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jeudi 12 mars 2009

Chaîne de possession

Dans le cadre d'une infraction relatives aux stupéfiants
La pratique a permis de développer des procédures qui facilitent cette preuve. En général, la substance est identifiée par des marques distinctives sur son contenant par celui qui l’a trouvée, placée dans un lieu dont l’accès est contrôlé jusqu’à son expédition à l’analyste dans une enveloppe sur laquelle des numéros d’identification distinctifs sont apposés. Une fois l’analyse complétée, les substances sont retournées au policier dans l’enveloppe d’expédition, accompagnées du certificat d’analyse.

La poursuite n’a pas l’obligation de faire entendre devant la cour toutes les personnes qui ont été en possession de la drogue afin d’établir la chaîne de possession. S’il n’existe rien dans la preuve qui permette de douter que les drogues analysées sont bien celles qui ont été saisies, la poursuite se sera déchargée de son fardeau même si elle ne présente pas comme témoin tous les intermédiaires qui sont intervenus dans le processus d’analyse
Tiré de Les infractions criminelles, Collection de droit,Volume 12 - Droit pénal : infractions, moyens de défense et peine


Dans le cadre d'infraction relative à l'informatique
La chaîne de possession désigne le suivi des éléments de preuve recueillis sur les lieux du crime jusqu’à la présentation de ceux-ci devant les tribunaux. L’entretien de la chaîne de possession est essentiel dans les cas qui reposent fortement sur des preuves numériques. Ce type de preuve peut facilement être modifié, et un bris dans la chaîne de possession peut compromettre la force probante d’une affaire pénale.

Il est essentiel de savoir où se sont trouvées les preuves en tout temps, du moment où elles ont été obtenues au moment où elles sont présentées devant les tribunaux. Les organismes d’application de la loi préfèrent toujours qu’on ne touche pas à la preuve avant leur arrivée sur les lieux. Cependant, cela n’est pas toujours possible, tel qu’il a été mentionné précédemment. Dans de tels cas, toutes les mesures prises par le personnel ne faisant pas partie des organismes d’application de la loi doivent entretenir la chaîne de possession et respecter les règles de preuve.
Tiré du Guide à l’intention des intervenants en cas d’incident de sécurité informatique
http://www.rcmp-grc.gc.ca/ts-st/pubs/it-ti-sec/g2-008-fra.pdf

Preuve d'expert quant à la prédisposition

R. c. Mohan, [1994] 2 R.C.S. 9

Le ministère public ne peut produire une preuve d'expert quant à la prédisposition que si elle est pertinente et n'est pas utilisée comme simple preuve de la prédisposition.

L'accusé peut en revanche produire une preuve quant à la prédisposition, mais cette preuve se limite, en règle générale, à la preuve de la réputation de l'accusé au sein de la collectivité relativement aux traits de caractère concernés. L'accusé peut aussi invoquer dans son propre témoignage des actes particuliers de bonne conduite. L'accusé peut produire une preuve sur la prédisposition tant par son propre témoignage que par celui d'autres témoins. Le témoignage d'un expert indiquant qu'en raison de sa constitution mentale ou de son état mental, l'accusé serait incapable de commettre le crime ou ne pourrait être prédisposé à le commettre, ne correspond à aucune de ces catégories. Cependant, une autre exception de portée limitée a été créée. Bien que cette exception ait été appliquée à des comportements anormaux liés usuellement à une déviance sexuelle, sa raison d'être est le caractère distinctif.

Suivant la règle générale, la preuve de moralité se limite à la preuve de la réputation de l'accusé au sein de la collectivité relativement au trait de caractère concerné. L'accusé peut toutefois invoquer dans son propre témoignage des actes particuliers de bonne conduite. Le témoignage d'un expert indiquant qu'en raison de sa constitution mentale ou de son état mental, l'accusé serait incapable de commettre le crime ou ne pourrait être prédisposé à le commettre, ne correspond à aucune des catégories concernées. Une autre exception de portée limitée a toutefois été créée

Avant d'admettre en preuve l'opinion d'un expert sur la prédisposition, le juge du procès doit être convaincu, en droit, que l'auteur du crime ou l'accusé possède des caractéristiques de comportement distinctives de sorte que la comparaison de l'un avec l'autre aidera considérablement à déterminer l'innocence ou la culpabilité. Bien que cette décision repose sur le bon sens et l'expérience, elle n'est pas prise dans le vide. Le juge du procès devrait considérer, d'une part, l'opinion de l'expert et, d'autre part, si ce dernier exprime simplement une opinion personnelle ou si le profil de comportement qu'il décrit est couramment utilisé comme indice fiable de l'appartenance à un groupe distinctif. La conclusion que la profession scientifique a élaboré un profil type du délinquant qui commet ce genre de crime satisfera aux critères de pertinence et de fiabilité. La preuve sera considérée comme une exception à la règle d'exclusion relative à la preuve de moralité à condition que le juge soit convaincu que l'opinion proposée se situe dans le domaine d'expertise du témoin expert.

En d'autres termes, la profession scientifique a‑t‑elle élaboré un profil type du délinquant qui commet ce genre de crime? Une conclusion affirmative sur ce fondement satisfera aux critères de pertinence et de fiabilité. Non seulement la preuve d'expert tendra à prouver un fait en litige, mais elle offrira aussi au juge des faits l'aide dont il a besoin. Une telle preuve aura satisfait au critère préliminaire de la fiabilité qui fera généralement en sorte que le juge des faits ne lui accorde pas plus de poids qu'elle ne le mérite. La preuve sera considérée comme une exception à la règle d'exclusion relative à la preuve de moralité à condition bien sûr que le juge du procès soit convaincu que l'opinion exprimée se situe dans le domaine d'expertise du témoin expert.

Rien dans le dossier ne permettait de conclure que le profil du pédophile ou du psychopathe a été normalisé au point où on pourrait soutenir qu'il correspond au profil présumé du délinquant décrit dans les accusations. Les profils de groupes décrits par l'expert n'ont pas été considérés suffisamment fiables pour être utiles. En l'absence de ces indices de fiabilité, on ne pouvait pas dire que la preuve serait nécessaire au sens où elle clarifierait utilement une question qui serait autrement inaccessible, ou que la valeur qu'elle pourrait avoir ne serait pas surpassée par la possibilité qu'elle induise le jury en erreur ou le détourne de ses tâches.

Les similitudes, expliquées par le juge, portaient sur le modus operandi de l'auteur des actes qui étaient l'objet de chefs spécifiques. La preuve d'expert ne visait pas ces questions. De plus, la question de savoir si le crime est commis d'une manière qui identifie l'auteur, en raison de similitudes frappantes dans la méthode utilisée pour perpétrer d'autres actes, peut être appréciée en général par un jury sans l'aide de la preuve d'expert.

Admissibilité de la preuve d'expert

R. c. Mohan, [1994] 2 R.C.S. 9

L'admission de la preuve d'expert repose sur l'application des critères suivants:

a) la pertinence;
b) la nécessité d'aider le juge des faits;
c) l'absence de toute règle d'exclusion; et
d) la qualification suffisante de l'expert.

a) la pertinence
La pertinence est une exigence liminaire déterminée par le juge comme question de droit. La preuve logiquement pertinente peut être exclue si sa valeur probante est surpassée par son effet préjudiciable, si elle exige un temps excessivement long qui est sans commune mesure avec sa valeur ou si son effet sur le juge des faits est disproportionné par rapport à sa fiabilité. Le facteur fiabilité‑effet revêt une importance particulière dans l'appréciation de l'admissibilité de la preuve d'expert. La preuve d'expert ne devrait pas être admise si elle risque d'être utilisée à mauvais escient et de fausser le processus de recherche des faits, ou de dérouter le jury.

b) la nécessité d'aider le juge des faits

Pour être nécessaire, la preuve d'expert doit, selon toute vraisemblance, dépasser l'expérience et la connaissance d'un juge ou d'un jury et être évaluée à la lumière de la possibilité qu'elle fausse le processus de recherche des faits. La nécessité ne devrait pas être jugée selon une norme trop stricte. La possibilité que la preuve ait un impact excessif sur le jury et le détourne de ses tâches peut souvent être contrecarrée par des directives appropriées. Les experts ne doivent toutefois pas pouvoir usurper les fonctions du juge des faits, ce qui pourrait réduire le procès à un simple concours d'experts.

c) l'absence de toute règle d'exclusion
La preuve d'expert peut être exclue si elle contrevient à une règle d'exclusion de la preuve, distincte de la règle applicable à l'opinion.

d) la qualification suffisante de l'expert
La preuve doit être présentée par un témoin dont on démontre qu'il ou elle a acquis des connaissances spéciales ou particulières grâce à des études ou à une expérience relatives aux questions visées dans son témoignage.

La preuve d'expert qui avance une nouvelle théorie ou technique scientifique est soigneusement examinée pour déterminer si elle satisfait à la norme de fiabilité et si elle est essentielle en ce sens que le juge des faits sera incapable de tirer une conclusion satisfaisante sans l'aide de l'expert. Plus la preuve se rapproche de l'opinion sur une question fondamentale, plus l'application de ce principe est stricte

mercredi 11 mars 2009

Droit d'avoir recours à l'assistance d'un avocat et d'être informé de ce droit

R. c. Prosper, [1994] 3 R.C.S. 236

Résumé des faits
Une mise en garde conforme à l'al. 10b) de la Charte, imprimée sur un carton, a été lue à l'appelant l'informant de son droit de demander des conseils juridiques gratuits. L'appelant a dit vouloir parler à un avocat. La police lui a remis une liste des avocats de l'aide juridique et, les tentatives de l'appelant pour rejoindre un avocat s'étant révélées vaines, lui a fourni un bottin pour qu'il puisse continuer ses recherches. La police ne s'était pas rendu compte alors qu'un seul des avocats sur la liste continuait à recevoir les appels après les heures de bureau, mais en a informé l'appelant dès qu'elle a été mise au courant de cette situation. L'appelant a refusé de téléphoner à des avocats de cabinets privés parce qu'il n'avait pas les moyens de recourir à leurs services. Il a ensuite accepté de se soumettre aux alcootests.

Analyse
Il ne suffit pas, d'un point de vue constitutionnel, que les responsables de l'application de la loi répètent simplement les termes de la Charte quand ils informent les personnes détenues de leur droit «d'avoir recours sans délai à l'assistance d'un avocat». Deux nouveaux éléments s'ajoutent au volet information de l'al. 10b): (1) des renseignements sur l'accès sans frais aux services d'un avocat lorsque l'accusé répond aux critères financiers établis par l'aide juridique de la province, et (2) des renseignements sur l'accès aux services d'avocats de garde (qu'il s'agisse d'avocats salariés ou d'avocats de cabinets privés) qui fournissent des conseils juridiques immédiats, quoique temporaires, sans égard à la situation financière. Dans les renseignements qu'ils donnent aux personnes détenues, les policiers doivent mentionner les services existant dans la province ou le territoire en cause.

Dans les provinces et territoires où des services d'avocats de garde existent mais où la personne ne peut y recourir au moment précis de sa mise en détention, l'al. 10b) impose aux agents de l'État l'obligation de surseoir aux mesures visant à lui soutirer des éléments de preuve, si elle a manifesté l'intention de se prévaloir de son droit à l'assistance d'un avocat et fait preuve d'une diligence raisonnable dans l'exercice de ce droit. Autrement dit, la police doit donner à la personne détenue ce qui, dans les circonstances, constitue une possibilité raisonnable de communiquer avec un avocat de garde.

Il peut y avoir des circonstances pressantes et urgentes où la police n'est pas tenue de surseoir. Toutefois, lorsqu'il s'agit d'affaires de conduite avec facultés affaiblies, la présomption en matière de preuve à l'égard des échantillons pris dans les deux heures que peut invoquer le ministère public (en vertu du sous‑al. 258(1)c)(ii)) ne constitue pas en soi une circonstance pressante ou urgente. L'urgence ne naît pas de la seule recherche d'efficience en matière d'enquête et d'établissement de la preuve. Les droits garantis à une personne détenue par l'al. 10b) doit avoir préséance sur le droit d'origine législative qui permet au ministère public de se fonder sur une présomption en matière de preuve.

Il n'est ni opportun ni nécessaire de conclure que l'al. 10b) impose aux gouvernements une obligation positive d'assurer aux personnes détenues la disponibilité de services d'«avocats de garde selon Brydges», ou encore qu'il accorde à toutes les personnes détenues un droit analogue à de tels services. En premier lieu, l'al. 10b) ne constitutionnalise pas expressément le droit à des conseils juridiques gratuits et immédiats au moment de la mise en détention.

L'alinéa 10b) impose aux autorités qui arrêtent une personne ou la placent en détention des obligations en matière d'information et de mise en application. L'existence d'une période pendant laquelle il faut «surseoir» à l'enquête découle des obligations en matière de mise en application. Une fois qu'une personne détenue a exprimé le désir d'exercer son droit à l'assistance d'un avocat, l'État doit lui fournir une possibilité raisonnable de consulter un avocat, et les agents de l'État doivent s'abstenir de lui soutirer des éléments de preuve incriminants jusqu'à ce qu'on lui ait donné cette possibilité. Ce qui constitue une possibilité raisonnable dépend des circonstances de chaque espèce, notamment l'existence de services d'avocats de garde dans le ressort en cause. L'existence ou l'absence de services d'avocats de garde influe sur la durée de la période de sursis.

L'obligation des agents de l'État d'informer les personnes de leur droit à l'assistance d'un avocat ne prend pas effet tant que la personne n'a pas été détenue au sens de l'art. 10. La détention suppose de la part de l'État une certaine forme de coercition ou de contrainte qui entraîne une privation de liberté.

Les tribunaux doivent s'assurer qu'on n'a pas conclu trop facilement à la renonciation au droit à l'assistance d'un avocat. Il y a naissance d'une obligation d'information supplémentaire de la part de la police dès que la personne détenue, qui a déjà manifesté son intention de se prévaloir de son droit, indique qu'elle a changé d'avis et qu'elle ne désire plus obtenir de conseils juridiques. La police est tenue à ce moment de l'informer de son droit d'avoir une possibilité raisonnable de communiquer avec un avocat et de l'obligation de la police de surseoir à l'enquête au cours de cette période. La personne détenue doit indiquer explicitement qu'elle a changé d'avis et il appartient au ministère public d'établir qu'elle a clairement renoncé à son droit. La renonciation doit être libre et volontaire et elle ne doit pas avoir été donnée sous la contrainte, directe ou indirecte. La norme requise pour établir l'existence d'une renonciation au droit à l'assistance d'un avocat est très stricte. La personne qui renonce à un droit doit savoir ce à quoi elle renonce pour que la renonciation soit valide. Le droit à l'assistance d'un avocat garanti à l'al. 10b) ne doit toutefois pas se transformer en obligation pour les personnes détenues de demander l'assistance d'un avocat.

Dès qu'une personne détenue invoque son droit à l'assistance d'un avocat et fait preuve de diligence dans l'exercice de ce droit, donnant ainsi naissance à l'obligation de sursis de la police, la norme exigée pour qu'il y ait renonciation valide de ce droit sera stricte. Quand la personne détenue fait quelque chose qui indique qu'elle a changé d'avis et qu'elle ne souhaite plus communiquer avec un avocat, les policiers devront l'informer de son droit à une possibilité raisonnable de communiquer avec un avocat et de leur obligation de ne pas lui soutirer des éléments de preuve de nature incriminante.

La personne détenue a le droit, en vertu de l'al. 10b), d'être informée de l'existence de tout système lui permettant d'obtenir sans délai des conseils juridiques préliminaires gratuits dans la province ou le territoire, et des moyens à employer pour y avoir accès

dimanche 8 mars 2009

Violation du droit à l'avocat de son choix / 6 appels à différents avocats / messages laissés sur un répondeur

R. c. Mathieu Grégoire 550-01-024744-064

Résumé des faits
L'accusé a été mis en état d'arrestation pour y subir un test d'ivressomètre. Dans le véhicule du policier, l'accusé demande à parler à un avocat spécifique (Me Mendo). Il n'a pas été possible de joindre Me Mendo et le policier n'a laissé aucun message sur la boîte vocale de celui-ci. Il y a six tentatives pour contacter divers avocats. Deux minutes après avoir laissé un message à l'avocat que désirait consulter l'accusé, le policier place l'appel au service de garde de l'aide juridique. Pour se justifier, le policier a dit à l'accusé : tu réalises que l'on peut pas rejoindre personne. Quand un avocat ne répond pas la nuit, il est peu probable qu'ils rappellent en laissant des messages. Tu ferais peut-être mieux d'aller directement à l'aide juridique. Après la conversation, l'accusé a donné un échantillon d'haleine qui dépassait la limite légale

Analyse
L'al. 10b) de la Charte impose au moins deux obligations aux policiers en plus de celle d'informer le détenu de ses droits. D'abord, les policiers doivent donner à la personne accusée ou détenue une possibilité raisonnable d'exercer le droit de recourir à l'assistance d'un avocat, puis les policiers doivent s'abstenir de questionner la personne ou d'essayer de lui soutirer des éléments de preuve jusqu'à ce qu'elle ait eu cette possibilité raisonnable.

La deuxième obligation comporte notamment l'interdiction faite aux policiers de forcer la personne détenue à prendre une décision ou à participer à quelque chose qui pourrait finalement avoir un effet préjudiciable sur un éventuel procès, jusqu'à ce que cette personne ait eu une possibilité raisonnable d'exercer son droit à l'assistance d'un avocat

Il faut que l'accusé ait été proactif, il ne faut pas qu'il attende passivement la suite des événements.

L'accusé a en principe le droit de consulter l'avocat de son choix, sauf si cela est source d'un délai injustifié dans les circonstances. Ce sera notamment le cas si un long délai peut entraîner l'impossibilité d'obtenir une preuve.

Sur le plan pratique, le problème de la raisonnabilité du délai se pose surtout lorsque l'accusé est détenu pour y subir un test d'ivressomètre, le sous-alinéa 258 1) c) ii) prévoyant que le premier échantillon doit être prélevé dans les 2 heures de la commission de l'infraction si la poursuite veut bénéficier de la présomption d'identité de l'alcoolémie entre le moment de l'interception et celui de l'administration du test.

Dans l'arrêt Prosper, on a cependant précisé que ce délai en lui-même ne constitue pas une circonstance urgente ou pressante. Cela étant, dans l,arrêt richfiels de la cour d'appel de l'Ontario, celle-ci a décidé que l,accusé, après avoir veinement tenté de communiquer avec l'avocat de son choix, n,avait pas fait preuve de diligence en refusant de consulter l'avocat de garde disponible durant cette période

Moins d'une minute pour attendre un retour d'appel, ce n'est pas une possibilité raisonnable qui est donnée à quelqu'un de faire affaire avec l'avocat en lequel il a confiance

samedi 7 mars 2009

Communication du certificat d’utilisation prévu à l'article 4 du Règlement sur les appareils de détection d'alcool

R. c. Bouchard 2008 QCCQ 12214

Résumé des faits

Au début de l’audition, la défense présente une « requête en arrêt de procédure pour avoir fait défaut de divulguer toute la preuve pertinente à la préparation d’une défense pleine et entière » [la requête]. Essentiellement, elle prétend que la poursuite refuse de communiquer le certificat d’utilisation prévu à l'article 4 du Règlement sur les appareils de détection d'alcool

Analyse
Le ministère public doit divulguer à l'accusé tous les renseignements pertinents, qu'ils soient inculpatoires ou disculpatoires, sous réserve de l'exercice du pouvoir discrétionnaire du ministère public de refuser de divulguer des renseignements privilégiés ou encore manifestement non pertinents. La pertinence s'apprécie tant à l'égard de l'accusation elle-même que des défenses raisonnablement possibles. Les renseignements pertinents doivent être divulgués, que le ministère public ait ou non l'intention de les produire en preuve et ce, avant que l'accusé n'ait été appelé à choisir son mode de procès ou à présenter son plaidoyer […]. En outre, toute déclaration obtenue de personnes qui ont fourni des renseignements pertinents aux autorités devrait être produite, même si le ministère public n'a pas l'intention de citer ces personnes comme témoins à charge […].

Le juge LeBel souligne que la Cour suprême a largement défini la notion de pertinence dans l'arrêt R. c. Egger[15] : « Une façon de mesurer la pertinence d'un renseignement dont dispose le ministère public est de déterminer son utilité pour la défense : s'il a une certaine utilité, il est pertinent et devrait être divulgué […]. Le juge qui effectue le contrôle doit déterminer si l'accusé peut raisonnablement utiliser la communication des renseignements pour réfuter la preuve et les arguments du ministère public, pour présenter un moyen de défense ou autrement pour parvenir à une décision susceptible d'avoir un effet sur le déroulement de la défense comme, par exemple, de présenter ou non une preuve. »

Le juge LeBel ajoute que le concept de pertinence favorise la divulgation de preuve. Ainsi :

[60] Peu de renseignements seront soustraits à l'obligation de communication de la preuve imposée à la poursuite. Comme l'affirmait notre Cour dans l'arrêt Dixon […] "le critère préliminaire fixé pour la divulgation [de la preuve] est fort peu élevé. [...] L'obligation de divulguer du ministère public est donc déclenchée chaque fois qu'il y a une possibilité raisonnable que le renseignement soit utile à l'accusé pour présenter une défense pleine et entière" […]. "Si le ministère public pèche, ce doit être par inclusion. Il n'est toutefois pas tenu de produire ce qui n'a manifestement aucune pertinence".

[61] Ce droit a un caractère constitutionnel. Protégé par l'art. 7 de la Charte, il contribue à assurer l'exercice du droit de l'accusé à une défense pleine et entière; […]. Tel que l'écrivait le juge Cory, au nom de notre Cour […] :

... lorsqu'un accusé démontre l'existence d'une possibilité raisonnable que les renseignements non divulgués auraient été utilisés pour réfuter la preuve du ministère public, pour présenter un moyen de défense ou, par ailleurs, pour prendre une décision qui aurait pu avoir une incidence sur la façon de présenter la défense, il se trouve également à établir l'existence d'une atteinte au droit à la divulgation que lui garantit la Charte.

Dans R. c. Chaplin, le juge Sopinka précise que : « [d]ans les cas où l'existence de certains renseignements a été établie, le ministère public est tenu de justifier la non-divulgation en démontrant soit qu'il n'en a pas le contrôle soit qu'ils sont manifestement sans pertinence ou privilégiés »

Le pouvoir discrétionnaire de la poursuite peut faire l’objet d’un contrôle par le juge du procès

Dans la présente affaire, le renseignement demandé existe et n’est pas privilégié. Il revient donc au ministère public de justifier le refus de divulguer sur la base de la non-pertinence

Le Tribunal retient que le renseignement recherché par la défense existe et, dans les faits, s’inscrit dans la mécanique prévue par les articles 254 (2) [soupçons lors de l'interception] et 254 (3) [motifs lors de l'arrestation]. Dans cette mesure, l’argument constitutionnel soulevé par la poursuite ne s'avère pas pertinent.

En outre, la demande de la défense ne correspond pas à une « expédition de pêche », expression qui signifie, au sens figuré, une recherche au hasard, sans savoir ce qu’on cherche ni trouvera. Bref, l’incertitude, liée à la chance, dans l’espoir d’une prise miraculeuse. Dans le présent cas, le renseignement existe.

Probation intimant à l’accusé de s’abstenir de consommer de l’alcool et des narcotiques

R. c. Shoker, [2006] 2 R.C.S. 399

Résumé des faits
L’accusé est condamné à une peine d’emprisonnement suivie d’une période de probation. L’ordonnance de probation lui intime de s’abstenir totalement de consommer et de posséder de l’alcool et des narcotiques non vendus sur ordonnance et de se soumettre, à la demande d’un agent de la paix ou d’un agent de probation, à des analyses de sang, d’urine et d’haleine permettant de vérifier si la condition interdisant la consommation et la possession de ces substances est respectée. L’ordonnance précise également que tout résultat d’analyse positif constituera une violation de cette condition.

Analyse
Bien qu’une condition intimant de s’abstenir de consommer et de posséder de l’alcool et des narcotiques non vendus sur ordonnance soit autorisée par le Code criminel et qu’elle fût raisonnable compte tenu de la situation de l’accusé, les al. 732.1(3)c) et h) du Code n’habilitaient pas le juge chargé de la détermination de la peine à autoriser le prélèvement de substances corporelles dans le cadre d’une ordonnance de probation. Ce juge n’avait pas non plus compétence pour décider d’avance que tout résultat d’analyse positif constituerait une violation de l’ordonnance de probation

L’alinéa 732.1(3)h) confère au tribunal un vaste pouvoir de concevoir d’autres conditions raisonnables destinées à protéger la société et à faciliter la réinsertion sociale de l’accusé. Cependant, l’al. 732.1(3)h) n’a pas une portée illimitée et doit être interprété dans son contexte. Les conditions énumérées au par. 732.1(3) peuvent aider à circonscrire la portée de cette disposition résiduelle. Le respect de ces conditions, qui ont trait à un comportement ou à une abstention d’adopter un comportement, n’a aucune conséquence incriminante pour le probationnaire.

Une condition susceptible de présenter un risque, comme celle intimant de participer à un programme de traitement, ne peut être imposée qu’avec le consentement du probationnaire.

Du fait qu’elles ne permettent pas simplement de surveiller le comportement du probationnaire, les conditions obligeant à fournir des échantillons de substances corporelles dans le but de faciliter l’obtention d’éléments de preuve aux fins d’exécution sont différentes et soulèvent, à cause de leur effet potentiel, des questions d’ordre constitutionnel dans le cas où le probationnaire n’y a pas consenti.

Un tel libellé est intéressant non seulement en ce qui concerne les conditions conçues en vertu de ce pouvoir résiduel, mais également en ce qui a trait aux conditions facultatives énumérées au par. 732.1(3) : la condition imposée doit être « raisonnable » dans les circonstances et viser à assurer la protection de la société et à faciliter la réinsertion sociale du délinquant en question. Les conditions raisonnables sont généralement, mais pas nécessairement, liées à l’infraction en cause. Il doit y avoir un lien entre le délinquant, la protection de la société et la réinsertion sociale de ce délinquant.

La violation d’une ordonnance de probation est une infraction criminelle prévue par le Code criminel et, à ce titre, elle est sujette aux techniques d’enquête et au mode de preuve qui sont habituellement utilisés pour n’importe quelle autre infraction. Partant, le probationnaire surpris en train de consommer de l’alcool avec ses amis dans un débit de boissons peut être poursuivi sur la foi du témoignage de ceux qui l’ont vu faire. De même, le probationnaire qui montre des signes de facultés affaiblies en raison de la consommation d’alcool ou de drogue peut être poursuivi et l’infraction peut être prouvée au moyen d’une preuve testimoniale à peu près de la même façon qu’une infraction de conduite avec facultés affaiblies. Il ne fait aucun doute que le pouvoir de demander des échantillons de substances corporelles et les analyses qui en découleraient aideraient à exécuter une condition imposée en vertu de l’al. 732.1(3)c), mais cela n’est pas suffisant pour tout simplement conclure que ce pouvoir existe implicitement.

Il est possible d’imposer toute une série de conditions supplémentaires destinées à assurer le respect, par le probationnaire, de la condition interdisant la consommation et la possession de certaines substances.

Un juge chargé de la détermination de la peine pourrait interdire au délinquant de fréquenter les copains avec qui il aime prendre un verre ou tout endroit où de l’alcool est vendu ou servi, ou encore lui imposer un couvre‑feu. Toutes ces conditions pourraient être imposées pour assurer un meilleur respect de la condition interdisant la consommation et la possession d’alcool et ainsi faciliter la réadaptation du délinquant et protéger la société. En l’absence de circonstances particulières, on ne saurait sérieusement prétendre qu’une telle condition serait déraisonnable.

On peut raisonnablement inférer que des conditions supplémentaires imposées en vertu du pouvoir résiduel seraient du même genre que celles qui sont énumérées. Toutefois, du fait qu’elles ne permettent pas simplement de surveiller le comportement du probationnaire, les conditions destinées à faciliter l’obtention d’éléments de preuve aux fins d’exécution sont différentes et soulèvent, à cause de leur effet potentiel, des questions d’ordre constitutionnel dans le cas où le probationnaire n’y a pas consenti.

Le dédommagement à la victime doit toujours être envisagé lors de la détermination de la peine

Ce qu'est la déclaration d'un accusé à haut risque

Lebel c. R., 2024 QCCA 1666  Lien vers la décision [ 4 ]           L’appelant se pourvoit contre un jugement de la Cour supérieure qui le dé...