mardi 1 décembre 2009

Admissibilité des déclarations à un policier après avoir demandé un traitement clément pour son amie et avoir obtenu de la rencontrer

R. c. Spencer, 2007 CSC 11 (CanLII)

11 En common law, les déclarations faites par un accusé à une personne en situation d’autorité sont inadmissibles à moins qu’elles ne soient volontaires. Dans l’arrêt Oickle, notre Cour a énoncé le critère permettant de déterminer le caractère volontaire de telles déclarations. Cet arrêt a [traduction] « reformulé le droit relatif au caractère volontaire des confessions [. . .] Il a écarté le recours à des règles déterminées et strictes » : D. M. Paciocco et L. Stuesser, The Law of Evidence (4e éd. 2005), p. 290. Comme l’a expliqué le juge Iacobucci dans Oickle, au par. 27, la règle « s’attache plutôt à la question du caractère volontaire, considérée au sens large ». Il a également fait ressortir la nécessité d’une analyse contextuelle (par. 47) :

L’application de la règle est, par nécessité, contextuelle. Il n’y a tout simplement pas de règle simple et rigide qui permette de tenir compte des diverses circonstances susceptibles de vicier le caractère volontaire d’une confession; il en résulterait inévitablement une règle dont la portée serait à la fois trop large et trop restreinte. Par conséquent, le juge du procès doit tenir compte de tous les facteurs pertinents lorsqu’il examine une confession.

12 Dans l’arrêt Oickle, la Cour a reconnu qu’il faut tenir compte de plusieurs facteurs pour déterminer s’il existe un doute raisonnable quant au caractère volontaire d’une déclaration faite à une personne en situation d’autorité, y compris l’existence de menaces ou de promesses, l’oppression, la théorie de l’état d’esprit conscient et les ruses policières. Les menaces ou promesses, l’oppression et la théorie de l’état d’esprit conscient sont des éléments qui doivent être examinés globalement et ne doivent « pas être considéré[s] comme une enquête distincte, complètement dissociée du reste de la règle des confessions » (Oickle, par. 63). Par ailleurs, le recours par les « policiers [. . .] [à] des ruses » en vue d’obtenir une confession fait appel à « une analyse distincte [. . .] [qui] vise plus précisément à préserver l’intégrité du système de justice pénale » (par. 65).

13 En ce qui concerne les promesses, qui sont en cause dans le présent pourvoi, notre Cour a reconnu qu’il « n’est pas nécessaire qu[’elles] [. . .] visent directement le suspect pour avoir un effet coercitif » (Oickle, par. 51). Même si le juge Iacobucci a reconnu dans l’arrêt Oickle que l’existence d’une contrepartie est la « question la plus importante » lorsqu’il est allégué que des encouragements ont été offerts par une personne en situation d’autorité, il n’a pas conclu qu’elle est un facteur exclusif ou déterminant du caractère volontaire. Au contraire, le critère élaboré dans l’arrêt Oickle est « attentif aux particularités du suspect en cause » (par. 42) et son application « est, par nécessité, contextuelle » (par. 47). Qui plus est, dans l’arrêt Oickle, la Cour ne dit pas que toute offre de contrepartie faite par une personne en situation d’autorité, peu importe son importance, rend nécessairement involontaire la déclaration d’un accusé. Par exemple, le fait d’offrir une assistance psychiatrique ou psychologique, bien « qu’il s’agisse clairement d’un encouragement, [. . .] n’a pas autant de poids qu’une offre de clémence et il faut, dans un tel cas, tenir compte de l’ensemble des circonstances » (par. 50). Les encouragements « ne devien[nen]t inacceptable[s] que lorsque [. . .] — à eux seuls ou combinés à d’autres facteurs — [ils] sont importants au point de soulever un doute raisonnable quant à la question de savoir si on a subjugué la volonté du suspect » (par. 57).

14 Dans la mesure où il est possible d’affirmer qu’il existe en droit une distinction entre la « règle des confessions » dite traditionnelle établie par lord Sumner dans Ibrahim c. The King, [1914] A.C. 599 (C.P.), p. 609, et la décision de notre Cour dans Oickle, cette dernière doit prévaloir. J’estime cependant que la règle « stricte » élaborée par lord Sumner ne signifie pas que toute contrepartie rend automatiquement une déclaration involontaire. En fait, selon lord Sumner, pour qu’une déclaration soit admissible, elle ne doit pas avoir été [traduction] « obtenue de [l’accusé] par crainte d’un préjudice ou dans l’espoir d’un avantage ». Dans la décision subséquente Director of Public Prosecutions c. Ping Lin, [1976] A.C. 574 (H.L.), p. 595, lord Morris a soulevé la question suivante : [traduction] « l’accusé a‑t‑il été incité ou amené à faire une déclaration par suite d’une chose dite ou faite par une personne en situation d’autorité ».

15 Par conséquent, bien que la contrepartie constitue un facteur important pour établir l’existence d’une menace ou d’une promesse, c’est l’importance des encouragements offerts, eu égard à l’individu et à la situation dans laquelle il se trouve, qu’il faut prendre en considération dans l’analyse contextuelle globale du caractère volontaire de la déclaration de l’accusé.

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