lundi 7 septembre 2009

La deuxième fouille de la sacoche au poste de police a-t-elle été effectuée contrairement à l’art. 8 de la Charte?

R. c. Lamarre, 2008 QCCQ 11151 (CanLII)

[15] La Cour suprême du Canada, sous la plume de la juge L’Heureux-Dubé, dans l’arrêt Cloutier c. Langlois, 1990 CanLII 122 (C.S.C.), [1990] 1 RCS 158, énonce que la common law reconnaît aux policiers le pouvoir de fouiller une personne légalement mise en état d’arrestation et de saisir les objets en sa possession ou dans son entourage immédiat dans le but de s’assurer de la sécurité des policiers et du prévenu, d’empêcher l’évasion du prisonnier ou encore de constituer une preuve contre ce dernier.

[16] Le pouvoir de procéder à une fouille accessoire à une arrestation découle de l’arrestation même. Il n’est pas nécessaire d’établir indépendamment qu’il existe des motifs raisonnables et probables de procéder à une fouille accessoire à une arrestation : voir Cloutier, précité, p. 185-186; R. c. Caslake, 1998 CanLII 838 (C.S.C.), [1998] 1 RCS 51, paragr. 43.

[17] Dans R. c. Stillman, [1997] 1 RCS 107, le juge Cory résume, à la p. 634, les trois conditions à remplir pour qu’une fouille soit valide en vertu du pouvoir de common law de procéder à une fouille accessoire à une arrestation : l’arrestation doit être légale; la fouille doit être effectuée accessoirement à l’arrestation légale; la fouille ne doit pas être effectuée d’une manière abusive.

[18] Dans le cas sous étude, il est admis que l’accusé a été arrêté et détenu légalement à la suite d’une infraction d’avoir conduit un véhicule à moteur alors que sa capacité de conduire ce véhicule était affaiblie par l’effet de l’alcool ou d’une drogue.

[19] La défense admet que la première fouille de la sacoche au poste de police était légale. C’est à cette occasion que le policier a découvert le lecteur optique de cartes de crédit. Il ne faut pas oublier que l’accusé avait déclaré dans l’auto-patrouille, durant son transport au poste de police, qu’il était un dangereux criminel, qu’il était pour tout casser et, a même averti le policier de vérifier son dossier judiciaire.

[20] Voyant son antécédent judiciaire récent de possession de carte de crédit frauduleuse, le policier décide de fouiller plus à fond la sacoche. Il y trouve alors huit cartes de crédit dont l’une s’avère, par la suite, volée. En fait, cette seconde fouille, peu de temps après la première, n’en est que la continuation. La sacoche n’avait tout simplement pas été entièrement fouillée.

[21] Même si le but de la fouille n’est pas lié directement à l’arrestation, celle-ci a été effectuée d’une manière raisonnable par le policier. En l’espèce, l’arrestation légale de l’accusé avait réduit considérablement ses attentes en matière de vie privée. La fouille revêtait un caractère peu envahissant : voir Stillman, précité, p. 147.

[22] De plus, l’intrusion était minime. La fouille d’une sacoche porte moins atteinte à la liberté, à la dignité et à l’intégrité physique d’une personne que la fouille corporelle la moins envahissante ou la fouille sommaire approuvée dans Cloutier, précité, p. 185 : voir aussi Stillman, précité, p. 138 et Caslake, précité, paragr. 48.

[23] Et qu’à l’occasion d’une telle fouille, l’on y trouve une ou plusieurs cartes de crédit obtenues frauduleusement constitue une conséquence de la fouille que l’on ne peut écarter sous prétexte que l’on ne cherchait pas nécessairement la présence de ces cartes lors de l’arrestation de l’accusé. En l’occurrence, il ne s’agit pas d’une expédition de pêche dans le but de découvrir des preuves incriminantes. Cette fouille était justifiée par les circonstances particulières de l’affaire, soit : arrestation et détention légales, déclaration de l’accusé dans l’auto-patrouille, découverte du lecteur optique, antécédents judiciaires de l’accusé, caractère peu envahissant de l’intrusion, bonne foi des policiers.

[24] À la lumière de l’ensemble de la preuve, la Cour estime que la deuxième fouille de la sacoche au poste de police n’était pas abusive, car elle visait un objectif valable dans la poursuite des fins de la justice criminelle, soit recueillir légitimement des éléments de preuve contre l’accusé.

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