samedi 21 novembre 2009

Le juge siégeant dans une cour municipale n’a de compétence que pour les infractions commises sur le territoire de la municipalité concernée

R. c. Carrier, 2009 CanLII 31785 (QC C.M.)

[29] Le juge siégeant dans une cour municipale n’a effectivement de compétence que pour les infractions commises sur le territoire de la municipalité concernée, à la différence d’un juge de la Cour du Québec qui, bien que siégeant dans différents districts, a une juridiction étendue à tous les districts judiciaires.

[30] En vertu de la Loi sur les tribunaux judiciaires (L.R.Q. c. T-16), la compétence d’une cour municipale est restreinte à une ou des localités.

[31] L’article 2 de cette loi édicte ce qui suit :

« Les compétences de la Cour d'appel, de la Cour supérieure et de la Cour du Québec sont générales et s'étendent à tout le Québec; celle des Cours municipales est restreinte à des localités et celle des juges de paix est prévue par la loi ou par leur acte de nomination. »

[32] L’article 43 de Loi sur les cours municipales édicte que le juge a la compétence de la cour où il est affecté.

[36] Lévis est situé dans le district judiciaire de Québec mais constitue une circonscription territoriale au sens du C. cr.

[37] Les juges de cours municipales sont ainsi cloisonnés dans leur territoire, de la même façon que les juges de la Cour du Québec sont cloisonnés au territoire de la province de Québec par rapport aux autres provinces.

[38] Dans Bell c. La Reine, 1983 CanLII 166 (C.S.C.), [1983] 2 R.C.S. 471, on reprochait au défendeur l’importation de stupéfiants, contrairement à l’article 5 de la Loi sur les stupéfiants.

[39] Sommairement, la drogue avait été cachée dans des tabourets expédiés de la Jamaïque à l’adresse personnelle du défendeur, à St-Hubert dans la région de Montréal.

[40] La drogue avait été trouvée à l’Aéroport international de Toronto par des douaniers qui ont avisé la GRC. Les tabourets ont par la suite été expédiés à l’Aéroport de Mirabel et emportés par des agents à leur quartier général où la majeure partie de la drogue a été retirée des tabourets.

[41] Quelques jours plus tard, les tabourets ont été renvoyés à Mirabel où le défendeur est venu les chercher.

[42] La question s’est posée de l’endroit où l’accusation devait être portée. Dans les faits, elle l’avait été à Mirabel dans le district judiciaire de Terrebonne.

[43] La Cour suprême en arrive à la conclusion que l’accusation d’importation est une infraction continue et qu’en conséquence, l’accusation aurait pu être portée tant devant un tribunal Ontarien que dans le district judiciaire de Terrebonne (Mirabel) ou dans le district judiciaire de Longueuil (St-Hubert).

[44] À la page 489 de l’arrêt, voici comment on définit l’infraction continue :

« Une infraction continue n’est pas simplement une infraction dont la perpétration dure ou peut durer longtemps. On peut la décrire comme une infraction où la réunion de l’actus reus et de la mens rea, ce qui rend l’infraction complète, n’a pas aussi pour effet de mettre fin à l’infraction. Les deux éléments essentiels à la perpétration de l’infraction continuent d’être réunis et l’accusé demeure dans ce qu’on peut appeler un état de criminalité pendant toute la durée de cette infraction. Le meurtre n’est pas une infraction continue. Quand l’intention requise de tuer est présente, le crime est complet dès lors qu’il y est donné suite. Un complot en vue de commettre un meurtre pourrait être une infraction continue. L’actus reus et la mens rea existent au moment où l’entente illégale est conclue et ils continuent d’exister jusqu’au moment du meurtre ou jusqu’à l’abandon du complot. Quelle que soit la durée, les comploteurs se trouvent à perpétrer une infraction véritablement continue. Le vol n’est pas une infraction continue. Il est accompli lorsque, avec l’intention requise, on s’empare illégalement du bien d’autrui. Par contre, la possession de biens qu’on savait avoir été obtenus par la perpétration d’un vol est une infraction continue. L’infraction d’enlèvement ne serait pas une infraction continue, mais la séquestration de la victime après l’enlèvement le serait. »

[45] La défense a déposé quelques décisions dont notamment celle de La Reine c. Woods de la Cour municipale de Montréal, EYB 1996-105329. Dans ce dossier, il s’agissait d’une maison de débauche et effectivement, l’endroit précis de l’infraction constituait un élément essentiel; l’infraction de tenir une telle maison de débauche est localisée dans l’espace; il s’agit d’une activité dans un immeuble.

[46] La décision du Juge Jean-Claude Beaulieu dans La Reine c. Beauséjour, 200-36-001491-083, 2 février 2009, CSQ est une belle illustration du cloisonnement des cours municipales.

[47] Le défendeur Beauséjour est interpellé à Boischatel sur le territoire de la ville de Québec et dans le district judiciaire de Québec en relation avec une infraction relative à la conduite d’un véhicule en contravention des articles 253 a) et b) et 255 (1) du C. cr.

[48] Bien que Boischatel se trouve sur le territoire de la ville, la Cour municipale n’exerce pas sa juridiction criminelle sur cette partie de son territoire.

[49] La Cour municipale de Québec n’avait donc pas de juridiction sur l’infraction reprochée au défendeur.

[50] Il faut toutefois mentionner que dans cet arrêt, la preuve ne révèle pas si le défendeur a, à quelque moment que ce soit, circulé sur une partie du territoire de la ville de Québec où elle exerçait sa juridiction criminelle.

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