R. c. S. (R.D.), [1997] 3 R.C.S. 484
36. L’existence d’une crainte raisonnable de partialité ou son absence est déterminée par référence à une personne raisonnable, bien renseignée, qui étudierait la question en profondeur, de façon réaliste et pratique (Committee for Justice and Liberty, précité). Cette personne n’est pas «de nature scrupuleuse ou tatillonne», c’est plutôt une personne sensée qui connaît les circonstances de la cause.
37. Il s’ensuit que ce qui entre en ligne de compte, ce sont la connaissance et la compréhension que la personne raisonnable a du processus judiciaire et de l’exercice de la justice ainsi que de la collectivité où le crime reproché a été commis.
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jeudi 3 mars 2011
mercredi 2 mars 2011
Garde et contrôle: c’est au risque de mise en mouvement que le danger doit être associé
R. c. Leblanc, 2011 CanLII 9441 (QC C.M.)
[6] La poursuivante adopte ainsi les principes émis pas notre Cour d’Appel en 2005 dans l’affaire Sergerie :
« La poursuite n’a pas le fardeau de démontrer hors de tout doute raisonnable un risque réel de mise en mouvement. Elle doit simplement démontrer que l’accusé s’est placé dans une situation susceptible de devenir dangereuse. Le risque en question provient de l’état de jugement altéré par l’alcool d’une personne en état d’ébriété ayant les moyens de mettre son véhicule en mouvement. »
[8] Dans l’affaire Toews, l ’Honorable juge McIntyre de la Cour Suprême a ainsi défini les actes de garde ou contrôle d’un véhicule automobile:
« (…) les actes de garde ou contrôle, hormis l’acte de conduire, sont des actes qui comportent une certaine utilisation du véhicule ou de ses accessoires, ou une conduite quelconque à l’égard du véhicule qui comporterait le risque de le mettre en mouvement de sorte qu’il puisse devenir dangereux. Chaque affaire sera décidée en fonction de ses propres faits et les circonstances où l’on pourra conclure qu’il y a des actes de garde ou de contrôle varieront beaucoup. »
[9] Pour conclure à garde ou contrôle, il faut donc retrouver une certaine utilisation du véhicule ou de ses accessoires qui comporte le risque de le mettre en mouvement.
[10] C’est une erreur d’associer le danger à l’utilisation simple des accessoires tel la radio ou la chaufferette du véhicule.
[11] C’est au risque de mise en mouvement que le danger doit être associé.
[12] La présomption de l’article 258 1 (a) C. cr. a pour but de « décourager les gens en état d’ébriété de se placer dans une situation où ils pourraient mettre un véhicule en marche et en même temps leur fournir un moyen d’échapper à la responsabilité lorsqu’ils avaient un motif pour monter dans le véhicule autre que celui de le mettre en marche. ».
[13] Une fois cette présomption repoussée, celui qui occupait la place du conducteur du véhicule n’est plus réputé en avoir eu la garde ou le contrôle.
[14] La défenderesse a repoussé cette présomption et n’est donc plus réputée avoir eu la garde ou le contrôle de son véhicule.
[15] Il ne pourrait conséquemment être conclu qu’elle avait la garde ou le contrôle de son véhicule, au sens de l’article 253 C. cr., que depuis l’ensemble de la preuve déterminant qu’elle a posé des actes comportant une certaine utilisation du son dit véhicule ou de ses accessoires risquant de le mettre en mouvement, devenant ainsi potentiellement dangereux.
[16] Notre cour d’appel l’a souligné en l’affaire Olivier : le fait qu’un conducteur soit assis derrière le volant, avec la clé dans le contact, n’entraîne pas nécessairement la conclusion qu’il a le contrôle de son véhicule. Chaque cas doit être décidé eu égard à ses propres faits.
[17] L’actus reus de l’infraction de cet article 253 C. cr. serait le fait, pour la défenderesse, d’assumer ce risque de mettre son véhicule en mouvement alors que sa consommation volontaire d’alcool avait affaibli sa capacité de conduire, ou que son alcoolémie était supérieure à la limite permise.
[18] Il y aurait donc absence d’actus reus si l’utilisation de son véhicule ne comportait pas de risque de le mettre en mouvement, de le rendre dangereux :
« Lorsque l’utilisation du véhicule à moteur ne comporte aucun risque de le mettre en marche ou de le rendre dangereux, les cours de justice devraient conclure qu’il y a absence « d’actus reus » (R. Penno, 1990 2 R.C.S. 865)»
« Par contre, la loi ne manque pas totalement de souplesse et ne va pas jusqu’à punir la simple présence dans un véhicule à moteur d’une personne dont la capacité de conduire est affaiblie. En réalité, l’arrêt Toews consacre la règle que, lorsque l’utilisation du véhicule ne comporte aucun risque de le mettre en marche et de le rendre dangereux, les cours de justice devraient conclure qu’il y a absence d’actus reus. »
« J’estime que le fait de se trouver ainsi, seul dans son véhicule, le téléphone cellulaire en main, à la recherche d’un bon samaritain dans le but d’éviter de conduire son véhicule, constitue un fait neutre puisque la présomption a été réfutée. Comme la preuve ne révèle aucun autre acte de l’appelant comportant une certaine utilisation du véhicule, ou encore certains actes établissant une conduite quelconque à l’égard du véhicule qui comportaient le risque de le mettre en mouvement de sorte qu’il puisse devenir dangereux, l’actus reus n’a pas été démontré hors de tout doute raisonnable. »
[19] Ainsi, la mens rea de l’infraction de cet article 253 C. cr. serait l’intention coupable d’assumer ce risque de mettre le véhicule en mouvement après avoir volontairement consommé de l’alcool ou des drogues.
[20] Certes, comme l’a si bien souligné le procureur de la poursuivante, même ayant repoussé la présomption de l’article 258 1 (a) C. cr., même étant ainsi réputée ne pas avoir eu la garde et contrôle de son véhicule, la défenderesse pouvait toujours devenir potentiellement dangereuse, pourrait-on prétendre, car à tout moment et en tout temps elle aurait pu changer d’idée et décider de quitter les lieux sans plus attendre :
« There is no necessity of proving that the offender was posing an immediate danger to the public in order to find him guilty. It is the possibility that the vehicle may be in motion, intentionally or unintentionally, by a person who is intoxicated that poses a problem for the public safety.”
[21] Jusqu’à l’intervention des policiers, il est incontestable que la défenderesse n’avait aucune intention de mettre son véhicule en mouvement, même si elle en avait la possibilité : elle attendait son transporteur contacté par téléphone par son copain.
[29] Répétition volontaire: c’est au risque de mise en mouvement que le danger doit être associé.
[6] La poursuivante adopte ainsi les principes émis pas notre Cour d’Appel en 2005 dans l’affaire Sergerie :
« La poursuite n’a pas le fardeau de démontrer hors de tout doute raisonnable un risque réel de mise en mouvement. Elle doit simplement démontrer que l’accusé s’est placé dans une situation susceptible de devenir dangereuse. Le risque en question provient de l’état de jugement altéré par l’alcool d’une personne en état d’ébriété ayant les moyens de mettre son véhicule en mouvement. »
[8] Dans l’affaire Toews, l ’Honorable juge McIntyre de la Cour Suprême a ainsi défini les actes de garde ou contrôle d’un véhicule automobile:
« (…) les actes de garde ou contrôle, hormis l’acte de conduire, sont des actes qui comportent une certaine utilisation du véhicule ou de ses accessoires, ou une conduite quelconque à l’égard du véhicule qui comporterait le risque de le mettre en mouvement de sorte qu’il puisse devenir dangereux. Chaque affaire sera décidée en fonction de ses propres faits et les circonstances où l’on pourra conclure qu’il y a des actes de garde ou de contrôle varieront beaucoup. »
[9] Pour conclure à garde ou contrôle, il faut donc retrouver une certaine utilisation du véhicule ou de ses accessoires qui comporte le risque de le mettre en mouvement.
[10] C’est une erreur d’associer le danger à l’utilisation simple des accessoires tel la radio ou la chaufferette du véhicule.
[11] C’est au risque de mise en mouvement que le danger doit être associé.
[12] La présomption de l’article 258 1 (a) C. cr. a pour but de « décourager les gens en état d’ébriété de se placer dans une situation où ils pourraient mettre un véhicule en marche et en même temps leur fournir un moyen d’échapper à la responsabilité lorsqu’ils avaient un motif pour monter dans le véhicule autre que celui de le mettre en marche. ».
[13] Une fois cette présomption repoussée, celui qui occupait la place du conducteur du véhicule n’est plus réputé en avoir eu la garde ou le contrôle.
[14] La défenderesse a repoussé cette présomption et n’est donc plus réputée avoir eu la garde ou le contrôle de son véhicule.
[15] Il ne pourrait conséquemment être conclu qu’elle avait la garde ou le contrôle de son véhicule, au sens de l’article 253 C. cr., que depuis l’ensemble de la preuve déterminant qu’elle a posé des actes comportant une certaine utilisation du son dit véhicule ou de ses accessoires risquant de le mettre en mouvement, devenant ainsi potentiellement dangereux.
[16] Notre cour d’appel l’a souligné en l’affaire Olivier : le fait qu’un conducteur soit assis derrière le volant, avec la clé dans le contact, n’entraîne pas nécessairement la conclusion qu’il a le contrôle de son véhicule. Chaque cas doit être décidé eu égard à ses propres faits.
[17] L’actus reus de l’infraction de cet article 253 C. cr. serait le fait, pour la défenderesse, d’assumer ce risque de mettre son véhicule en mouvement alors que sa consommation volontaire d’alcool avait affaibli sa capacité de conduire, ou que son alcoolémie était supérieure à la limite permise.
[18] Il y aurait donc absence d’actus reus si l’utilisation de son véhicule ne comportait pas de risque de le mettre en mouvement, de le rendre dangereux :
« Lorsque l’utilisation du véhicule à moteur ne comporte aucun risque de le mettre en marche ou de le rendre dangereux, les cours de justice devraient conclure qu’il y a absence « d’actus reus » (R. Penno, 1990 2 R.C.S. 865)»
« Par contre, la loi ne manque pas totalement de souplesse et ne va pas jusqu’à punir la simple présence dans un véhicule à moteur d’une personne dont la capacité de conduire est affaiblie. En réalité, l’arrêt Toews consacre la règle que, lorsque l’utilisation du véhicule ne comporte aucun risque de le mettre en marche et de le rendre dangereux, les cours de justice devraient conclure qu’il y a absence d’actus reus. »
« J’estime que le fait de se trouver ainsi, seul dans son véhicule, le téléphone cellulaire en main, à la recherche d’un bon samaritain dans le but d’éviter de conduire son véhicule, constitue un fait neutre puisque la présomption a été réfutée. Comme la preuve ne révèle aucun autre acte de l’appelant comportant une certaine utilisation du véhicule, ou encore certains actes établissant une conduite quelconque à l’égard du véhicule qui comportaient le risque de le mettre en mouvement de sorte qu’il puisse devenir dangereux, l’actus reus n’a pas été démontré hors de tout doute raisonnable. »
[19] Ainsi, la mens rea de l’infraction de cet article 253 C. cr. serait l’intention coupable d’assumer ce risque de mettre le véhicule en mouvement après avoir volontairement consommé de l’alcool ou des drogues.
[20] Certes, comme l’a si bien souligné le procureur de la poursuivante, même ayant repoussé la présomption de l’article 258 1 (a) C. cr., même étant ainsi réputée ne pas avoir eu la garde et contrôle de son véhicule, la défenderesse pouvait toujours devenir potentiellement dangereuse, pourrait-on prétendre, car à tout moment et en tout temps elle aurait pu changer d’idée et décider de quitter les lieux sans plus attendre :
« There is no necessity of proving that the offender was posing an immediate danger to the public in order to find him guilty. It is the possibility that the vehicle may be in motion, intentionally or unintentionally, by a person who is intoxicated that poses a problem for the public safety.”
[21] Jusqu’à l’intervention des policiers, il est incontestable que la défenderesse n’avait aucune intention de mettre son véhicule en mouvement, même si elle en avait la possibilité : elle attendait son transporteur contacté par téléphone par son copain.
[29] Répétition volontaire: c’est au risque de mise en mouvement que le danger doit être associé.
La poursuite a l'obligation de produire tout témoin de la déclaration, sauf explication raisonnable quant à son absence dans le cadre d'un voir-dire
R. c. Fournier, 1987 CanLII 802 (QC C.A.)
Lorsqu'elle entend se servir d'une déclaration de l'accusé, la Couronne, comme on le sait, assume l'obligation de démontrer hors de tout doute raisonnable son caractère libre et volontaire (R. c. Erven, 1978, 1 R.C.S. 26; Park c. R., 1981, 2 R.C.S. 64, p. 66, m. le juge Dickson; Kaufman, The Admissibility of confessions, 3e ed., pp. 21-22). La détermination de ce caractère volontaire pose au juge du procès un problème d'évaluation des faits (voir Park c. R., loc.cit.p. 70, m. le juge Dickson; R. c. Settee, 1974, 229 C.R.N.S. 104, p. 117, m. le juge en chef Culliton. Le juge devra pour apprécier l'ensemble des circonstances de l'affaire et à partir de celles-ci, évaluer si la Couronne a démontré à sa satisfaction et au-delà d'un doute raisonnable que la déclaration a été obtenue librement et sans utilisation de moyens ou d'influence indus, comme la violence, les sévices les pressions ou les promesses d'avantages.
Afin que le juge du procès remplisse adéquatement son rôle et puisse vérifier effectivement le caractère volontaire de la déclaration, conformément aux exigences du droit de la preuve pénale, la jurisprudence a imposé à la Couronne une règle d'information complète sur les circonstances de la déclaration. Cette règle se trouve exprimée en droit canadien, par le juge en chef Anglin, dans l'arrêt Sankey c. R., 1927, R.C.S. 436, pp. 440 et 441:
"We feel, however, that we should not part from this case without expressing our view that the proof of the voluntary character of the accused's statement to the police, which was put in evidence against him, is most unsatisfactory. That statement, put in writing by the police officer, was obtained only upon a fourth questioning to which the accused was subjected on the day following his arrest. Three previous attemps to lead him to "talk" had apparently proved abortive - why we are left to surmise. The accused, a young Indian, could neither read or write. No particulars are vouchsafed as to what transpired at any of the three previous "interviews; and but meagre details are given of the process by which the writen statement ultimately signed by the appellant was obtained. We think that the police officer who obtained that statement should have fully disclosed all that took place on each of the occasions when he "interviewed" the prisoner; and, if another policeman was present, as the detendant swore at the trial, his evidence adduced before the statement was received in evidence. With all the facts before him, the Judge should form his own opinion that the tendered statement was indeed free and voluntary as the basis for its admission rather than accept the mere opinion of the police officer, who had obtained it, that it was made "voluntary" and "freely"."
Quelques années plus tard, un autre arrêt de la Cour suprême du Canada reprenait cette règle, l'assortissant d'une réserve, soit l'obligation de produire tout témoin de la déclaration, sauf explication raisonnable quant à son absence (Thiffault c. R., 1933, R.C.S. 509, p. 515):
"Where such a statement is elicited in the presence of several officers, the statement ought, as a rule, not to be admittted unless (in the absence of some adequate explanation of their absence) those who were present are produced by the Crown as witnesses, at least for cross-examination on behalf of the accused; and, where the statement professes to give the substance of a report of oral answers given by the accused to interrogatories, without reproducing the questions, then the written report ought not to be admitted in evidence unless the person who is responsible for its compilation is (here again in the absence of some adequate explanation of his absence) called as a witness."
Cette règle jurisprudentielle impose l'exclusion de la déclaration lorsque la Couronne, par négligence ou mauvaise foi, dissimule ou écarte un témoin. Le juge du procès ne peut remplir sa fonction de vérification et la défense est privée de ses droits au contre-interrogatoire, le cas échéant. Si elle crée l'obligation de produire tout témoin utile quant à la vérification du caractère volontaire de la déclaration, la jurisprudence n'introduit pas, cependant, une nouvelle règle d'irrecevabilité de la déclaration chaque fois qu'un témoin est absent ou ne peut rendre son témoignage. L'arrêt de notre Cour, Caron c. La Reine, 1979, C.A. 429, n'a pas, sur ce point, la portée que lui prête le premier juge. Il retenait la règle dégagée par l'arrêt Thiffault, imposant la production de tout témoin utile, mais permettant à la Couronne d'expliquer le motif de son absence:
"En matière de voir-dire, quant à l'admissibilité d'une déclaration faite hors cour par un accusé, il incombe à la Couronne d'établir que la déclaration a été libre et volontaire. Cette preuve comporte l'interrogatoire, dans la mesure du possible, de toutes les personnes en autorité qui ont pu être en mesure d'écouter l'accusé faire la déclaration, sauf dispense de la part de la défense." (Caron c. R., loc.cit. monsieur le juge Bernier, p. 432).
Dans l'affaire Caron, notre Cour reprochait au juge de première instance d'avoir empêché l'interrogatoire témoins qui auraient joué un rôle actif dans l'obtention de la déclaration. Elle réservait toutefois la possibilité de donner une raison valable de l'absence, comme l'indique une note à l'opinion de monsieur le juge Bernier (voir loc.cit. p. 432, note 6; voir aussi: Kaufman, The Admissibily of confessions, 3 ed, pp. 38 à 40, 3d supplement, pp. 15 à 19). Notre Cour avait donc écarté la déclaration de l'appelante Caron en employant le langage suivant:
"Dans le présent cas, la Couronne, par suite de l'intervention du premier juge, a fait défaut de faire entendre toutes les personnes en autorité qui auraient pu faire des pressions indus sur l'appelante. C'est à mon avis un vice fatal qui invalide le voir-dire et partant en l'espèce le procès..." (loc.cit. p. 432, monsieur le juge Bernier)
Ce passage doit être lu en relation avec l'ensemble de l'opinion de monsieur le juge Bernier et du jugement de la Cour. Il n'établit pas le principe de droit qu'invoque le jugement attaqué. Il exprime plutôt la règle jurisprudentielle traditionnelle qui laisse le juge apprécier la valeur de la preuve qui lui est offerte. L'absence d'un témoin peut s'expliquer: le juge appréciera alors son effet sur l'ensemble de la preuve. Il lui appartiendra de déterminer s'il reste assez de preuve pour qu'il soit capable de se satisfaire du caractère volontaire de la déclaration. Celle-ci ne doit être exclue, par principe, que si un témoin, tel que mentionné plus haut, n'est pas produit par la Couronne volontairement, par négligence ou sans motif. Le risque de porter atteinte à l'intégrité du procès pénal et aux droits de l'accusé et de le contre-interroger valablement, justifiera semblable conclusion. Lorsque ce principe n'est pas en jeu, le problème se réduit, cependant, à une question d'évaluation de la preuve que le juge pèsera au terme du voir-dire.
Ce principe ressort de la jurisprudence qui a appliqué l'arrêt Thiffault. Comme l'indiquent quelques exemples, les tribunaux dispensent en effet la Couronne de la production d'un témoin sans utilité, comme ce policier qui n'avait pas assisté à la prise d'une première déclaration non-utilisée (voir R. c. Tonnancourt, 1956, 24 C.R. 19). Aussi, dans R. c. Kacherowski, 1937, C.C.C. 2d, p. 257, la Cour d'Appel de l'Alberta ne jugea pas nécessaire de faire entendre un policier qui avait assisté à la prise d'une déclaration. La Cour appliquait à nouveau les critères exposés dans l'arrêt Thiffault. À l'inverse, dans l'ar- R. c. Botfield, 1973, 28 C.C.C., 2d, 477, la déclaration était rejetée parce que l'on n'avait pas produit, au voir-dire, un policier malade. À la lecture de ce jugement, l'on constate, cependant, que le témoin produit par la poursuite n'avait pas assisté à une partie de l'entrevue entre le policier qui avait recueilli la déclaration et l'accusé. L'on se trouvait donc devant une absence de preuve à l'égard d'au moins une partie importante des circonstances de la réception de la déclaration.
À cause du fardeau imposé à la Couronne, la déclaration devait alors être rejetée. Une semblable conclusion a été adoptée en raison du défaut de faire entendre les policiers présents avec l'accusé pendant une perquisition (R. c. Woodward, 1975, 23 C.C.C., 2d, 568, Cour d'Appel de l'Ontario). Ces témoins étaient en effet importants en raison de leur rôle dans la prise de déclaration. Leur absence n'était pas alors justifiée.
Même justifiée, l'absence ou l'incapacité d'un témoin peut laisser la preuve incomplète, ne permettant pas ainsi au juge d'évaluer le caractère volontaire de la déclaration conformément à la règle du doute raisonnable. L'absence peut alors rendre la preuve insuffisante, mais non pas irrévocable. La jurisprudence n'oblige pas un juge à appliquer, dans tous ces cas, une règle d'exclusion automatique de la déclaration mais, en définitive, elle leur demande de peser l'effet de l'absence du témoignage sur la qualité de la preuve offerte.
Lorsqu'elle entend se servir d'une déclaration de l'accusé, la Couronne, comme on le sait, assume l'obligation de démontrer hors de tout doute raisonnable son caractère libre et volontaire (R. c. Erven, 1978, 1 R.C.S. 26; Park c. R., 1981, 2 R.C.S. 64, p. 66, m. le juge Dickson; Kaufman, The Admissibility of confessions, 3e ed., pp. 21-22). La détermination de ce caractère volontaire pose au juge du procès un problème d'évaluation des faits (voir Park c. R., loc.cit.p. 70, m. le juge Dickson; R. c. Settee, 1974, 229 C.R.N.S. 104, p. 117, m. le juge en chef Culliton. Le juge devra pour apprécier l'ensemble des circonstances de l'affaire et à partir de celles-ci, évaluer si la Couronne a démontré à sa satisfaction et au-delà d'un doute raisonnable que la déclaration a été obtenue librement et sans utilisation de moyens ou d'influence indus, comme la violence, les sévices les pressions ou les promesses d'avantages.
Afin que le juge du procès remplisse adéquatement son rôle et puisse vérifier effectivement le caractère volontaire de la déclaration, conformément aux exigences du droit de la preuve pénale, la jurisprudence a imposé à la Couronne une règle d'information complète sur les circonstances de la déclaration. Cette règle se trouve exprimée en droit canadien, par le juge en chef Anglin, dans l'arrêt Sankey c. R., 1927, R.C.S. 436, pp. 440 et 441:
"We feel, however, that we should not part from this case without expressing our view that the proof of the voluntary character of the accused's statement to the police, which was put in evidence against him, is most unsatisfactory. That statement, put in writing by the police officer, was obtained only upon a fourth questioning to which the accused was subjected on the day following his arrest. Three previous attemps to lead him to "talk" had apparently proved abortive - why we are left to surmise. The accused, a young Indian, could neither read or write. No particulars are vouchsafed as to what transpired at any of the three previous "interviews; and but meagre details are given of the process by which the writen statement ultimately signed by the appellant was obtained. We think that the police officer who obtained that statement should have fully disclosed all that took place on each of the occasions when he "interviewed" the prisoner; and, if another policeman was present, as the detendant swore at the trial, his evidence adduced before the statement was received in evidence. With all the facts before him, the Judge should form his own opinion that the tendered statement was indeed free and voluntary as the basis for its admission rather than accept the mere opinion of the police officer, who had obtained it, that it was made "voluntary" and "freely"."
Quelques années plus tard, un autre arrêt de la Cour suprême du Canada reprenait cette règle, l'assortissant d'une réserve, soit l'obligation de produire tout témoin de la déclaration, sauf explication raisonnable quant à son absence (Thiffault c. R., 1933, R.C.S. 509, p. 515):
"Where such a statement is elicited in the presence of several officers, the statement ought, as a rule, not to be admittted unless (in the absence of some adequate explanation of their absence) those who were present are produced by the Crown as witnesses, at least for cross-examination on behalf of the accused; and, where the statement professes to give the substance of a report of oral answers given by the accused to interrogatories, without reproducing the questions, then the written report ought not to be admitted in evidence unless the person who is responsible for its compilation is (here again in the absence of some adequate explanation of his absence) called as a witness."
Cette règle jurisprudentielle impose l'exclusion de la déclaration lorsque la Couronne, par négligence ou mauvaise foi, dissimule ou écarte un témoin. Le juge du procès ne peut remplir sa fonction de vérification et la défense est privée de ses droits au contre-interrogatoire, le cas échéant. Si elle crée l'obligation de produire tout témoin utile quant à la vérification du caractère volontaire de la déclaration, la jurisprudence n'introduit pas, cependant, une nouvelle règle d'irrecevabilité de la déclaration chaque fois qu'un témoin est absent ou ne peut rendre son témoignage. L'arrêt de notre Cour, Caron c. La Reine, 1979, C.A. 429, n'a pas, sur ce point, la portée que lui prête le premier juge. Il retenait la règle dégagée par l'arrêt Thiffault, imposant la production de tout témoin utile, mais permettant à la Couronne d'expliquer le motif de son absence:
"En matière de voir-dire, quant à l'admissibilité d'une déclaration faite hors cour par un accusé, il incombe à la Couronne d'établir que la déclaration a été libre et volontaire. Cette preuve comporte l'interrogatoire, dans la mesure du possible, de toutes les personnes en autorité qui ont pu être en mesure d'écouter l'accusé faire la déclaration, sauf dispense de la part de la défense." (Caron c. R., loc.cit. monsieur le juge Bernier, p. 432).
Dans l'affaire Caron, notre Cour reprochait au juge de première instance d'avoir empêché l'interrogatoire témoins qui auraient joué un rôle actif dans l'obtention de la déclaration. Elle réservait toutefois la possibilité de donner une raison valable de l'absence, comme l'indique une note à l'opinion de monsieur le juge Bernier (voir loc.cit. p. 432, note 6; voir aussi: Kaufman, The Admissibily of confessions, 3 ed, pp. 38 à 40, 3d supplement, pp. 15 à 19). Notre Cour avait donc écarté la déclaration de l'appelante Caron en employant le langage suivant:
"Dans le présent cas, la Couronne, par suite de l'intervention du premier juge, a fait défaut de faire entendre toutes les personnes en autorité qui auraient pu faire des pressions indus sur l'appelante. C'est à mon avis un vice fatal qui invalide le voir-dire et partant en l'espèce le procès..." (loc.cit. p. 432, monsieur le juge Bernier)
Ce passage doit être lu en relation avec l'ensemble de l'opinion de monsieur le juge Bernier et du jugement de la Cour. Il n'établit pas le principe de droit qu'invoque le jugement attaqué. Il exprime plutôt la règle jurisprudentielle traditionnelle qui laisse le juge apprécier la valeur de la preuve qui lui est offerte. L'absence d'un témoin peut s'expliquer: le juge appréciera alors son effet sur l'ensemble de la preuve. Il lui appartiendra de déterminer s'il reste assez de preuve pour qu'il soit capable de se satisfaire du caractère volontaire de la déclaration. Celle-ci ne doit être exclue, par principe, que si un témoin, tel que mentionné plus haut, n'est pas produit par la Couronne volontairement, par négligence ou sans motif. Le risque de porter atteinte à l'intégrité du procès pénal et aux droits de l'accusé et de le contre-interroger valablement, justifiera semblable conclusion. Lorsque ce principe n'est pas en jeu, le problème se réduit, cependant, à une question d'évaluation de la preuve que le juge pèsera au terme du voir-dire.
Ce principe ressort de la jurisprudence qui a appliqué l'arrêt Thiffault. Comme l'indiquent quelques exemples, les tribunaux dispensent en effet la Couronne de la production d'un témoin sans utilité, comme ce policier qui n'avait pas assisté à la prise d'une première déclaration non-utilisée (voir R. c. Tonnancourt, 1956, 24 C.R. 19). Aussi, dans R. c. Kacherowski, 1937, C.C.C. 2d, p. 257, la Cour d'Appel de l'Alberta ne jugea pas nécessaire de faire entendre un policier qui avait assisté à la prise d'une déclaration. La Cour appliquait à nouveau les critères exposés dans l'arrêt Thiffault. À l'inverse, dans l'ar- R. c. Botfield, 1973, 28 C.C.C., 2d, 477, la déclaration était rejetée parce que l'on n'avait pas produit, au voir-dire, un policier malade. À la lecture de ce jugement, l'on constate, cependant, que le témoin produit par la poursuite n'avait pas assisté à une partie de l'entrevue entre le policier qui avait recueilli la déclaration et l'accusé. L'on se trouvait donc devant une absence de preuve à l'égard d'au moins une partie importante des circonstances de la réception de la déclaration.
À cause du fardeau imposé à la Couronne, la déclaration devait alors être rejetée. Une semblable conclusion a été adoptée en raison du défaut de faire entendre les policiers présents avec l'accusé pendant une perquisition (R. c. Woodward, 1975, 23 C.C.C., 2d, 568, Cour d'Appel de l'Ontario). Ces témoins étaient en effet importants en raison de leur rôle dans la prise de déclaration. Leur absence n'était pas alors justifiée.
Même justifiée, l'absence ou l'incapacité d'un témoin peut laisser la preuve incomplète, ne permettant pas ainsi au juge d'évaluer le caractère volontaire de la déclaration conformément à la règle du doute raisonnable. L'absence peut alors rendre la preuve insuffisante, mais non pas irrévocable. La jurisprudence n'oblige pas un juge à appliquer, dans tous ces cas, une règle d'exclusion automatique de la déclaration mais, en définitive, elle leur demande de peser l'effet de l'absence du témoignage sur la qualité de la preuve offerte.
Le droit concernant l'exigence de préavis relativement à la déclaration de délinquant dangereux / délinquant à contrôler
R. c. C.L., 2007 QCCQ 6852 (CanLII)
[7] Ainsi, le Code criminel prévoit deux étapes :
▪ Premièrement, suite à une demande de la poursuite, le Tribunal peut renvoyer l'accusé à la garde d’une personne qui effectue une évaluation.
▪ Deuxièmement, suite au dépôt du rapport, la poursuite peut formuler une demande de déclaration de délinquant dangereux ou de délinquant à contrôler.
[8] La poursuite doit donner au délinquant un préavis d'au moins sept jours francs après la présentation de la demande, indiquant ce sur quoi la demande se fonde.
[9] Ainsi, à la première étape, la poursuite formule une demande de renvoi pour évaluation. Ne connaissant pas d’avance les résultats du rapport, elle ne formule pas de demande de déclaration de délinquant dangereux ou de délinquant à contrôler. En outre, suite à la réception du rapport, il est théoriquement possible que la poursuite ne formule pas de demande.
[10] Selon cette logique, le préavis de sept jours ne s’applique pas à la première étape mais plutôt, et le cas échéant, à la deuxième.
[7] Ainsi, le Code criminel prévoit deux étapes :
▪ Premièrement, suite à une demande de la poursuite, le Tribunal peut renvoyer l'accusé à la garde d’une personne qui effectue une évaluation.
▪ Deuxièmement, suite au dépôt du rapport, la poursuite peut formuler une demande de déclaration de délinquant dangereux ou de délinquant à contrôler.
[8] La poursuite doit donner au délinquant un préavis d'au moins sept jours francs après la présentation de la demande, indiquant ce sur quoi la demande se fonde.
[9] Ainsi, à la première étape, la poursuite formule une demande de renvoi pour évaluation. Ne connaissant pas d’avance les résultats du rapport, elle ne formule pas de demande de déclaration de délinquant dangereux ou de délinquant à contrôler. En outre, suite à la réception du rapport, il est théoriquement possible que la poursuite ne formule pas de demande.
[10] Selon cette logique, le préavis de sept jours ne s’applique pas à la première étape mais plutôt, et le cas échéant, à la deuxième.
Les principes de droit servant de guide dans l'analyse à savoir si l'accusé est délinquant dangereux
R. c. P.(M.), 2003 CanLII 48820 (QC C.Q.)
[96] Les principes de droit servant de guide dans l'analyse de la preuve en pareille matière ont été résumés par l'Honorable Juge B. Falardeau dans un jugement récent du 27 février 2003:
«La Cour suprême du Canada, dans l'arrêt R. c. Currie 1997 CanLII 347 (C.S.C.), (1997) 2 R.C.S. 260 a décidé que dès que la conduite antérieure de l'accusé laissait prévoir qu'il causerait vraisemblablement des sévices graves à d'autres personnes, la décision de déclarer l'accusé délinquant dangereux pourrait être justifiée. Ce principe, bien sûr, n'enlève pas la discrétion du tribunal.
À cet effet la Cour d'appel de la Colombie Britannique dans l'affaire R. c. Scott 2000 BCCA 220 (CanLII), (2000) 145 C.C.C. (3d) 52, en confirmant que la poursuite devait prouver hors de tout doute raisonnable les exigences requises par l'article 753 (1) b) C.cr. a reconnu l'entière discrétion du juge à déclarer l'accusé délinquant dangereux.
Cette même cour d'appel a aussi décidé, dans l'affaire R. c. Johnson 2001 BCCA 456 (CanLII), (2001) 158 C.C.C. (3d) 155, qu'un accusé qui était susceptible de répondre positivement à des traitements efficaces devait plutôt être déclaré délinquant à contrôler que délinquant dangereux.
Il est établi, depuis la décision R. c. Audette (2002-06-17) C.A.Q. 500-10-001674-991, que le rapport d'un expert ne lie aucunement le juge, il ne constitue qu'un élément de preuve parmi les autres. La Cour suprême, dans l'arrêt R. c. Lyons 1987 CanLII 25 (C.S.C.), (1987) 2 R.C.S. 309 avait d'ailleurs déclaré que c'est le tribunal et non l'expert qui doit être convaincu du bien-fondé de sa démarche.»
[96] Les principes de droit servant de guide dans l'analyse de la preuve en pareille matière ont été résumés par l'Honorable Juge B. Falardeau dans un jugement récent du 27 février 2003:
«La Cour suprême du Canada, dans l'arrêt R. c. Currie 1997 CanLII 347 (C.S.C.), (1997) 2 R.C.S. 260 a décidé que dès que la conduite antérieure de l'accusé laissait prévoir qu'il causerait vraisemblablement des sévices graves à d'autres personnes, la décision de déclarer l'accusé délinquant dangereux pourrait être justifiée. Ce principe, bien sûr, n'enlève pas la discrétion du tribunal.
À cet effet la Cour d'appel de la Colombie Britannique dans l'affaire R. c. Scott 2000 BCCA 220 (CanLII), (2000) 145 C.C.C. (3d) 52, en confirmant que la poursuite devait prouver hors de tout doute raisonnable les exigences requises par l'article 753 (1) b) C.cr. a reconnu l'entière discrétion du juge à déclarer l'accusé délinquant dangereux.
Cette même cour d'appel a aussi décidé, dans l'affaire R. c. Johnson 2001 BCCA 456 (CanLII), (2001) 158 C.C.C. (3d) 155, qu'un accusé qui était susceptible de répondre positivement à des traitements efficaces devait plutôt être déclaré délinquant à contrôler que délinquant dangereux.
Il est établi, depuis la décision R. c. Audette (2002-06-17) C.A.Q. 500-10-001674-991, que le rapport d'un expert ne lie aucunement le juge, il ne constitue qu'un élément de preuve parmi les autres. La Cour suprême, dans l'arrêt R. c. Lyons 1987 CanLII 25 (C.S.C.), (1987) 2 R.C.S. 309 avait d'ailleurs déclaré que c'est le tribunal et non l'expert qui doit être convaincu du bien-fondé de sa démarche.»
mardi 1 mars 2011
Les aspects juridiques d'un complot (et de son désistement)
R. c. Campeau, 1999 CanLII 13455 (QC C.A.)
Lien vers la décision
Un complot se définit comme (1) une entente entre au moins deux personnes (2) qui ont l'intention de participer ensemble (3) à la poursuite d'une fin illégale.
Il se peut que deux personnes poursuivent la même fin illégale mais sans s'être entendues pour ce faire, auquel cas il n'y a pas de complot.
Une entente signifie un accord de volontés qui peut être tacite ou exprès. Cette entente sera significative dans la mesure où les participants ont l'intention de s'entraider ou de prendre ensemble des moyens pour réaliser cette fin illégale qui leur est commune. Dès lors, si dans leurs tractations ou dans leurs rencontres, les parties se limitent à considérer un projet ou la possibilité de réaliser une fin illégale, elles n'ont pas encore nécessairement exprimé par leurs faits et gestes l'intention de s'entraider dans la poursuite de la fin illégale: le complot ne s'est pas formé. De la même façon, on exigera, à l'égard de la personne que l'on considère «adhérer» à un complot existant, plus que sa connaissance, son intérêt, voire même son acquiescement: une personne adhère véritablement à un complot dans la mesure où l'on peut inférer de sa conduite l'intention de se joindre aux autres et de participer avec elles à la réalisation de la fin illégale («faire sien le complot... et accepter de travailler à son achèvement»). En principe, il n'est donc pas essentiel que les parties à un complot aient effectivement posé des actes dans la réalisation de l'objet du complot: c'est la participation à l'entente et non pas à la réalisation de son objet qui est requise. Contrairement à la tentative, le complot n'exige pas un commencement d'exécution.
Qu'en est-il du retrait ou du désistement de l'un des conspirateurs? On ne peut se dissocier d'un complot s'il a été commis: le désistement n'a de conséquence qu'à l'égard de l'examen de la responsabilité des parties à la réalisation de la fin illégale.
Lien vers la décision
Un complot se définit comme (1) une entente entre au moins deux personnes (2) qui ont l'intention de participer ensemble (3) à la poursuite d'une fin illégale.
Il se peut que deux personnes poursuivent la même fin illégale mais sans s'être entendues pour ce faire, auquel cas il n'y a pas de complot.
Une entente signifie un accord de volontés qui peut être tacite ou exprès. Cette entente sera significative dans la mesure où les participants ont l'intention de s'entraider ou de prendre ensemble des moyens pour réaliser cette fin illégale qui leur est commune. Dès lors, si dans leurs tractations ou dans leurs rencontres, les parties se limitent à considérer un projet ou la possibilité de réaliser une fin illégale, elles n'ont pas encore nécessairement exprimé par leurs faits et gestes l'intention de s'entraider dans la poursuite de la fin illégale: le complot ne s'est pas formé. De la même façon, on exigera, à l'égard de la personne que l'on considère «adhérer» à un complot existant, plus que sa connaissance, son intérêt, voire même son acquiescement: une personne adhère véritablement à un complot dans la mesure où l'on peut inférer de sa conduite l'intention de se joindre aux autres et de participer avec elles à la réalisation de la fin illégale («faire sien le complot... et accepter de travailler à son achèvement»). En principe, il n'est donc pas essentiel que les parties à un complot aient effectivement posé des actes dans la réalisation de l'objet du complot: c'est la participation à l'entente et non pas à la réalisation de son objet qui est requise. Contrairement à la tentative, le complot n'exige pas un commencement d'exécution.
Qu'en est-il du retrait ou du désistement de l'un des conspirateurs? On ne peut se dissocier d'un complot s'il a été commis: le désistement n'a de conséquence qu'à l'égard de l'examen de la responsabilité des parties à la réalisation de la fin illégale.
L'état du droit sur la contraignabilité à témoigner du conjoint de fait, de l'individu marié et de la personne divorcée
R. c. Campeau, 1999 CanLII 13455 (QC C.A.)
L'appelant plaide que le conjoint de fait, comme le mari ou la femme selon l'art. 4 de la Loi sur la preuve au Canada, ne devrait pas être un témoin contraignable.
Avant de disposer de cette question de fond qui consiste à déterminer si le conjoint de fait devrait bénéficier de la même exemption que le mari ou la femme selon l'art. 4, supra, il convient de se demander si les conditions préalables à cette exemption qui vaut pour le mari ou la femme s'appliqueraient en l'espèce. En premier lieu, il y a lieu de déterminer à quel moment doit exister la qualité de conjoint (mari ou femme): est-ce à l'époque où l'infraction a été commise ou lors du procès au moment où le témoin est appelé à déposer?
L'objectif de la règle actuelle est double: il vise à assurer la protection de l'harmonie conjugale et reflète une répugnance naturelle à contraindre la femme ou le mari à se faire l'instrument de la condamnation de l'autre (R. c. Salituro, 1991 CanLII 17 (C.S.C.), [1991] 3 R.C.S. 654, 672). Partant de là, il est logique que la jurisprudence ait affirmé que la relation maritale doit exister au moment où le conjoint est appelé à témoigner. En conséquence, si les époux sont divorcés au moment où l'un d'eux est appelé à témoigner contre l'autre ou encore, même si encore mariés, «ils sont séparés sans possibilité de réconciliation», la société «n'a aucun intérêt à préserver l'harmonie conjugale» (R. c. Salituro, supra, p. 676).
Ce n'est donc pas, comme le juge du procès l'a décidé, la situation entre les conjoints au moment de la commission de l'infraction qui prévaut mais bien celle qui est démontrée lorsque le conjoint est appelé à déposer contre l'autre.
En l'espèce, même si, pour les fins de la discussion, un conjoint de fait pouvait être exempté, ce que je m'abstiens de décider, il se dégage clairement de la preuve que Ghislaine Dubreuil était un témoin contraignable. Elle fut la conjointe de fait de l'appelant pendant au moins trois ans. Toutefois, lors de son interrogatoire par la Couronne, elle témoigne qu'elle a cohabité avec l'appelant de 1989 jusqu'au mois de mai 1993 ou au début de l'été de la même année et que lors de l'arrestation de l'appelant, elle ne demeurait plus avec lui depuis deux mois et nul ne laisse entendre qu'après l'arrestation de l'appelant, il y aurait même eu tentative de réconciliation. L'appelant confirme la déposition de son ex-conjointe. En conséquence, même si en principe l'exemption de l'art. 4 s'appliquait à des conjoints de fait, Ghislaine Dubreuil ne l'était plus au moment de sa déposition.
Reste à disposer d'une autre objection se fondant cette fois sur le principe énoncé au par. 4(3) de la Loi sur la preuve au Canada que «nul ne peut être contraint de divulguer une communication que son conjoint lui a faite durant leur mariage».
Encore là, le premier obstacle que doit franchir l'appelant consiste à démontrer que cette disposition s'applique également aux conjoints de fait. Si tant est que cet argument pouvait être retenu, de toute façon il ne pourrait faire ici échec à la divulgation. En effet, ce «privilège» qui est accordé au témoin par ailleurs contraint à témoigner (il ne s'agit donc pas d'une prohibition absolue de divulguer), ne peut plus être invoqué si le mariage s'est dissout depuis la communication: un conjoint divorcé au moment de son témoignage ne peut soulever le privilège et il en serait ainsi pour un ex-conjoint de fait. C'est ce que les auteurs opinent, s'appuyant principalement sur deux arrêts qui tranchent cette question, dont la Cour suprême du Canada, dans l'arrêt Kanester, approuvant les motifs du juge McLean en Cour d'appel, lequel avait affirmé: «She was not his wife at the time she gave her evidence and it follows that not then being a wife that s. 4(3) of the Canada Evidence Act does not apply».
L'appelant plaide que le conjoint de fait, comme le mari ou la femme selon l'art. 4 de la Loi sur la preuve au Canada, ne devrait pas être un témoin contraignable.
Avant de disposer de cette question de fond qui consiste à déterminer si le conjoint de fait devrait bénéficier de la même exemption que le mari ou la femme selon l'art. 4, supra, il convient de se demander si les conditions préalables à cette exemption qui vaut pour le mari ou la femme s'appliqueraient en l'espèce. En premier lieu, il y a lieu de déterminer à quel moment doit exister la qualité de conjoint (mari ou femme): est-ce à l'époque où l'infraction a été commise ou lors du procès au moment où le témoin est appelé à déposer?
L'objectif de la règle actuelle est double: il vise à assurer la protection de l'harmonie conjugale et reflète une répugnance naturelle à contraindre la femme ou le mari à se faire l'instrument de la condamnation de l'autre (R. c. Salituro, 1991 CanLII 17 (C.S.C.), [1991] 3 R.C.S. 654, 672). Partant de là, il est logique que la jurisprudence ait affirmé que la relation maritale doit exister au moment où le conjoint est appelé à témoigner. En conséquence, si les époux sont divorcés au moment où l'un d'eux est appelé à témoigner contre l'autre ou encore, même si encore mariés, «ils sont séparés sans possibilité de réconciliation», la société «n'a aucun intérêt à préserver l'harmonie conjugale» (R. c. Salituro, supra, p. 676).
Ce n'est donc pas, comme le juge du procès l'a décidé, la situation entre les conjoints au moment de la commission de l'infraction qui prévaut mais bien celle qui est démontrée lorsque le conjoint est appelé à déposer contre l'autre.
En l'espèce, même si, pour les fins de la discussion, un conjoint de fait pouvait être exempté, ce que je m'abstiens de décider, il se dégage clairement de la preuve que Ghislaine Dubreuil était un témoin contraignable. Elle fut la conjointe de fait de l'appelant pendant au moins trois ans. Toutefois, lors de son interrogatoire par la Couronne, elle témoigne qu'elle a cohabité avec l'appelant de 1989 jusqu'au mois de mai 1993 ou au début de l'été de la même année et que lors de l'arrestation de l'appelant, elle ne demeurait plus avec lui depuis deux mois et nul ne laisse entendre qu'après l'arrestation de l'appelant, il y aurait même eu tentative de réconciliation. L'appelant confirme la déposition de son ex-conjointe. En conséquence, même si en principe l'exemption de l'art. 4 s'appliquait à des conjoints de fait, Ghislaine Dubreuil ne l'était plus au moment de sa déposition.
Reste à disposer d'une autre objection se fondant cette fois sur le principe énoncé au par. 4(3) de la Loi sur la preuve au Canada que «nul ne peut être contraint de divulguer une communication que son conjoint lui a faite durant leur mariage».
Encore là, le premier obstacle que doit franchir l'appelant consiste à démontrer que cette disposition s'applique également aux conjoints de fait. Si tant est que cet argument pouvait être retenu, de toute façon il ne pourrait faire ici échec à la divulgation. En effet, ce «privilège» qui est accordé au témoin par ailleurs contraint à témoigner (il ne s'agit donc pas d'une prohibition absolue de divulguer), ne peut plus être invoqué si le mariage s'est dissout depuis la communication: un conjoint divorcé au moment de son témoignage ne peut soulever le privilège et il en serait ainsi pour un ex-conjoint de fait. C'est ce que les auteurs opinent, s'appuyant principalement sur deux arrêts qui tranchent cette question, dont la Cour suprême du Canada, dans l'arrêt Kanester, approuvant les motifs du juge McLean en Cour d'appel, lequel avait affirmé: «She was not his wife at the time she gave her evidence and it follows that not then being a wife that s. 4(3) of the Canada Evidence Act does not apply».
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