R. c. Perrier, 2013 QCCS 1658 (CanLII)
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[65] La question de la collaboration mérite quelques commentaires. Faciliter une confiscation inévitable est certes un geste de collaboration avec les autorités, mais il ne s'agit pas de la collaboration au sens normalement retenu par la jurisprudence, comme dans le cas de M. Cantin qui, dans la présente affaire, a collaboré avec les autorités policières et a témoigné à plusieurs reprises devant les tribunaux.
[66] En effet, on parle généralement de collaboration lorsque le délinquant collabore réellement avec les autorités en fournissant de l'information et en témoignant lors d'un procès.
[67] Les auteurs de la huitième édition de l'ouvrage Sentencing écrivent :
The circumstances in which credit should be given for assistance to the police are deliberately broad. In order to insure that such encouragement is given, the appropriate reward for providing assistance should be given, whatever the offender's motive may have been in giving it, be it genuine remorse or simply self-interest. Insofar as an offender is prepared to implicate himself further and to help solve outstanding crimes, their is both a saving to the public purse and an indication the person is prepared to leave crime behind. What is to be encouraged is full and frank cooperation on the part of the offender, whatever be his motive.
The extent of the discount will depend to a large degree upon the willingness with which the disclosure is made. The offender will not receive any discount at all where he tailors his disclosure so as to reveal only information which he knows is already in the possession of the authorities. The discount will rarely be substantial unless the offender discloses everything he knows. To this extent, the inquiry is into the subjective nature of the offender's cooperation.
If the motive is genuine remorse, that circumstance may well warrant even greater leniency being extended, but contrition is not a necessary ingredient which must be shown in order to obtain a lesser sentence for giving assistance to the authorities. The reward for providing assistance should be given if the offender has genuinely cooperated with the authorities whether or not the information supplied turns out in fact to have been effective. The information which he gives must be such as could significantly assist the authorities. The information must, of course, be true; a false disclosure attracts no benefit at all. What is relevant here is the potential of the information to assist the authorities, as comprehended by the offender himself.
[68] Le jugement de la Cour d'appel ne permet pas de déterminer avec précision l'impact de la collaboration à la confiscation des biens en termes de réduction de la peine d'emprisonnement. Cet impact n'a pu être que marginal.
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jeudi 9 mai 2013
La requête pour procès séparé et les risques d'injustice
Lévesque c. R., 2007 QCCA 1291 (CanLII)
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[52] La décision d’ordonner la tenue de procès séparés relève de la discrétion du juge de première instance. En 2005, la Cour suprême du Canada a précisé quelle était la norme d’intervention de la Cour d’appel par rapport à cette décision:
De même, dans Torbiak and Gillis, p. 199, la Cour d’appel de l’Ontario a souligné la [traduction] « [règle] bien établie selon laquelle [. . .] lorsque l’essentiel de la preuve porte que (sic) les accusés ont agi de concert, ils devraient être inculpés et jugés conjointement, et une cour d’appel ne saurait intervenir dans l’exercice du pouvoir discrétionnaire du juge du procès, sauf si celui‑ci n’a pas exercé son pouvoir de manière judiciaire ou si sa décision a entraîné une erreur judiciaire ».
[53] La Cour d’appel devra donc faire preuve de retenue. La jurisprudence reconnaît que la tenue de procès distincts constitue l’exception et non la règle.
[54] Notre Cour a énoncé plusieurs facteurs à considérer pour ordonner la tenue de procès séparés:
Les tribunaux ont retenu un ensemble de facteurs visant à évaluer la nécessité de tenir des procès séparés: (1) la suffisance du lien factuel et juridique entre les divers chefs d'accusation, (2) le risque d'arriver à des verdicts contradictoires, (3) la possibilité d'avoir recours à une preuve d'actes similaires, (4) la complexité et la durée du procès en regard de la nature de la preuve administrée, (5) le préjudice causé à l'accusé relativement à son droit à un procès dans un délai raisonnable, (6) le préjudice causé aux coaccusés, (7) les défenses incompatibles, (8) l'irrecevabilité d'une preuve contre un coaccusé, (9) le désir manifesté par l'accusé de témoigner à l'égard de certains chefs, etc.
Évidemment, les tribunaux doivent considérer également les inconvénients administratifs et les coûts additionnels engendrés par la tenue d'un procès séparé. Toutefois, il est bien entendu que ces dernières considérations ne sont pas de nature à l'emporter sur les intérêts ni les droits constitutionnels d'un accusé.
[55] La Cour suprême précise, dans l’arrêt Crawford, ce qui est susceptible de constituer une injustice pour l’accusé :
Même si le juge du procès a le pouvoir discrétionnaire d'ordonner la tenue de procès distincts, il doit exercer ce pouvoir en tenant compte de principes juridiques, y compris celui voulant que la tenue de procès distincts ne soit ordonnée que s'il est établi qu'un procès conjoint causerait une injustice à l'accusé. Le seul fait qu'un coaccusé a recours à une défense «traîtresse» n'est pas suffisant en soi. Dans l'arrêt Pelletier, précité, on a autorisé un accusé à contre-interroger un coaccusé relativement à la déclaration qu'il avait faite à la police et dont le caractère volontaire n'avait pas été établi. En appel de sa déclaration de culpabilité, il a soutenu que, s'il avait été poursuivi séparément, le contre-interrogatoire n'aurait pas été autorisé. Il a donc fait valoir que la tenue de procès distincts aurait dû être ordonnée. En rejetant ce moyen, le juge Hinkson dit ce qui suit au nom de la cour, à la p. 539:
[traduction] Il faut se rappeler, à cet égard, que le juge du procès a le pouvoir discrétionnaire de faire droit ou non à une demande de procès distincts. La règle générale en la matière veut que les personnes qui ont pris part à une entreprise commune soient jugées conjointement, sauf si l'on peut démontrer qu'un procès conjoint causerait une injustice à l'une d'elles: R. c. Black and six others, reflex, [1970] 4 C.C.C. 251, aux pp. 267 et 268, 10 C.R.N.S. 17, aux pp. 35 et 36, 72 W.W.R. 407. En l'espèce, le juge du procès n'était pas convaincu qu'il était opportun d'ordonner la tenue de procès distincts. Je ne conclus pas qu'il a commis une erreur dans l'exercice de son pouvoir discrétionnaire. » (pages 880 et 881)
*** Note de l'auteur de ce blog: cet arrêt est antérieur à l'arrêt Last de la cour suprême - R. c. Last, 2009 CSC 45, [2009] 3 R.C.S. 146 ***
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[52] La décision d’ordonner la tenue de procès séparés relève de la discrétion du juge de première instance. En 2005, la Cour suprême du Canada a précisé quelle était la norme d’intervention de la Cour d’appel par rapport à cette décision:
De même, dans Torbiak and Gillis, p. 199, la Cour d’appel de l’Ontario a souligné la [traduction] « [règle] bien établie selon laquelle [. . .] lorsque l’essentiel de la preuve porte que (sic) les accusés ont agi de concert, ils devraient être inculpés et jugés conjointement, et une cour d’appel ne saurait intervenir dans l’exercice du pouvoir discrétionnaire du juge du procès, sauf si celui‑ci n’a pas exercé son pouvoir de manière judiciaire ou si sa décision a entraîné une erreur judiciaire ».
[53] La Cour d’appel devra donc faire preuve de retenue. La jurisprudence reconnaît que la tenue de procès distincts constitue l’exception et non la règle.
[54] Notre Cour a énoncé plusieurs facteurs à considérer pour ordonner la tenue de procès séparés:
Les tribunaux ont retenu un ensemble de facteurs visant à évaluer la nécessité de tenir des procès séparés: (1) la suffisance du lien factuel et juridique entre les divers chefs d'accusation, (2) le risque d'arriver à des verdicts contradictoires, (3) la possibilité d'avoir recours à une preuve d'actes similaires, (4) la complexité et la durée du procès en regard de la nature de la preuve administrée, (5) le préjudice causé à l'accusé relativement à son droit à un procès dans un délai raisonnable, (6) le préjudice causé aux coaccusés, (7) les défenses incompatibles, (8) l'irrecevabilité d'une preuve contre un coaccusé, (9) le désir manifesté par l'accusé de témoigner à l'égard de certains chefs, etc.
Évidemment, les tribunaux doivent considérer également les inconvénients administratifs et les coûts additionnels engendrés par la tenue d'un procès séparé. Toutefois, il est bien entendu que ces dernières considérations ne sont pas de nature à l'emporter sur les intérêts ni les droits constitutionnels d'un accusé.
[55] La Cour suprême précise, dans l’arrêt Crawford, ce qui est susceptible de constituer une injustice pour l’accusé :
Même si le juge du procès a le pouvoir discrétionnaire d'ordonner la tenue de procès distincts, il doit exercer ce pouvoir en tenant compte de principes juridiques, y compris celui voulant que la tenue de procès distincts ne soit ordonnée que s'il est établi qu'un procès conjoint causerait une injustice à l'accusé. Le seul fait qu'un coaccusé a recours à une défense «traîtresse» n'est pas suffisant en soi. Dans l'arrêt Pelletier, précité, on a autorisé un accusé à contre-interroger un coaccusé relativement à la déclaration qu'il avait faite à la police et dont le caractère volontaire n'avait pas été établi. En appel de sa déclaration de culpabilité, il a soutenu que, s'il avait été poursuivi séparément, le contre-interrogatoire n'aurait pas été autorisé. Il a donc fait valoir que la tenue de procès distincts aurait dû être ordonnée. En rejetant ce moyen, le juge Hinkson dit ce qui suit au nom de la cour, à la p. 539:
[traduction] Il faut se rappeler, à cet égard, que le juge du procès a le pouvoir discrétionnaire de faire droit ou non à une demande de procès distincts. La règle générale en la matière veut que les personnes qui ont pris part à une entreprise commune soient jugées conjointement, sauf si l'on peut démontrer qu'un procès conjoint causerait une injustice à l'une d'elles: R. c. Black and six others, reflex, [1970] 4 C.C.C. 251, aux pp. 267 et 268, 10 C.R.N.S. 17, aux pp. 35 et 36, 72 W.W.R. 407. En l'espèce, le juge du procès n'était pas convaincu qu'il était opportun d'ordonner la tenue de procès distincts. Je ne conclus pas qu'il a commis une erreur dans l'exercice de son pouvoir discrétionnaire. » (pages 880 et 881)
*** Note de l'auteur de ce blog: cet arrêt est antérieur à l'arrêt Last de la cour suprême - R. c. Last, 2009 CSC 45, [2009] 3 R.C.S. 146 ***
Ce qu'est l'ignorance volontaire
R. c. Vigeant-Dubois, 2013 QCCQ 3011 (CanLII)
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[44] L'ignorance volontaire se produit lorsqu'une personne qui ressent le besoin de se renseigner refuse de le faire parce qu'elle ne veut pas connaître la vérité.
[45] La Cour suprême, dans l'arrêt Sansregret, au paragraphe 22, cite avec approbation un très réputé professeur anglais relativement aux dangers et limites de l'ignorance volontaire :
« Glanville Williams signale cependant que la règle de l'ignorance volontaire comporte des dangers et a une application limitée. Il dit, à la page 159 :
[TRADUCTION] La règle selon laquelle l'ignorance volontaire équivaut à la connaissance est essentielle et se rencontre partout dans le droit criminel. En même temps, c'est une règle instable parce que les juges sont susceptibles d'en oublier la portée très limitée. Une cour peut valablement conclure à l'ignorance volontaire seulement lorsqu'on peut presque dire que le défendeur connaissait réellement le fait. Il le soupçonnait; il se rendait compte de sa probabilité; mais il s'est abstenu d'en obtenir confirmation définitive parce qu'il voulait, le cas échéant, être capable de nier qu'il savait. Cela, et cela seulement, constitue de l'ignorance volontaire. Il faut en effet qu'il y ait conclusion que le défendeur a voulu tromper l'administration de la justice. Toute définition plus générale aurait pour effet d'empêcher la distinction entre la doctrine de l'ignorance volontaire et la doctrine civile de la négligence de se renseigner. »
[46] Par ailleurs, la poursuite s'appuie essentiellement sur l'extrait suivant de l'arrêt R. c. Briscoe pour soutenir qu'en l'espèce, la mens rea est prouvée par l'ignorance volontaire de l'accusée :
« L'ignorance volontaire ne définit pas la mens rea requise d'infractions particulières. Au contraire, elle peut remplacer la connaissance réelle chaque fois que la connaissance est un élément de la mens rea. La doctrine de l'ignorance volontaire impute une connaissance à l'accusé qui a des doutes au point de vouloir se renseigner davantage, mais qui choisit délibérément de ne pas le faire. Voir Sansregret c. La Reine, 1985 CanLII 79 (CSC), [1985] 1 R.C.S. 570, et R. c. Jorgensen, 1995 CanLII 85 (CSC), [1995] 4 R.C.S. 55. Comme l'a dit succinctement le juge Sopinka dans Jorgensen (par. 103), < [p]our conclure à l'ignorance volontaire, il faut répondre par l'affirmative à la question suivante : L'accusé a-t-il fermé les yeux parce qu'il savait ou soupçonnait fortement que s'il regardait, il saurait? >».
[47] Suivant cette prétention, si le tribunal répond affirmativement à la question visant à savoir si l'accusée a fermé les yeux parce qu'elle savait ou soupçonnait fortement que si elle regardait, elle saurait, le tribunal, dans ces circonstances, doit déclarer l'accusée coupable.
[48] La défense ne soumet aucune autorité et ramène le débat à une question essentiellement factuelle en affirmant que l'accusée est de bonne foi et doit être crue. Conséquemment, suivant cette prétention, l'accusée n'a pas fait preuve d'ignorance volontaire et doit être acquittée.
[49] Le tribunal constate que la position de la défense fait écho, d'une certaine manière, à l'arrêt de la Cour d'appel du Québec dans l'arrêt R. c. Cedano, où la Cour signale que l'application de la doctrine de l'ignorance volontaire est intimement liée à l'appréciation de la preuve et singulièrement, à l'appréciation de la crédibilité de l'accusée.
[50] À la lumière de ces enseignements et de ceux du plus haut tribunal du pays, le tribunal, retenant la méthodologie de l'arrêt R. c. W. (D.) de même que les précisions apportées par l'arrêt C.L.Y., doit examiner, dans un premier temps, s'il croit la version de l'accusée
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[44] L'ignorance volontaire se produit lorsqu'une personne qui ressent le besoin de se renseigner refuse de le faire parce qu'elle ne veut pas connaître la vérité.
[45] La Cour suprême, dans l'arrêt Sansregret, au paragraphe 22, cite avec approbation un très réputé professeur anglais relativement aux dangers et limites de l'ignorance volontaire :
« Glanville Williams signale cependant que la règle de l'ignorance volontaire comporte des dangers et a une application limitée. Il dit, à la page 159 :
[TRADUCTION] La règle selon laquelle l'ignorance volontaire équivaut à la connaissance est essentielle et se rencontre partout dans le droit criminel. En même temps, c'est une règle instable parce que les juges sont susceptibles d'en oublier la portée très limitée. Une cour peut valablement conclure à l'ignorance volontaire seulement lorsqu'on peut presque dire que le défendeur connaissait réellement le fait. Il le soupçonnait; il se rendait compte de sa probabilité; mais il s'est abstenu d'en obtenir confirmation définitive parce qu'il voulait, le cas échéant, être capable de nier qu'il savait. Cela, et cela seulement, constitue de l'ignorance volontaire. Il faut en effet qu'il y ait conclusion que le défendeur a voulu tromper l'administration de la justice. Toute définition plus générale aurait pour effet d'empêcher la distinction entre la doctrine de l'ignorance volontaire et la doctrine civile de la négligence de se renseigner. »
[46] Par ailleurs, la poursuite s'appuie essentiellement sur l'extrait suivant de l'arrêt R. c. Briscoe pour soutenir qu'en l'espèce, la mens rea est prouvée par l'ignorance volontaire de l'accusée :
« L'ignorance volontaire ne définit pas la mens rea requise d'infractions particulières. Au contraire, elle peut remplacer la connaissance réelle chaque fois que la connaissance est un élément de la mens rea. La doctrine de l'ignorance volontaire impute une connaissance à l'accusé qui a des doutes au point de vouloir se renseigner davantage, mais qui choisit délibérément de ne pas le faire. Voir Sansregret c. La Reine, 1985 CanLII 79 (CSC), [1985] 1 R.C.S. 570, et R. c. Jorgensen, 1995 CanLII 85 (CSC), [1995] 4 R.C.S. 55. Comme l'a dit succinctement le juge Sopinka dans Jorgensen (par. 103), < [p]our conclure à l'ignorance volontaire, il faut répondre par l'affirmative à la question suivante : L'accusé a-t-il fermé les yeux parce qu'il savait ou soupçonnait fortement que s'il regardait, il saurait? >».
[47] Suivant cette prétention, si le tribunal répond affirmativement à la question visant à savoir si l'accusée a fermé les yeux parce qu'elle savait ou soupçonnait fortement que si elle regardait, elle saurait, le tribunal, dans ces circonstances, doit déclarer l'accusée coupable.
[48] La défense ne soumet aucune autorité et ramène le débat à une question essentiellement factuelle en affirmant que l'accusée est de bonne foi et doit être crue. Conséquemment, suivant cette prétention, l'accusée n'a pas fait preuve d'ignorance volontaire et doit être acquittée.
[49] Le tribunal constate que la position de la défense fait écho, d'une certaine manière, à l'arrêt de la Cour d'appel du Québec dans l'arrêt R. c. Cedano, où la Cour signale que l'application de la doctrine de l'ignorance volontaire est intimement liée à l'appréciation de la preuve et singulièrement, à l'appréciation de la crédibilité de l'accusée.
[50] À la lumière de ces enseignements et de ceux du plus haut tribunal du pays, le tribunal, retenant la méthodologie de l'arrêt R. c. W. (D.) de même que les précisions apportées par l'arrêt C.L.Y., doit examiner, dans un premier temps, s'il croit la version de l'accusée
Il faut se situer au moment de l'agir délictuel pour évaluer s'il y a eu fraude ou non
R. c. Huneault, 1991 CanLII 3769 (QC CA)
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L'appelant, qui a fait l'acquisition d'un commerce, a versé au vendeur comme paiement initial une somme de 2 000 $ par chèque visé et a remis une série de chèques postdatés en paiement du solde. Les deux premiers chèques postdatés n'ont pas été honorés à la date convenue en raison de l'insuffisance de fonds.
Il a été établi qu'aucune somme d'argent n'a été créditée au compte de l'appelant entre la date de la transaction et la date de la présentation pour encaissement des deux chèques.
C'est au motif "qu'en ne déposant pas les fonds nécessaires pour couvrir les chèques qu'il savait bel et bien qu'il faudrait" que le premier juge a trouvé l'appelant coupable.
Avec égard, le premier juge a erré en concluant à la preuve d'un acte malhonnête et d'une intention de frauder.
Il faut se situer au moment de la transaction. Or la preuve n'établit aucunement qu'au moment où l'appelant a remis ces deux chèques postdatés, il n'avait pas l'intention de payer: le défaut de paiement, dans les circonstances, ne permet pas d'inférer la conclusion de la commission d'un acte malhonnête ou de l'intention de frauder
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L'appelant, qui a fait l'acquisition d'un commerce, a versé au vendeur comme paiement initial une somme de 2 000 $ par chèque visé et a remis une série de chèques postdatés en paiement du solde. Les deux premiers chèques postdatés n'ont pas été honorés à la date convenue en raison de l'insuffisance de fonds.
Il a été établi qu'aucune somme d'argent n'a été créditée au compte de l'appelant entre la date de la transaction et la date de la présentation pour encaissement des deux chèques.
C'est au motif "qu'en ne déposant pas les fonds nécessaires pour couvrir les chèques qu'il savait bel et bien qu'il faudrait" que le premier juge a trouvé l'appelant coupable.
Avec égard, le premier juge a erré en concluant à la preuve d'un acte malhonnête et d'une intention de frauder.
Il faut se situer au moment de la transaction. Or la preuve n'établit aucunement qu'au moment où l'appelant a remis ces deux chèques postdatés, il n'avait pas l'intention de payer: le défaut de paiement, dans les circonstances, ne permet pas d'inférer la conclusion de la commission d'un acte malhonnête ou de l'intention de frauder
dimanche 5 mai 2013
La notion de lien de causalité en matière de fraude
R. v. Steinhubl, 2010 ABQB 602 (CanLII)
A. What is reliance?
[118] Reliance requires proof of action arising from deceit, falsehood or other fraudulent means. Engaging in deceit, the telling of lies or engaging in other fraud alone is insufficient absent evidence that the complainant has taken some action based on those statements or actions.
[119] In other words, not every deceit, lie or fraudulent act constitutes a crime. There is no crime of fraud absent a causal relationship between the dishonesty and some type of deprivation or risk of deprivation. A coincidence of dishonesty and loss is not sufficient: see Douglas Ewart, Criminal Fraud (Toronto: Carswell, 1986) at 105, cited in Brenda L. Nightingale, The Law of Fraud, looseleaf (Toronto: Carswell, 2009) at 5-7.
[120] Reliance was defined by the Ontario Court of Appeal in R. v. Vallillee (1974), 15 C.C.C. (2d) 409 (Ont. C.A.) in upholding a fraud conviction based on the accused having rented a car from Tilden Rent-A-Car using stolen identification and a stolen credit card. The Court stated at 414:
He has been induced to act to his detriment by transferring possession of his property in circumstances in which he would not have done so but for the fraud practiced.
[121] The test for reliance is, therefore, whether the complainant was induced to act to his or her detriment by transferring possession of property, including money, in circumstances in which he or she would not have done so but for the fraud.
[122] This test was again used by the Ontario Court of Appeal in R. v. Knowles reflex, (1979), 51 C.C.C. (2d) 237 at 241 (Ont. C.A.) in finding reliance to have been established based on express evidence from a loans officer that he would not have made the loan had he known that the accused employee was the true purchaser of a franchise. The franchiser had a policy of prohibiting its employees from purchasing franchises for fear of conflict of interest.
[123] Similarly, in R. v. Hilliard (1975), 28 C.C.C. (2d) 566 (Ont. Co. Ct.) [Hilliard], the judge inferred that the elderly victim “was induced to act to her detriment by transferring her property [cash] to the accused in circumstances in which she would not have done so, but for the deceit practiced” (at 576) in convicting the accused of fraud in a house renovation scam. The inference was based upon the evidence of other witnesses that the monies required by the accused were in excess of what was required for materials, as well as the fact of the victim’s age and infirmity.
[124] Reliance was also proven through evidence supporting the inference that the lender would not have advanced mortgage funding had it known the true circumstances in R. v. Wagman reflex, (1981), 60 C.C.C. (2d) 23 (Ont. C.A.) [Wagman], a mortgage fraud case based on facts strikingly similar to the ones in our case. There the fraudster homebuilders entered into agreements with mortgage lenders to obtain mortgages on 13 homes. The lender would advance only 75% of mortgage funding upon completion of each home. The balance became available when that home was sold to a qualified purchaser. The fraudster had straw buyers sign agreements to purchase homes stating they were paying deposits, but none were ever paid. None of these transactions closed. The fraudster nonetheless used these agreements to obtain the balance of the mortgage funds from the lender.
[125] The Ontario Court of Appeal inferred from the manner in which the agreements were obtained and presented to the lender that it would not have advanced the mortgage funds if it had known all of the circumstances (31). The conviction was upheld although the lender suffered no loss, as the fraudster subsequently sold the homes to bona fide purchasers who made the mortgage payments.
[126] In comparison, where money is loaned for reasons totally independent of the fraudulent conduct, reliance is not proven. For example, the Ontario Court of Appeal refused to uphold a fraud conviction arising from the accused having made two false statements on her application for an Eaton’s credit card in R. v. Winning (1973), 12 C.C.C. (2d) 449 (Ont. C.A.) [Winning] because of direct evidence that Eaton’s did not rely on these misrepresentations in deciding to grant her credit.
[127] The Québec Court of Appeal came to a similar decision in R. c. Champagne (1987), 19 Q.A.C. 309 at para. 21 (Que. C.A.) in concluding that fraud had not been made out where a bank granted the accused’s mortgage application on the basis of its own property appraisal evaluation rather than his representation as to the cost of construction.
[128] Courts have also refused to find reliance in cases where the complainant was an undercover law enforcement officer attempting to gain evidence of consumer fraud on the basis that there was no reliance on the misrepresentations because the complainant knew the true state of affairs. In R. v. Lyons, [1910] 16 C.C.C. 152 (Que. Prov. Ct.), the Québec Provincial Court refused to convict a store owner of false advertising where the complainant purchaser bought the product in order to gain evidence, knowing of the falsity of the representation. More recently, in R. v. Timar (1968), 5 C.R.N.S. 195 (Ont. Co. Ct.), reliance was not established where the police laid a trap to obtain evidence of the accused’s bribery scheme seeing as they parted with their money in order to found criminal charges rather than in reliance of the accused’s false representations.
[129] In summary, to prove reliance, the Crown must prove through direct evidence or permitted inference that the accused’s dishonest conduct caused deprivation, i.e., actual loss or at least risk to the victim’s pecuniary interests: see R. v. Théroux, 1993 CanLII 134 (SCC), [1993] 2 S.C.R. 5 at 20 (S.C.C.) [Théroux].
Notions juridiques reliées à la fraude
R. c. Dussault, 2012 QCCQ 9269 (CanLII)
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[67] Comme le soulignait la Cour suprême du Canada dans l'arrêt Vézina et Côté, les deux éléments de la fraude sont la malhonnêteté et la privation. On établit la privation si l'on trouve que les intérêts pécuniaires de la victime ont subi un dommage ou un préjudice ou qu'il y a risque de préjudice à leur égard. Ces deux éléments doivent coexister et un rapport causal doit être établi entre eux. La malhonnêteté doit entraîner ou causer la privation. Dans la décision Vézina et Côté, la Cour décide que le fait de cacher à la Banque de Montréal que les accusés étaient détenteurs d'obligations volées, et se présenter comme un détenteur licite des obligations satisfait au critère de la malhonnêteté. Par ailleurs, la Cour considère qu'aussi large que soit la notion de privation, en l'espèce il n'y avait pas comme tel de privation dans le genre de préjudice qui pouvait découler d'une telle situation. Toute privation causée à la Banque de Montréal restait hypothétique et trop lointaine.
[68] Selon l'article 380 du Code criminel, la fraude consiste dans le fait de frustrer une personne de quelque argent par supercherie, mensonge ou autre moyen dolosif constituant ou non un faux-semblant au sens de la Loi.
[69] L'évolution des décisions jurisprudentielles a élargi les façons d'exercer le crime de fraude. Ainsi, dans l'arrêt Zlatic, la juge McLachlin a examiné en particulier la notion de fraude en utilisant « d'autres moyens dolosifs ». S'inspirant de l'arrêt Olan, elle réitère le fait que : « ainsi donc, la preuve de la supercherie n'est pas essentielle pour pouvoir prononcer une condamnation pour fraude. L'expression « autres moyens dolosifs » couvre les moyens qui ne sont ni des mensonges, ni des supercheries, ils comprennent tous les autres moyens qu'on peut proprement qualifier de malhonnêtes ». Pour la juge McLachlin : « La malhonnêteté de " l'autre moyen dolosif " tient essentiellement à l'emploi illégitime d'une chose sur laquelle une personne a un droit, de telle sorte que ce droit d'autrui se trouve éteint ou compromis. L'emploi est illégitime dans ce contexte s'il constitue une conduite qu'une personne honnête et raisonnable considérerait malhonnête et dénuée de scrupules ».
[70] Concernant la notion de mens rea, la juge indique que pour commettre une fraude par un autre moyen dolosif « il n'est pas nécessaire que l'accusé saisisse subjectivement la malhonnêteté de son acte ou de ses actes. Il doit sciemment, c'est-à-dire subjectivement, adopter la conduite qui constitue l'acte malhonnête et il doit comprendre subjectivement que cette conduite peut entraîner une privation au sens de faire perdre à une autre personne l'intérêt pécuniaire qu'elle a dans un certain bien ou de mettre en péril cet intérêt ».
[71] Dans R. c. Lauer, différents exemples sont donnés pour expliquer la définition de l'expression « autres moyens dolosifs ». Ainsi, serait considéré comme tel la dissimulation de faits importants ou encore le détournement non autorisé de fonds ou enfin, l'usurpation non autorisée de fonds ou de biens.
Extraits jurisprudentiels & doctrinaux sur ce que constitue la pratique commerciale déloyale en matière de fraude
R. c. Théroux, 1993 CanLII 134 (CSC)
Une déclaration inexacte faite par négligence ou une pratique commerciale déloyale sont insuffisantes puisque, dans ni l'un ni l'autre cas, on ne trouve l'intention requise de priver par un moyen dolosif. Une déclaration faite par négligence, même si elle est inexacte, ne constitue pas un mensonge intentionnel du point de vue subjectif. De même, le fait de sauter sur une occasion d'affaires sans être motivé par l'intention subjective de causer une privation en trompant ou en induisant autrui en erreur ne constituera pas une fraude. Encore une fois, la supercherie employée négligemment sans s'attendre à des conséquences, comme par exemple, la plaisanterie innocente ou la déclaration faite au cours d'un débat, à laquelle on ne veut pas donner suite, ne constituerait pas une fraude, parce que l'accusé ignorerait que sa plaisanterie mettrait en péril le bien de ceux qui l'ont entendue. Il reste donc les actes frauduleux accomplis délibérément qui, à la connaissance de l'accusé, mettent vraiment en péril le bien d'autrui. À mon avis, une telle conduite peut être à bon droit criminalisée.
R. c. Auclair, 2005 CanLII 49593 (QC CQ)
[191] Selon la Cour suprême, il faut nuancer les notions de comportement déloyal et de comportement malhonnête. Le premier est une affaire de conscience tandis que le second constitue un acte criminel. Plusieurs comportements qui enfreignent la norme des gens scrupuleux ne sont pas pour autant assujettis aux sanctions du droit criminel
Analyse comparative du concept de malhonnêteté en droit criminel et en droit des
sociétés par Isabelle Charlebois Mémoire présenté à la Facilité des études supérieures
en vue de l'obtention du grade de maîtrise en droit option droit des affaires
Décembre 2006-12-20
Le droit criminel ne perçoit pas, à prime abord, l'usurpation d'une occasion d'affaires comme une conduite suffisamment grave pour faire l'objet d'une poursuite criminelle (p.118)
R. c. Bolstridge, 1993 CanLII 5327 (NB CA)
Dans l'arrêt Théroux, la juge McLachlin a fait un examen détaillé des éléments essentiels de la fraude. Elle insiste sur le fait qu'il doit y avoir un acte prohibé, consistant habituellement en une déclaration trompeuse qui équivaut à une supercherie ou à un mensonge. Il n'y en a pas en l'espèce. Dans l'affaire Zlatic, où il n'y avait ni supercherie ni mensonge, la juge McLachlin a ainsi appliqué le critère de la personne raisonnable, à la page 45 : « La personne raisonnable qualifierait-elle l'acte de malhonnête ? » Elle définit ensuite la conduite malhonnête comme une conduite impliquant un « dessein caché ». J'ajouterais à cette définition la question qu'elle a soulevée aux pages 24 et 25 de l'arrêt Théroux :
La question est donc de savoir si la définition de la mens rea que j'ai proposée à l'égard de la fraude peut viser une conduite ne justifiant pas la criminalisation. Je mentionne la crainte, reflétée dans les arrêts de tribunaux d'appel qui ont adopté une définition plus étroite de la mens rea nécessaire, que la portée de l'infraction de fraude puisse être étendue au-delà de la malhonnêteté criminelle de manière à englober des pratiques commerciales déloyales ou imprudentes qui, même si elles ne doivent pas être encouragées, ne méritent ni l'opprobre ni la perte de liberté que comporte la sanction criminelle.
TFE Industries Inc. c. R, 2009 NBCA 39 (CanLII)
[…] L’accusé doit intentionnellement tromper, mentir ou accomplir quelque autre acte frauduleux pour que l’infraction soit établie. Une déclaration inexacte faite par négligence ou une pratique commerciale déloyale sont insuffisantes puisque, dans ni l’un ni l’autre cas, on ne trouve l’intention requise de priver par un moyen dolosif. […] [p. 26]
R. c. Lavoie, 2002 CanLII 23649 (QC CQ)
Ð'après elle, l'exigence d'un acte frauduleux intentionnel exclut la simple déclaration inexacte faite par négligence. Elle exclut également le comportement commercial imprudent ou le comportement qui est déloyal au sens de profiter d'une occasion d'affaires au détriment d'une personne moins astucieuse. L'accusé doit intentionnellement tromper, mentir ou accomplir quelque autre acte frauduleux pour que l'infraction soit établie. Une déclaration inexacte faite par négligence ou une pratique commerciale déloyale sont insuffisantes puisque, dans ni l'un ni l'autre cas, on ne trouve l'intention requise de priver par un moyen dolosif. Une déclaration faite par négligence, même si elle est inexacte, ne constitue pas un mensonge intentionnel du point de vue subjectif. De même, le fait de sauter sur une occasion d'affaires sans être motivé par l'intention subjective de causer une privation en trompant ou en induisant autrui en erreur ne constituera pas une fraude. Encore une fois, la supercherie employée négligemment sans s'attendre à des conséquences, comme par exemple, la plaisanterie innocente ou la déclaration faite au cours d'un débat, à laquelle on ne veut pas donner suite, ne constituerait pas une fraude, parce que l'accusé ignorerait que sa plaisanterie mettrait en péril le bien de ceux qui l'ont entendue. Il reste donc les actes frauduleux accomplis délibérément qui, à la connaissance de l'accusé, mettent vraiment en péril le bien d'autrui. À mon avis, une telle conduite peut être à bon droit criminalisée
Nous sommes ici en matière criminelle où la Couronne doit faire preuve de tous et chacun des éléments constitutifs de l'infraction et où ce fardeau est beaucoup plus onéreux parce qu'il doit être déchargé au-delà du doute raisonnable. Toute ambiguïté d'interprétation donnant naissance à une croyance raisonnable d'une interprétation légitime doit donc bénéficier à l'accusé.
Laroche c. R., 2011 QCCA 1891 (CanLII)
[302] Finalement et contrairement à ce que prétend l'appelant, il importe peu qu'il ait été ou non le bénéficiaire de la fraude. L'article 380C.cr. s'intéresse au sort de la victime au plan économique et il se désintéresse de celui de l'accusé, comme le rappelait la juge McLachlin dans l'arrêt R. c. Zlatic :
Le fait que l'appelant possédait un droit de propriété sur les sommes qu'il a perdues au jeu ne change rien au résultat. La fraude concerne le fond de la question. Il ressort clairement de la jurisprudence que la partie qui commet une fraude n'a pas à en tirer profit pour être déclarée coupable; il n'est pas nécessaire non plus que les victimes d'une fraude subissent une perte pécuniaire réelle pour que l'infraction soit établie […]. L'important est non pas qu'il y ait profit ou perte pécuniaire réelle, mais que les pratiques commerciales malhonnêtes qui exposent l'intérêt pécuniaire d'autrui à la privation ou au risque de privation fassent l'objet d'une sanction criminelle. […]
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Le dédommagement à la victime doit toujours être envisagé lors de la détermination de la peine
La possession d'une quantité de drogue plus grande que pour usage personnel est une assise permettant au juge de conclure à la possession en vue de trafic / se débarrasser de la drogue via une toilette ne permet pas de conclure à la possession en vue de trafic de ladite substance
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