mardi 14 novembre 2017

Les pouvoirs de fouille d'un véhicule automobile


R. c. Nakhal, 2011 QCCQ 8026 (CanLII)

Lien vers la décision

[22]            Puisqu'il s'agit d'une fouille sans mandat, elle est présumée abusive et il appartient à la Poursuite d'établir par la prépondérance des probabilités que la fouille était autorisée par  une loi qui elle-même n'était pas abusive et que la fouille n'a pas été effectuée de manière abusive.
[23]            La Poursuite justifie la fouille par les pouvoirs de l'agent de la paix lors d'une interception légale. Selon l'article 636 .s.r., les policiers bénéficient d'un large pouvoir pour assurer la sécurité des routes. Lors d'une interpellation, l'agent peut exiger que le conducteur lui remette les documents relatifs à la conduite automobile (permis, immatriculation, assurances).  Cependant, en l'absence de motifs raisonnables et probables d'agir, il ne peut pas mener une enquête générale et bien entendu, l'agent ne peut se servir de ce pouvoir d'interpellation pour une fin oblique non prévue au Code de la sécurité routière.
[24]            En l'espèce, la constable Tremblay n'avait aucun motif raisonnable et probable de croire qu'il s'agissait d'une auto volée. Elle n'en avait même pas le moindre soupçon. Selon son témoignage, sa décision de vérifier le numéro de série de l'auto tient tout simplement de sa pratique routinière à chaque fois qu'elle intercepte un véhicule automobile.
[25]            Généralement, elle peut faire cette vérification sans fouiller l'auto et il s'agit alors d'une fouille «plain view». Cependant, rien dans le Code de la sécurité routière ne donne le pouvoir à un agent de la paix de procéder à une fouille pour voir si une auto est volée. Les limites strictes de l'article 636 permettent une interception pour vérifier la sobriété du conducteur, la validité du permis et des assurances et l'état mécanique du véhicule. Aucune autre fin n'est autorisée par cet article. L'enquête visant à vérifier si l'auto est volée est une enquête relative au Code criminel et ne vise aucunement la sécurité routière. Par conséquent, l'article 636 n'autorise pas la fouille du véhicule dans les circonstances.
[26]            Aucune autre justification n'est avancée par la Poursuite pour cette fouille. Il est clair qu'il ne s'agit pas d'une fouille accessoire à une détention pour fins d'enquête, laquelle est définie par la Cour suprême dans R. c. Mann. Lors d'une détention pour fins d'enquête, le pouvoir des policiers est limité à une fouille préventive nécessaire pour leur sécurité ou celle du public. Selon le témoignage de la constable Tremblay il n'était pas question d'une fouille préventive en l'espèce.
[27]            Il ne s'agit pas non plus d'une fouille consensuelle. Malgré le témoignage de la constable Tremblay à l'effet qu'elle ait demandé la permission d'ouvrir la portière (ce que l'accusé nie) il est évident que ce n'est pas suffisant pour valoir un consentement volontaire et éclairé, d'autant plus que le simple fait d'acquiescer à une demande d'un policier ne saurait établir un consentement valable.
[28]            La fouille était donc abusive et contraire à l'article 8 de la Charte et par conséquent la détention prolongée pour effectuer cette fouille était contraire à l'article 9 de la Charte.

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