Charbonneau c. R., 2005 QCCA 1054 (CanLII)
[31] Il est certain que le législateur n'a pas défini le mot importation de l'article 6 de la Loi non plus que le mot exportation qui s'y retrouve. Cependant, la Cour suprême dans l'arrêt R. c. Bell a appliqué le sens ordinaire du mot comme étant le fait d'introduire ou de faire introduire un stupéfiant au pays, et ce, sans égard au fait que la personne aille quérir la drogue à son point d'entrée au pays.
[33] Comme le mentionnait le juge McIntyre, dans cette affaire :
To convict of importing, it is not necessary to show that the accused actually carried the goods into the country. Neither is it necessary to show that the accused was present at the point of entry. It is quite possible for "A" while at town "X" to make all the arrangements and perform all the acts required to import illicit goods at town "Y". Indeed, in ordinary commerce, merchants in, say, Vancouver import goods through eastern Canadian ports on a regular basis without ever visiting the port of entry. The same principle can be applied in criminal cases and criminal acts performed in one province can render the actor liable to prosecution in another province and subject to the jurisdiction of that other province.
[35] Par ailleurs, il existe une jurisprudence constante que l'infraction d'importation est commise lorsqu'on prend des dispositions pour importer la drogue. Comme le mentionnait le juge O'Meara de la Cour des sessions du Québec:
I find that there is no ambiguity nor any equivocation in the words "import into Canada" set forth in s. 5(1) of the Act concerned and, on applying to them their ordinary and grammatical sense, it is made abundantly clear that the intent of Parliament is to prohibit the illegal bringing in of narcotics to Canada from an external source, no matter under what circumstances the illicit introduction into the country takes place and regardless of the means employed in the transporting across the national frontiers of the forbidden substance.
[36] Cette interprétation a été adoptée dans plusieurs arrêts subséquents.
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mardi 11 janvier 2011
La possession récente est une fiction juridique qui permet de conclure à une preuve suffisante du vol lorsque la possession du bien volé possède un caractère récent
Ramkaran c. R., 2009 QCCA 852 (CanLII)
[39] La possession récente est une fiction juridique qui permet de conclure à une preuve suffisante du vol lorsque la possession du bien volé possède un caractère récent : R. c. Kowlyk, 1988 CanLII 50 (C.S.C.), [1988] 2 R.C.S. 59.
[40] En outre, la possession récente peut relier le possesseur d'un objet volé à d'autres crimes que le vol. Dans l'arrêt Coffin c. La Reine, 1956 CanLII 94 (S.C.C.), [1956] R.C.S. 191, c'est la possession d'objets ayant appartenu aux victimes qui reliait l'accusé au meurtre des trois chasseurs.
[41] Dans R. c. Chatten, [1988] O.J. no 831, une affaire où un des accusés avait en sa possession un collier qui appartenait à la victime d'un meurtre, le juge Finlayson de la Cour d'appel d'Ontario écrit pour la cour que la possession est un élément de preuve pouvant relier l'accusé au crime sans toutefois que cela conduise nécessairement à une condamnation pour meurtre au premier degré. Il écrit ceci :
The law as stated in the Coffin case is that if, after the commission of the crime, a person is found in possession of stolen goods associated with the crime, that person is called upon to account for the possession and must give an explanation which is not unreasonable or improbable. It does not follow that if the jury rejects the explanation they must find, as they did in the case on appeal, that such person was guilty of first degree murder. He might have had an involvement in the crime, but it would have been more appropriate if the trial judge had restricted himself to stating to the jury that their disbelief or any explanation that Leonard Chatten gave as to how he came to be in possession of the necklace could be confirmatory of the evidence of Lillicrap and that the necklace evidence was significant material evidence which they could use to link Leonard Chatten with the crime with which he was charged.
[39] La possession récente est une fiction juridique qui permet de conclure à une preuve suffisante du vol lorsque la possession du bien volé possède un caractère récent : R. c. Kowlyk, 1988 CanLII 50 (C.S.C.), [1988] 2 R.C.S. 59.
[40] En outre, la possession récente peut relier le possesseur d'un objet volé à d'autres crimes que le vol. Dans l'arrêt Coffin c. La Reine, 1956 CanLII 94 (S.C.C.), [1956] R.C.S. 191, c'est la possession d'objets ayant appartenu aux victimes qui reliait l'accusé au meurtre des trois chasseurs.
[41] Dans R. c. Chatten, [1988] O.J. no 831, une affaire où un des accusés avait en sa possession un collier qui appartenait à la victime d'un meurtre, le juge Finlayson de la Cour d'appel d'Ontario écrit pour la cour que la possession est un élément de preuve pouvant relier l'accusé au crime sans toutefois que cela conduise nécessairement à une condamnation pour meurtre au premier degré. Il écrit ceci :
The law as stated in the Coffin case is that if, after the commission of the crime, a person is found in possession of stolen goods associated with the crime, that person is called upon to account for the possession and must give an explanation which is not unreasonable or improbable. It does not follow that if the jury rejects the explanation they must find, as they did in the case on appeal, that such person was guilty of first degree murder. He might have had an involvement in the crime, but it would have been more appropriate if the trial judge had restricted himself to stating to the jury that their disbelief or any explanation that Leonard Chatten gave as to how he came to be in possession of the necklace could be confirmatory of the evidence of Lillicrap and that the necklace evidence was significant material evidence which they could use to link Leonard Chatten with the crime with which he was charged.
vendredi 7 janvier 2011
Les principes directeurs concernant la modification de la date d’une infraction contenue dans une dénonciation
R. c. Sturgeon, 2008 NBCP 22 (CanLII)
[30] Il est permis de résumer comme suit les principes directeurs qui se dégagent des jugements précités :
1) Une modification de la date d’une infraction présumée ne constitue pas l’introduction d’une nouvelle procédure si, malgré que la modification soit postérieure au délai de prescription, la date modifiée, eût-elle été indiquée correctement dès l’introduction originelle de la procédure, serait demeurée en deçà du délai de prescription ‘R. c. Wakeley, par. 1);
2) Toute modification d’une dénonciation apportée avant l’instruction de l’affaire, autrement qu’en vertu des pouvoirs que confèrent les dispositions législatives régissant les modifications, suivie d’un nouveau dépôt de la dénonciation après l’expiration du délai de prescription de la procédure, peut emporter prescription de l’instance ‘R. c. J.D. Irving Ltd.);
3) Le nouveau dépôt d’une dénonciation, après qu’a été apportée une modification de la date qui se conforme aux dispositions législatives régissant les modifications, qui n’a pour effet d’inculper, ni d’une nouvelle infraction, ni d’une infraction semblable perpétrée à un moment substantiellement différent, et qui ne fait que préciser ou circonscrire le chef d’inculpation, n’emporte pas prescription de la procédure lorsque la date modifiée porte l’infraction par‑delà le délai de prescription ‘R. c. St. Stephen Woodworking Ltd. ‘1972), 8 C.C.C. ‘2d) 377 ‘C.A.N.‑B.), p. 380 et 381);
4) Toute modification substituant une infraction nouvelle ou différente à l’infraction de la dénonciation d’origine introduit une nouvelle procédure et fait intervenir le délai de prescription applicable ‘R. c. Ross, par. 5, et R. c. Ayer, par. 12).
5) Une modification qui porterait un préjudice irréparable à la défense ne peut pas être faite ‘Morozuk c. La Reine, R. c. Campbell, et Ewaschuk, E.G., Criminal Pleadings & Practice in Canada).
[30] Il est permis de résumer comme suit les principes directeurs qui se dégagent des jugements précités :
1) Une modification de la date d’une infraction présumée ne constitue pas l’introduction d’une nouvelle procédure si, malgré que la modification soit postérieure au délai de prescription, la date modifiée, eût-elle été indiquée correctement dès l’introduction originelle de la procédure, serait demeurée en deçà du délai de prescription ‘R. c. Wakeley, par. 1);
2) Toute modification d’une dénonciation apportée avant l’instruction de l’affaire, autrement qu’en vertu des pouvoirs que confèrent les dispositions législatives régissant les modifications, suivie d’un nouveau dépôt de la dénonciation après l’expiration du délai de prescription de la procédure, peut emporter prescription de l’instance ‘R. c. J.D. Irving Ltd.);
3) Le nouveau dépôt d’une dénonciation, après qu’a été apportée une modification de la date qui se conforme aux dispositions législatives régissant les modifications, qui n’a pour effet d’inculper, ni d’une nouvelle infraction, ni d’une infraction semblable perpétrée à un moment substantiellement différent, et qui ne fait que préciser ou circonscrire le chef d’inculpation, n’emporte pas prescription de la procédure lorsque la date modifiée porte l’infraction par‑delà le délai de prescription ‘R. c. St. Stephen Woodworking Ltd. ‘1972), 8 C.C.C. ‘2d) 377 ‘C.A.N.‑B.), p. 380 et 381);
4) Toute modification substituant une infraction nouvelle ou différente à l’infraction de la dénonciation d’origine introduit une nouvelle procédure et fait intervenir le délai de prescription applicable ‘R. c. Ross, par. 5, et R. c. Ayer, par. 12).
5) Une modification qui porterait un préjudice irréparable à la défense ne peut pas être faite ‘Morozuk c. La Reine, R. c. Campbell, et Ewaschuk, E.G., Criminal Pleadings & Practice in Canada).
Revue des principes juridiques applicables à l'absolution par le juge Valmont Beaulieu
R. c. Dumoulin, 2010 QCCQ 2991 (CanLII)
[204] Premièrement, comme l'a décidé la Cour d'appel d'Ontario, dans l'arrêt La Reine c. McInnes, 1973, 13 C.C.C., deuxième édition, page 741, c'est de permettre aux tribunaux, lorsque les circonstances s'y prêtent, de rendre une décision qui évite la constitution d'un casier judiciaire et, tel qu'exprimé par la Cour d'appel de Colombie-Britannique dans l'affaire La Reine c. Fallofield, 1973, 13 C.C.C., deuxième édition, page 450, que ce casier judiciaire pourrait compromettre sérieusement les projets d'avenir de l'accusé.
[205] En second lieu, le Tribunal résume ainsi bien humblement les règles qui se dégagent de l'enseignement des tribunaux de juridiction d'appel au sujet de cet article 730 C.cr.
1. L'article 730 ne doit pas être considéré comme une mesure exceptionnelle, sinon il serait vidé de tout sens qu'a voulu y donner le législateur, tel que l'écrivait le regretté honorable juge Amédée Monette de la Cour d'appel du Québec, dans l'arrêt La Reine c. Cyr.
2. Il serait à l'encontre de l'administration de la justice si les tribunaux accordaient d'une manière routinière les demandes en vertu de l'article 730. Le Tribunal souligne qu'il n'est pas rare qu'un agent de la paix obtienne une absolution conditionnelle ou inconditionnelle. Chaque cas est un cas d'espèce. Par contre, il ne faudrait pas en venir à ce que les agents de la paix prennent pour acquis qu'ils obtiendront automatiquement une réponse positive par les tribunaux, car les personnes bien informées y verraient, avec raison, un privilège accordé par les tribunaux envers ces derniers.
3. L'exemplarité est un facteur qu'il faut considérer et tenir compte. Mais cela ne doit pas faire obstacle à une application judicieuse de cet article, car le principe de l'individualisation de la peine y trouve toujours son application. De plus, le Tribunal doit prononcer une peine qui est proportionnelle au crime commis.
4. Cette disposition ne vise pas uniquement les contraventions triviales et techniques.
5. L'absolution ne constitue pas une alternative à la probation ou au sursis de sentence.
6. L'absolution est accordée lorsque son refus résulterait à une disparité injuste entre l'acte lui-même et l'effet qu'aurait une condamnation sur l'avenir du délinquant. Ainsi s'exprimait la Cour d'appel du Québec dans l'affaire Abouabdellah c. La Reine, du 8 mai 1996 en page 5 :
« la règle d'or en la matière est qu'un justiciable ne doit pas dans les faits subir un châtiment qui n'a aucune mesure avec sa faute. »
7. Cette absolution doit respecter les objectifs de l'article 718 C.cr.
8. L'octroi de cette absolution ne doit pas nuire à l'intérêt public.
[207] Monsieur le juge Pierre Béliveau définit ainsi ces mots dans l'affaire Rozon c. La Reine, dossier 750-36-000087-993, aux paragraphes 41 et 42, il écrit :
« 41. Quant à la notion d’intérêt public, elle doit prendre en cause l’objectif de la dissuasion générale, la gravité de l’infraction, son incidence dans la communauté, l’attitude du public à son égard et la confiance de ce dernier dans le système judiciaire (R. c. Elsharawy, par. 3). Cela étant, il faut se rappeler que dans l’arrêt R. c. Meneses, (1976) 25 C.C.C. (2d) 115, la Cour d’appel de l’Ontario a précisé que l’arrestation et la comparution d’un délinquant peuvent constituer une mesure de dissuasion efficace à l’égard de personnes qui ne sont pas criminalisées, lesquelles sont justement celles qui sont candidates à une absolution.
42. Dans ce même arrêt, la Cour d’appel de l’Ontario a indiqué que l’intérêt public comporte également le fait que l’accusé ait la possibilité de devenir une personne utile dans la communauté et qu’elle puisse assurer sa subsistance et celle de sa famille. […] »
[208] Afin de prononcer une peine juste et équitable envers la société, la victime et l'accusé, le Tribunal doit faire appel à un public bien informé sur les faits et sur le droit, tel que qualifié par monsieur le juge Béliveau :
« 69. Par ailleurs, il faut se demander si le public pourrait perdre confiance dans la crédibilité du système judiciaire si l’appelant devait être absous. À cet égard, le critère doit s’apprécier, non pas en se référant à la personne qui se renseigne à même cette partie de la couverture médiatique que la substitut de la procureure générale a qualifiée de «particulièrement foireuse», ou que d’aucuns désignent comme la «presse de caniveau», mais en déterminant ce que penserait la personne raisonnable et renseignée [par analogie, voir R. c. Lamothe, 1990 CanLII 3479 (QC C.A.), [1990] R.J.Q. 973, 981 (C.A.); R. c. Auclair, [1997] R.J.Q. 2210, par. 158-170 (C.S.)].
70. En fait, une justice indépendante ne saurait être rendue en se guidant sur ce que peut penser cette partie de l’opinion publique influencée par les médias qui cherchent à exploiter le sensationnalisme. Par analogie, on pourrait rappeler que lors de ses directives préliminaires aux membres du jury, le juge qui préside leur dit toujours de rendre leur décision en se fondant uniquement sur la preuve, et sans se demander si elle plaira ou sera populaire. Agir autrement discréditerait l’administration de la justice. »
[210] En effet, dans les dossiers reprochant des infractions en matière de violence conjugale, les critères de dénonciation et de dissuasion doivent primer.
[211] La Cour d'appel dans l'arrêt R. c. Gendron écrit :
« Cependant, si la réhabilitation demeure un facteur important dans la détermination de la peine, elle ne doit pas, surtout dans un contexte de violence conjugale, prévaloir démesurément sur les facteurs de dissuasion et d'exemplarité de la sentence. Madame la juge Wilson dans R. c. Lavallée, 1990 CanLII 95 (C.S.C.), [1990] 1 R.C.S. 852, à la page 872 a rappelé « qu'il est difficile d'exagérer la gravité, voire la tragédie, de la violence domestique. L'attention accrue portée à ce phénomène par les médias au cours des dernières années a fait ressortir aussi bien son caractère généralisé que ses conséquences terribles pour les femmes de toutes les conditions sociales.»
[212] Même s'ils datent d'un certain temps, ces propos sont toujours d'actualité.
[213] De ceux-ci, le Tribunal conclut qu'il se doit aussi de tenir compte de la réhabilitation de l'accusé même en cette matière comme le dit clairement la Cour. Il faut donc y retenir que ce critère ne doit pas prévaloir démesurément sur les deux autres facteurs. Le Tribunal doit donc analyser ces trois facteurs avec pondération.
[214] Au surplus, même si l'accusé n'était pas dans l'exercice de ses fonctions lorsqu'il a commis les infractions, le Tribunal doit nécessairement tenir compte de sa profession de policier.
[215] Le public général a le droit que les agents de la paix soient des personnes ayant des comportements exemplaires dans leurs vies privées puisqu'ils appliquent les lois dans l'exercice de leurs fonctions et peuvent agir en leur qualité d'agents de la paix même lorsqu'ils sont à l'extérieur de leurs horaires de travail.
[216] À ce sujet, le Tribunal fait siens les propos de son collègue monsieur le juge Aubin:
« [60] […] Le travail de policier ou d'agent de la paix constitue par le fait même un poste de responsabilité. La société s'attend à ce que le titulaire ait une conduite exemplaire en tout temps, étant tenu d'appliquer la loi et de la faire respecter. Il doit assumer son travail de façon digne, sans abuser indûment de ses droits. »
[217] Le Tribunal ajoute à cet énoncé l'enseignement de la Cour d'appel de la Nouvelle-Écosse, R. c. Cusack, 1978 41 CCC (2d) 289, qui possède encore son autorité même en 2010 :
« The commission of offences by police officers has been considered on numerous occaions by the Courts and the unanimous finding has been that their sentence should be more severe than that of an ordinary person who commits the same crime because of the position of public trust which the held at the time of the offence and their knowledge of the consequences of its perpetration. »
[218] Malgré l'ensemble de ces décisions, il ne faut pas en conclure pour autant qu'un agent de la paix ne puisse bénéficier d'une absolution. Le législateur, à cette disposition, n'a pas exclu aucune catégorie de personnes et il n'appartient pas aux tribunaux de le faire.
[219] En cette matière, comme lors du prononcé de toute absolution, chaque cas devient un cas d'espèce et le Tribunal a toujours le devoir d'individualiser la peine.
[204] Premièrement, comme l'a décidé la Cour d'appel d'Ontario, dans l'arrêt La Reine c. McInnes, 1973, 13 C.C.C., deuxième édition, page 741, c'est de permettre aux tribunaux, lorsque les circonstances s'y prêtent, de rendre une décision qui évite la constitution d'un casier judiciaire et, tel qu'exprimé par la Cour d'appel de Colombie-Britannique dans l'affaire La Reine c. Fallofield, 1973, 13 C.C.C., deuxième édition, page 450, que ce casier judiciaire pourrait compromettre sérieusement les projets d'avenir de l'accusé.
[205] En second lieu, le Tribunal résume ainsi bien humblement les règles qui se dégagent de l'enseignement des tribunaux de juridiction d'appel au sujet de cet article 730 C.cr.
1. L'article 730 ne doit pas être considéré comme une mesure exceptionnelle, sinon il serait vidé de tout sens qu'a voulu y donner le législateur, tel que l'écrivait le regretté honorable juge Amédée Monette de la Cour d'appel du Québec, dans l'arrêt La Reine c. Cyr.
2. Il serait à l'encontre de l'administration de la justice si les tribunaux accordaient d'une manière routinière les demandes en vertu de l'article 730. Le Tribunal souligne qu'il n'est pas rare qu'un agent de la paix obtienne une absolution conditionnelle ou inconditionnelle. Chaque cas est un cas d'espèce. Par contre, il ne faudrait pas en venir à ce que les agents de la paix prennent pour acquis qu'ils obtiendront automatiquement une réponse positive par les tribunaux, car les personnes bien informées y verraient, avec raison, un privilège accordé par les tribunaux envers ces derniers.
3. L'exemplarité est un facteur qu'il faut considérer et tenir compte. Mais cela ne doit pas faire obstacle à une application judicieuse de cet article, car le principe de l'individualisation de la peine y trouve toujours son application. De plus, le Tribunal doit prononcer une peine qui est proportionnelle au crime commis.
4. Cette disposition ne vise pas uniquement les contraventions triviales et techniques.
5. L'absolution ne constitue pas une alternative à la probation ou au sursis de sentence.
6. L'absolution est accordée lorsque son refus résulterait à une disparité injuste entre l'acte lui-même et l'effet qu'aurait une condamnation sur l'avenir du délinquant. Ainsi s'exprimait la Cour d'appel du Québec dans l'affaire Abouabdellah c. La Reine, du 8 mai 1996 en page 5 :
« la règle d'or en la matière est qu'un justiciable ne doit pas dans les faits subir un châtiment qui n'a aucune mesure avec sa faute. »
7. Cette absolution doit respecter les objectifs de l'article 718 C.cr.
8. L'octroi de cette absolution ne doit pas nuire à l'intérêt public.
[207] Monsieur le juge Pierre Béliveau définit ainsi ces mots dans l'affaire Rozon c. La Reine, dossier 750-36-000087-993, aux paragraphes 41 et 42, il écrit :
« 41. Quant à la notion d’intérêt public, elle doit prendre en cause l’objectif de la dissuasion générale, la gravité de l’infraction, son incidence dans la communauté, l’attitude du public à son égard et la confiance de ce dernier dans le système judiciaire (R. c. Elsharawy, par. 3). Cela étant, il faut se rappeler que dans l’arrêt R. c. Meneses, (1976) 25 C.C.C. (2d) 115, la Cour d’appel de l’Ontario a précisé que l’arrestation et la comparution d’un délinquant peuvent constituer une mesure de dissuasion efficace à l’égard de personnes qui ne sont pas criminalisées, lesquelles sont justement celles qui sont candidates à une absolution.
42. Dans ce même arrêt, la Cour d’appel de l’Ontario a indiqué que l’intérêt public comporte également le fait que l’accusé ait la possibilité de devenir une personne utile dans la communauté et qu’elle puisse assurer sa subsistance et celle de sa famille. […] »
[208] Afin de prononcer une peine juste et équitable envers la société, la victime et l'accusé, le Tribunal doit faire appel à un public bien informé sur les faits et sur le droit, tel que qualifié par monsieur le juge Béliveau :
« 69. Par ailleurs, il faut se demander si le public pourrait perdre confiance dans la crédibilité du système judiciaire si l’appelant devait être absous. À cet égard, le critère doit s’apprécier, non pas en se référant à la personne qui se renseigne à même cette partie de la couverture médiatique que la substitut de la procureure générale a qualifiée de «particulièrement foireuse», ou que d’aucuns désignent comme la «presse de caniveau», mais en déterminant ce que penserait la personne raisonnable et renseignée [par analogie, voir R. c. Lamothe, 1990 CanLII 3479 (QC C.A.), [1990] R.J.Q. 973, 981 (C.A.); R. c. Auclair, [1997] R.J.Q. 2210, par. 158-170 (C.S.)].
70. En fait, une justice indépendante ne saurait être rendue en se guidant sur ce que peut penser cette partie de l’opinion publique influencée par les médias qui cherchent à exploiter le sensationnalisme. Par analogie, on pourrait rappeler que lors de ses directives préliminaires aux membres du jury, le juge qui préside leur dit toujours de rendre leur décision en se fondant uniquement sur la preuve, et sans se demander si elle plaira ou sera populaire. Agir autrement discréditerait l’administration de la justice. »
[210] En effet, dans les dossiers reprochant des infractions en matière de violence conjugale, les critères de dénonciation et de dissuasion doivent primer.
[211] La Cour d'appel dans l'arrêt R. c. Gendron écrit :
« Cependant, si la réhabilitation demeure un facteur important dans la détermination de la peine, elle ne doit pas, surtout dans un contexte de violence conjugale, prévaloir démesurément sur les facteurs de dissuasion et d'exemplarité de la sentence. Madame la juge Wilson dans R. c. Lavallée, 1990 CanLII 95 (C.S.C.), [1990] 1 R.C.S. 852, à la page 872 a rappelé « qu'il est difficile d'exagérer la gravité, voire la tragédie, de la violence domestique. L'attention accrue portée à ce phénomène par les médias au cours des dernières années a fait ressortir aussi bien son caractère généralisé que ses conséquences terribles pour les femmes de toutes les conditions sociales.»
[212] Même s'ils datent d'un certain temps, ces propos sont toujours d'actualité.
[213] De ceux-ci, le Tribunal conclut qu'il se doit aussi de tenir compte de la réhabilitation de l'accusé même en cette matière comme le dit clairement la Cour. Il faut donc y retenir que ce critère ne doit pas prévaloir démesurément sur les deux autres facteurs. Le Tribunal doit donc analyser ces trois facteurs avec pondération.
[214] Au surplus, même si l'accusé n'était pas dans l'exercice de ses fonctions lorsqu'il a commis les infractions, le Tribunal doit nécessairement tenir compte de sa profession de policier.
[215] Le public général a le droit que les agents de la paix soient des personnes ayant des comportements exemplaires dans leurs vies privées puisqu'ils appliquent les lois dans l'exercice de leurs fonctions et peuvent agir en leur qualité d'agents de la paix même lorsqu'ils sont à l'extérieur de leurs horaires de travail.
[216] À ce sujet, le Tribunal fait siens les propos de son collègue monsieur le juge Aubin:
« [60] […] Le travail de policier ou d'agent de la paix constitue par le fait même un poste de responsabilité. La société s'attend à ce que le titulaire ait une conduite exemplaire en tout temps, étant tenu d'appliquer la loi et de la faire respecter. Il doit assumer son travail de façon digne, sans abuser indûment de ses droits. »
[217] Le Tribunal ajoute à cet énoncé l'enseignement de la Cour d'appel de la Nouvelle-Écosse, R. c. Cusack, 1978 41 CCC (2d) 289, qui possède encore son autorité même en 2010 :
« The commission of offences by police officers has been considered on numerous occaions by the Courts and the unanimous finding has been that their sentence should be more severe than that of an ordinary person who commits the same crime because of the position of public trust which the held at the time of the offence and their knowledge of the consequences of its perpetration. »
[218] Malgré l'ensemble de ces décisions, il ne faut pas en conclure pour autant qu'un agent de la paix ne puisse bénéficier d'une absolution. Le législateur, à cette disposition, n'a pas exclu aucune catégorie de personnes et il n'appartient pas aux tribunaux de le faire.
[219] En cette matière, comme lors du prononcé de toute absolution, chaque cas devient un cas d'espèce et le Tribunal a toujours le devoir d'individualiser la peine.
jeudi 6 janvier 2011
La définition de la crédibilité par la Cour suprême
White v. The King, [1947] S.C.R. 268
It is a matter in which so many human characteristics, both the strong and the weak, must be taken into consideration. The general integrity and intelligence of the witness, his powers to observe, his capacity to remember and his accuracy in statement are important. It is also important to determine whether he is honestly endeavouring to tell the truth, whether he is sincere and frank or whether he is biassed, reticent and evasive. All these questions and others may be answered from the observation of the witness’ general conduct and demeanour in determining the question of credibility.
It is a matter in which so many human characteristics, both the strong and the weak, must be taken into consideration. The general integrity and intelligence of the witness, his powers to observe, his capacity to remember and his accuracy in statement are important. It is also important to determine whether he is honestly endeavouring to tell the truth, whether he is sincere and frank or whether he is biassed, reticent and evasive. All these questions and others may be answered from the observation of the witness’ general conduct and demeanour in determining the question of credibility.
mercredi 5 janvier 2011
Ce qu'est la possession personnelle ou imputée au sens du droit criminel
R. c. Fortin, 2010 QCCQ 8814 (CanLII)
[29] Dans un arrêt récent de la Cour suprême, R. c. Morelli, le juge Fish précise :
« [15] Pour l'application du Code criminel, la « possession » définie au par. 4(3) s'entend de la possession personnelle, de la possession imputée et de la possession commune. Seules les deux premières de ces trois formes de possession fautive sont pertinentes en l'espèce. Nul ne conteste que la connaissance et le contrôle constituent des éléments essentiels de ces deux types d'infraction. »
[30] Au paragraphe 16 on y lit :
« [16] Dans le cas d'une allégation de possession personnelle, le critère de la connaissance est formé des deux éléments suivants : l'accusé doit savoir qu'il a la garde physique de la chose donnée et il doit connaître la nature de cette dernière. Il faut en outre que ces deux éléments soient conjugués à un acte de contrôle (qui ne procède pas d'un devoir civique) : Beaver c. The Queen, 1957 CanLII 14 (S.C.C.), [1957] R.C.S. 531, p. 541-542.
[31] C'est le paragraphe 17 de cet arrêt qui est pertinent dans le dossier que l'on traite et qui précise :
« [17] Il y a possession imputée lorsque l'accusé n'a pas la garde physique de l'objet en question, mais qu'il l'a « en la possession ou garde réelle d'une autre personne » ou « en un lieu qui lui appartient ou non ou qu'[il] occupe ou non, pour son propre usage ou avantage ou celui d'une autre personne » (Code criminel, al. 4(3)a)). Il y a donc possession imputée quand l'accusé : (1) a connaissance de la nature de l'objet, (2) met ou garde volontairement l'objet dans un lieu donné, que ce lieu lui appartienne ou non, et (3) a l'intention d'avoir l'objet dans ce lieu pour son « propre usage ou avantage » ou celui d'une autre personne. »
[32] Cela étant, la poursuite doit prouver :
1- que l'accusé exerçait un certain contrôle
2- sur une substance dont il connaissait la nature
[33] Dans la cause R. c. Fisher, les trois juges de la Cour d'appel de la Colombie-Britannique confirment la culpabilité de l'accusé en précisant que la possession imputée ou la possession conjointe n'exige pas la manipulation physique. Pour la possession imputée, la poursuite doit établir que l'accusé connaissait la présence d'une drogue et qu'il avait une certaine mesure de contrôle sur celle-ci.
[29] Dans un arrêt récent de la Cour suprême, R. c. Morelli, le juge Fish précise :
« [15] Pour l'application du Code criminel, la « possession » définie au par. 4(3) s'entend de la possession personnelle, de la possession imputée et de la possession commune. Seules les deux premières de ces trois formes de possession fautive sont pertinentes en l'espèce. Nul ne conteste que la connaissance et le contrôle constituent des éléments essentiels de ces deux types d'infraction. »
[30] Au paragraphe 16 on y lit :
« [16] Dans le cas d'une allégation de possession personnelle, le critère de la connaissance est formé des deux éléments suivants : l'accusé doit savoir qu'il a la garde physique de la chose donnée et il doit connaître la nature de cette dernière. Il faut en outre que ces deux éléments soient conjugués à un acte de contrôle (qui ne procède pas d'un devoir civique) : Beaver c. The Queen, 1957 CanLII 14 (S.C.C.), [1957] R.C.S. 531, p. 541-542.
[31] C'est le paragraphe 17 de cet arrêt qui est pertinent dans le dossier que l'on traite et qui précise :
« [17] Il y a possession imputée lorsque l'accusé n'a pas la garde physique de l'objet en question, mais qu'il l'a « en la possession ou garde réelle d'une autre personne » ou « en un lieu qui lui appartient ou non ou qu'[il] occupe ou non, pour son propre usage ou avantage ou celui d'une autre personne » (Code criminel, al. 4(3)a)). Il y a donc possession imputée quand l'accusé : (1) a connaissance de la nature de l'objet, (2) met ou garde volontairement l'objet dans un lieu donné, que ce lieu lui appartienne ou non, et (3) a l'intention d'avoir l'objet dans ce lieu pour son « propre usage ou avantage » ou celui d'une autre personne. »
[32] Cela étant, la poursuite doit prouver :
1- que l'accusé exerçait un certain contrôle
2- sur une substance dont il connaissait la nature
[33] Dans la cause R. c. Fisher, les trois juges de la Cour d'appel de la Colombie-Britannique confirment la culpabilité de l'accusé en précisant que la possession imputée ou la possession conjointe n'exige pas la manipulation physique. Pour la possession imputée, la poursuite doit établir que l'accusé connaissait la présence d'une drogue et qu'il avait une certaine mesure de contrôle sur celle-ci.
mardi 4 janvier 2011
Les perquisitions informatiques
Nous vous reproduisons la conclusion d'une chronique de Francis BRABANT concernant les perquisitions informatiques
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Le domaine des perquisitions informatiques est relativement récent et se diversifie en fonction de l’évolution rapide des nouveaux moyens et possibilités de communication électronique et de traitement de l’information. Bien que des éclaircissements législatifs soient souhaitables en matière de communication par courriel, les principes traditionnels régissant les perquisitions, saisies et surveillance sont habituellement suffisamment souples pour s’appliquer à ces développements. Il importe toutefois de bien déterminer les aspects technologiques d’une situation ou d’une intervention avant d’en faire l’analyse sur le plan juridique. La jurisprudence canadienne spécifique aux perquisitions informatiques est encore embryonnaire, et il est à prévoir qu’elle s’inspirera des précédents d’autres pays de droit commun, dans la mesure où leurs principes directeurs sont similaires.
Tiré de Revue du Barreau: volume 62 numéro 2 / Auteur : Francis Brabant
www.barreau.qc.ca/pdf/publications/revue/2002-tome-62-2-p431.pdf
http://collections.banq.qc.ca/ark:/52327/bs62219
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Le domaine des perquisitions informatiques est relativement récent et se diversifie en fonction de l’évolution rapide des nouveaux moyens et possibilités de communication électronique et de traitement de l’information. Bien que des éclaircissements législatifs soient souhaitables en matière de communication par courriel, les principes traditionnels régissant les perquisitions, saisies et surveillance sont habituellement suffisamment souples pour s’appliquer à ces développements. Il importe toutefois de bien déterminer les aspects technologiques d’une situation ou d’une intervention avant d’en faire l’analyse sur le plan juridique. La jurisprudence canadienne spécifique aux perquisitions informatiques est encore embryonnaire, et il est à prévoir qu’elle s’inspirera des précédents d’autres pays de droit commun, dans la mesure où leurs principes directeurs sont similaires.
Tiré de Revue du Barreau: volume 62 numéro 2 / Auteur : Francis Brabant
www.barreau.qc.ca/pdf/publications/revue/2002-tome-62-2-p431.pdf
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