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vendredi 26 octobre 2012

Le droit sur la règle du ouï-dire

R. c. St-Jacques, 2008 QCCS 6817 (CanLII)

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[18] L'arrêt Khelawon, rendu par la Cour suprême en 2006, est l'arrêt de base sur cette question de fiabilité d'une déclaration, tel qu'interprété plus récemment par cette Cour dans Blackman en 2008, deux décisions sous la plume de l'honorable Louise Charron. Il faut immédiatement préciser que Khelawon vient réviser la jurisprudence antérieure, surtout une partie de l'arrêt Starr quant à la preuve qu'il faut considérer lorsqu'on détermine le seuil de fiabilité d'une preuve par ouï-dire au stade d'un voir dire, comme ici.

[19] Commençons donc avec Khelawon, qui concernait des plaintes de plusieurs résidents d'une maison de retraite d'avoir été agressés par l'accusé. Le juge du procès avait admis une partie de la preuve par ouï-dire, malgré le décès d'un certain nombre de ces plaignants, dans une large mesure en raison de la similitude frappante des déclarations. La Cour d'appel de l'Ontario avait exclu toutes les déclarations et avait acquitté l'accusé, une conclusion confirmée par la Cour suprême.

[20] Dans son opinion, la juge Charron commence avec un rappel des règles de base en matière d'ouï-dire, aux paragraphes 2 et 3 :

[2] En général, tout élément de preuve pertinent est admissible. La règle excluant le ouï-dire est une exception bien établie à ce principe général. […] l'exclusion […] tient essentiellement à l'incapacité générale d'en vérifier la fiabilité. Si le déclarant n'est pas présent en cour, il peut se révéler impossible de mettre à l'épreuve sa perception, sa mémoire, sa relation du fait en question ou sa sincérité. […] Des erreurs, des exagérations ou des faussetés délibérées peuvent passer inaperçues et mener à des verdicts injustes. […] Dans certains cas, cette preuve présente des dangers minimes et son exclusion au lieu de son admission gênerait la constatation exacte des faits. C'est ainsi que les tribunaux ont établi, au fil du temps, un certain nombre d'exceptions à la règle. […] Si la partie qui veut présenter la preuve ne peut satisfaire au double critère de la nécessité et de la fiabilité (lorsqu'on sort des règles générales d'exclusion de preuve par ouï-dire), la règle d'exclusion générale l'emporte. Le juge du procès joue le rôle de gardien en effectuant cette appréciation préliminaire du « seuil de fiabilité » de la déclaration relatée et laisse au juge des faits le soin d'en déterminer en fin de compte la valeur.

[3] […] En tranchant la question du seuil de fiabilité (threshold reliability), le juge du procès doit être conscient que la preuve par ouï-dire est présumée inadmissible. Son rôle est de prévenir l'admission d'une preuve par ouï-dire qui n'est pas nécessaire pour trancher la question en litige ou dont la fiabilité ne ressort pas clairement de la véracité de son contenu ou ne peut, en dernière analyse, être vérifiée utilement par le juge des faits. Dans une affaire criminelle, l'incapacité de l'accusé de vérifier la preuve risque de compromettre l'équité du procès […] guident l'exercice du pouvoir discrétionnaire résiduel du juge du procès d'exclure des éléments de preuve même si leur nécessité et leur fiabilité peuvent être démontrées. […] le juge du procès a le pouvoir discrétionnaire d'exclure une preuve admissible lorsque son effet préjudiciable est disproportionné par rapport à sa valeur probante.

[21] Il s'agissait dans Khelawon (comme ici) d'une preuve par ouï-dire pour laquelle la nécessité était établie (le déclarant étant disparu ou mort). La Cour suprême a enseigné qu'il faut décider si la Couronne a établi qu'il s'agit d'une preuve pertinente - nécessaire pour trancher une question en litige - et si cette preuve a atteint le seuil de fiabilité, sur une balance des probabilités. Enfin, même s'il s'agit d'une preuve pertinente, nécessaire et fiable, il faut examiner son effet préjudiciable par rapport à sa valeur probante.

[22] Avant de quitter l'arrêt Khelawon, il faut préciser que la Cour suprême, aux paragraphes 93 et suivants, spécifie que les commentaires aux paragraphes 215 et 217 de l'arrêt Starr ne devraient plus être suivis, soit la limite imposée auparavant quant à la preuve soumise sur le seuil de fiabilité :

[93] […] Partant, certains des commentaires formulés aux par. 215 et 217 de l'arrêt Starr ne devraient plus être suivis. Les facteurs pertinents ne doivent plus être rangés dans des catégories de seuil de fiabilité et de fiabilité en dernière analyse. Le tribunal devrait plutôt adopter une approche plus fonctionnelle, comme nous l'avons vu précédemment, et se concentrer sur les dangers particuliers que comporte la preuve par ouï-dire qu'on cherche à présenter, de même que sur les caractéristiques ou circonstances que la partie qui veut présenter la preuve invoque pour écarter ces dangers. De plus, le juge du procès doit demeurer conscient du rôle limité qu'il joue lorsqu'il se prononce sur l'admissibilité – il est essentiel pour assurer l'intégrité du processus de constatation des faits que la question de la fiabilité en dernière analyse ne soit pas préjugée lors du voir-dire portant sur l'admissibilité.

[94] Je tiens à dire quelques mots sur un facteur décrit dans l'arrêt Starr, à savoir « la présence d'une preuve corroborante ou contradictoire ». […]

[100] Il s'est révélé difficile et parfois paradoxal de limiter l'enquête aux circonstances entourant la déclaration.

[23] Il faut toutefois souligner que la juge Charron dans Khelawon n'a aucunement rejeté l'approche ou la méthode de « principe » élaboré dans Starr et basé sur les arrêts Smith et Khan, tel qu'il appert des extraits suivants de Starr :

[192] Jusqu'à maintenant, l'application par notre Cour de la méthode fondée sur des principes en matière d'admissibilité de la preuve par ouï-dire s'est limitée, en pratique, à élargir la portée de l'admissibilité de la preuve par ouï-dire au-delà des exceptions traditionnelles. L'analyse et les observations de la Cour ont été axées sur la nécessité d'accroître la souplesse des exceptions existantes, et non pas particulièrement sur la nécessité de réexaminer les exceptions elles-mêmes. […]

[…]

[215] À cet égard, lorsque la fiabilité d'une déclaration est examinée selon la méthode fondée sur des principes, il importe d'établir une distinction entre le seuil de fiabilité et la fiabilité absolue. […] Le seuil de fiabilité ne concerne pas la question de savoir si la déclaration est véridique ou non; c'est une question de fiabilité absolue. Il concerne plutôt la question de savoir si les circonstances ayant entouré la déclaration elle-même offrent des garanties circonstancielles de fiabilité. Ces garanties pourraient découler du fait que le déclarant n'avait aucune raison de mentir (voir Khan et Smith, précités) […].
[24] En 2008, la juge Charron revient sur la question dans Blackman et répète que l'approche fonctionnelle et de « principe » élaborée, entre autre, dans Khelawon s'applique toujours. Elle souligne, aux paragraphes 30 et suivants, les critères de la pertinence de l'approche « raisonnée » en matière de ouï-dire (par. 33 et s.), la question d'un motif pour mentir de la part du déclarant lors de l'étude de fiabilité (par. 39 et s.) et les problèmes vis-à-vis du témoin qui rapporte des déclarations d'ouï-dire (par. 47 et s.), surtout lorsque la faible crédibilité ou fiabilité de la personne qui relate la déclaration extrajudiciaire prive la déclaration de toute valeur probante (par. 52). Dans ce cas (relativement rare précise-t-elle), le juge du procès pourrait conclure qu'en raison de la faible crédibilité ou fiabilité de la preuve fournie par le narrateur il doit, en vertu de son pouvoir discrétionnaire résiduel, écarter la déclaration relatée.

[25] Aux paragraphes 53 et suivants de Blackman, la juge Charron traite de la question de la corroboration, ou l'absence de corroboration - voire contradiction :

[53] Avant de terminer, j'aimerais dire quelques mots en réponse aux observations qui nous ont été soumises pendant l'audience sur la question de la corroboration. […] à la lumière des précisions apportées ultérieurement dans Khelawon sur la façon de tenir compte d'une preuve corroborante ou contradictoire lors du voir-dire sur l'admissibilité.

[54] Je tiens à souligner que Khelawon n'a pas élargi la portée de l'examen de l'admissibilité; il n'a fait que le mettre au point. La Cour a statué que les facteurs pertinents à considérer lors du voir-dire sur l'admissibilité ne devraient plus être rangés dans la catégorie du seuil de fiabilité ou celle de la fiabilité ultime. Elle a plutôt déclaré qu'il y avait lieu d'adopter une approche fonctionnelle.

[55] La Cour a donc précisé que, lorsque les circonstances s'y prêtent, il est possible de prendre en compte un élément de preuve corroborant pour apprécier le seuil de fiabilité d'une déclaration. Prenons l'exemple de la déclaration relatée d'une victime qui affirme avoir été poignardé à plusieurs reprises, mais qui ne porte aucune trace de blessure. L'absence de preuve corroborante pourrait jeter un doute sérieux quant à la véracité de la déclaration, voire porter un coup fatal à son admissibilité. À l'inverse, un élément de preuve corroborant peut aussi confirmer la véracité d'une déclaration.

[26] J'arrive donc maintenant à l'analyse des déclarations devant moi dans la présente cause. Selon l'approche de Khelawon et de Blackman, il faut répondre aux quatre questions suivantes :

1. Est-ce qu'il s'agit de ouï-dire? Ici, la réponse est oui.

2. Si oui, est-ce que cette preuve est pertinente aux accusations pour lesquelles l'accusé subit son procès?

3. Si oui, on applique l'approche « de principe », c'est-à-dire, on procède à l'analyse de chaque déclaration en se posant la question suivante : « Cette déclaration atteint-elle le seuil de fiabilité sur une balance des probabilités? », en appliquant l'approche fonctionnelle et en tenant compte de toute la preuve, non seulement des circonstances entourant la déclaration, mais également de la preuve corroborante ou contradictoire.

4. Enfin, et même si cette déclaration est jugée nécessaire, pertinente et fiable suite à ces analyses, il faut peser le risque de préjudice pour l'accusé si la déclaration est admise contre sa valeur probante, chaque déclaration étant prise de façon individuelle.

Il y a deux manières de satisfaire l'exigence de ce critère en ce qui concerne la fiabilité d'une preuve par ouï-dire

R. c. Moussali, 2012 QCCS 849 (CanLII)

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[22] Une déclaration extrajudiciaire constitue du ouï-dire si elle est présentée pour établir la véracité de son contenu et s’il y a impossibilité de contre-interroger le déclarant au moment précis où il fait cette déclaration. Or, une preuve par ouï-dire est présumée inadmissible. Effectivement, la règle du ouï-dire est par nature une règle d’exclusion générale. Il y a toutefois certaines exceptions traditionnelles de common law à cette règle.

[23] Par ailleurs, c'est dans l'arrêt Khan que la Cour suprême a adopté une exception de principe à la règle interdisant la preuve par ouï-dire. Est donc admissible une telle preuve lorsque sa production est nécessaire et qu’elle est fiable. Ainsi, avant d’admettre une déclaration relatée en vertu de l’exception raisonnée à la règle du ouï-dire, le juge du procès doit tenir un voir-dire dans lequel il doit décider si les critères de nécessité et de fiabilité ont été établis. La partie qui cherche à présenter cette preuve doit établir ces critères selon la prépondérance des probabilités.

[24] Dans le présent cas, la juge d'instance a conclu que le critère de nécessité avait été démontré. Il restait donc le débat sur le critère de fiabilité à faire. En effet, une preuve par ouï-dire ne sera pas déclarée admissible si l’on ne peut pas vérifier sa fiabilité. Cela étant et comme la juge l'affirme " il s’ensuit que, selon la méthode d’analyse raisonnée, l’exigence de fiabilité vise à déterminer les cas où cette difficulté est suffisamment surmontée pour justifier l’admission de la preuve à titre d’exception à la règle d’exclusion générale."

[25] En ce qui concerne la fiabilité, il y a deux manières de satisfaire l'exigence de ce critère. Les auteurs Béliveau et Vauclair mentionnent à ce sujet que:

" on peut envisager la fiabilité de deux manières distinctes, de façon intrinsèque ou extrinsèque. La fiabilité intrinsèque, que la Cour suprême a désignée comme offrant des garanties circonstancielles, est celle qui découle des circonstances de l’espèce. Dans un tel cas, " il n’y a pas de préoccupation réelle quant au caractère véridique ou non de la déclaration, vu les circonstances dans lesquelles elle a été faite ". La fiabilité extrinsèque est celle qui découle des garanties procédurales attachées à la prise de la déclaration. Dans un tel cas, " le seuil de fiabilité repose essentiellement sur l’existence de substituts adéquats aux garanties traditionnelles invoquées pour vérifier la preuve".

[26] L'appelante soutient que les garanties procédurales des notes de l’agent Graveley ne suffisent pas à satisfaire au critère de fiabilité, d’où la nécessité de s’appuyer sur les indices de fiabilité intrinsèque. Elle mentionne également que malgré le fait que les notes aient été rédigées en mode télégraphique et contiennent des abréviations, elles sont compréhensibles et intelligibles. De plus, la précision des détails contenue dans les notes de l’agent des services frontaliers, tend à démontrer l’exactitude et la véracité de ses notes et ne laisse pas de place à l’interprétation. Par conséquent, les notes de l’officier Graveley sont fiables.

[27] Pour déterminer si cette preuve rencontre le critère de fiabilité ou si elle offre suffisamment de garanties circonstancielles de fiabilité, il faut analyser, selon la jurisprudence, les circonstances dans lesquelles les notes ont été écrites.

Les principes de la preuve par ouï-dire

R. c. Nicolas, 2011 QCCQ 5702 (CanLII)

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[14] Conséquemment, il importe au stade de la recevabilité de se concentrer sur les dangers inhérents à la preuve par ouï-dire concernée et sur les caractéristiques ou circonstances invoquées par la partie qui veut s'en prévaloir.

[15] Il y a lieu donc de retenir :

- la preuve par ouï-dire est présumée inadmissible;

- il incombe à celui qui cherche à présenter la preuve d'en établir les critères de nécessité et de fiabilité selon la prépondérance des probabilités;

- la nécessité et la fiabilité doivent être interprétées de façon souple;

- il faut distinguer entre « fiabilité en dernière analyse » et « seuil de fiabilité ». L'examen de la recevabilité de la preuve par ouï-dire se limite au « seuil de fiabilité ». C'est au terme du procès que le juge des faits décide de s'en remettre ou non à la preuve par ouï-dire pour trancher les questions en litige au regard de l'ensemble de la preuve;

- le « seuil de fiabilité » s'entend d'une preuve qui comporte des indices et des garanties circonstanciels suffisants de nature à parer les dangers propres au ouï-dire. Bien qu'au stade de la décision portant sur la recevabilité de la preuve son rôle demeure limité et ne doit pas empiéter sur celui du juge du fond à qui revient « la fiabilité en dernière analyse », le tribunal peut tenir compte de tous les éléments de preuve pertinents.

Les critères de la res gestae

Alexandre c. R., 2012 QCCA 935 (CanLII)

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[54] Ici, seule la res gestae serait susceptible d'application. Les conversations téléphoniques de l'appelant avec V... ne constituent pas de la res gestae. Les critères de la res gestae sont les suivants : la déclaration doit être contemporaine à l’événement en question, et doit être spontanée; de plus, le déclarant doit subir une contrainte ou une intensité émotive, découlant des événements en litige, qui garantit la fiabilité de la déclaration. La Cour suprême enseigne ce qui suit :

Je suis convaincue qu'en appliquant les critères traditionnels des déclarations spontanées le juge du procès a rejeté à juste titre la déclaration de la mère. La déclaration n'était pas contemporaine puisqu'elle a été faite quinze minutes après leur départ du cabinet du médecin et probablement une demi-heure après la perpétration de l'infraction. Elle n'a pas été faite non plus sous la contrainte ou l'intensité émotive qui fournirait la garantie de fiabilité sur laquelle se fonde traditionnellement la règle des déclarations spontanées

[55] Dans le présent cas, les déclarations ont été faites une quinzaine de minutes après l’incident, et ainsi l’on pourrait difficilement les qualifier de contemporaines aux événements, si l’on considère leur contexte. Selon les auteurs Casey Hill et al., :

There must be a sufficient link between the event giving rise to the statement, and the statement, in the sense that the statement must be a product of the state of surprise or shock following on the event

mercredi 24 octobre 2012

La définition de maison d'habitation

R. v. Higgs, 2006 CanLII 10380 (MB PC)

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[12] This issue was decided in Manitoba by Justice McKelvey of the Manitoba Court of Queen’s Bench on the 29th of March 2005 in the case of R v. Bolczak.5 In essence, Justice McKelvey considered whether the sleeper berth of a semi was a dwelling house in a case that involved possession of marihuana for the purposes of trafficking. The marihuana was found in the sleeper part of the cab. Justice McKelvey indicated in her decision,

The term dwelling has been broadly interpreted by the Courts as it was said in a dissenting opinion in R v. Grant 1992 CanLII 5996 (BC CA), (1992), 14 C.R. (4th) 260 (CA) (an appeal to the Supreme Court of Canada did not consider the definition of a “dwelling house”) (at paragraph 70):

“Dwelling house” in that section is not an architect’s term. On the one hand, a boat is the “dwelling house” of one who lives aboard it and so may a packing case in which a “homeless” person sleeps and keeps his few pitiful belongings. On the other hand, a building which would be called a house in a real estate advertisement is not a “dwelling house” if no one dwells within it.

Mr. Bolczak testified he slept and ate most of his meals in the berth area during the course of his journey. He had a berth, fridge and a table in this confined area. It’s where he lived, albeit on a temporary basis while on the road. Section 2 of the Criminal Code defines a “dwelling house”, in part, as being a structure which is occupied on a temporary basis and includes a mobile unit.

I find the sleeper berth area is a “dwelling” within the meaning of the Act

mardi 23 octobre 2012

Le résumé des principes généraux à appliquer à l’examen auquel le juge du procès soumet le mandat de perquisition pour statuer sur sa validité

Arsenault c. R., 2009 NBCA 29 (CanLII)

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[5] Au départ de son analyse, le juge du procès s’est reporté à l’arrêt que notre Cour a rendu dans R. c. Allain (S.) (1998), 205 R.N.‑B. (2e) 201, [1998] A.N.‑B. no 436 (QL). Le juge d’appel Drapeau (aujourd’hui juge en chef) y formulait des principes généraux à appliquer à l’examen auquel le juge du procès soumet le mandat de perquisition pour statuer sur sa validité. Le résumé de ces principes proposé ci‑dessous puise largement dans cet arrêt :

1) L’examen que mène le juge du procès doit être entrepris en partant du point de vue que le mandat de perquisition et la dénonciation contestés sont présumés valides.

2) Il incombe à la personne qui en conteste la validité de convaincre le juge qui siège en révision que la dénonciation n’est pas conforme aux exigences de fond établies par la loi.

3) Lorsqu’il évalue la qualité de fond de la dénonciation, le tribunal de révision ne doit pas s’en tenir à la preuve qui y est explicitement mentionnée. Il doit se rappeler le pouvoir incontestable dont jouit le juge qui a décerné le mandat de tirer des déductions raisonnables de cette preuve explicite.

4) Dans son évaluation, le tribunal de révision doit prendre en considération la totalité de la dénonciation et en interpréter les différentes parties en contexte.

5) Une interprétation trop étroite des mots utilisés dans la dénonciation n’est pas justifiée par la jurisprudence ni par l’art. 8 de la Charte, mais le tribunal de révision doit rester vigilant et ne pas faire en sorte que sa tolérance à l’égard des erreurs ou des faiblesses de rédaction ne s’étende à des omissions importantes concernant les exigences de fond.

6) En définitive, si la dénonciation ne donne pas explicitement ou implicitement les motifs raisonnables requis, on ne peut pas dire que le mandat qui en découle a été décerné à bon droit.

7) Lorsque le dossier de la preuve soumis au juge siégeant en révision est essentiellement le même que celui qui a été présenté au juge qui a décerné le mandat, le critère à appliquer en révision consiste à déterminer si le juge qui a décerné le mandat disposait d’une preuve sur laquelle, agissant de façon judiciaire, il pouvait se fonder pour décerner le mandat de perquisition.

8) Par contre, lorsque le dossier soumis au juge siégeant en révision est essentiellement différent de celui qui a été présenté au juge qui a décerné le mandat, par exemple lorsque des parties importantes ont été retranchées de la dénonciation, le critère à appliquer en révision consiste à déterminer si le mandat aurait été décerné sur la foi de la preuve qui reste.

9) Lorsque le dossier de la preuve soumis au tribunal de révision est sensiblement moins important que le dossier présenté au juge qui a décerné le mandat, la question de la déférence n’a plus de justification de principe et il incombe au ministère public de convaincre le juge siégeant en révision que le mandat aurait été décerné sur le fondement de la preuve qui reste. [par. 10 à 19]

Le dénonciateur doit exposer les faits de façon complète et sincère, sans chercher à tromper le juge

Cossette c. R., 2011 QCCA 2368 (CanLII)

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[20] Pour être considérée non abusive aux termes de l’article 8 de la Charte, une fouille ou une perquisition doit être autorisée par la loi, cette loi doit n’avoir rien d’abusif et la fouille ou la perquisition ne doit pas être effectuée d’une manière abusive.

[21] Ici, la loi autorisait-elle la perquisition ? Tout est affaire de circonstances. Dans l'arrêt Hunter c. Southam Inc., le juge Dickson résume les exigences minimales de l'article 8 de la Charte comme étant « l'existence de motifs raisonnables et probables, [dont l'existence est] établie sous serment, de croire qu'une infraction a été commise et que des éléments de preuve se trouvent à l'endroit de la perquisition ».

[22] Le dénonciateur doit exposer les faits de façon complète et sincère, sans chercher à tromper le juge. Les aspects tant favorables que défavorables doivent être divulgués, comme le rappelait récemment le juge Fish, au nom de la majorité de la Cour suprême :

[58] En omettant de fournir ces détails, le dénonciateur a manqué à l’obligation qui lui incombe en tant que policier d’exposer les faits de manière complète et sincère au juge. Lorsqu’il demande une autorisation ex parte, comme dans le cas d’un mandat de perquisition, un policier — en fait, tout dénonciateur — doit faire particulièrement attention de ne pas faire un tri des faits pertinents dans le but d’obtenir le résultat souhaité. Le dénonciateur est tenu de présenter tous les faits pertinents, favorables ou non. Il peut omettre des détails non pertinents ou sans importance au nom de l’objectif louable de la concision, mais il ne peut pas taire des faits essentiels. Le policier dénonciateur doit donc éviter de présenter un exposé incomplet des faits connus et veiller à ne pas orienter le juge vers une inférence ou une conclusion à laquelle ce dernier ne serait pas parvenu si les faits omis lui avaient été divulgués.

[Soulignement ajouté]

[23] En revanche, le travail des policiers ne doit pas être examiné au peigne fin, mais il demeure que leur conduite peut rendre injustifiable une intrusion dans la vie privée des gens.

[24] Des soupçons ne justifient pas l'émission d'un mandat de perquisition et il serait préférable, bien que non crucial, que les affidavits soient donnés par des personnes ayant la connaissance la plus directe possible des faits en cause. Dans l'arrêt Garofoli, une affaire d'écoute électronique dont les principes demeurent pertinents pour toute demande d'autorisation, le juge Sopinka écrivait pour la majorité :

Le juge qui siège en révision ne substitue pas son opinion à celle du juge qui a accordé l'autorisation. Si, compte tenu du dossier dont disposait le juge qui a accordé l'autorisation et complété lors de la révision, le juge siégeant en révision conclut que le juge qui a accordé l'autorisation pouvait le faire, il ne devrait pas intervenir. Dans ce processus, la fraude, la non-divulgation, la déclaration trompeuse et les nouveaux éléments de preuve sont tous des aspects pertinents, mais au lieu d'être nécessaires à la révision leur seul effet est d'aider à décider s'il existe encore un fondement quelconque à la décision du juge qui a accordé l'autorisation.

[Soulignement ajouté]

[25] Dit autrement, le juge qui siège en révision doit « se demander s'il y avait au moins quelque élément de preuve auquel le juge aurait pu raisonnablement ajouter foi pour faire droit à la demande ». Il peut donc confirmer une autorisation qui comporte des informations erronées :

[28] L'affidavit doit en second lieu être fiable. Il ne doit pas chercher à tromper. Certes, une erreur peut s'y être glissée, une information consignée peut être erronée, voire délibérément trompeuse. Cela n'a pas nécessairement pour effet d'invalider de manière automatique la demande d'autorisation si une fois ce renseignement ou cette affirmation retiré du document, l'affidavit satisfait toujours les conditions de la loi.

[Soulignement ajouté]

[26] Le juge doit alors faire abstraction des renseignements inexacts énoncés dans la dénonciation. Il est possible de recourir à l’« amplification » pour rétablir les faits, lorsque la police a commis une erreur de bonne foi

[27] Il revient enfin à l'accusé de persuader le juge, selon la prépondérance des probabilités, que la dénonciation ne justifiait pas la délivrance de l'autorisation recherchée

Le dédommagement à la victime doit toujours être envisagé lors de la détermination de la peine

Le pouvoir d'amender un acte d'accusation ou une dénonciation expliqué par la Cour d'appel de l'Ontario

R. v. K.R., 2025 ONCA 330 Lien vers la décision [ 17 ]        The power to amend an indictment or information under  s. 601(2)  of the  Crim...