R. c. Plamondon, 1999 IIJCan 10445 (QC C.Q.)
24 L'ensemble des objectifs et des principes contenus aux articles 718 et suivants du Code criminel doivent être envisagés lors du processus de détermination de la peine.
25 Cependant, relativement aux faits de la présente cause, ceux qui retiennent l'attention du tribunal sont la dénonciation du comportement illégal, la dissuasion des délinquants et la volonté de responsabiliser l'accusé relativement à son crime.
26 C'est à juste titre que les tribunaux doivent signifier par leur sentence, que la société désapprouve ceux qui comme l'accusé, commettent ce genre de crime pour régler leurs problèmes financiers. La sentence doit avoir un effet dissuasif suffisant pour décourager les gens qui seraient tentés d'utiliser les mêmes moyens frauduleux.
27 Dans sa recherche d'une peine proportionnelle à la gravité de l'infraction et au degré de responsabilité du délinquant, la motivation, le degré de préméditation et l'ampleur des pertes matérielles sont des critères importants dont doit tenir compte le juge.
28 Ainsi, dans R. c. Petropoulos, la cour d'Appel de la Colombie-Britannique diminuait une sentence de 5 ans de pénitencier à 3 ans et demie suite à une condamnation pour incendie frauduleux. Bien que l'accusé âgé de cinquante-trois ans n'avait pas d'antécédent criminel et présentait une image fort positive, la Cour a retenu comme facteurs aggravants, le degré élevé de préméditation et de planification dans l'accomplissement du crime. Le montant de la perte monétaire évalué entre 800 000 $ et 1 000 000 $ ainsi que la faillite de commerces qui y étaient situés ont également été envisagés par la Cour.
29 Cette dernière stipulait que l'éventail normal des sentences pour ce genre d'offense varie entre 2 et 3 ans de pénitencier.
30 Dans R. c. Singh, la cour d'Appel de l'Ontario réitérait l'importance d'une sentence qui doit tenir compte de la responsabilité de chacun des accusés dans la commission d'un crime. La Cour soulignait également que la société s'attendait à ce que les sentences aient un caractère dissuasif important pour ce genre d'offense.
31 Dans cette cause, l'accusé ainsi que son complice associé en affaires furent condamnés pour incendie criminel suite à la destruction de leur commerce après qu'ils l'eurent assuré. La diligence des pompiers a fait en sorte que les vies humaines de deux (2) personnes ont été sauvées in extremis.
32 L'accusé âgé de 45 ans n'avait aucun antécédent judiciaire et était marié et support de famille. Voulant distinguer le degré de responsabilité de chacun, la Cour imposa une peine de trois ans de détention à l'instigateur et de 21 mois à son complice.
33 D'autre part, les cours tiendront également compte de certains facteurs atténuants pour réduire des sentences initialement élevées.
34 Ainsi, dans R. c. Debock, la cour d'Appel de l'Alberta réduisait à deux ans et demie une sentence de 4 ans prononcée par le Tribunal de première instance. L'accusé avait fait mettre le feu à son hôtel dans le but d'en retirer les assurances. La cour d'Appel, en tenant compte du fait que le complice avait reçu une sentence de 18 mois de détention,réduisait la sentence de Debock en soulignant qu'au moment de l'incendie, il n'y avait personne dans l'hôtel. Elle prit également en considération l'âge de l'accusé et de l'absence d'antécédent judiciaire.
35 Dans R. c. Robert Martin, la juge Claire Barrette Joncas imposait une sentence de 18 mois à un individu trouvé coupable d'incendie criminel et de complot. La détention préventive avait été de deux mois et le montant des dommages se situait entre 400 000 $ et 430 000 $. L'accusé n'avait aucun antécédent judiciaire et était âgé de 20 ans.
36 La cour d'Appel de la Colombie-Britannique dans R. c. Deen, réduisait à 2 ans une sentence de 4 ans pour un incendie criminel dont l'ampleur des dommages dépassait ceux du présent dossier.
37 Dans Szabo c. la Reine, la cour d'Appel du Québec imposait une sentence de 90 jours d'emprisonnement de façon discontinue à un homme et une femme sans antécédent judiciaire, qui avaient incendié leur commerce et causé ainsi des dommages minimes.
38 Dans R. c. McIntyre, l'accusé âgé de quarante (40) ans, sans antécédent judiciaire, a plaidé coupable à un crime d'incendie. Ce dernier qui avait mis le feu à sa résidence, traversait des problèmes financiers et souffrait d'une détresse psychologique. Par ailleurs, son offense était préméditée et avait été faite dans le but de frauder les assurances. Considérant que l'accusé démontrait plusieurs aspects positifs, tout en admettant le sérieux du crime, la Cour lui imposait une sentence de 2 ans moins un jour à être purgée dans la collectivité.
39 Dans R. c. François Sévigny et Famir Nached, le juge condamnait les deux accusés à purger une sentence de 2 ans moins un jour dans une institution carcérale se refusant d'appliquer dans leurs cas, la peine dans la collectivité prévue à 742.1. Il s'agissait de l'incendie criminel d'un commerce dans le but de mettre fin prématurément au bal désavantageux. L'incendie causa des dommages de cinq millions et requit l'intervention de cent cinquante (150) pompiers de la ville de Montréal. Après avoir analyser l'ensemble des facteurs pertinents, le juge considéra que les critères qui devaient être privilégiés étaient la dénonciation et la dissuasion. Il condamna les deux accusés, sans antécédent judiciaire, à ce qui peut être considéré comme le milieu de l'éventail des sentences pour ce genre d'affaire, soit deux ans moins un jour de prison.
40 Bien qu'il admettait qu'une sentence d'emprisonnement avec sursis dans certaines circonstances pouvait satisfaire aux critères de dénonciation et de dissuasion, le juge privilégia la détention pour y satisfaire.
41 L'application d'une sentence juste et appropriée demeure pour le Tribunal un exercice hautement subjectif. Dans cette recherche de la sentence appropriée, la Cour est aidée par les balises jurisprudentielles et par l'interprétation des principes généraux que doit appliquer tout Tribunal dans l'imposition d'une sentence.
42 Dans R. c. M.C.A. à la page 558, l'honorable juge Lamer formulait la remarque suivante:
En contexte criminel, le châtiment se traduit par la détermination objective raisonnée et mesurée d'une peine appropriée reflétant adéquatement la culpabilité morale du délinquant compte tenu des risques pris intentionnellement par le contrevenant, du préjudice qu'il a causé en conséquence et du caractère normatif de sa conduite.
De plus, contrairement à la vengeance, le châtiment intègre un principe de modération; en effet, le châtiment exige l'application d'une peine juste et appropriée, rien de plus.
43 Et comme le soulignait monsieur le juge Chamberland dans R. c. Rodrigue:
Le but fondamental de la sentence est de préserver l'autorité des Lois et d'en promouvoir le respect par l'imposition de sanctions justes; la peine est appropriée dans la mesure où elle est proportionnelle à la gravité de l'infraction et au degré de responsabilité de son auteur. Dans cette perspective, la sentence est modulée en fonction de la personnalité de l'accusé: elle est individualisée. Chaque cas est un cas d'espèce et la sentence doit refléter l'ensemble des circonstances du dossier.
44 L'application des principes et objectifs de 718 et 718.1 ainsi que du principe de 718.2 b), et le survol des décisions jurisprudentielles précitées, fait en sorte que le bilan entre les facteurs aggravants et les facteurs atténuants dans le cas de Paulin Plamondon milite pour l'imposition d'une sentence se situant dans la limite inférieure des sentences pour les cas similaires.
45 Selon le Tribunal, l'exemplarité et la dissuasion commandent ici une sentence d'emprisonnement. Il serait cependant inapproprié de conclure que seule une sentence de deux ans de pénitencier puisse atteindre ce double objectif.
46 Le Tribunal considère qu'une sentence de deux ans moins un jour contribuerait à atteindre les mêmes objectifs. Conclure à une sentence de deux ans de pénitencier dans le but de se soustraire à l'application de 742.1 ne rencontrerait pas selon l'avis du Tribunal, les fins de la justice. Les faits du présent dossier justifient une analyse plus approfondie de l'applicabilité de l'emprisonnement avec sursis.
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