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vendredi 8 février 2013

Les éléments constitutifs du crime de faire défaut ou refuser d'obtempérer à un ordre donné par un agent de la paix au terme de l'article 254 (2)b)

Pitre c. R., 2011 QCCS 3555 (CanLII)

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[24] Le crime de faire défaut ou refuser d'obtempérer à un ordre donné par un agent de la paix au terme de l'article 254 (2)b), nécessite que le ministère public fasse la preuve hors de tout doute raisonnable des éléments essentiels suivants :

1 - L'existence d'un ordre valide d'un agent de la paix de fournir l'échantillon d'haleine suffisante à la réalisation d'une analyse convenable,

2 - Le défaut ou le refus de l'accusé de fournir l'échantillon d'haleine nécessaire à la réalisation d'une analyse convenable à l'aide d'un appareil de détection approuvé,

3 - L'intention de l'accusé de produire ce résultat.

[25]             Une fois ces éléments prouvés hors de tout doute raisonnable, il appartient à l'accusé de démontrer, par une preuve prépondérante, qu'il avait une excuse raisonnable pour avoir omis ou refuser d'obtempérer à l'ordre donné

jeudi 7 février 2013

Détermination de la peine relativement à l'infraction de possession de monnaie contrefaite

R. c. Martin, 2012 QCCQ 1215 (CanLII)

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[6] Le Tribunal s’en tiendra aux extraits suivants de la décision du 18 janvier dernier afin de rappeler les faits pertinents.

« [11] Essentiellement, Linda Martin reconnaît avoir utilisé de la monnaie contrefaite, d’avoir effectué des achats avec cette fausse monnaie (les 3 chefs du dossier 550-01-026262-065). Mais elle dit avoir appris, seulement le matin-même de la perquisition pratiquée à son domicile de Jonquière, qu’il y avait dans sa demeure l’importante somme d’argent en question soit environ 535 400 $ en dollars US et plus ou moins 21 500 $ devises canadiennes en fausse monnaie

[30] Notre Cour d’appel préconise depuis fort longtemps une approche axée sur la dissuasion en matière de peines pour des affaires de cette nature.

[31] En 1971 juge Rivard écrivait : « (…) je suis d’opinion que la sentence d’un an est inadéquate et ne comporte pas les conséquences de dissuasion qui me semblent nécessaires pour empêcher ceux-là qui, par l’appât du gain, pourraient être tentés de suivre l’exemple de Sonsalla » (l’accusé). Le père de famille de 38 ans, imprimeur de métier, bon travailleur sans antécédents judiciaires vit sa peine augmentée à quatre ans pour avoir imprimé quelque 24 100 billets de 10 $ chacun.

[32] Le juge Rivard rappelait que la Cour d’appel s’était déjà montrée ferme lorsque le juge Rinfret avait écrit quelques années plus tôt et ce de façon explicite, dans R. c. Lacoste que l’exemplarité devait primer.

[33] Il s’en prenait aux « sentences insignifiantes qui sont bien plus un encouragement à la pratique qu’un détersif valable ». Et, « (…) Même si le criminel n’est pas un récidiviste, la sentence doit en certaines circonstances avoir le caractère punitif et exemplaire».

[34] La sentence d’emprisonnement pour le jeune père de famille sans antécédents qui s’était reconnu coupable de possession de 6 400 billets de 5 $ chacun, passa, malgré les divergences d’opinion exprimées de trois mois à deux ans compte tenu de la sentence déjà purgée.

[35] Ces deux décisions ont été considérées dans de nombreux jugements de nos cours d’instance comme par celles à l’extérieur du Québec.

[36] Dans une décision beaucoup plus contemporaine de notre Cour, et qui fait grand état des propos tenus dans l’affaire Lacoste précitée, juge René de la Sablonnière actualisait la nécessité de traiter sévèrement les possesseurs de fausse monnaie et ceux qui en fabriquent comme c’était le cas dans l’affaire dont il traitait. Il s’inscrivit dans le courant privilégié jusqu’alors mettant l’accent sur la dissuasion et l’exemplarité. Il disait craindre qu’à défaut de ce faire, une peine moindre constituerait pour certains un encouragement à se lancer dans la contrefaçon, opération très lucrative qui se pratique au détriment de l’économie de la société. Il imposa une peine de trois ans de pénitencier à la jeune femme sans antécédents judiciaires, qui tenait un emploi tout en étudiant à l’université. Elle n’était pas seule dans cette opération mais demeurait maître d’œuvre de l’affaire qui impliquait aussi, dans son cas, l’impression des billets.

[37] À Vancouver, un homme de 30 ans sans antécédents judiciaires avait reçu en première instance une peine de neuf mois. Il avait sur sa personne lors de son arrestation 24 billets de 100 $ et en avait écoulé une douzaine avant l’arrestation. Ce jeune travailleur supportait sa femme et deux jeunes enfants[4].

[38] En appel cette peine était maintenue et le juge en chef McEachern affirmait que l’importance de la dissuasion devait primer davantage dans de telles matières que pour bien d’autres infractions.

[39] La Cour d’appel de l’Ontario décida dans R. c. Mankoo qu’une sentence de 23 mois et demi d’emprisonnement était appropriée pour cet homme qui passait autant que 300 000 $ en billets et chèques de voyage. On lui refusa le retrait de plaidoyer et compte tenu de ses antécédents judiciaires et du fait qu’il était en probation lors de la commission des infractions la Cour statua qu’il n’était pas éligible au sursis.

[40] Dans une décision de la Cour provinciale du Nouveau-Brunswick, R. c. Al Saidi, juge Ferguson s’exprima d’une façon fort intéressante :

"[60] There is a parasitic aspect to the offence of passing counterfeit money in that the perpetrators of this type of offence in a calculating way prey on the trusting nature of innocent people, in this case a series of cashiers who find themselves economically at the very base of the retail merchandising paradigm. The offence is calculating and premeditated in its nature since it sometimes involves considerable marketing in order to dupe those who are the intended victims".

[41] Le juge Ferguson fit prévaloir lui aussi, le critère de la dissuasion et compte tenu de la période déjà purgée équivalente à une année de détention imposa une peine de huit mois additionnels à cet individu qui n’avait pas comme l’avait fait ses complices, reconnu sa culpabilité d’avoir utilisé quelque 2 000 $ en billets contrefaits et d’avoir eu possession conjointement avec d’autres de plus de 5 000 $ en billets U.S.A

[53]            Madame Linda Martin purgera une peine de détention ferme de 20 mois pour l’infraction de possession de monnaie contrefaite

Les principes régissant les perquisitions dans des bureaux d’avocats

Directeur des poursuites criminelles et pénales et Shérif de la Chambre criminelle et pénale, 2010 QCCS 2362 (CanLII)

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[19] Dans Lavallee, la Cour suprême déclare inconstitutionnel et annule l'article 488.1 du Code criminel qui établissait la procédure permettant de décider si le secret professionnel de l’avocat s’applique aux documents saisis en vertu d’un mandat de perquisition dans un bureau d’avocats.

[20] Dans sa décision, la juge Arbour, pour la majorité, «formule les principes généraux régissant la légalité, en common law, des perquisitions dans des bureaux d’avocats jusqu’à ce que le législateur juge bon d’adopter de nouvelles dispositions législatives sur la question». Le législateur n'a toujours pas adopté de nouvelles dispositions. Cela est malheureux.

[21] Les principes énoncés sont les suivants:

1. Aucun mandat de perquisition ne peut être décerné relativement à des documents reconnus comme étant protégés par le secret professionnel de l’avocat.

2. Avant de perquisitionner dans un bureau d’avocats, les autorités chargées de l’enquête doivent convaincre le juge saisi de la demande de mandat qu’il n’existe aucune solution de rechange raisonnable.

3. Lorsqu’il permet la perquisition dans un bureau d’avocats, le juge saisi de la demande de mandat doit être rigoureusement exigeant, de manière à conférer la plus grande protection possible à la confidentialité des communications entre client et avocat.

4. Sauf lorsque le mandat autorise expressément l’analyse, la copie et la saisie immédiates d’un document précis, tous les documents en la possession d’un avocat doivent être scellés avant d’être examinés ou de lui être enlevés.

5. Il faut faire tous les efforts possibles pour communiquer avec l’avocat et le client au moment de l’exécution du mandat de perquisition. Lorsque l’avocat ou le client ne peut être joint, on devrait permettre à un représentant du Barreau de superviser la mise sous scellés et la saisie des documents.

6. L’enquêteur qui exécute le mandat doit rendre compte au juge de paix des efforts faits pour joindre tous les détenteurs potentiels du privilège, lesquels devraient ensuite avoir une occasion raisonnable de formuler une objection fondée sur le privilège et, si cette objection est contestée, de faire trancher la question par les tribunaux.

7. S’il est impossible d’aviser les détenteurs potentiels du privilège, l’avocat qui a la garde des documents saisis, ou un autre avocat nommé par le Barreau ou par la cour, doit examiner les documents pour déterminer si le privilège devrait être invoqué et doit avoir une occasion raisonnable de faire valoir ce privilège.

8. Le procureur général peut présenter des arguments sur la question du privilège, mais on ne devrait pas lui permettre d’examiner les documents à l’avance. L’autorité poursuivante peut examiner les documents uniquement lorsqu’un juge conclut qu’ils ne sont pas privilégiés.

9. Si les documents scellés sont jugés non privilégiés, ils peuvent être utilisés dans le cours normal de l’enquête.

10. Si les documents sont jugés privilégiés, ils doivent être retournés immédiatement au détenteur du privilège ou à une personne désignée par la cour

L'admissibilité des documents établis dans le cours normal des affaires

R. v. Schertzer, 2008 CanLII 1836 (ON SC)

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[13] Faced with that obstacle, the prosecution then seeks to rely on the common law requirements for the admissibility of business records. The modern requirements were established in Ares v. Venner 1970 CanLII 5 (SCC), [1970] S.C.R. 608 and were subsequently summarized in R. v. Monkhouse 1987 ABCA 227 (CanLII), (1987), 61 C.R. (3d) 343 (Alta. C.A. ) where Chief Justice Laycraft said, at p. 350:

“In his useful book, Documentarv Evidence in Canada (Carswell Co., 1984), Mr. J.D. Ewart summarizes the common law rule after the decision in Ares v. Venner as follows at page 54:

‘… the modern rule can be said to make admissible a record containing (i) an original entry (ii) made contemporaneously (iii) in the routine (iv) of business (v) by a recorder with personal knowledge of the thing recorded as a result of having done or observed or formulated it (vi) who had a duty to make the record and (vii) who had no motive to misrepresent. Read in this way, the rule after Ares does reflect a more modern, realistic approach for the common law to take towards business duty records.’.”

[15] Further, in Monkhouse, Chief Justice Laycraft went on to explain the fundamental rationale for why business records are admissible without the need to call the author of the records. He said, at pp. 350-351:

“These hearsay records are not to be accepted in evidence merely to avoid the inconvenience of identifying a witness or because many witnesses would be involved, or even because otherwise no evidence would be available. Rather, they can be admitted only if they have come into existence under circumstances which makes them inherently trustworthy. Where an established system in a business or other organization produces records which are regarded as reliable and customarily accepted by those affected by them, they should be admitted as prima facie evidence.” [emphasis added]

[18] It is for this same reason that the prosecution cannot successfully rely on the principled exception to the hearsay rule. In order to fall within that exception, the evidence sought to be admitted must meet the twin tests of necessity and reliability. There is no dispute that these notes are clearly hearsay insofar as they might be admitted against the accused other than Mr. Maodus. Hearsay is presumptively inadmissible. The rationale underlying that presumption is set out in R. v. Khelawon, 2006 SCC 57 (CanLII), [2006] 2 S.C.R. 787 where Madam Justice Charron said, at para. 2:

“As a general principle, all relevant evidence is admissible. The rule excluding hearsay is a well-established exception to this general principle. While no single rationale underlies its historical development, the central reason for the presumptive exclusion of hearsay statements is the general inability to test their reliability. Without the maker of the statement in court, it may be impossible to inquire into that person's perception, memory, narration or sincerity. The statement itself may not be accurately recorded. Mistakes, exaggerations or deliberate falsehoods may go undetected and lead to unjust verdicts. Hence, the rule against hearsay is intended to enhance the accuracy of the court’s findings of fact, not impede its truth-seeking function.”

[19] Madam Justice Charron went on to outline the trial judge’s role as the evidentiary gatekeeper who must decide whether hearsay statements meet a threshold reliability in order to be admissible. Madam Justice Charron said, at para. 3:

“In determining the question of threshold reliability, the trial judge must be mindful that hearsay evidence is presumptively inadmissible. The trial judge’s function is to guard against the admission of hearsay evidence which is unnecessary in the context of the issue to be decided, or the reliability of which is neither readily apparent from the trustworthiness of its contents, nor capable of being meaningfully tested by the ultimate trier of fact. In the context of a criminal case, the accused’s inability to test the evidence may impact on the fairness of the trial, thereby giving the rule a constitutional dimension. Concerns over trial fairness not only permeate the decision on admissibility, but also inform the residual discretion of the trial judge to exclude the evidence even if necessity and reliability can be shown.”

L'état du droit concernant les ordonnances de communication

Société Télé-Mobile c. Ontario, 2008 CSC 12 (CanLII)

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[44] La procédure prévue aux art. 487.012 et 487.015 est engagée sur demande présentée ex parte par un agent de la paix (par. 487.012(3)). Le juge saisi peut ordonner la communication ou la préparation de documents ou de données lorsqu’il existe des motifs raisonnables de croire qu’une infraction a été ou est présumée avoir été commise, que l’information demandée est pertinente pour une enquête en cours et que cette information se trouve en la possession de la personne en cause (par. 487.012(1) et (3)). L’ordonnance peut être assortie « des conditions que le juge de paix ou le juge estime indiquées » (par. 487.012(4)). L’agent de la paix nommé dans l’ordonnance peut à tout moment saisir ex parte le juge qui l’a rendue ou un juge de la même circonscription d’une demande de modification, de renouvellement ou de révocation (par. 487.012(5)).

[45] Avant l’expiration de l’ordonnance, la personne visée peut demander une exemption au motif que les renseignements sont protégés, qu’ils ne sont ni en sa possession ni à sa disposition ou qu’il serait déraisonnable de l’obliger à les communiquer (par. 487.015(1) et (4)). La demande d’exemption suspend l’exécution de l’ordonnance (par. 487.015(3)). Point n’est besoin d’obtenir d’ordonnance lorsqu’une personne accepte de communiquer volontairement les documents ou les renseignements et qu’aucune règle de droit ne lui interdit de le faire (art. 487.014).

[46] Le mécanisme prévu aux art. 487.012 et 487.015 confirme qu’il n’était pas dans l’intention du législateur que le juge se penche sur la question potentiellement complexe et litigieuse du coût au moment de rendre l’ordonnance. Cela aurait en effet été contraire à la volonté du Parlement de créer un mécanisme efficient et rapide d’obtention de renseignements pour les besoins d’une enquête policière.

[47] La procédure ex parte établie dans la loi ne se prête pas à l’examen de la question de savoir si l’ordonnance devrait prévoir l’indemnisation. En effet, pour trancher cette question, le juge aurait besoin de renseignements sur le coût de l’obtempération à l’ordonnance et les répercussions de celle‑ci sur la personne visée. Pareils renseignements ne peuvent être obtenus qu’en donnant avis de la demande à l’intéressé et en lui permettant de justifier son indemnisation. Or, aucune de ces mesures n’est prévue dans les dispositions applicables. De plus, comme le juge Vaillancourt l’a fait remarquer, [traduction] « [s]tatuer sur les frais à cette étape de l’instance pourrait compromettre le secret de l’enquête et empêcher les autorités d’atteindre leurs objectifs » (par. 30).

[48] De même, le juge appelé à « modifier [l’ordonnance, la] renouveler ou la révoquer » en application du par. 487.012(5) est saisi « sur demande présentée ex parte par l’agent de la paix ou le fonctionnaire public nommé dans l’ordonnance ». Là encore, si le législateur avait voulu que le juge puisse alors statuer sur l’indemnisation, il aurait vraisemblablement établi un mécanisme permettant à l’une ou l’autre des parties de présenter une demande de modification de l’ordonnance, de sorte que la demande puisse être entendue inter partes.

vendredi 1 février 2013

Les principaux schémas de détournements d’actifs relatifs au cycle « Vente »

Les principaux schémas de détournements d’actifs relatifs au cycle « Vente »

- Romain DUPRAT -


La mise en place de mesures efficaces de prévention et de détection des fraudes nécessite de connaître les principaux schémas de détournement d’actifs. Cet article expose un certain nombre de cas fréquemment rencontrés au niveau du cycle « Vente » des entreprises.

Sommaire




Une recherche efficace des détournements d’actifs commis par les employés rend nécessaire la maîtrise des principaux schémas de fraude, afin d’adapter les contrôles à effectuer et les outils à utiliser aux objectifs poursuivis. Il convient de connaître non seulement la méthode de détournement mais aussi la technique de dissimulation du détournement qui, si elle s’avère efficiente, permettra la réitération de l’acte frauduleux. En effet, pour un employé fraudeur, la dissimulation de la fraude est la partie la plus importante du délit, car elle lui permettra, d’une part, de ne pas être poursuivi et de conserver son travail et, d’autre part, de continuer à s’enrichir avec ces détournements, tant que l’entreprise victime ne se rend pas compte du préjudice subi.

Les fraudes peuvent concerner tous les cycles de l’entreprise, qu’ils soient opérationnels ou administratifs. Cet article se limitera à la présentation de schémas de fraude spécifiques au cycle « ventes/clients ».

Le processus « ventes » s’entend de la prise d’une commande d’un client à l’encaissement du règlement en passant par la livraison du bien commandé, la facturation et la comptabilisation de l’opération concernée.

Ce cycle peut être considéré comme étant à risque du fait du volume important de transactions qu’il comprend et des flux d’argent qu’il génère, en entrées principalement (règlements des clients) mais également en sorties (remboursements, avoirs ou remises).

Les schémas présentés ci-après vont concerner soit des ventes « sur compte », c’est à dire avec une inscription dans un compte client, que l’on retrouvera dans la plupart des entreprises commerciales, soit des ventes « au comptant » réalisées en magasin, cas spécifiques aux entreprises de commerce de détail. En revanche, ne seront pas évoquées les ventes effectuées par des représentants.


La fraude sur encaissements – « skimming » en anglais – permet à toute personne en liaison directe avec le process de réception de trésorerie de dérober le fruit des ventes ou des créances clients avant leur enregistrement comptable dans les livres de la société victime. Cela signifie que ces schémas n’offrent pas de piste d’audit directe. En effet, les fonds détournés n’ayant jamais été enregistrés dans le système d’informations de l’entreprise, celle-ci n’a pas conscience de la réception de l’argent. En conséquence, la détection de ce type de fraude va s’avérer très difficile, ce qui la rend très fréquente parmi les cas de détournements d’actifs.



La forme la plus basique de la fraude sur encaissements consiste pour un employé à vendre des produits ou des services de l’entreprise sans en enregistrer la vente dans les comptes. L’employé va simplement prendre pour lui l’argent reçu du client au lieu de le remettre à son employeur.


Une autre forme de fraude peut être la réalisation de ventes en dehors des heures d’ouverture normales sans prévenir son employeur. Les fraudeurs peuvent ainsi conserver la totalité du produit des ventes faites durant ces périodes, car l’entreprise n’est pas au courant de ces activités.

Ce type de fraude se retrouve principalement dans les activités de commerce de détail, comme celle de ce responsable de magasin qui ouvrait son commerce deux heures avant l’ouverture officielle. Pendant cette période, il enregistrait les ventes de façon habituelle, mais à la fin de la journée, il retirait le support qui avait pris en compte les enregistrements ainsi que l’argent accumulé durant cette période.


Le circuit allant de la réception du règlement (chèque ou liquidités) en provenance des clients jusqu’au dépôt en banque dudit règlement est particulièrement exposé au risque de fraude. En effet, il est « tentant » pour chacune des personnes intervenant sur cette chaîne de détourner à son profit l’argent de l’entreprise. Toutefois, si le fraudeur ne peut pas passer d’écritures comptables (exemple : service accueil) ou de modifications dans les ventes enregistrées (exemple : caissière d’un magasin sans possibilité de modifications des tickets), l’anomalie sera rapidement constatée, soit par le service comptabilité dans le cadre du suivi des créances clients, soit lors de l’inventaire des caisses. Dans le cas contraire, il dispose de plusieurs moyens de dissimulation de son acte :


Une des situations particulièrement risquée en termes de fraude existe lorsque la personne en charge de l’encaissement des règlements s’occupe également des enregistrements comptables. En effet, il lui est aisément possible de falsifier les enregistrements comptables pour dissimuler son acte frauduleux.

Lors du détournement d’un règlement, le fraudeur doit faire en sorte que le compte du client qui a payé soit soldé, ainsi il ne sera pas considéré comme ayant dépassé l’échéance de paiement et ne sera pas relancé. En effet, en cas de rappel effectué auprès de ce client, celui-ci signalerait qu’il a déjà réglé et une enquête serait menée pour savoir où est passé l’argent. La probabilité que le fraudeur, de part sa position professionnelle privilégiée, soit confondu est alors très forte.

Une technique de dissimulation consistera à simplement annuler la transaction après avoir dérobé les fonds. Ainsi, l’annulation de la vente permet de solder le compte du client et il n’apparaît plus de trace de la vente.

Afin d’être en mesure d’identifier ce genre d’anomalie, l’entreprise doit posséder un logiciel comptable qui garde les traces de l’ensemble des transactions effectuées, y compris celles qui ont été annulées.


Pour dissimuler sa fraude, l’employé peut également utiliser des schémas d’écritures comptables anormaux. L’objectif reste toujours de faire en sorte, d’une part, que le compte client soit soldé pour éviter que celui-ci ne soit relancé, et, d’autre part, que les comptes de banques soient équilibrés et justifiés par rapport aux relevés bancaires.

Ainsi, l’employé fraudeur peut solder le compte du client en créditant son compte auxiliaire par le débit d’un compte autre que celui de la banque. Toutefois, afin que cette opération soit peu visible, le compte à débiter doit posséder plusieurs caractéristiques :
- il doit comprendre beaucoup de mouvements,
- il doit être difficile à auditer,
- il doit être peu surveillé,
- le solde doit être suffisamment élevé pour que la revue analytique ne signale rien.

La seule technique de détection de ce genre de manipulation passe par une lecture des journaux comptables et une revue détaillée des écritures. Mais, si les volumes sont importants, ce contrôle ne peut être réalisé que par un logiciel spécialisé.


Cette technique de dissimulation connue sous le nom de « lapping » par les anglo-saxons consiste à imputer sur le compte client dont on a détourné les fonds le règlement d’un autre client ; et de répéter cette manipulation au fur et à mesure des règlements des clients.

Exemple : le fraudeur détourne l’argent reçu d’un client A ce qui laisse le compte de ce dernier débiteur alors qu’il aurait du être soldé. Lorsque le client B règle sa créance, les sommes reçues sont imputées sur le compte du client A, régularisant ainsi la situation de ce dernier. Le règlement d’un troisième client permettra de solder le compte du client B et donc de rétablir sa position réelle, et ainsi de suite.


Ces schémas de détournements d’actifs sont essentiellement réalisables par les personnes en contact avec le client. Ils se différencient des schémas dits « hors enregistrements » par le fait qu’ils engendrent effectivement un enregistrement, mais qui n’est pas conforme à la réalité de la vente.


La sous-facturation est une forme de fraude fréquemment utilisée par les employés qui travaillent à la caisse d’un magasin.

Typiquement, un employé enregistre une vente pour un montant inférieur à celui effectivement payé par le client. Puis il détourne à son profit la différence entre le prix réel d’achat et le montant de la vente enregistré dans le système.

Egalement, la sous-facturation peut être commise dans des cas de collusion. Cela permet à un complice d’acheter un bien à un prix inférieur au tarif normal. L’employé fraudeur récupère alors auprès de son complice une partie de l’économie qu’il lui a fait réaliser.


Les employés qui sont habilités à accorder des remises peuvent utiliser cette faculté pour détourner des fonds lors de ventes. Par le biais de fausses remises, l’employé fraudeur peut, d’une part, recevoir le règlement complet d’une vente, et, d’autre part, enregistrer en comptabilité la transaction comme si le client avait bénéficié d’une remise. Ainsi, il est à même de pouvoir dérober la somme correspondant à la remise fictivement accordée sans déséquilibrer les comptes de l’entreprise.


Dans les cas de surfacturation, les clients surpayent à leur insu les biens qu’ils ont acquis et la différence est conservée par le fraudeur. Pour surfacturer, c’est à dire facturer au delà du prix fixé par l’entreprise, le fraudeur doit soit avoir la possibilité de modifier les prix des articles vendus, soit établir des factures manuellement, ou encore il peut ne pas faire bénéficier aux clients facturées des conditions tarifaires promotionnelles.

Situations favorables à la fraude sur encaissement

D’une manière générale, la fraude sur encaissement est facilitée lorsque les clients effectuent leur paiement en espèces. Toutefois, elle peut aussi se produire avec des règlements par chèque même si cela nécessite de la part du fraudeur des manipulations complémentaires, qui peuvent, dans certains cas, être difficiles à réaliser.

Par ailleurs, en termes de contrôle interne, la fraude sur encaissement relative au cycle « ventes » est favorisée dans les entreprises où la séparation des fonctions présente des défaillances, notamment dans les cas suivants :
- la personne qui réceptionne en premier lieu les règlements est dépendante du service comptable, ou du caissier ;
- les règlements reçus ne font pas l’objet d’un relevé par la personne qui ouvre le courrier ;
- le caissier a accès aux journaux de ventes et de banques ;
- le comptable en charge des clients prépare les remises en banques ;
- aucune vérification interne ou externe (circularisation) n’est réalisée.


Le principe général de la fraude sur décaissement consiste à faire en sorte que l’entreprise victime décaisse de l’argent que le fraudeur puisse détourner. Cette technique implique deux caractéristiques : d’une part, les apparences doivent convaincre l’entreprise que le décaissement qu’elle va réaliser est valide et justifié ; d’autre part, l’argent décaissé par la société doit pouvoir être détourné à sa sortie par le fraudeur.

Donc, à la différence de la fraude sur encaissement ou du vol, quand une fraude est basée sur un décaissement, le mouvement de sortie de fonds est réellement enregistré en comptabilité. Une transaction frauduleuse vient alors maquiller cette opération de façon à ce que le décaissement apparaisse légitime.


Dans le cas d’un remboursement fictif, l’employé fraudeur effectue une transaction comme si un client retournait une marchandise.

Cette manipulation a deux implications :
- Elle permet au fraudeur de récupérer à son compte la somme d’argent correspondant à la valeur du bien fictivement rendu. Le système légitime alors le décaissement puisqu’en contrepartie l’entreprise s’est théoriquement enrichie de la marchandise rapportée. De plus, le compte comptable de caisse est égal au montant effectivement en caisse.
- Elle génère une entrée dans les stocks de la société. Comme la transaction est fictive, les stocks deviennent surévalués. Cela perturbe alors le suivi des quantités et peut engendrer des problèmes de rupture de stock car le réapprovisionnement ne s’effectue pas sur des bases réelles.


A la suite d’un problème (de qualité ou de quantité) survenu dans la livraison d’un bien ou d’un service, l’entreprise peut être amenée à rembourser à son client une partie de son achat. Une technique de fraude consiste à enregistrer un remboursement à effectuer supérieur à ce que réclame le client et à encaisser à son compte la différence.

Selon la même technique, l’employé fraudeur peut, au lieu de créer entièrement un remboursement fictif comme vu précédemment, préférer surévaluer le remboursement total d’un réel retour de marchandise et encaisser la différence.

Ainsi, dans le cas où un client ramènerait un bien d’une valeur de 100 €, l’employé enregistrerait un retour pour une valeur de 200 €. Il rendrait les 100 € au client et empocherait les 100 € restants. Comptablement la caisse serait équilibrée, mais il en résulterait un écart d’inventaire de 100 €.

Ce genre de malversation existe principalement dans les organisations où les remboursements sont faits en espèces plutôt qu’en chèque ou en virement. En effet, le fraudeur ne pourrait détourner une partie du paiement effectué par chèque.


Dans ce schéma-ci, l’employé fraudeur, après avoir effectué une vente et après le départ du client, annule la transaction et retire de la caisse l’argent correspondant, comme s’il l’avait rendu au client.


Afin que ces fraudes sur décaissement soient le moins visibles possible, les employés fraudeurs préfèrent habituellement détourner de multiples petites sommes plutôt qu’une seule somme importante. En effet, de nombreuses entreprises fixent des seuils au delà desquels une approbation particulière doit être obtenue pour procéder à un remboursement. Les fraudeurs font donc en sorte de dérober des sommes suffisamment petites, pour ne pas avoir besoin d’autorisation.

Ainsi, un employé américain a effectué plus de 1.000 remboursements fictifs ou surévalués, toujours en dessous du seuil d’approbation de 15 $. Sa fraude a finalement été découverte lorsqu’il a commencé à réaliser des remboursements fictifs avant les heures d’ouverture. Toutefois, avant que sa malversation ne soit détectée, il a pu détourner plus de 11.000 $ à son entreprise.

Les écarts d’inventaires
Une des caractéristiques de la fraude sur décaissements liée au cycle « ventes » est qu’elle engendre, dans la majorité des cas, des anomalies dans les stocks, car il a fallu enregistrer dans le système le retour d’un bien qui n’existe pas. Aussi, lors du comptage physique des stocks, sera constaté un écart d’inventaire. Toutes les entreprises font état d’écarts entre le stock théorique et le stock réel, notamment les entreprises du secteur de la distribution de détail, qui constatent régulièrement une démarque inconnue qui peut provenir de fraudes internes ou externes mais aussi d’erreurs.

Tant que ces écarts sont non significatifs au regard du total des stocks et compte tenu de l’activité de la société, il y a peu de chance que l’entreprise procède à des investigations suffisamment poussées qui permettraient de remonter jusqu’à la fraude. En revanche, si la fraude devait générer un écart important, cela nécessiterait de la part du fraudeur de maquiller cet écart en utilisant différents moyens qui sont fonction des ses habilitations, comme surévaluer les comptages lors de l’inventaire, enregistrer des mises au rebut, ou encore constater un crédit fictif dans le stock comptable.

Situations favorables à la fraude sur décaissement
La fraude sur décaissement relative au cycle « ventes » est favorisée dans les organisations où la séparation des fonctions est peu mise en place et où le suivi des opérations d’annulation ou de remboursement est faiblement réalisé, notamment dans les cas suivants :
- lorsqu’un employé de caisse est habilité à effectuer des annulations,
- lorsqu’un employé de caisse procède lui-même à l’inventaire de la caisse et/ou des stocks,
- si les transactions d’annulation ne sont pas correctement justifiées et documentées,
- si les écritures d’annulation et de remboursement ne font pas l’objet d’une analyse détaillée dans le temps et par employé,
- lorsque la société n’étudie pas les numéros manquants dans les séquences numériques des transactions.

Egalement, les entreprises peuvent faire plus facilement l’objet de fraude sur décaissement en cas d’insuffisance dans le suivi des stocks et dans l’analyse des écarts d’inventaires.
 
Tiré de:  Les principaux schémas de détournements d’actifs relatifs au cycle « Vente »  - Romain DUPRAT -
http://www.pansard-associes.com/publications/audit-comptabilite/controle-interne-fraudes/detournement-actifs-cycle-ventes.htm

Savoir reconnaître les stratagèmes à la Ponzi

 Savoir reconnaître les stratagèmes à la Ponzi| KPMG | CA
(Extraits sélectionnés de ce texte)

Les stratagèmes à la Ponzi – un type d’escroquerie à la façon des ventes pyramidales dans laquelle les premiers investisseurs touchent un revenu provenant de l’argent perçu auprès des nouveaux investisseurs – deviennent de plus en plus courants au Canada.

Lorsqu’un tel stratagème est soupçonné, le fait de savoir quoi faire peut fortement contribuer à réduire le nombre de victimes lésées par ce genre de fraude.
 
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Signes précurseurs

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 Signes précurseurs d’un possible stratagème à la Ponzi
      • rendement du capital investi supérieur à la normale;
    • aucun impôt déclaré dans la déclaration de revenus;
    • indication d’absence de risque ou de risque faible;
    • publicité faite de bouche à oreille;
    • groupes ciblés selon une affiliation religieuse ou une appartenance ethnique ou sociale;
    • caractère apparemment exclusif de l’offre : il faut être recommandé par une personne pour pouvoir investir;
    • urgence d’investir signifiée ou sous-entendue;
    • le manipulateur se fait souvent appeler « gourou », « maître » ou « génie »;
    • confiance aveugle : manque de connaissances du secteur des investissements de la part des investisseurs;
    • absence ou faible quantité d’écritures documentant les investissements.
Signes précurseurs d’un effondrement imminent
    • recherche impérative d’autres investisseurs; promesse de taux plus élevé;
    • excuses et délais en réponse aux demandes d’encaissement;
  • les demandes concernant l’argent investi restent sans réponse;
  • absence de documents sur les placements;
  • impossibilité de joindre le « gourou »;
  • la rumeur concernant la disparition du « gourou » se répand.

Devoir de diligence raisonnable
Afin d’éviter de tomber dans le filet d’un stratagème à la Ponzi, l’investisseur doit prendre quelques mesures de précaution pour mieux comprendre la légitimité de l’investissement envisagé et du conseiller :

    • effectuez une recherche sur le « gourou » et son entreprise sur Internet. Il ne serait pas étonnant que certains de ces mêmes « conseillers en placement » aient déjà été accusés ou prétendument impliqués en lien avec une occasion de placement suspecte ou qui n’a pas abouti;
    • assurez-vous que le conseiller est inscrit en bonne et due forme auprès de l’Autorité des marchés financiers (ou de la CVMO ou de tout autre organisme de réglementation similaire) afin de pouvoir solliciter, accepter et investir des fonds. En Ontario, toute entreprise ou personne qui offre d’investir des sommes dans cette province doit généralement être inscrite auprès de la CVMO3;
    • obtenez des renseignements documentés sur l’utilisation des fonds et sur le niveau de risque associé au placement ainsi que des explications détaillées justifiant l’atteinte de rendements élevés. Bien que certains conseillers bien intentionnés puissent hésiter à révéler le secret de leur « filon d’or », dites-vous, comme le vieux dicton qui tend à être valable dans la plupart des cas, que si c’est trop beau pour être vrai…;
    • vérifiez les prétentions du gourou et ses sources d’investissement auprès d’un organisme de placement digne de confiance ou auprès d’un avocat ou d’un comptable afin de vous assurer de la légalité et de la viabilité de la stratégie d’investissement;
  • communiquez avec les autres investisseurs pour savoir s’ils se sont vu offrir les mêmes propositions d’investissement. Toute différence devrait éveiller un soupçon.
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Donner l’alerte
Afin d’empêcher ou de réduire les pertes, il y a lieu de signaler toute escroquerie soupçonnée, dès que les sommes investies semblent irrécupérables, et de prendre les mesures suivantes :

  • rassembler tous les documents liés aux placements, y compris les billets à ordre, les relevés de placements (s’il en existe), les chèques annulés initialement libellés à l’ordre du conseiller en placement ou de son entreprise, de même que tout document attestant les paiements reçus. Ces documents contiennent des renseignements dont les autorités ont besoin;
  • formuler une plainte auprès de la CVMO4;
  • formuler une plainte au corps policier de la région;
  • discuter avec un avocat des divers recours juridiques qui s’offrent à vous pour récupérer les sommes investies.
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Le dédommagement à la victime doit toujours être envisagé lors de la détermination de la peine

Le ré-interrogatoire

R. v. Lavoie, 2000 ABCA 318 Lien vers la décision Re-examination of Stephen Greene, Re-cross-examination of Stephen Greene   [ 46 ]        T...