mardi 4 octobre 2011

Le tribunal ne peut infliger une amende que s’il est convaincu, selon la prépondérance des probabilités, que le délinquant a la capacité de la payer

R. c. Topp, 2011 CSC 43 (CanLII)

L’objectif du par. 734(2) du Code criminel consiste à empêcher que des amendes soient infligées à des délinquants réellement incapables de les payer, et ainsi diminuer le nombre de délinquants incarcérés pour défaut de paiement. Le tribunal ne peut infliger une amende que s’il est convaincu, selon la prépondérance des probabilités, que le délinquant a la capacité de la payer (ou de s’en acquitter en vertu de l’art. 736, ce qui n’est pas possible en l’espèce). En pratique, le par. 734(2) impose à la partie qui propose l’amende le fardeau de convaincre le tribunal que le délinquant est en mesure de la payer. La partie qui s’oppose à l’amende n’est pas tenue de s’acquitter d’un fardeau de preuve formel, et elle demeure libre d’avancer que la preuve dont dispose le tribunal ne saurait convaincre ce dernier que le délinquant est capable de la payer.

Il arrive souvent qu’en l’absence d’une explication raisonnable contraire le fait que le délinquant a reçu, dans le passé, des fonds obtenus illégalement permette de déduire qu’il a toujours suffisamment de fonds pour payer une amende. Cependant, le juge du procès n’est pas tenu, en droit, de parvenir à cette conclusion. La valeur probante que l’on peut raisonnablement accorder au fait que le délinquant a reçu, dans le passé, des fonds obtenus illégalement variera en fonction d’au moins deux facteurs, à savoir le délai qui s’est écoulé entre le moment où il les a acquis et celui où il se voit imposer une peine, et l’importance de la somme en question. Le texte même du par. 734(2) ainsi que la volonté du législateur d’éviter que ne soient incarcérés des délinquants véritablement incapables de payer leurs amendes appuient la conclusion qu’il ne faut pas toujours déduire d’une preuve établissant que le délinquant a déjà reçu des fonds obtenus illégalement qu’il a toujours la capacité de payer une amende.

Le ministère public n’est pas tenu d’identifier ou de localiser les éléments d’actif précis dont le délinquant peut se servir pour payer l’amende; il peut plutôt se fonder sur une preuve indirecte pour établir la capacité de payer du délinquant. Par contre, le par. 734(2) prévoit expressément que le tribunal doit conclure formellement que le délinquant est capable de payer une amende, au lieu d’imposer à la partie qui s’oppose à l’amende le fardeau de le convaincre que le délinquant incapable de le faire.

En l’espèce, la juge du procès n’a pas commis d’erreur susceptible de révision en refusant d’infliger une amende à l’accusé. Elle a expressément pris en compte l’omission de ce dernier d’expliquer ce qu’il était advenu des fonds dont il s’était frauduleusement emparé. Elle n’a pas omis de tenir compte d’un quelconque élément pertinent avant de prendre sa décision. Elle n’a pas imposé au ministère public le fardeau de déterminer où se trouvaient les fonds manquants. Elle n’était tout simplement pas convaincue que l’accusé était en mesure de payer l’amende que le ministère public cherchait à lui faire imposer. Elle pouvait, en droit, tirer une telle conclusion sur la base de sa propre appréciation des faits.

Aucun commentaire:

Publier un commentaire

Le processus que doit suivre un juge lors de la détermination de la peine face à un accusé non citoyen canadien

R. c. Kabasele, 2023 ONCA 252 Lien vers la décision [ 31 ]        En raison des arts. 36 et 64 de la  Loi sur l’immigration et la protection...