vendredi 23 avril 2010

L'état du droit sur la question d'une demande de retrait de plaidoyer de culpabilité

R. c. Hébert, 2009 QCCQ 16250 (CanLII)

[54] La Cour d'appel du Québec, dans l'affaire Raymond c. R., fut saisie d'une demande de retrait de plaidoyer de culpabilité. Elle analyse ainsi l'état du droit sur cette question :

[74] Il est acquis qu’une personne, qui a plaidé coupable aux infractions qui lui étaient reprochées en première instance, peut interjeter appel de sa déclaration de culpabilité, dans la mesure où elle invoque des motifs valables justifiant le retrait de son plaidoyer.

[75] L’invalidité du plaidoyer de culpabilité qu’a présenté un accusé peut constituer un tel motif. Le paragraphe 1.1 de l’article 606 C.cr. codifie les conditions de validité d’un plaidoyer de culpabilité :

(a) le prévenu fait volontairement le plaidoyer;

(b) le prévenu comprend qu’il admet les éléments essentiels de l’infraction;

(c) le prévenu comprend la nature et les conséquences de sa décision; et

(d) le prévenu sait que le tribunal n’est lié par aucun accord conclu entre lui et le poursuivant.

[76] En d’autres termes, pour qu’il soit considéré comme valide, le plaidoyer « doit être libre, non équivoque et fondé sur une information adéquate quant à la nature des accusations portées contre le prévenu et aux conséquences du plaidoyer de culpabilité pour celui-ci ».

[55] Dans cette affaire, la Cour d'appel rappelle que c'est au requérant de démontrer que le plaidoyer qu'il a offert est invalide.

[56] Dans l'affaire R. c. Nersysyan, la Cour d'appel énonce ce qui suit :

[6] Le requérant a le fardeau de démontrer les motifs sérieux et valables justifiant la radiation de son plaidoyer de culpabilité. Le facteur primordial à considérer est le déni de justice. Dans ce contexte, il incombe à l’appelant d’établir qu’il avait des moyens de défense valables et non futiles à présenter. Il ne suffit pas de spéculer sur l’issue du procès qui a été évité. Or, dans le présent cas, l’appelant se contente d’une dénégation générale des actes qu’on lui reproche.

[7] Par ailleurs, l’insatisfaction subséquente devant la « manière dont les choses ont tourné » ou devant la peine infligée ne suffit pas pour obtenir la radiation du plaidoyer lorsque celui-ci demeure un geste éclairé et volontaire quant à l’ensemble des circonstances entourant les infractions reprochées et le procès lui-même.

[57] Par ailleurs, dans l'affaire Carignan c. R., la Cour d'appel, sur la question du retrait de plaidoyer de culpabilité, rappelle les éléments suivants :

[34] En enregistrant un plaidoyer de culpabilité, un accusé renonce à plusieurs droits garantis par la Charte. Dans R. c. Richard, le juge La Forest rappelle ce principe en faisant siens les propos du juge Laskin (il n'était pas encore juge en chef) dans Adgey c. R. :

Un plaidoyer de culpabilité comporte en soi l'aveu que le requérant qui l'offre a commis le crime imputé, de même qu'un consentement à ce qu'une déclaration de culpabilité soit inscrite sans procès d'aucune sorte. Le requérant, par un tel plaidoyer, délie le ministère public de l'obligation de prouver la culpabilité au-delà d'un doute raisonnable, abandonne son privilège de ne pouvoir être contraint à témoigner et son droit de rester muet, et renonce à son droit de faire une réponse et défense complète à l'encontre d'une accusation.

[35] C'est pourquoi « un plaidoyer, écrit le juge Baudouin, parce qu'il entraîne pour le requérant des conséquences, doit revêtir certaines qualités. Il doit être libre, volontaire, clair et informé ». Il est l'affaire du requérant et l'avocat ne peut forcer son client par des promesses ou des menaces à admettre une faute qu'il ne veut pas confesser ou qu'il n'a pas commise. Il faut néanmoins faire preuve de prudence car la frontière entre l'opinion juridique et la contrainte peut parfois être difficile à tracer.

[36] Le fardeau de la démonstration qu'un aveu de culpabilité fut illégalement donné et devrait être retiré appartient au requérant et il sera plus lourd s'il était représenté par avocat.

[37] En somme, c'est sur la base d'un examen de l'ensemble du dossier et des circonstances qu'un juge déterminera si le plaidoyer est non équivoque, volontaire et surtout informé. Au regard de ce dernier critère, Clayton C. Ruby écrit :

Where counsel’s assessment of the likelihood of success was flawed, for example, following counsel’s advice to plead guilty because there was no valid defence is a factor militating in favour of permission to change a plea as being invalid.

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