mardi 4 juin 2013

Les principes en matière de publicité des procédures judiciaires

Toronto Star Newspapers Ltd. c. Ontario, 2005 CSC 41 (CanLII), [2005] 2 RCS 188

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4                                   Les demandes concurrentes se rapportant à des procédures judiciaires amènent nécessairement les tribunaux à exercer leur pouvoir discrétionnaire.  La présomption de « publicité » des procédures judiciaires est désormais bien établie au Canada.  L’accès du public ne sera interdit que lorsque le tribunal compétent conclut, dans l’exercice de son pouvoir discrétionnaire, que la divulgation serait préjudiciable aux fins de la justice ou nuirait indûment à la bonne administration de la justice

21 Une fois le mandat de perquisition exécuté, la présomption devait jouer en faveur de la publicité des débats. La partie qui cherchait à interdire l’accès du public aux renseignements devait donc, après l’exécution du mandat, prouver que leur divulgation serait préjudiciable aux fins de la justice.

23 Le paragraphe 487.3(2) est particulièrement pertinent en l’espèce. Il prévoit qu’une ordonnance de mise sous scellés peut être fondée sur le fait que la communication serait préjudiciable aux fins de la justice parce qu’elle compromettrait la nature et l’étendue d’une enquête en cours. C’est ce motif que le ministère public fait valoir en l’espèce. Il s’agit certainement d’un motif valable de mettre sous scellés une dénonciation utilisée pour obtenir un mandat provincial, en plus des dénonciations faites sous le régime du Code criminel. Dans les deux cas, il ne suffit cependant pas d’invoquer ce motif dans l’abstrait; il faut l’étayer d’allégations spécifiques liées à l’enquête que l’on prétend compromise. C’est ce qui n’a pas été fait en l’espèce, selon le juge Doherty, comme nous le verrons plus loin.

26 Dans Mentuck, la Cour a réaffirmé, tout en le reformulant dans une certaine mesure, le critère énoncé dans Dagenais. Dans Mentuck, le ministère public demandait une interdiction de publication visant l’identité de policiers banalisés et les techniques d’enquête qu’ils avaient utilisées. La Cour a statué que l’exercice du pouvoir discrétionnaire de restreindre la liberté d’expression relativement à des procédures judiciaires touche divers droits et qu’une ordonnance de non‑publication ne doit être rendue que si :

a) elle est nécessaire pour écarter un risque sérieux pour la bonne administration de la justice, vu l’absence d’autres mesures raisonnables pouvant écarter ce risque;

b) ses effets bénéfiques sont plus importants que ses effets préjudiciables sur les droits et les intérêts des parties et du public, notamment ses effets sur le droit à la libre expression, sur le droit de l’accusé à un procès public et équitable, et sur l’efficacité de l’administration de la justice. [par. 32]

27 S’exprimant au nom de la Cour, le juge Iacobucci a souligné que le « risque » dont il est question dans le premier volet de l’analyse doit être réel et important et qu’il doit s’agir d’un risque dont l’existence est bien appuyée par la preuve : « il faut que ce soit un danger grave que l’on cherche à éviter, et non un important bénéfice ou avantage pour l’administration de la justice que l’on cherche à obtenir » (par. 34).
29 Enfin, dans Vancouver Sun, la Cour a approuvé expressément les motifs du juge Dickson dans MacIntyre et a souligné que la présomption de publicité des procédures judiciaires s’applique aussi au stade précédant le procès. Elle a statué que le « principe de la publicité des débats en justice est inextricablement lié à la liberté d’expression garantie par l’al. 2b) de la Charte et sert à promouvoir les valeurs fondamentales qu’elle véhicule » (par. 26). Ce principe s’applique donc à chacune des étapes de la procédure (par. 23‑27).

41                              Le juge Doherty a insisté à juste titre sur l’importance de la liberté d’expression et de la liberté de la presse, et il a souligné que les demandes visant à empiéter sur ces libertés doivent être [traduction] « scrutées à la loupe et satisfaire à des normes rigoureuses » (par. 19).  Toutefois, il a finalement rejeté la demande présentée par le ministère public en l’espèce parce qu’elle reposait entièrement sur une allégation générale portant que la publicité peut compromettre l’intégrité de l’enquête

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