons invoquées par les policiers étaient « théoriques » et constituaient donc de simples hypothèses et conjectures.

[39]      Notons d’entrée de jeu que l’importance de ce droit n’est plus à démontrer. Le droit à l’assistance d’un avocat prévu à l’alinéa 10 b) de la Charte vise à assurer un processus décisionnel et judiciaire équitable aux personnes arrêtées ou détenues en leur donnant la possibilité d'être informées des droits et des obligations que la loi leur reconnaît et, surtout, d'obtenir des conseils sur la façon d'exercer ces droits et de remplir ces obligations : Clarkson c. La Reine1986 CanLII 61 (CSC), [1986] 1 R.C.S. 383, à la p. 394; R. c. Manninen1987 CanLII 67 (CSC), [1987] 1 R.C.S. 1233, aux pp. 1242 et 1243; R. c. Bartle1994 CanLII 64 (CSC), [1994] 3 R.C.S. 173.

[40]      Détenue par les représentants de l'État, cette personne est désavantagée dans ses rapports avec celui-ci; privée de sa liberté, elle risque de s'incriminer. Le droit à l’assistance d’un avocat est donc primordial et permet aussi aux personnes ainsi détenues de ne pas se sentir totalement subordonnées au bon plaisir de la police. Comme l’écrit le juge Doherty dans R. v. Rover2018 ONCA 745 :

[45] The right to counsel is a lifeline for detained persons. Through that lifeline, detained persons obtain, not only legal advice and guidance, […] but also the sense that they are not entirely at the mercy of the police while detained. The psychological value of access to counsel without delay should not be underestimated.

[46]      Dans R. c. Taylor2014 CSC 50, [2014] 2 R.C.S. 495, la juge Abella écrit :

[24]      L’obligation d’informer le détenu de son droit à l’assistance d’un avocat prend naissance « immédiatement » après l’arrestation ou la mise en détention (Suberu, par. 41-42), et celle de faciliter l’accès à un avocat prend pour sa part naissance immédiatement après que le détenu a demandé à parler à un avocat. Le policier qui procède à l’arrestation a donc l’obligation constitutionnelle de faciliter à la première occasion raisonnable l’accès à un avocat qui est demandé. Il incombe au ministère public de démontrer qu’un délai donné était raisonnable dans les circonstances (R. c. Luong (2000), 2000 ABCA 301 (CanLII), 271 A.R. 368, par. 12 (C.A.)). La question de savoir si le délai qui s’est écoulé avant que l’on facilite l’accès à un avocat était raisonnable est une question de fait.

[47]      Par conséquent, non seulement la question de savoir si le délai peut être qualifié de raisonnable est une question de fait, mais en plus, c’est la poursuite qui a le fardeau de le démontrer. Elle doit donc le faire en se fondant sur la preuve, et non en fonction d’une règle immuable voulant que cela ne soit jamais « raisonnablement possible en pratique ».

[48]      Une question de fait s’analyse au regard de la preuve et non en se fondant sur des hypothèses que l’on voudrait étendre à tous les cas. La poursuite ne sera donc en mesure de se décharger de son fardeau qu’en démontrant que l’accès a été facilité à la première occasion raisonnable, selon les circonstances de l’affaire.

[50]      Je conviens que la présence d’un cellulaire ne constitue pas, en soi, une circonstance forçant les policiers à en permettre l’utilisation pour communiquer avec un avocat. Cette technologie ne répond pas dans tous les cas à la question de savoir quand survient la « première occasion raisonnable ». Elle demeure néanmoins une circonstance dont il faut tenir compte en répondant à cette question. Comme le rappelle la juge Abella dans Taylor, précité :

[28]      Toutefois, les policiers ont néanmoins l’obligation de donner à une telle personne accès à un téléphone dès que cela est possible en pratique, afin de réduire le risque d’auto incrimination accidentelle, ainsi que l’obligation de s’abstenir de tenter de lui soutirer des éléments de preuve tant qu’ils ne lui ont pas facilité l’accès à un avocat. L’alinéa 10b) ne crée pas le « droit » d’utiliser un téléphone précis, mais garantit effectivement à l’intéressé l’accès à un téléphone pour qu’il puisse exercer son droit à l’assistance d’un avocat à la première occasion raisonnable.

[51]      Dans ce même arrêt, qui porte lui aussi sur une arrestation pour conduite avec facultés affaiblies, la juge Abella rappelle l’importance de considérer l’ensemble des circonstances pour savoir si l’accès a été donné dans un délai raisonnable, certains cas pouvant justifier une attente plus longue :

[31]      […] Comme l’a souligné la Cour dans l’arrêt Bartle, les obligations qu’ont les policiers de donner effet aux droits garantis par l’al. 10b) sont nécessairement limitées lors de situations urgentes ou dangereuses. Mais nous ne sommes pas en présence de telles circonstances restrictives en l’espèce. […]

[32]      Les policiers ont l’obligation de permettre l’accès à un avocat dès que la chose est possible en pratique. Le fait de présumer, comme le suggère le juge du procès, qu’il est raisonnable de tarder à donner effet au droit à l’assistance d’un avocat pendant toute la période où l’accusé attend de recevoir un traitement médical à l’urgence d’un hôpital ainsi que pendant toute la durée de ce traitement, et ce, en l’absence de toute preuve des circonstances particulières en cause, compromettrait le respect de l’obligation constitutionnelle relative à l’accès « sans délai » à l’assistance d’un avocat.

[33]      Les cas traités en salle d’urgence ne constituent pas nécessairement tous des urgences médicales telles que les communications entre un avocat et un accusé ne sont pas raisonnablement possibles. Des droits constitutionnels ne sauraient être écartés sur la base de suppositions d’impossibilité pratique. L’existence d’obstacles à l’accès doit être prouvée — et non pas supposée —, et des mesures proactives sont requises pour que le droit à un avocat se concrétise en accès à un avocat.

[52]      De la même manière qu’un passage à l’hôpital n’autorise pas les policiers, dans tous les cas, à attendre la fin des traitements, l’attente, sur le côté de la route, n’autorise pas les policiers, dans tous les cas, à reporter au poste de police l’accès à l’avocat. Il en est de même du cellulaire : la loi n’oblige pas les policiers à en permettre l’utilisation. Elle les oblige plutôt à en tenir compte, comme de toutes les autres circonstances, au moment de prendre leur décision.

[53]      En somme, les hypothèses, les suppositions, telles celles évoquées par l’appelante (comme en a conclu le juge de la Cour du Québec), ne suffisent pas pour qu’elle se décharge de son fardeau qui consiste à prouver l’existence de véritables obstacles, comme une urgence, un danger, une règle de droit : R. c. Suberu2009 CSC 33, [2009] 2 R.C.S. 460; R. c. Strachan1988 CanLII 25 (CSC), [1988] 2 R.C.S. 980. Encore récemment, dans R. v. La2018 ONCA 830, la Cour d’appel de l’Ontario soulignait qu’il faut une preuve factuelle de circonstances particulières pour justifier un délai, de simples suppositions ne pouvant suffire :

[39] Those concerns must be circumstantially concrete. General or theoretical concern for officer safety and destruction of evidence will not justify a suspension of the right to counsel: R. v. Wu2017 ONSC 1003, 35 C.R. (7th) 101, at para. 78R. v. Patterson2006 BCCA 24, 206 C.C.C. (3d) 70, at paras. 41-42, and R. v. Proulx2016 ONCJ 352, at para. 47. Rather, the assessment of whether a delay or suspension of the right to counsel is justified involves a fact specific contextual determination: Wu, at para. 78.

[54]      Cela faisait d’ailleurs écho aux motifs de la juge Abella aux paragraphes 32 et 33 de Taylor, précités.

[55]      Notre cour a aussi rappelé la nécessité de circonstances « exceptionnelles » pour justifier un délai avant l’accès à un avocat dans R. c. Archambault2012 QCCA 20, paragr. 36, dont une menace à la sécurité des policiers ou du public, ou encore un risque imminent que des éléments de preuve soient détruits ou perdus ou encore qu'une autre opération policière en cours puisse être compromise.

[56]      L’appelante fait grand cas de l’utilisation du terme « sans délai » par le juge de première instance. Je ne comprends pas l’argument. C’est le texte même de l’alinéa 10 b) qui le prévoit : « […] avoir recours sans délai à l’assistance d’un avocat […] / […] to retain and instruct counsel without delay […] ». Évidemment, comme on l’a vu, selon la jurisprudence, « sans délai » signifie « à la première occasion raisonnable », mais je ne vois aucune indication dans le jugement de la Cour du Québec selon laquelle le juge n’aurait pas tenu compte de cette qualification.

La valeur d'un témoignage dépend de quatre facteurs

 R. v. Baldree, 2012 ONCA 138

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[43] The value of testimony depends on four factors:

(i) perception; (ii) memory; (iii) narration; and (iv) sincerity. Kenneth S. Broun et al., McCormick on Evidence, 6th ed. (St. Paul, MN: Thomson/West, 2006), 245, at p. 125


samedi 19 septembre 2020

Les principes de droit applicables à la preuve d’identification

 Amiri c. R., 2018 QCCA 417


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[30]        Comme la Cour l’écrivait dans R. c. Chrétien, « chaque témoignage comporte son lot d’imprécisions, de nuances, et parfois même d’incohérences ou de contradictions[3] », dont il appartient au juge qui entend un procès de faire l’évaluation.


[31]        Une cour d’appel doit faire preuve de retenue, sauf erreur manifeste et déterminante du juge de première instance, à l’égard de toute conclusion tirée par ce dernier au sujet de la crédibilité des témoins et de la fiabilité de leurs propos[4]. Elle ne doit pas oublier que « l’appréciation de la crédibilité est un exercice difficile et délicat qui ne se prête pas toujours à une énonciation complète et précise[5] ».


[32]        L’analyse d’une preuve d’identification par témoins oculaires requiert attention et prudence. Sincérité d’un témoin et fiabilité de ses propos quant à l’identification ne vont pas forcément ni nécessairement de pair : un témoin sincère, dont les propos paraissent fiables, peut se tromper et sa mémoire lui jouer des tours[6].


[33]        Évaluer la fiabilité à accorder à l’identification proposée par un témoin requiert l’examen de toutes les circonstances qui l’entourent. Ainsi, lors de l’analyse, des facteurs tels la durée de l’observation, la distance, la luminosité, le mouvement relatif, la présence d’obstacles à la vue, l’acuité visuelle du témoin, son état psychologique pendant l’observation, sa connaissance préalable de la personne identifiée et la précision de la première description et sa ressemblance avec l’accusé de même que l’environnement dans laquelle se déroule toute parade d’identification à laquelle il participe, doivent être pris en compte[7].


[34]        À la suite de l’affaire Sophonow[8], une série de recommandations a été élaborée[9] au sujet de la préparation et du déroulement d’une parade d’identification. Les voici :


•         The photo pack should contain at least 10 subjects.


•         The photos should resemble as closely as possible the eyewitnesses' description. If that is not possible, the photos should be as close as possible to the suspect.


•         Everything should be recorded on video or audiotape from the time that the officer meets the witness, before the photographs are shown through until the completion of the interview. Once again, it is essential that an officer who does not know who the suspect is and who is not involved in the investigation conducts the photo pack line-up.


•         Before the showing of the photo pack, the officer conducting the line-up should confirm that he does not know who the suspect is or whether his photo is contained in the line-up. In addition, before showing the photo pack to a witness, the officer should advise the witness that it is just as important to clear the innocent as it is to identify the suspect. The photo pack should be presented by the officer to each witness separately.


•         The photo pack must be presented sequentially and not as a package.


•         In addition to the videotape, if possible, or, as a minimum alternative, the audiotape, there should be a form provided for setting out in writing and for signature the comments of both the officer conducting the line-up and the witness. All comments of each witness must be noted and recorded verbatim and signed by the witness.


•         Police officers should not speak to eyewitnesses after the line-ups regarding their identification or their inability to identify anyone. This can only cast suspicion on any identification made and raise concerns that it was reinforced.


•         It was suggested that, because of the importance of eyewitness evidence and the high risk of contaminating it, a police force other than the one conducting the investigation of the crime should conduct the interviews and the line-ups with the eyewitnesses. Ideal as that procedure might be, I think that it would unduly complicate the investigation, add to its cost and increase the time required. At some point, there must be reasonable degree of trust placed in the police. The interviews of eyewitnesses and the line-up may be conducted by the same force as that investigating the crime, provided that the officers dealing with the eyewitnesses are not involved in the investigation of the crime and do not know the suspect or whether his photo forms part of the line-up. If this were done and the other recommendations complied with, that would provide adequate protection of the process. [10]


[35]        Ces recommandations et les écarts notés avec elles ainsi que le processus suivi dans un cas d’espèce offrent une grille utile et pertinente à l’analyse de la valeur probante qu’il y a lieu d’accorder à une parade d’identification et aux résultats qui en découlent.


[36]        Cela dit, le seul fait qu’une parade d’identification s’écarte de l’une ou l’autre de ces recommandations n’invalide pas le processus suivi et l’identification qui en résulte[11]. Ce qui importe c’est de s’assurer que le processus ne soit pas biaisé par des éléments intrinsèques ou extrinsèques[12]. Bref, qu’il s’agisse d’un processus équitable.

samedi 22 février 2020

Admissibilité de la preuve documentaire en common law - comment faire la preuve orale d'un relevé de paye

R. v Clarke, 2016 ONSC 575 (CanLII)

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[35]           The Supreme Court of Canada in Ares v. Venner sets out the common law criteria that can allow a business record to be admitted as an exception to hearsay.  The record must be: 
(a)        an original entry [or an oral statement];

(b)        made contemporaneously [with the thing recorded]

(c)        in the routine of business

(d)               by a recorder with personal knowledge of the thing recorded as a result of having done or observed or formulated it

(e)               who had a duty to make the record, and

(f)               who had no motive to misrepresent

[Ares v. Venner, 1970 CanLII 5 (SCC), [1970] S.C.R. 608 (S.C.C.)]

[36]           Hall, J., as he then was, held:
Hospital records, including nurses’ notes, made contemporaneously by someone having a personal knowledge of the matters then being recorded and under a duty to make the entry or record, should be received in evidence as prima facie proof of the facts stated therein.  This should, in no way, preclude a party wishing to challenge the accuracy of the records or entries from doing so. …

[Ares v. Venner, at p. 362, my emphasis]

[37]           The common law requires neither notice nor an affidavit nor a certificate attesting to the authenticity of the record or attesting that it was made by the person who made the copy.  As a general principle, in deciding whether at common law a statement or record can be admitted, the authenticity and the creator of the record must be proven by evidence on the admissibility inquiry.

[38]           Ares v. Venner was decided decades before the common use of computers in a business context.  The requirement to prove the creator of a record in the modern world of electronic record keeping raises new inquiries when considering computer-generated business records.

[39]           A nineteenth century authority recognized a criterion beyond those set down by Ares v. Venner which has been developed and applied in modern times.  The Supreme Court of Canada found a person with the duty had “caused” an entry in a record to be made: [Canadian Atlantic Railway Co v. Moxley, 1888 CanLII 2 (SCC), [1889] 15 S.C.R. 145 (S.C.C.)].

[40]           One can see the applicability of Moxley to modern business records.  These records are frequently compiled from original source data such as sales slips, invoices, purchase orders, or other original data entered by the many often nameless persons routinely tasked to do this in a business context – information that would scarcely have been compiled by the person who prepared the original documents.  In daily business practice records compiled in this way are customarily accepted as valid and reliable sources of information by persons affected by the records.

[41]           The Alberta Court of Appeal echoed Moxley when considering the admissibility of oral evidence of entries in payroll records.  The witness, who was a payroll manager, had extracted portions of a larger payroll record and read them into the record.  The Court found the payroll records admissible even though the payroll manager had no personal knowledge of the information and did not produce the original records.  The Court found the records to have been made in the ordinary and usual course of business: [R. v. Monkhouse, 1987 ABCA 227, at para. 24, (Alta. C.A.)].

[42]           Paciocco and Stuesser commented on the rationale underlying the common law rule on the reliability of business records:
The principle is sound.   The reliability of the records is premised on the notion that they are prepared by persons under “business duty”; where a person provides information gratuitously, the record loses its stamp of trustworthiness.

[Paciocco and Stuesser, The Law of Evidence, p. 162]

[43]           Paciocco comments further in an article on proof of reliability with computer-generated records:
Although in Ares v. Venner the Supreme Court of Canada held that the recorder had to have personal knowledge, in R. v. Monkhouse the Court accepted a compiled record of employment made by someone without personal knowledge where the person originally recording the employment information would evidently have been under a business duty as well.  This is sensible.

[David M. Paciocco, “Proof and Progress: Coping with the Law of Evidence in a Technological Age”, (2013) 11 Canadian Journal of Law and Technology, 181, at  214]

L'admissibilité de la preuve documentaire en common law

R. v. Monkhouse, 1987 ABCA 227 (CanLII)

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[15]                       In my view the evidence tendered was admissible under the common law rule and it is not necessary to consider whether it also met the tests of Section 30.

[16]                       Wigmore defined no less than seven criteria to be satisfied at common law for the admission, as evidence of the truth of its contents, of a document containing hearsay. These were that the hearsay portion must be (1) an original entry, (2) made contemporaneously with that which it recorded, (3) in the routine, (4) of business, (5) by a person since deceased, (6) who was under a duty to do the act and record it and (7) who had no motive to misrepresent it. (Wigmore, 3rd Ed., Vol. 5, Sections 1517 and 1521-35.)

[17]                       Wigmore advocated change in this rigid position. Dealing specifically with hospital records (3rd Edition, Vol. 6, Section 1707) he urged admission despite the hearsay. He said:

“There is a Circumstantial Guarantee of Trustworthiness for the records are made and relied upon in affairs of life and death. Moreover, amidst the day-to-day details of scores of hospital cases, the physicians and nurses can ordinarily recall from actual memory few or none of the specific data entered; they themselves rely upon the record of their own action; hence, to call them to the stand would ordinarily add little or nothing to the information furnished by the record alone. The occasional errors and omissions, occurring in the routine work of a large staff, are no more an obstacle to the general trustworthiness of such records than are the errors of witnesses on the stand. And the power of the Court to summon for examination the members of the recording staff is a sufficient corrective, where it seems to be needed and a bona fide dispute exists.”
[18]                       In Ares v. Venner (1970) 1970 CanLII 5 (SCC)14 D.L.R. (3d) 4, the Supreme Court of Canada after a review of the case law, ruled such records admissible. Mr. Justice Hall, for the Court, referred to the decision of the House of Lords in Myers v. D.P.P. [1965] A.C. 1001 where the majority refused to modify the common law leaving that task to Parliament. He adopted what had been the minority view in the House of Lords that the common law, as judge made law, could and should be modified by the Courts. With retroactive effect for the case before the Court he then modified the rules. At page 16 he said:

“Hospital records, including nurses’ notes, made contemporaneously by someone having a personal knowledge of the matters then being recorded and under a duty to make the entry or record should be received in evidence as prima facie proof of the facts stated therein. This should, in no way, preclude a party wishing to challenge the accuracy of the records or entries from doing so. Had the respondent here wanted to challenge the accuracy of the nurses’ notes, the nurses were present in Court and available to be called as witnesses if the respondent had so wished.”
[19]                       Subsequent cases have applied these words to records generally: Setak Computer Services Corporation v. Burroughs Business Machines Ltd. (1977) 1977 CanLII 1184 (ON SC)15 O.R. (2d) 750 (Ont. H.C.)R. v. Laverty (1979) 1979 CanLII 3010 (ON CA)9 C.R. (3d) 288 and 292 (Ont. C.A.).

[20]                       Even prior to Ares v. Venner, the common law rule as enunciated by Wigmore had undergone some change. Mr. Justice Hall cited with approval two previous decisions of this Court: Omand v. Alberta Milling Co. 1922 CanLII 450 (AB CA)[1922] 3 W.W.R. 412 and Ashdown Hardware Co. Ltd. v. Senger 1951 CanLII 268 (AB CA)[1952] 1 D.L.R. 33. In Omand, a witness was permitted to examine the inspection records for flour prepared as part of a government inspection system by a number of officials and to give evidence of the result. In Ashdown, the Plaintiff’s credit manager produced ledger records to prove that goods had been sold and delivered. At page 35, Ford, J.A. said:

“It is true that there was no direct proof of actual delivery to or receipt by the firm of the goods in question, nor evidence by any clerk or servant of the plaintiff who personally sent out the goods, in fulfilment of any specific order; but, in my opinion proof in this way cannot be reasonably required in present-day business in a large commercial concern where clerks and servants are changed from time to time, whose evidence may be difficult, and often impossible to obtain; and who, even if brought before the Court, would have forgotten most of the particular transactions. Of course, the Court must, as always, having in mind the circumstances, decide what is the best evidence available, and the kind or degree of proof required. This view is, I think, in accord with that outlined fully in Wigmore on Evidence, 3rd ed., vol. V, s. 1530. To emphasize the difficulty of proving each specific item of the account, I point out that we have here an example of goods sold an delivered over a period from April 26, 1948, to November 30, 1949, composed of items covering about 40 pages of the appeal book.”
[21]                       It is clear in these cases that the witness gave testimony supporting a document about which he had no personal knowledge though the original documents containing the information recorded in the ledgers were undoubtedly prepared by persons with personal knowledge.

[22]                       An even earlier modification of the common law rules may be seen in a decision in the Supreme Court of Canada in Canadian Atlantic Rwy. Co. v. Moxley (1889) 1888 CanLII 2 (SCC)15 S.C.R. 145. That case held that the person originally recording the event need not himself have direct personal knowledge of the event recorded. It was held to be sufficient if the person who has a duty to do and record the act “causes” a record to be made by an agent. This case, too, was cited by Mr. Justice Hall in Ares v. Venner.

[23]                       In his useful book, Documentary Evidence in Canada (Carswell Co., 1984), Mr. J. D. Ewart summarizes the common law rule after the decision in Ares v. Venner as follows at page 54:

“the modern rule can be said to make admissible a record containing (i) an original entry (ii) made contemporaneously (iii) in the routine (iv) of business (v) by a recorder with personal knowledge of the thing recorded as a result of having done or observed or formulated it (vi) who had a duty to make the record and (vii) who had no motive to misrepresent. Read in this way, the rule after Ares does reflect a more modern, realistic approach for the common law to take towards business duty records.”
[24]                       To this summary, I would respectfully make one modification. The “original entry” need not have been made personally by a recorder with knowledge of the thing recorded. On the authority of OmandAshdown, and Moxley, it is sufficient if the recorder is functioning in the usual and ordinary course of a system in effect for the preparation of business records. In Ashdown, for example, the ledger account, introduced in evidence, was said in the judgment to run for 40 pages. It is unlikely that the same person who sent the goods from a shipping dock and sent a memorandum of that to the business office also made the ledger entry which it was sought to admit. Neither the shipping clerk nor the original ledger keeper was before the Court. In Omand, clearly the original entries had been made by a number of different persons. In Moxley, the person with the duty had “caused” the entry to be made. Modern business records are customarily a compilation of original documents such as sales slips or other memoranda and rarely would that compilation be made by the person who prepared the original document. Yet those records are accepted as valid daily by all those affected by them.

[25]                       These hearsay records are not to be accepted in evidence merely to avoid the inconvenience of identifying a witness or because many witnesses would be involved, or even because otherwise no evidence would be available. Rather, they can be admitted only if they have come into existence under circumstances which makes them inherently trustworthy. Where an established system in a business or other organization produces records which are regarded as reliable and customarily accepted by those affected by them, they should be admitted as prima facie evidence.

vendredi 6 septembre 2019

Les deux conditions devant être réunies pour que le juge fasse droit à une demande de contrôle à savoir si un délinquant pose un risque sérieux pour la sécurité publique

M.L. c. R., 2010 QCCA 395 (CanLII)

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[8]               Dans l'arrêt R. c. L.M., le juge LeBel, écrivant à ce sujet pour tous ses collègues, rappelait la nature exceptionnelle des déclarations de délinquant à contrôler : 
[39]      Comme notre Cour l'a fait dans le cas des délinquants dangereux (R. c. Lyons, 1987 CanLII 25 (CSC)[1987] 2 R.C.S. 309, p. 339; R. c. Jones1994 CanLII 85 (CSC)[1994] 2 R.C.S. 229, p. 297), je rappelle la nature exceptionnelle des déclarations de délinquant à contrôler. Ainsi que je l'expliquerai plus bas, le caractère strict et précis des critères gouvernant l'imposition de cette mesure de contrôle restreint nécessairement le nombre de personnes auxquelles elle trouvera à s'appliquer. […]
[9]               Puis, parlant du rapport que le juge peut obtenir en application de l'article 752.1(1) C.cr., le juge LeBel ajouta : 
[40]      Le Code criminel prévoit d'abord que la Couronne doit présenter la demande de déclaration de délinquant à contrôler une fois l'accusé reconnu coupable, mais avant que la peine n'ait été déterminée (par. 752.1(1) et al. 753.1(1)a) et 753.1(3.1)aC. cr.). Après le dépôt de cette demande, le tribunal peut faire évaluer le délinquant par des experts. Leur rapport est utilisé comme preuve lors de l'examen de la demande (par. 752.1(1) et 753.1(1) C. cr.). En effet, ce rapport permet d'évaluer si le délinquant pose un risque sérieux pour la sécurité publique.
[Je souligne]
[10]           Ensuite, le juge LeBel résume ainsi les deux conditions qui doivent être réunies pour que le juge fasse droit à une demande de contrôle : 
(i)         D'abord, une peine minimale d'emprisonnement de deux ans doit être justifiée pour l'infraction dont le délinquant a été déclaré coupable (al. 753.1(1)a)C. cr.).
(ii)        Ensuite, le juge doit être convaincu hors de tout doute raisonnable que le délinquant présente un risque élevé de récidive (al. 753.1(1)bC. cr.; voir par exemple Beaulieu c. R.[2007] J.Q. no 2116 (QL)2007 QCCA 403 (CanLII), par. 25). Pour évaluer le risque de récidive, le juge doit constater la présence des deux facteurs suivants (par. 753.1(2) C. cr.) : 
a)         Le délinquant a été reconnu coupable d'une infraction de nature sexuelle prévue aux art. 152152, 152=3, l63.1(2), l63.1(3), l63.1(4), l63.1(4.1), 172.1, 173(2), 271, 272 et 273 C. cr., ou a commis un "acte grave de nature sexuelle lors de la perpétration d'une autre infraction dont il a été déclaré coupable" (al.  753.1(2)a) C. cr.).
b)         Le délinquant a accompli des actes répétitifs permettant de croire qu'il causera des sévices ou des dommages psychologiques graves à d'autres personnes, ou sa conduite antérieure dans le domaine sexuel laisse prévoir qu'il causera à l'avenir des sévices à d'autres personnes (sous-al. 753.1(2)b)(i) et (ii) C. cr.; voir par exemple R. c. Corneau2001 CanLII 20599 (QC CA)[2001] R.J.Q. 2509 (C.A.)). Cet exercice visant à évaluer la "dangerosité potentielle" tient compte, en somme, de la conduite antérieure et des faits ayant entouré la perpétration des infractions (R. c. Ménard[2002] J.Q. no 5271 (QL) (C.A.), par. 23).
[Je souligne]
[11]           Donc, en application de l'article 753.1(1) C.crle juge peut déclarer qu'un accusé est un délinquant à contrôler si, pour l'infraction dont l'accusé a été déclaré coupable, il y a eu lieu d'infliger une peine minimale d'emprisonnement de deux ans et si l'accusé présente un risque élevé de récidive.
[12]           D'autre part, l'article 753.1(2) C.crcrée une présomption qu'il existe un risque élevé de récidive si le délinquant a, d'une part, été déclaré coupable d'une infraction visée à l'article 753.1(2)a) C.cr(diverses infractions à caractère sexuel) et, d'autre part : 
(i)         si le délinquant a accompli des actes répétitifs (y compris un acte qui est à l'origine de l'infraction dont il a été déclaré coupable), actes répétitifs qui permettent de croire que le délinquant causera vraisemblablement la mort de quelque autre personne ou causera des sévices ou des dommages psychologiques graves à d'autres personnes, ou
(ii)        si la conduite antérieure du délinquant dans le domaine sexuel (y compris lors de la perpétration de l'infraction dont il a été déclaré coupable) laisse prévoir que vraisemblablement il causera à l'avenir de ce fait des sévices ou autres maux à d'autres personnes.
[13]           En l'espèce, pour être convaincu que le délinquant présentait un risque élevé de récidive, le juge devait conclure que l'appelant avait accompli des actes répétitifs qui donnaient lieu de croire qu'il allait vraisemblablement causer la mort de quelqu'un ou des sévices ou des dommages psychologiques graves, ou que la conduite antérieure de l'appelant dans le domaine sexuel laissait prévoir que vraisemblablement il allait causer à l'avenir des sévices ou autres maux à d'autres personnes.
[14]           Notons que pour être convaincu que le délinquant présente un risque élevé de récidive il est insuffisant que les actes répétitifs ou la conduite antérieure d'un délinquant permettent au juge de croire qu'il est possible que le délinquant récidive. Il faut que ce soit probable. La version anglaise de l'article 753.1(2) C.crutilise le mot « likelihood », et la version française le mot « vraisemblablement ».

Le dédommagement à la victime doit toujours être envisagé lors de la détermination de la peine

La possession d'une quantité de drogue plus grande que pour usage personnel est une assise permettant au juge de conclure à la possession en vue de trafic / se débarrasser de la drogue via une toilette ne permet pas de conclure à la possession en vue de trafic de ladite substance

R. v. Scharf, 2017 ONCA 794 Lien vers la décision [ 9 ]           Although not the subject of submissions by the appellant, we do not agree ...