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mardi 12 juillet 2011

Ce que l'on entend par l'utilisation d'une arme à feu lors de la perpétration d'une infraction

R. c. Steele, 2007 CSC 36, [2007] 3 RCS 3

27 Les tribunaux ont statué qu’« utiliser » une arme à feu s’entendait de la décharger (R. c. Switzer reflex, (1987), 32 C.C.C. (3d) 303 (C.A. Alb.)), de la braquer (R. c. Griffin 1996 CanLII 3210 (BC C.A.), (1996), 111 C.C.C. (3d) 567 (C.A.C.‑B.)), [traduction] « pour un contrevenant, de la sortir alors qu’il l’a sur lui et de l’avoir à la main pour intimider autrui » (Langevin, p. 145, citant Rowe c. The King, 1951 CanLII 7 (S.C.C.), [1951] R.C.S. 713, p. 717; voir également Krug, p. 265) et de l’exhiber pour intimider (R. c. Neufeld, [1984] O.J. No. 1747 (QL) (C.A.)). Dans l’arrêt Gagnon, la Cour d’appel a indiqué au passage qu’« utiliser une arme à feu » pouvait s’entendre de révéler sa présence par ses propos ou ses gestes.

28 Il est donc bien établi en droit qu’utiliser une arme à feu n’est pas synonyme de l’avoir simplement en sa possession (ou d’en « être muni »). Cependant, les tribunaux ont presque toujours décidé au cas par cas si l’acte considéré dans une affaire équivalait à utiliser une arme à feu. L’on ne saurait dire qu’ils ont formulé un critère permettant de bien cerner les actes qui emportent l’« utilisation » d’une arme à feu au sens du par. 85(1).

29 L’arrêt Chang, de la Cour d’appel de la Colombie‑Britannique, permet toutefois de mieux saisir la différence entre l’utilisation et la simple possession dans ce contexte. Dans ses motifs concordants, le juge Carrothers conclut que le mot « utilise » employé au par. 85(1) [traduction] « a une connotation claire de mise en action, en fonction ou en marche réelle », ce qui doit être distingué d’avec le fait d’être muni d’une arme ou de l’avoir en sa possession, qui [traduction] « connote une utilisation simplement possible, et non réelle » (p. 422).

30 Dans l’affaire Bailey c. United States, 516 U.S. 137 (1995), la Cour suprême des États‑Unis a tiré une conclusion semblable concernant le sens du mot « use » (utilisation) employé à l’art. 924c)(1), 18 U.S.C. — une disposition comparable au par. 85(1) du Code criminel. Au nom de la Cour, la juge O’Connor a statué que le terme exigeait davantage que la simple possession et que la preuve de la proximité de l’arme à feu et de l’accessibilité à celle‑ci ne permettait pas de déclarer une personne coupable de l’avoir utilisée au sens de la loi. Elle a précisé que pour établir l’utilisation, [traduction] « l’État doit prouver l’emploi actif de l’arme à feu » (p. 144 (je souligne)). Elle a ajouté plus loin :

[traduction] « Utiliser » une arme à feu au sens de l’employer activement s’entend certainement du fait de la brandir, de l’exhiber, de l’échanger, de s’en servir pour frapper et, bien évidemment, de faire feu ou de tenter de le faire. Force est donc de conclure que même la mention par le contrevenant d’une arme à feu en sa possession pourrait satisfaire aux exigences de l’art. 924c)(1). Ainsi, la mention d’une arme à feu dans le but de modifier les circonstances de l’infraction sous‑jacente constitue une « utilisation », tout comme peut l’être sa présence silencieuse, mais perceptible et menaçante, sur une table. [p. 148]

31 Ces observations sont tout à fait compatibles avec le sens ordinaire et courant du verbe « utiliser » (« use », dans la version anglaise correspondante), et la Cour a reconnu que ce sens peut se dégager des définitions du dictionnaire dans l’une et l’autre langues. Pour déterminer le sens du verbe « utiliser », quoique dans un contexte différent, la Cour a retenu la définition du Petit Robert : « rendre utile [ou] faire servir à une fin précise » (Veilleux c. Québec (Commission de protection du territoire agricole), 1989 CanLII 82 (C.S.C.), [1989] 1 R.C.S. 839, p. 854). Elle a opiné que cette définition « implique une notion d’activité ainsi qu’une notion de finalité ». Aussi, le Canadian Oxford Dictionary (2e éd. 2004) définit le verbe « use » (utiliser) comme suit : [traduction] « employer (une chose) à une fin précise . . . [ou] exploiter (une personne ou une chose) à ses propres fins ». De même, suivant le Black’s Law Dictionary (6e éd. 1990), ce verbe s’entend de [traduction] « faire usage, convertir à son service, employer, se servir, tirer parti, exécuter par un moyen ou faire entrer en action ou en service, en particulier pour obtenir un résultat » (je souligne).

32 À défaut d’une définition dans la loi, je suis d’avis qu’un contrevenant « utilise » une arme à feu au sens du par. 85(1) lorsque, pour faciliter la perpétration d’un crime ou pour prendre la fuite, il révèle par ses propos ou ses gestes la présence réelle d’une arme à feu ou sa disponibilité immédiate. Le contrevenant doit alors avoir l’arme en sa possession physique ou à portée de main.

vendredi 8 juillet 2011

Détermination de la peine dans des cas d'agression sexuelle sur une conjointe

R. c. Z.R., 2011 QCCQ 1701 (CanLII)

[41] Plus particulièrement, dans des cas d'agression sexuelle sur une conjointe, nos tribunaux ont réitéré l'importance de donner priorité aux facteurs de dissuasion et de dénonciation lors de la détermination de la peine. Dans la cause de R. c. Cumming, le juge Plouffe de la Cour supérieure du Québec a prononcé une peine de 21 mois d'incarcération à un accusé qui avait agressé sexuellement sa femme à répétition (au moins cinq fois) sur une période de plusieurs mois. L'accusé avait 47 ans et ne possédait aucun antécédent judiciaire lors du prononcé de la peine. En rejetant la proposition de la défense pour une peine avec sursis, le juge Plouffe a souligné les facteurs aggravants suivants: (i) la gravité objective du crime (par 29); (ii) le fait que le législateur a prévu que la violence conjugale est un facteur aggravant car ce crime constitue un mauvais traitement contre la conjointe (par. 31).

[42] Dans ce jugement, le juge Plouffe a fait une recherche approfondie des décisions prononcées par nos tribunaux dans les cas d'agression sexuelle perpétrée par un accusé sur sa femme. Le Tribunal reproduit, ci-après, quelques-uns de ces résumés:

44. Dans un premier temps, il y a l'arrêt FJ c. R. [FN3]. Dans cet arrêt, l'accusé avait agressé sexuellement sa conjointe et s'était également montré violent envers elle. Il a été retenu coupable d'agression sexuelle, de voies de fait, d'avoir proféré des menaces de mort et d'avoir eu en sa possession des matières incendiaires.

45. Le juge de première instance a reconnu que la preuve avait établi, au-delà de tout doute raisonnable, cinq (5) agressions sexuelles. Chaque agression comportait une relation sexuelle complète. Le premier juge avait retenu comme facteurs aggravants, la violence conjugale et le fait qu'en matière d'agression sexuelle, les objectifs de dénonciation et de dissuasion doivent primer sur ceux de la réhabilitation. Il a aussi considéré l'âge de l'accusé, c'est-à-dire, trente-huit (38) ans, l'absence de désordres similaires et d'antécédents judiciaires, la présence de remords, bien que tardifs, et une bonne possibilité de réhabilitation. Il y avait eu aussi une détention provisoire, depuis l'arrestation.

46. Le premier juge a imposé alors une peine de trente (30) mois d'emprisonnement sur les chefs d'agression sexuelle. Considérant la détention provisoire, il a imposé une peine de dix-sept (17) mois d'emprisonnement avec une probation de trois (3) ans.

47. La Cour d'appel mentionne qu'une peine d'emprisonnement de trente (30) mois sous les chefs d'agression sexuelle n'est pas déraisonnable en l'espèce, même si c'est sévère. La Cour d'appel a rejeté l'appel de l'accusé et la Cour suprême du Canada a rejeté l'appel de ce jugement. C'est un cas, qui à mon sens, est plus sérieux que le cas qui nous occupe aujourd'hui. Quand même, cela nous donne certaines balises.

48. Un autre arrêt, cette fois-ci, de la Cour d'appel de l'Ontario. C'est l'arrêt R. c. O.T. [FN4] où la Cour d'appel de l'Ontario traite d'un appel logé par l'accusé, condamné pour agression sexuelle et voies de fait sur sa conjointe. Dans ce cas, l'accusé, selon la preuve, était un homme violent et il avait agressé sexuellement son épouse dans le but de la punir.

49. Le juge de première instance l'a condamné à deux (2) ans d'emprisonnement pour les voies de fait et six (6) mois consécutifs pour l'agression sexuelle. La Cour d'appel de l'Ontario a jugé que cette peine globale de deux (2) ans et demi était acceptable et l'appel a été rejeté. Encore une fois, selon moi, c'est un cas plus sérieux que le nôtre.

50. Dans l'affaire R. c. L.D.M. [FN5], il s'agit d'un crime assez violent. L'accusé a été condamné à une peine totale de quatre (4) ans d'emprisonnement pour cinq (5) accusations, soit deux (2) ans pour agression sexuelle, six (6) mois pour voies de fait, un (1) an pour avoir pointé une arme à feu, six (6) mois pour avoir proféré des menaces de mort. Dans chaque cas, la victime était l'épouse de l'accusé. La Cour d'appel de la Nouvelle-Écosse rejette l'appel logé par l'accusé et juge que la peine est appropriée compte tenu de toutes les circonstances. Encore une fois, selon moi, il s'agit d'un crime dont les circonstances sont plus sérieuses que celles qui sont présentes dans le présent dossier.

51. Un autre arrêt, cette fois de la Cour d'appel du Québec. L'arrêt Brunette c. R. [FN6], demande pour autorisation de la Cour suprême du Canada rejetée. Dans ce cas-ci, l'accusé a été condamné pour avoir agressé sexuellement son ex-conjointe. L'incident s'est produit alors que les conjoints revenaient à la maison avec les enfants, je crois. L'accusé a conduit Madame dans la chambre à coucher et l'a forcée à avoir des relations sexuelles complètes. La victime n'a pas été blessée et n'a subi aucune menace. Le Tribunal de première instance avait imposé une peine d'emprisonnement de dix-huit (18) mois, accompagnée d'une ordonnance de probation de trois (3) ans. En considérant les facteurs subjectifs et objectifs du dossier et le fait que l'accusé avait déjà purgé quarante-deux (42) jours d'emprisonnement, de façon provisoire, la Cour d'appel accueille l'appel de l'accusé et ordonne que la peine de dix-huit (18) mois soit purgée dans la collectivité. Selon moi, les circonstances dans ce cas-là sont moins sérieuses que celles que nous avons dans notre dossier.

52. Dans l'arrêt R. c. O.F.B. [FN7], de la Cour d'appel de l'Alberta, l'accusé avait plaidé coupable à trois (3) chefs d'agression sexuelle à l'endroit d'une ancienne partenaire. Dans cette affaire, il existait un climat de dépendance entre la victime et l'accusé qui abusait de celle-ci. La Cour d'appel accueille l'appel. Elle ordonne que la peine d'emprisonnement de deux (2) ans, imposée par le juge de première instance, soit modifiée pour une peine de cinq (5) ans, moins un (1) an pour tenir compte de la détention provisoire purgée. À mon avis, les circonstances de cette affaire sont plus sérieuses que celles qui nous confrontent aujourd'hui.

53. Dans l'arrêt M.D. c. R. [FN8], la Cour d'appel du Québec maintient une peine d'un (1) an avec probation, pour un accusé qui a agressé sexuellement son épouse. Ceci m'apparaît un peu moins sérieux que le dossier qui nous confronte aujourd'hui.

[43] Dans la cause de R. c. D.D., 2006 QCCQ 576 (CanLII), 2006 QCCQ 576, l'accusé est devenu furieux quand sa conjointe est retournée à la résidence conjugale accompagnée d'un ami. Après l'avoir frappée au menton et déchiré les vêtements de sa conjointe, il rentra ses doigts dans son vagin. L'accusé avait un antécédent de voies de fait causant des lésions corporelles dans un contexte de violence conjugale. Selon le rapport présentenciel, l'accusé minimisait la gravité des offenses et faisait porter sur sa victime une large part de la responsabilité.

[44] Les parties ont conjointement proposé une peine de sursis d'une durée de 18 mois. Mon collègue, le Juge Serge Boisvert, a refusé d'entériner cette proposition commune en précisant qu'elle était clairement déraisonnable, car elle ne rencontrait pas les objectifs d'une peine appropriée (paras. 3 et 18). Après avoir souligné les facteurs aggravants, l'antécédent judiciaire de l'accusé, la gravité objective du crime et le fait que l'infraction perpétrée constitue un mauvais traitement du conjoint, le juge a imposé une peine de 18 mois de détention ferme.

mercredi 6 juillet 2011

Il n'est pas nécessaire pour le ministère public de faire la preuve de l'identité de la victime visée par les menaces

R. c. Rémy, 1993 CanLII 3851 (QC CA)

Dans l'affaire R. c. Shea (1984) 55 A.R. 47 (Alta Q.B.), (une des rares décisions rendues sur le point soulevé par l'appelant), le juge Montgomery précisait qu'il n'était pas nécessaire pour le ministère public de faire la preuve de l'identité de la victime visée par les menaces (p. 49):

«...I am of the opinion that the Crown does not have to prove the identity of such person. The said section of the Code [331(1) a)] is wide enough to convict solely on the statement of the accused. It is the threat which is prohibited.»

(...)

Quant à l'acceptation générale de la portée des termes "quelqu'un" et "any person", elle est la suivante:

«Quelqu'un: un être humain. Une personne absolument indéterminée.» (Le Petit Robert)

«The words "any person" are perfectly general and unless restricted in some way, must include an unascertained or an unborn person» (Words and Phrases legally defined, vol. 1, London, Butterworth, 1988)

«"Any person" is one of the broadest expression that can be employed and the generality of this phrase is not to be restricted unless for good reason.» (Worthington v. Robin & Cardigan, (1924) 56 O.L.R. 285) (Words and Phrases - Legal Maxims, Vol. 1, Toronto, de Boo, 1979)

Bien que je concède à l'appelant que l'acte d'accusation ne spécifie pas l'identité de la victime nommément, je ne suis pas prêt à affirmer qu'un tel élément est constitutif de l'infraction prévue à l'article 264.1(1)a) C.cr. La loi n'exige pas que la poursuite amène la preuve de l'identité de la victime. La menace de causer la mort à un membre d'un groupe déterminé de citoyens constitue une violation de cet article.

Pour s'en convaincre, il suffit de considérer le but visé par cette disposition, tel qu'exposé par le juge Cory dans l'arrêt R. c. McCraw 1991 CanLII 29 (C.S.C.), (1991) 3 R.C.S. 72 (pp. 81-82):

«Le législateur, lorsqu'il a créé cette infraction, a reconnu que l'acte de menacer permet à la personne qui profère la menace d'utiliser l'intimidation pour atteindre son but. Il n'est pas nécessaire que la menace soit exécutée; l'infraction est complète lorsque la menace est proférée. Elle est destinée à faciliter la réalisation du but visé par la personne qui profère la menace. Une menace est un moyen d'intimidation visant à susciter un sentiment de crainte chez son destinataire. Le but et l'objet de l'article sont d'assurer une protection contre la crainte et l'intimidation. Le législateur, lorsqu'il a adopté l'article, a agi pour protéger la liberté de choix et d'action de la personne, une question d'une importance fondamentale pour les membres d'une société démocratique.»

L'infraction prévue à l'article 264.1 C.cr. est complète dès lors que la menace est proférée. Elle a pour but de protéger les personnes contre l'intimidation et la crainte.

L'état du droit concernant le risque réaliste de l'infraction d'avoir la garde ou le contrôle

Le rôle de la Cour dans l'évaluation du risque de danger

· Mallery c. R., 2008 NBCA 18 (CanLII)

o Dans les instances relatives à la garde ou au contrôle, le juge du procès a pour tâche ultime de décider si le ministère public s’est acquitté de la charge d’établir hors de tout doute raisonnable que l’interaction de l’accusé avec son véhicule a constitué un danger ou, selon les expressions qui sont parfois employées, un [TRADUCTION] « risque de danger » ou un [TRADUCTION] « risque pour la sécurité publique ». Si les faits établissent hors de tout doute raisonnable qu’il existait un risque que l’accusé mette le véhicule en en mouvement, volontairement ou non, ou si les faits appuient par ailleurs une conclusion de danger (le fait d’avoir stationné son véhicule au milieu d’une voie publique, par ex.), la garde ou le contrôle aura été établi. Il va sans dire qu’il s’agit là d’un cadre général. Bien que l’intention de conduire (de mettre le véhicule en mouvement) ne soit pas un élément essentiel de l’infraction, si cette intention est prouvée, elle peut donner lieu à une déclaration de culpabilité

La mens rea de l'infraction

· La Reine c. Toews, [1985] 2 R.C.S. 119

o la mens rea de l'infraction d'avoir la garde ou le contrôle d'un véhicule à moteur est l'intention d'assumer la garde ou le contrôle après avoir volontairement consommé de l'alcool ou une drogue. L'actus reus est l'acte qui consiste à assumer la garde ou le contrôle du véhicule alors que la consommation volontaire d'alcool ou d'une drogue a affaibli la capacité de conduire.

Certaines précisions au regard de l'actus reus de l'infraction de garde et contrôle

· Ford c. La Reine, [1982] 1 R.C.S. 231

o Il peut y avoir garde même en l'absence de cette intention lorsque, comme c'est le cas en l'espèce, un accusé accomplit un acte ou une série d'actes ayant trait à l'utilisation d'un véhicule ou de ses accessoires, qui font que le véhicule peut être mis en marche involontairement, créant le danger que l'article vise à prévenir.

· La Reine c. Toews, [1985] 2 R.C.S. 119

o Cependant, la jurisprudence citée illustre le point et amène à conclure que les actes de garde ou de contrôle, hormis l'acte de conduire, sont des actes qui comportent une certaine utilisation du véhicule ou de ses accessoires, ou une conduite quelconque à l'égard du véhicule qui comporterait le risque de le mettre en mouvement de sorte qu'il puisse devenir dangereux. Chaque affaire sera décidée en fonction de ses propres faits et les circonstances où l'on pourra conclure qu'il y a des actes de garde ou de contrôle varieront beaucoup.

· R. c. Penno, [1990] 2 R.C.S. 865

o Par contre, la loi ne manque pas totalement de souplesse et ne va pas jusqu'à punir la simple présence dans un véhicule à moteur d'une personne dont la capacité de conduire est affaiblie. En réalité, l'arrêt Toews consacre la règle que, lorsque l'utilisation du véhicule à moteur ne comporte aucun risque de le mettre en marche et de le rendre dangereux, les cours de justice devraient conclure qu'il y a absence d'actus reus.


La définition la plus précise de ce qui constitue des actes de garde et de contrôle

· R. v. Sinclair, 1990 CanLII 1775 (BC C.A.)

o It is to be observed that McIntyre, J. referred to three different circumstances which, short of driving, could establish care and control of a vehicle:
i)acts which would involve some use of the car; or
ii)acts which would involve some use of its fittings and equipment; or
iii)some course of conduct associated with the vehicle;
which would involve a risk of putting the vehicle in motion so that it could become dangerous.


La garde et contrôle est possible même si le véhicule était inutilisable

· Saunders v. The Queen, [1967] S.C.R. 284

o La définition de véhicule à moteur dans l’art. 2(25) du Code réfère au type, à la nature et non pas à la capacité actuelle de manœuvrer ou au fonctionnement effectif du véhicule en question. Le fait qu’un véhicule à moteur, lors de l’offense, ne puisse se mouvoir de son propre pouvoir en raison de conditions internes ou externes, est sans importance.


Conducteur assis derrière le volant avec la clé dans le contact, n'entraîne pas nécessairement la conclusion que ce conducteur a le contrôle de la voiture

· R. c. Olivier, 1998 CanLII 12928 (QC C.A.)

o Le fait qu'un conducteur soit assis sur la banquette avant d'une voiture et que la clé soit dans le contact n'établit pas nécessairement que ce conducteur a le contrôle de la voiture pour les fins des accusations mentionnées plus haut; même si la détermination de ce qui constitue le «contrôle» d'une voiture est une question de droit pour les fins d'un pourvoi, il reste que cette détermination ne répond pas à des critères fixes mais qu'elle dépend des circonstances particulières à chaque cas;

o La proposition de l'appelante suivant laquelle le fait pour un conducteur d'être assis derrière le volant d'une voiture, avec la clé dans le contact, entraîne nécessairement la conclusion que ce conducteur a le contrôle de la voiture est trop absolu: dans la très grande majorité des situations on pourra conclure que c'est le cas, mais, devant un jeu de circonstances donné, le tribunal pourra, sans errer en droit, conclure que ce n'est pas le cas;


Il est présumé qu’une personne qui est en état d’ébriété et qui est trouvée endormie au volant de son automobile constitue un danger pour la sécurité publique

· Mallery c. R., 2008 NBCA 18 (CanLII)

o Nulle part dans l’arrêt Clarke on ne dit que le danger n’est pas un élément essentiel de l’infraction. Certes, on peut tenir pour acquis, sans crainte de se tromper, que le danger est présent dès lors qu’il est établi que l’accusé a été trouvé assis au volant pendant que le moteur tournait, compte tenu du risque que l’accusé change d’avis et décide de conduire. Tout comme dans l’affaire Diotte, rien n’indique que l’accusé a invoqué le moyen de défense fondé sur l’existence d’un projet bien arrêté. En l’absence d’un argument de ce genre, il sera présumé qu’une personne qui est en état d’ébriété et qui est trouvée endormie au volant de son automobile constitue un danger pour la sécurité publique. Toutefois, cela ne veut pas dire que le danger n’est pas un élément essentiel de l’infraction.

Les menaces conditionnelles

R. v. Deneault, 2002 BCCA 178 (CanLII)

[24] As Beetz J. pointed out in R. v. Nabis, supra, whether the threat raises a possibility of imminent or remote danger is of no consequence.

[25] Conditional threats are also not excluded from the ambit of s. 264.1(1)(a), as R. v. Ross reflex, (1986), 26 C.C.C. (3d) 413 (Ont. C.A.) illustrates. In Ross, the accused had gone to his bank and demanded money from his accounts. He was told that the accounts had been seized by the sheriff acting under a court order. The accused told a bank employee that he was going home to get his gun and would proceed to the sheriff’s office and then return to the bank. The bank employee and others who heard the accused found his words to be a threat to their continued well-being. The following day, Constable Sobolta was sent to the home of the accused to investigate the allegation of threats to a member of the bank staff. The constable went to the door but after being met with obscenities from the accused, he returned to his cruiser. There he received a radio communication from Constable Belbas, who was in the police communications room, advising him to clear the area immediately as the police department had received a telephone call that the constable would be shot if he did not leave. In the phone call to Constable Belbas, the accused had said “tell that bugger to get off my doorstep. He is disturbing the peace and trespassing on my property”. When asked who was trespassing he replied: “One of your cops. If he does not leave he will be shot”. The accused was charged with uttering a threat to Mike Belbas to cause death or injury to John Sobolta. The trial judge held the accused’s statement was a warning, not a threat, and acquitted the accused. In allowing the Crown’s appeal, the Ontario Court of Appeal said (at 415), in part:

The trial judge held that the respondent’s statement was a warning not a threat. In effect, he held that a conditional threat is not covered by the provision. In so concluding, we think, with respect, that he erred. In our view “threat” in s. 331(1)(a) includes what may be thought of as a conditional threat. One of the definitions of “threat” in the Shorter Oxford English Dictionary is:

A denunciation to a person of ill to befall him; esp. a declaration of hostile determination or of loss, pain, punishment, or damage to be inflicted in retribution of or conditionally upon some course; a menace. (Emphasis [of Morden J.A.].)

* * *

A conditional threat, if one wants to describe it that way, is part of the ordinary meaning of threat and we think that it would be in accordance with the purpose of s. 331(1) [now 264.1(1)] to interpret it as including such a threat. In Black’s Law Dictionary, 5th ed. (1979), the definition of “threat” reads, in part:

The term, “threat” means an avowed present determination or intent to injure presently or in the future. A statement may constitute a threat even though it is subject to a possible contingency in the maker’s control.

[26] In my opinion, neither the legislative history of the offence of uttering threats to cause death or bodily harm nor the jurisprudence relating to uttering threats provides support for the suggestion that, because of their contingent or future nature, the words uttered by the appellant in this case could not come within the ambit of the offence created by s. 264.1(1)(a).

lundi 4 juillet 2011

Le jeune âge de l'accusé dans le processus de détermination de la peine

R. c. Fortin, 2011 QCCQ 7005 (CanLII)

[55] L'auteur Clayton Ruby écrit au paragraphe 5.139 et suivant de la sixième édition de son livre intitulé Sentencing, ce qui suit :

Youth is generally conceded to be a mitigating factor, probably because it discloses the greatest possibilities for reform and because we do not expect to much from youthful judgement.

Young people often do not have sufficient maturity to be deterred by exemplary sentences.

Occasionally, a crime reflects nothing more than a lack of maturity or a lack of parental supervision or guidance.

Thus, the general rule for most common offences is that a sentence should not be imposed on a youthful offender for the purpose of general deterrence, but should rather be directed at rehabilitation.

The transition from statutorily defined young person to adult should not be marked by an immediate abandonment of rehabilitation as a primary goal in cases where the prospect of successful rehabilitation is real.

vendredi 1 juillet 2011

Les infractions continues et le point de départ de la prescription de l'infraction

R. c. Morency, 2010 QCCQ 954 (CanLII)

[13] La Cour suprême du Canada, dans l'arrêt Bell c. La Reine, décrit une infraction continue « […] comme une infraction où la réunion de l’actus reus et de la mens rea, ce qui rend l’infraction complète, n’a pas aussi pour effet de mettre fin à l’infraction. Les deux éléments essentiels à la perpétration de l’infraction continuent d’être réunis et l’accusé demeure dans ce qu’on peut appeler un état de criminalité pendant toute la durée de cette infraction. […] ».

[14] Voici un exemple qui illustre bien le concept juridique. Le vol n'est pas une infraction continue puisqu'il est accompli lorsque la personne s'empare du bien d'autrui avec l'intention requise. Dès lors, le délit appartient au passé. Par contre, la possession d'un objet provenant de la perpétration d'un crime est une infraction continue qui se poursuit chaque jour, aussi longtemps que le receleur détient le bien.

[15] La Cour d'appel de l'Ontario, dans l'arrêt R. v. Rutherford, énonce que cette règle, bien établie en droit criminel, est utilisée pour deux types d'infractions, soit celles commises par action et par omission.

[16] Lorsqu'il s'agit d'un comportement positif, la continuité réside dans la répétition jour après jour de l'acte prohibé.

[17] D'autre part, lorsqu'il s'agit d'une conduite passive, consistant en une omission d'accomplir un devoir ou de se conformer à une obligation qui se continue par l'effet de la loi, le manquement, tout en constituant par lui-même l'infraction, se perpétue jusqu'à l'accomplissement du devoir ou à la prestation de l'obligation.

[18] Dans le cas d'une infraction simple, la prescription se compte en considérant le jour où elle a été perpétrée.

[19] En matière d'infraction continue, le délai de prescription s'apprécie à partir de la date où l'infraction a cessé.

[20] Même si la question n'a pas été soulevée, il peut être utile de rappeler que le calcul des délais stipulés dans les lois fédérales, comme le Code criminel, doit se faire selon les règles édictées aux articles 26 à 30 de la Loi d'interprétation

Le dédommagement à la victime doit toujours être envisagé lors de la détermination de la peine

Le pouvoir d'amender un acte d'accusation ou une dénonciation expliqué par la Cour d'appel de l'Ontario

R. v. K.R., 2025 ONCA 330 Lien vers la décision [ 17 ]        The power to amend an indictment or information under  s. 601(2)  of the  Crim...