samedi 6 novembre 2010

La fourchette des peines pour les infractions de conduite dangereuse causant la mort / conduite avec les capacités affaiblies causant la mort et les principes devant guider la Cour dans l'imposition de la peine

R. c. Paré, 2010 QCCQ 9354 (CanLII)

[30] Dans R. c. Comeau[2009 QCCA 1175 (CanLII)] la Cour d'appel cite avec approbation les constats tirés par monsieur le juge Jean-François Gosselin à la suite de l'examen de la jurisprudence récente. Ils peuvent se résumer ainsi :

- Des sentences clémentes oscillant entre 18 mois et 3 ans ferme de détention lorsque les facteurs prééminents favorisent l'accusé.

- Des peines sévères variant de 3 ans à 6 ans de pénitencier sont imposées lorsque les facteurs de dissuasion et de dénonciation l'emportent sur les facteurs personnels de l'accusé.

- Lorsque les facteurs personnels à l'accusé lui sont défavorables, il y a infliction de peines très sévères variant entre 6 à 9 ans de prison ou des peines supérieures lorsque l'on se rapproche du scénario des pires affaires.

[52] Les tribunaux reconnaissent qu'il est nécessaire en semblable matière de mettre l'emphase sur la dénonciation et la dissuasion générale à l'égard d'un comportement de ce genre et à l'endroit de ce type de conducteur. D'ailleurs, le juge Lamer de la Cour suprême du Canada, dans La Reine c. Proulx, s'exprimait comme suit :

De plus, il est possible que la conduite dangereuse et la conduite avec les facultés affaiblies soient des infractions à l'égard desquelles il est plus plausible que l'infliction de peines sévères ait un effet dissuasif général. Souvent, ces crimes sont commis par des citoyens qui respectent la loi, qui sont de bons travailleurs et qui ont un conjoint et des enfants. Il est possible de supposer qu'il s'agit là des personnes les plus susceptibles d'être dissuadées par l'imposition de peines sévères.

[53] Des peines de prison exemplaires et dissuasives s'imposent donc en pareil cas.

[54] Les décisions des tribunaux plus haut citées vont d'ailleurs dans ce sens et il est permis d'y constater une tendance à la hausse des peines imposées afin de sanctionner un tel comportement criminel, non seulement au Québec, mais ailleurs au Canada.

[55] Plus particulièrement, la Cour d'appel du Québec dans Verreault c. La Reine fait état de la jurisprudence en semblable matière :

Si l'on examine avec soin la jurisprudence la plus récente, en incluant les décisions récentes citées par l'appelante, on s'aperçoit que les peines varient de 1 an à 10 ans. C'est ici qu'entrent en jeu notamment les circonstances atténuantes et aggravantes propres au dossier particulier. En cette matière, il n'y a ni automatisme ni règles préétablies. L'existence de circonstances atténuantes prédominantes dans un dossier peut conduire le juge à choisir une peine qui se situe au plus bas de la fourchette alors que, lorsqu'il fait face à des circonstances aggravantes plus importantes, il peut opter pour une peine plus sévère.

[56] Ainsi, dans R. c. Junkert, la Cour d'appel de l'Ontario a confirmé une peine de cinq ans de pénitencier imposée à un individu sans antécédents judiciaires, à la suite de la tenue d'un procès.

[57] S'exprimant pour la majorité, monsieur le juge O'Connor déclare que :

In recent years there has been an upward trend in the length of sentences imposed for drinking ans driving offences. The reasons for this trend can be attributed to society's abhorrence for the often tragic circumstances that result when individuals choose to drink and drive, thereby putting the lives and safety of others at risk.

[58] Il ajoute plus loin :

I recognize that sentences of four to five years for first offenders may be at the high end of sentences imposed by the courts to this point in time. That said, I do not think that a sentence of five years for this offence is unfit. Nor is it a significant departure from sentences previously imposed so as to warrant interference by this court. While the sentence in this case may be seen as a slight movement upwards, I am satisfied that the increase, if there is one, is incremental and that it quite properly continues the very gradual trend that has taken place over recent years.

[59] En somme, le message est clair : le législateur a voulu une sévérité accrue lors de l'imposition de la peine afin de dénoncer le fléau que constitue l'alcool au volant et les tribunaux doivent marquer l'importance de la réprobation sociale à l'égard de ce type de comportement.

[61] Dans R. c. Sasseville, monsieur le juge Claude Provost s'exprime ainsi :

Monsieur et madame Tout-le-Monde doivent savoir que les peines d'emprisonnement substantielles ne sont pas uniquement réservées aux assassins, aux voleurs de banque ou aux trafiquants de stupéfiants.

Le bon père de famille et la bonne mère de famille doivent savoir que s'ils causent la mort ou des lésions corporelles en conduisant un véhicule à moteur, alors que leur capacité de le conduire est diminuée de par l'effet de l'alcool ou d'une drogue, ils seront sévèrement punis, même si leur passé est sans tache et qu'ils se sont toujours comportés en honnêtes citoyens.

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