jeudi 31 décembre 2009

Une peine d’emprisonnement, même avec sursis, n’est pas la seule façon d’exprimer les éléments de dissuasion et dénonciation dans un cas de fraude

R. c. Riopelle, 2009 QCCQ 1476 (CanLII)

[8] D'emblée je dois dire que je n'accepte pas la suggestion que la prison – même l’emprisonnement avec sursis - s'impose toujours dans un cas de fraude. Il n'y a pas de peine minimale pour cette infraction. Donc pour la fraude, tout en conformité avec les principes énoncés dans le Code criminel et dans la jurisprudence, je dois prononcer une peine qui est juste et appropriée pour l'infraction et le contrevenant en l'espèce.

[9] J’ai déjà noté les facteurs aggravants et atténuants qui sont pertinents, ainsi que la gravité subjective et objective de l’infraction. Je tiens en considération les facteurs énumérés par la Cour d’appel dans Lévesque et Juteau. Selon cette jurisprudence, une peine pour fraude doit être dissuasive et exemplaire, mais en même temps proportionnelle.

[10] L’accusé reconnaît que par ses gestes il a commis une grave erreur. Il voulait rectifier sa situation financière après son échec comme propriétaire gérant d’un restaurant. Bien entendu, la fraude a duré plusieurs mois et elle était préméditée, mais elle n’était pas motivée par cupidité. L’accusé a commencé à rembourser tout le montant fraudé et il s’engage à compléter ce remboursement d’ici quinze mois.

[11] Une peine d’emprisonnement, même avec sursis, n’est pas la seule façon d’exprimer les éléments de dissuasion et dénonciation. Compte tenu de toutes les circonstances en l’espèce – le remords, le plaidoyer de culpabilité, le remboursement, et les autres facteurs mentionnés dans le rapport présentenciel - les mêmes objectifs peuvent être réalisés dans le cadre d’une peine suspendue avec une ordonnance de probation qui comprend une période de travaux communautaires et une ordonnance de remboursement à la victime.

[12] Je tiens à souligner le jugement du juge Pierre Belisle dans Cadoch, qui m'a beaucoup aidé à rendre ma décision aujourd'hui. Il s'agissait d'une fraude de 15000.00$ avec abus de confiance. Un remboursement du montant fraudé était remboursé en totalité. Le juge Belisle a signalé l'importance du plaidoyer de culpabilité à la première occasion, les remords manifestés par le contrevenant, le remboursement intégral du montant fraudé et le fait que le contrevenant ait un nouvel emploi. Pourtant, il a souligné la gravité objective et subjective du crime et le fait que l'infraction ne soit pas un agir spontané mais bien orchestré. Je note aussi que dans Cadoch la poursuite a suggéré une sentence suspendue avec une ordonnance de probation d'une durée de trois ans. La défense a proposé une absolution inconditionnelle. Je cite les conclusions du juge Belisle au paragraphe 28 de ses motifs:

La peine suggérée par la poursuite est raisonnable dans les circonstances. Elle atteint les objectifs de dénonciation et de dissuasion générale. Elle est également proportionnelle à la gravité objective et subjective de l’infraction et au degré de responsabilité du délinquant (art. 718.1 C.cr.). Elle est aussi adaptée aux circonstances aggravantes et atténuantes liées à la perpétration de l’infraction et à la situation personnelle de l’accusé (art. 718.2a) C.cr.).

Les mêmes conclusions sont justes dans les circonstances du dossier qui nous occupe aujourd'hui.

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