mardi 28 juillet 2009

Quand la mise en liberté sous caution doit être refusé à l'accusé

R. c. Morales, 1992 CanLII 53 (C.S.C.)

La présomption d'innocence est un principe de justice fondamentale qui s'applique à toutes les étapes du processus pénal, mais les exigences qu'il comporte sur le plan de la procédure à l'étape de la mise en liberté sous caution sont remplies chaque fois que les exigences de l'al. 11e) le sont. Cette disposition crée un droit fondamental à une mise en liberté assortie d'un cautionnement raisonnable sauf s'il existe une «juste cause» justifiant le refus de l'accorder.

Dans l'arrêt Pearson, j'ai indiqué deux facteurs qui sont, à mon sens, fondamentaux lorsqu'il s'agit de décider s'il y a une juste cause au sens de l'al. 11e). Premièrement, la mise en liberté sous caution ne doit être refusée que dans certains cas bien précis. Deuxièmement, le refus doit s'imposer pour favoriser le bon fonctionnement du système de mise en liberté sous caution et on ne doit pas y recourir à des fins extérieures à ce système. À mon avis, l'élément «sécurité du public» de l'al. 515(10)b) représente une juste cause de privation de la liberté sous caution selon ces critères.

Je suis convaincu que la portée de l'élément «sécurité du public» de l'al. 515(10)b) est suffisamment limitée pour satisfaire à la première exigence de l'al. 11e). La mise en liberté sous caution n'est pas refusée à toutes les personnes qui risquent de commettre une infraction ou de nuire à l'administration de la justice si elles sont mises en liberté. Elle n'est refusée que s'il y a une «probabilité marquée» que le prévenu commettra une infraction criminelle ou nuira à l'administration de la justice et seulement si cette «probabilité marquée» compromet «la protection ou la sécurité du public». Au surplus, la détention n'est justifiée que si elle est «nécessaire» pour la sécurité du public. Elle n'est pas justifiée si la détention est seulement commode ou avantageuse. Ces motifs sont assez limités pour remplir la première exigence de l'al. 11e) quant à la juste cause.

Je suis également convaincu que l'élément «sécurité du public» de l'al. 515(10)b) est nécessaire pour favoriser le bon fonctionnement du système de mise en liberté sous caution, et qu'il n'est pas utilisé à des fins extérieures à ce système. À mon avis, le système ne fonctionne pas bien si un prévenu nuit à l'administration de la justice après avoir été mis en liberté sous caution. Le système de justice pénale dans son ensemble est subverti si un prévenu nuit à l'administration de la justice. Si un prévenu est mis en liberté sous caution, ce doit être à la condition qu'il s'abstienne d'entraver l'administration de la justice. S'il y a une probabilité marquée que le prévenu ne coopérera pas, refuser la mise en liberté favorise la réalisation des objectifs du système de mise en liberté sous caution.

Certes, il est sans aucun doute vrai qu'il est impossible de faire des prédictions exactes au sujet de la récidive et de la dangerosité future, mais la prévisibilité exacte de la dangerosité future n'est pas une exigence constitutionnelle. Il suffit que le système de mise en liberté sous caution établisse la probabilité de la dangerosité.

Selon moi, que le danger ou la probabilité qu'une personne commette une infraction criminelle ne constitue pas en soi une juste cause pour sa détention. En général, notre société n'admet pas la détention préventive de personnes simplement parce qu'elles ont une propension au crime. L'appelante accepte cette proposition, mais affirme que la détention préventive repose sur une juste cause si une personne qui risque de commettre une infraction attend déjà son procès relativement à un crime.

Dans l'arrêt Pearson, j'ai indiqué deux facteurs qui sont, à mon sens, fondamentaux lorsqu'il s'agit de décider s'il y a une juste cause au sens de l'al. 11e). Premièrement, la mise en liberté sous caution ne doit être refusée que dans certains cas bien précis. Deuxièmement, le refus doit s'imposer pour favoriser le bon fonctionnement du système de mise en liberté sous caution et on ne doit pas y recourir à des fins extérieures à ce système. À mon avis, l'élément «sécurité du public» de l'al. 515(10)b) représente une juste cause de privation de la liberté sous caution selon ces critères.

La mise en liberté sous caution n'est pas refusée à toutes les personnes qui risquent de commettre une infraction ou de nuire à l'administration de la justice si elles sont mises en liberté. Elle n'est refusée que s'il y a une probabilité marquée que le prévenu commettra une infraction criminelle ou nuira à l'administration de la justice et seulement si cette probabilité marquée compromet la protection ou la sécurité du public

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