Henry c. R., 2007 QCCS 6613 (CanLII)
[20] L'article 264.1(1)a) a fait l'objet de plusieurs analyses par les tribunaux, notamment dans R. c. McGraw [1991] 3 R.C.S. 72 , la Cour suprême, parlant de la véritable nature de l'infraction, réitère ce qu'elle avait déjà dit dans R. c. Leblanc [1989] 1 R.C.S. 1583 :
«…Dans cet arrêt, la Cour a approuvé la décision du juge du procès selon laquelle la question de savoir si la personne qui menace a l'intention d'exécuter la menace n'est pas pertinente pour déterminer si une déclaration de culpabilité peut être maintenue. C'est l'élément de crainte insufflé à la victime par la personne qui protège la menace qui est visé par la sanction criminelle. L'article 264.1 prévoit que la menace doit avoir été proférée et transmise sciemment par l'accusé. Le ministère public est donc tenu d'établir que l'accusé avait l'intention de menacer l'accusé de blessures graves. Toutefois, pour déterminer si une telle intention suggestive est présente, il faudra souvent se fonder dans une large mesure sur un examen des mots employés par l'accusé. La prochaine étape est l'examen des mots contestés.
[…] Alors, de quelle façon un tribunal devrait-il aborder cette question ? La structure et le libellé de l'alinéa 264.1(1)a) indique que la nature de la menace doit être examinée de façon objective; c'est-à-dire, comme le ferait une personne raisonnable et ordinaire. Les termes qui constitueraient une menace doivent être examinés en fonction plusieurs facteurs. Ils doivent être examinés de façon objective et dans le contexte de l'ensemble du texte ou de la conversation dans lequel ils s'inscrivent. De même, il faut tenir compte de la situation dans laquelle se trouve le destinataire de la menace. La question à trancher peut être énoncée de la manière suivante. Considéré de façon objective, dans le contexte de tous les mots écrits ou énoncés et compte tenu de la personne à qui ils s'adressent, les termes visés constituent-ils une menace de blessure grave pour une personne raisonnable ?
[…]
Aux fins de l'al. 264.1(1)a) du Code criminel, l'expression blessure grave signifie toute blessure ou lésion, physique ou psychologique, qui nuit d'une manière importante à l'intégrité, à la santé ou au bien-être d'une victime. Pour déterminer si des termes écrits ou prononcés constituent une menace de causer des blessures graves, ils doivent être examinés dans le contexte où ils ont été prononcés ou écrits compte tenu de la personne à qui ils s'adressaient et des circonstances dans lesquelles ils ont été proférés. Ils doivent être examinés d'une manière objective et la signification attribuée aux termes devrait être celle que leur donnerait une personne raisonnable.
[21] Dans R. c. Clemente [1994] 2 R.C.S. 758 , la Cour suprême réitère l'actus reus et la mens rea de l'infraction tout en faisant référence à l'arrêt McGraw qu'elle avait déjà rendu :
« Sous le régime de la présente disposition, l'actus reus de l'infraction est le fait de proférer des menaces de mort ou de blessures graves. La mens rea est l'intention de faire en sorte que les paroles prononcées ou les mots écrits soient perçus comme une menace de causer la mort ou des blessures graves, c'est-à-dire comme visant à intimider ou à être pris au sérieux.
Pour décider si une personne raisonnable aurait considéré les paroles prononcées comme une menace, le Tribunal doit les examiner objectivement, en tenant compte des circonstances dans lesquelles elles s'inscrivent, de la manière dont elles ont été prononcées et de la personne à qui elles étaient destinées.
De tout évidence, des paroles prononcées à la blague ou de manière telle qu'elles ne pouvaient être prises au sérieux ne pourraient mener une personne raisonnable à conclure qu'elles constituaient une menace. » (nos soulignements)
[22] La Cour d'appel, dans l'affaire Andrew Rudnicki, [2004] J.Q. no 11631, reprend les préceptes émis par la Cour suprême et dit ceci des éléments constitutifs de l'art. 264.1(1)a) :
37 De plus, le récipiendaire de la menace n'a pas à être la victime potentielle. En effet, la menace peut viser une autre personne, un animal ou même un bien (art. 264.1 C.cr.); cela dispose du deuxième moyen. Lorsqu'il s'agit d'une autre personne, cette dernière n'a pas à être au courant de la menace (R. c. Clemente, précité; R. c. Bonneville, [1996] A.Q. no 2735 (C.A.) (QL).
39 Au niveau de l'actus reus, il faut cependant que le message transmis constitue objectivement une menace; en d'autres mots, qu'il constitue pour une personne raisonnable qui le recevrait, un message menaçant ou à prendre au sérieux. Il appartient au juge des faits de déterminer si le message constitue une menace de causer la mort ou une blessure pour une personne raisonnable (R. c. Kafé, (1996) 45 C.R. (4th) 390 (C.A.).
40 Pour décider si une personne raisonnable aurait considéré les paroles prononcées comme une menace, le tribunal doit les examiner objectivement, en tenant compte des circonstances dans lesquelles elles s'inscrivent, de la manière dont elles ont été prononcées et de la personne à qui elles étaient destinées. Le passage suivant de l'arrêt R. c. McCraw, [1991] 3 R.C.S. 72 , aux p. 82-83, repris dans l'arrêt R. c. Clemente, précité, est indicatif de la manière dont le tribunal devrait aborder les accusations de menace :
Alors, de quelle façon un tribunal devrait-il aborder cette question? La structure et le libellé de l'al. 264.1(1)a) indiquent que la nature de la menace doit être examinée de façon objective; c'est-à-dire, comme le ferait une personne raisonnable ordinaire. Les termes qui constitueraient une menace doivent être examinés en fonction de divers facteurs. Ils doivent être examinés de façon objective et dans le contexte de l'ensemble du texte ou de la conversation dans lesquels ils s'inscrivent. De même, il faut tenir compte de la situation dans laquelle se trouve le destinataire de la menace.
41 La mens rea de l'infraction est l'intention de faire en sorte que les paroles prononcées ou les mots écrits soient perçus comme une menace de causer la mort ou des blessures, c'est-à-dire comme visant à intimider ou à être pris au sérieux (R. c. Clemente, précité). Le fait que l'accusé n'ait pas eu l'intention de mettre à exécution la menace n'est pas un élément essentiel; seule compte l'intention que la menace soit prise au sérieux (R. c. Leblanc, [1989] 1 R.C.S. 1583).
76 Il n'est pas non plus nécessaire de prouver une intention de transmettre les menaces aux victimes visées dans le message ou une connaissance des menaces de la part des victimes
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