R. c. Alix, 2005 CanLII 48242 (QC C.S.)
[16] Le principal point en litige consiste à déterminer si le privilège client-notaire ou client-avocat, au Canada, survit après le décès du détenteur.
[17] La question est de savoir dans quelles circonstances le privilège survit, à quelles conditions, à qui il profite et quelles en sont les exceptions.
[18] Tout d'abord, avant d'invoquer le privilège, il faut se demander si l'accusée était la cliente du notaire. À prime abord, la réponse est simple : non. C'est sa mère qui était la cliente.
[19] Il faut alors se demander si le privilège survit au décès du client.
[20] L'honorable juge Wilson de la Cour suprême dans Geffen c. Succession Goodman écrit que le privilège survit aux héritiers mais qu'il n'est pas sans exception :
« Le secret professionnel est tellement important que les tribunaux ont également précisé que le caractère confidentiel des communications entre l'avocat et son client subsiste après le décès du client et est transmis à ses parents, héritiers ou ayants droit: voir Bullivant v. Attorney-General for Victoria, [1901] A.C. 196, Stewart v. Walker (1903), 6 O.L.R. 495, et Langworthy v. McVicar (1913), 25 O.W.R. 297.
Une exception a toutefois été prévue afin de permettre à l'avocat de témoigner en matière testamentaire, et les commentateurs de même que les tribunaux ont donné diverses explications de cette exception à la règle générale du secret professionnel de l'avocat. Dans Wigmore on Evidence (vol. 8, {SS} 2314), par exemple, l'auteur affirme que, pour ce qui est des questions relatives à la signature ou au contenu d'un testament, le raisonnement qui sous-tend l'exception se rapporte à la volonté du testateur de préserver le secret. À la page 610 du vol. 8, le professeur Wigmore dit:
[TRADUCTION] Mais, dans le cas des testaments, un élément particulier entre en jeu. L'on ne peut guère douter que le client souhaite tacitement que la signature et surtout le contenu demeurent secrets pendant sa vie et qu'ils font donc partie de sa communication confidentielle. Il faut présumer que, durant cette période, l'avocat ne devrait pas être appelé à divulguer même le fait qu'il y a eu signature d'un testament, et encore moins sa teneur. Mais, en revanche, ce caractère confidentiel n'est destiné à être que temporaire. Il est évident qu'une telle restriction peut être apportée au privilège.
[….]
Par contre, le professeur Phipson semble être d'avis que, dans le contexte des testaments, l'exception au privilège du secret professionnel de l'avocat a une justification différente. À son avis, chaque fois que ceux qui l'invoquent et le client ont un intérêt commun dans le sujet des communications, qu'il s'agisse de questions de testament ou d'autres types de questions, le privilège ne s'applique pas. C'est pourquoi il affirme que le privilège ne s'applique pas lorsque les ayants droit d'un testateur, qui partagent un intérêt commun, l'invoquent à propos des communications faites par ce dernier à son avocat: voir Phipson on Evidence (13e éd. 1982), à la p. 300.
[…]
De même, dans l'affaire Re Ott, [1972] 2 O.R. 5 (C. succ.), où il s'agissait de décider si le testateur qui avait déchiré son testament avait voulu révoquer un testament et redonner effet à un testament antérieur, le juge Anderson a décidé que la discussion qui avait eu lieu entre le défunt et son avocat au moment de la destruction du testament était admissible. Il dit, à la p. 11:
[TRADUCTION] . . . puisqu'il est essentiel en l'espèce de découvrir l'intention du testateur au moment où il a détruit le testament, c'est-à-dire s'il révoquait son testament sans condition ou s'il ne faisait que le déchirer afin de redonner effet à un testament antérieur, tout le débat se circonscrit autour de cette question et il me semble que la cour, si elle faisait jouer le privilège du client, après son décès, ne pourrait plus dès lors déterminer l'intention qu'avait le testateur au moment où il a déchiré le testament. Dans l'intérêt de la justice, il est plus important de découvrir l'intention véritable du testateur.
En l'espèce, les intimés soutiennent qu'aucune analogie ne peut être établie entre ces affaires de testament et le cas qui nous occupe. Je ne suis pas d'accord. Par leur argument, ils affirment implicitement que la common law n'a reconnu jusqu'à présent qu'une "exception" à la règle générale du caractère privilégié des communications entre l'avocat et son client, et ce, en matière de signature, de teneur ou de validité des testaments et seulement des testaments. Leur argument rappelle l'époque où la compartimentation était de mise au chapitre des règles de preuve. Or, il n'en est plus ainsi, à mon sens. La tendance à la rationalisation de la façon d'aborder les questions d'admissibilité peut être observée autant au pays qu'à l'étranger (voir, par exemple, au Canada, Ares c. Venner, 1970 CanLII 5 (C.S.C.), [1970] R.C.S. 608 (ouï-dire), et R. c. Khan, 1990 CanLII 77 (C.S.C.), [1990] 2 R.C.S. 531 (ouï-dire), et au Royaume-Uni, Director of Public Prosecutions v. Boardman, [1975] A.C. 421 (H.L.) (fait similaire)); c'est une tendance qu'il y a lieu d'encourager, selon moi.
À mon avis, les considérations qui justifient l'admissibilité des communications entre l'avocat et son client en matière de testament s'appliquent avec la même force en l'espèce. Le principe général qui justifie la protection de ces communications est respecté. Les intérêts de la cliente maintenant décédée sont servis, en ce sens que l'admission du témoignage a précisément pour but d'établir ses intentions véritables. Et en faisant porter l'examen sur l'identité des héritiers ou ayants droit légitimes de la défunte, l'on respecte le principe qui veut que l'on étende le privilège à ses héritiers ou ayants droit. En résumé, pour reprendre les mots du juge Anderson de la Cour des successions dans l'affaire Re Ott, précitée, il y va de "l'intérêt de la justice" d'admettre ce témoignage. »
[21] L'auteur, Paul-Yvan Marquis, dans son traité de droit civil, dit aux para 292 et 298 que le secret professionnel ne saurait couvrir la fraude, le crime et la malhonnêteté, bref, qu'il ne constitue pas un "asile d'impunité" :
« 292. Il y a encore d'autres cas bien reconnus où la relativité du secret notarial se manifeste. Il n'est pas difficile, en effet, d'imaginer que celui-ci est susceptible d'être parfois en opposition au bien commun. Nous croyons que la primauté doit alors être accordée à ce dernier. Il est bien admis que le secret professionnel ne saurait couvrir la fraude, le crime, et la malhonnêteté. On l'a écrit avec justesse, le secret professionnel n'est pas un "asile d'impunité".
298. Plusieurs conséquences semblent découler de cette norme que le secret professionnel est personnel à celui qui se confie. Une première assez manifeste à l'effet que le secret ne saurait être opposé au bénéficiaire. Une deuxième voulant que ce dernier, expressément ou tacitement, ait, comme nous l'avons indiqué ci-dessus, le droit de délier partiellement ou totalement le notaire de son obligation au silence. Cette renonciation unilatérale est facilement conciliable avec l'opinion que le secret professionnel ne prend pas sa source dans un contrat de dépôt. En outre, il semble bien que le devoir de conseil ne devrait pas être nécessairement alors absent. Souvent, en effet, le notaire sera plus en mesure que son client d'apprécier avec justesse l'opportunité, l'amplitude et les conséquences d'une pareille divulgation. » (nos soulignements)
[22] L'approche américaine semble être au même effet. En effet, la Cour suprême des Etats-Unis dans Swidler & Berlin v. United States, à la page 6 :
« Such testamentary exception cases consistently presume the privilege survives. […] The view testamentary [8405] disclosure of communications as an exception to the privilege: "The general rule with respect to confidential communications… is that such communications are privileged during the testator's lifetime and, also, after the testator's death unless sought to be disclosed in litigation between the testator's heirs." Osborn, 561 F.2d at 1340. The rationale for such disclosure is that it furthers the client's intent.
[…]
Where the exoneration of an innocent criminal defendant or a compelling law enforcement interest is at stake, the harm of precluding critical evidence that is unavailable by any other means outweighs the potential disincentive to forthright communication. In my view, the cost of silence warrants a narrow exception to the rule that the attorney-client privilege survives the death of the client. Moreover, although I disagree with the Court of Appeals' notion that the context of an initial client interview affects the applicability of the work product doctrine, I do not believe that the doctrine applies where the material concerns a client who is no longer a potential party of adversarial litigation. » (Nos soulignements)
[23] Dans R. c. Jack, une affaire où la poursuite voulut mettre en preuve des conversations entre la victime et son avocat juste avant sa disparition, l'accusé était le mari de la victime décédée, la Cour d'appel du Manitoba dit ceci du privilège client‑avocat à la page 90 :
« …Relying on the emphasized passage above, the accused concedes that the privilege exists in favour of the client (Christine Jack), but asserts that it can be invoked by anyone whose interests might be adversely impacted by the disclosure. Further support is found by the accused in R. v. Solosky reflex, (1979), 50 C.C.C. (2d) 495, 105 D.L.R. (3d) 745, [1980] 1 S.C.R. 821, where Dickson J. (as he then was) referred to the privilege existing "out of regard to the interests of justice".
In my opinion, the accused's position is not tenable. In this case the person in whose favour the privilege exists is alleged to have been killed by the very person who claims to benefit from the privilege. It is clearly in the best interests of Christine Jack, and in the "interests of justice", that the privilege be waived as it was in this case by her lawyer.
The basic rule is that the claim to privilege can only be made by the person whose privilege it is: see Wigmore on Evidence (McNaughton rev. 1961), vol. 8, p. 111, 2196:
It follows that the claim of privilege can be made solely by the person whose privilege it is. The privilege (as the common phrasing runs) is purely personal to himself. Whether he chooses to permit disclosure without objection, or whether he prefers to exercise the exemption which the law concedes to him, is a matter resting entirely between himself and the state (or the court as its representative). The party against whom the testimony is brought has no right to claim or to urge the exemption on his own behalf.
In McCormick on Evidence, 2nd ed. (1972), it is noted at p. 192 that, "the privilege is not designed to protect the fact-finding process but is intended to protect some 'outside' interest", namely, a party to legal proceedings. The privilege does not arise as a result of some undefined duty to the court. Bell v. Smith, supra, simply stands for the proposition that a court will not knowingly allow a solicitor to act in breach of a duty to a client when the information will clearly be used against the interests of the client. The underlying basis of the rule as to solicitor-client privilege is public policy favouring candour between lawyers and their clients. It is a privilege which the client alone has the power to invoke except in extraordinary circumstances such as here when the client is not available. It cannot be invoked by a party whose interest in the proceedings is manifestly contrary to that of the client.
The Supreme court of Canada in admitting communications between a deceased person and her solicitor in Geffen v. Goodman Estate 1991 CanLII 69 (S.C.C.), (1991), 81 D.L.R. (4th) 211 at p. 235, [1991] 5 W.W.R. 389, 80 Alta. L.R. (2d) 293, said per Wilson J.:
[…]
With respect to other heads of privilege, the courts have recently shown a tendency to allow evidence to be introduced in "the interests of justice" where the benefit to the administration of justice clearly outweights in importance any public interest that might be protected by upholding the claim for privilege: see, for example, Bergwitz v. Fast 1980 CanLII 392 (BC C.A.), (1980), 108 D.L.R. (3d) 732, 18 B.C.L.R. 368, 1 A.C.W.S. (2d) 180 (B.C.C.A.); Hamulka v. Golfman reflex, (1985), 20 D.L.R. (4th) 540, [1985] 5 W.W.R. 597, 35 Man. R. (2d) 189 (C.A.), and Merrill Lynch v. Granove, reflex, [1985] 5 W.W.R. 589, 35 Man. R. (2d) 194, 33 A.C.W.S. (2d) 18 (C.A.) this is exactly what was done, albeit in the interests of the accused, in Dunbar and Logan, supra, relied on by the trial judge.
I have no difficulty in concluding in the circumstances of this case that if the evidence of the lawyer strayed into communications of a confidential nature, it was in the interests of both the client, Christine Jack, and the administration of justice that the communications in question be admitted in evidence. »
[24] De plus, l'article 37 du Code de déontologie des notaires mentionne que le notaire ne doit pas, à moins que la nature du cas ne l'exige, révéler qu'une personne a fait appel à ses services.
[25] Le Tribunal considère que la nature du cas est précisément de celle qui exige la levée du privilège. En effet, le privilège ne saurait être invoqué par une personne dont on a des motifs raisonnables et probables de croire qu'elle a attenté aux jours du testateur. D'ailleurs, l'article 620 du C.c.Q. édicte qu'est indigne de succéder celui qui est déclaré coupable d'avoir attenté à la vie du défunt.
[26] Il en va donc de l'intérêt public. La société ne saurait accepter qu'une personne, dans une telle situation, puisse se retrancher derrière le privilège notarial.
[27] L'exception testamentaire prend tout son sens dans la présente affaire. L'intention du testateur est au cœur du présent litige.
[28] De plus, le notaire n'a pas contrevenu au privilège en dévoilant l'existence d'un projet de testament à l'enquêteur, puisque la nature même de cette information constituait une exception.
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vendredi 14 janvier 2011
Chaque élément de preuve n'a pas à être nécessairement prouvé hors de tout doute raisonnable dans le cadre d'une preuve circonstancielle
Gagnon c. R., 2011 QCCS 19 (CanLII)
[49] Comme le soulignait le juge Doyon dans la cause de Corneau c. R., relativement à la nature de la preuve circonstancielle :
« [71] Bien sûr, chaque élément de preuve n'a pas à être nécessairement prouvé hors de tout doute raisonnable. Il va de soi également que chacun de ces éléments de preuve ne peut démontrer, isolément, la culpabilité de l'appelant. C'est uniquement la preuve, considérée dans son ensemble, qui doit satisfaire à ce critère. »
[50] Dans R. c. Neveu, la Cour rappelait que le juge peut conclure que la poursuite s'est déchargée de son fardeau lorsque la preuve circonstancielle constitue la seule inférence ou déduction logique qui peut-être tiré des faits prouvés : R. c. Cooper.
[51] Lorsque la preuve circonstancielle offre une autre hypothèse logique ou raisonnable que celle de la culpabilité, le juge doit conclure que la poursuite n'a pas rempli son fardeau (R. c. Khan). Tel n'est pas le cas dans la présente affaire.
[49] Comme le soulignait le juge Doyon dans la cause de Corneau c. R., relativement à la nature de la preuve circonstancielle :
« [71] Bien sûr, chaque élément de preuve n'a pas à être nécessairement prouvé hors de tout doute raisonnable. Il va de soi également que chacun de ces éléments de preuve ne peut démontrer, isolément, la culpabilité de l'appelant. C'est uniquement la preuve, considérée dans son ensemble, qui doit satisfaire à ce critère. »
[50] Dans R. c. Neveu, la Cour rappelait que le juge peut conclure que la poursuite s'est déchargée de son fardeau lorsque la preuve circonstancielle constitue la seule inférence ou déduction logique qui peut-être tiré des faits prouvés : R. c. Cooper.
[51] Lorsque la preuve circonstancielle offre une autre hypothèse logique ou raisonnable que celle de la culpabilité, le juge doit conclure que la poursuite n'a pas rempli son fardeau (R. c. Khan). Tel n'est pas le cas dans la présente affaire.
jeudi 13 janvier 2011
Ce que constitue un centre communautaire au sens de l'article 161 C.cr
R. c. Lévesque, 2010 QCCQ 9121 (CanLII)
[28] L'accusé est un employé de la Station plein air St-Pacôme où se déroulent, durant l'hiver, des sports de glisse et, durant l'été, une activité d'hébertisme. Cet endroit peut-il être considéré comme un centre communautaire tel que l'énonce l'article 161 C.cr. ?
[29] Lors des délibérations entourant la promulgation de l'article 161 C.Cr., les membres du sénat ont questionné l'utilisation du terme « centre communautaire », et ils ont souligné les difficultés d'interprétation pouvant survenir.
[30] Le 23 juin 1993, le législateur fédéral a procédé à l'abrogation de l'article 811, et il l'a remplacé par l'article 810.1 dans le but de protéger la sécurité de personnes âgées de moins de 16 ans de tout abus à caractère sexuel. Pour atteindre cet objectif, il a permis à quiconque craignant que ne soit commise une telle infraction de déposer une dénonciation afin qu'il soit imposé à la personne visée un engagement de ne pas fréquenter certains endroits, soit les mêmes lieux que ceux prévus à l'actuel article 161 C.cr.
[31] Le 19 janvier 2000, la Cour d'appel de l'Ontario a déclaré que l'expression «centre communautaire » énoncé à cet article 810.1 C.cr. avait une portée excessive, et il a déclaré ce terme inopérant. Le 3 mai 2001, la Cour suprême du Canada a refusé d'entendre l'appel. Huit ans plus tard, le Parlement fédéral a finalement modifié l'alinéa 3 de l'article 810.1, et il a retiré ce terme.
[32] Puisque les articles 161 et 810.1 visent les mêmes objectifs, l'expression «centre communautaire » devrait donc être analysée de la même façon que l'a fait la Cour d'appel de l'Ontario dans l'arrêt Budreo qui traite de l'article 810.1 C.cr.
[34] Le terme « centre communautaire » n'est pas défini au Code criminel. Tel que le précise la Cour suprême du Canada dans R. c. Clark, 2005 CSC 2 (CanLII), [2005] 1 R.C.S. 6, par. 43:
« (…) il faut lire les termes d'une loi dans leur contexte global en suivant le sens ordinaire et grammatical qui s'harmonise avec l'esprit de la loi, l'objet de la loi et l'intention du législateur. »
[35] Selon le Petit Robert, le mot « centre » est défini comme un lieu où diverses activités sont groupées, et le mot « communautaire » comme se rapportant à la communauté. Ce dernier nom désignant un groupe social dont les membres vivent ensemble, ou ont des biens, des intérêts communs.
[36] Le Petit Larousse définit, de son côté, le mot « centre » comme le lieu où sont regroupées, pour une fin commune, des personnes, des activités alors que le mot «communauté» est défini soit comme un groupe de personnes vivant ensemble et poursuivant des buts communs ou comme un groupe social ayant des caractères, des intérêts communs.
[37] Ces définitions de mots prises isolément ne permettent pas de bien saisir le sens qu'il faut donner au terme « centre communautaire. » Toutefois, le Multidictionnaire de la langue française précise que le nom « centre » entre dans la composition de plusieurs dénominations et que son emploi doit être limité aux entreprises, aux organismes qui font véritablement un regroupement, une centralisation de services, d'activités.
[38] Finalement, les nuages se dissipent sur le sens "ordinaire et grammatical" du terme « centre communautaire » lorsque l'on se réfère au Grand dictionnaire terminologique de l'Office de la langue française qui en donne la définition suivante :
« Lieu servant de point de ralliement à une collectivité ou à une communauté dans le but d'exercer des activités récréatives, culturelles, sociales ou humanitaires. Note : Le centre communautaire se distingue du centre de loisirs du fait qu'il s'y déroule des activités d'ordre social et qu'il sert de lieu de rencontre à une collectivité ou à une communauté. »
[39] À la lumière de ces définitions, il ressort que la Station de plein air St-Pacôme n'est pas un centre communautaire puisqu'il ne s'y déroule que des activités sportives. Aucune preuve n'a été soumise démontrant qu'il s'y pratique des activités d'une autre nature. Il s'agit donc d'un centre de loisirs.
[28] L'accusé est un employé de la Station plein air St-Pacôme où se déroulent, durant l'hiver, des sports de glisse et, durant l'été, une activité d'hébertisme. Cet endroit peut-il être considéré comme un centre communautaire tel que l'énonce l'article 161 C.cr. ?
[29] Lors des délibérations entourant la promulgation de l'article 161 C.Cr., les membres du sénat ont questionné l'utilisation du terme « centre communautaire », et ils ont souligné les difficultés d'interprétation pouvant survenir.
[30] Le 23 juin 1993, le législateur fédéral a procédé à l'abrogation de l'article 811, et il l'a remplacé par l'article 810.1 dans le but de protéger la sécurité de personnes âgées de moins de 16 ans de tout abus à caractère sexuel. Pour atteindre cet objectif, il a permis à quiconque craignant que ne soit commise une telle infraction de déposer une dénonciation afin qu'il soit imposé à la personne visée un engagement de ne pas fréquenter certains endroits, soit les mêmes lieux que ceux prévus à l'actuel article 161 C.cr.
[31] Le 19 janvier 2000, la Cour d'appel de l'Ontario a déclaré que l'expression «centre communautaire » énoncé à cet article 810.1 C.cr. avait une portée excessive, et il a déclaré ce terme inopérant. Le 3 mai 2001, la Cour suprême du Canada a refusé d'entendre l'appel. Huit ans plus tard, le Parlement fédéral a finalement modifié l'alinéa 3 de l'article 810.1, et il a retiré ce terme.
[32] Puisque les articles 161 et 810.1 visent les mêmes objectifs, l'expression «centre communautaire » devrait donc être analysée de la même façon que l'a fait la Cour d'appel de l'Ontario dans l'arrêt Budreo qui traite de l'article 810.1 C.cr.
[34] Le terme « centre communautaire » n'est pas défini au Code criminel. Tel que le précise la Cour suprême du Canada dans R. c. Clark, 2005 CSC 2 (CanLII), [2005] 1 R.C.S. 6, par. 43:
« (…) il faut lire les termes d'une loi dans leur contexte global en suivant le sens ordinaire et grammatical qui s'harmonise avec l'esprit de la loi, l'objet de la loi et l'intention du législateur. »
[35] Selon le Petit Robert, le mot « centre » est défini comme un lieu où diverses activités sont groupées, et le mot « communautaire » comme se rapportant à la communauté. Ce dernier nom désignant un groupe social dont les membres vivent ensemble, ou ont des biens, des intérêts communs.
[36] Le Petit Larousse définit, de son côté, le mot « centre » comme le lieu où sont regroupées, pour une fin commune, des personnes, des activités alors que le mot «communauté» est défini soit comme un groupe de personnes vivant ensemble et poursuivant des buts communs ou comme un groupe social ayant des caractères, des intérêts communs.
[37] Ces définitions de mots prises isolément ne permettent pas de bien saisir le sens qu'il faut donner au terme « centre communautaire. » Toutefois, le Multidictionnaire de la langue française précise que le nom « centre » entre dans la composition de plusieurs dénominations et que son emploi doit être limité aux entreprises, aux organismes qui font véritablement un regroupement, une centralisation de services, d'activités.
[38] Finalement, les nuages se dissipent sur le sens "ordinaire et grammatical" du terme « centre communautaire » lorsque l'on se réfère au Grand dictionnaire terminologique de l'Office de la langue française qui en donne la définition suivante :
« Lieu servant de point de ralliement à une collectivité ou à une communauté dans le but d'exercer des activités récréatives, culturelles, sociales ou humanitaires. Note : Le centre communautaire se distingue du centre de loisirs du fait qu'il s'y déroule des activités d'ordre social et qu'il sert de lieu de rencontre à une collectivité ou à une communauté. »
[39] À la lumière de ces définitions, il ressort que la Station de plein air St-Pacôme n'est pas un centre communautaire puisqu'il ne s'y déroule que des activités sportives. Aucune preuve n'a été soumise démontrant qu'il s'y pratique des activités d'une autre nature. Il s'agit donc d'un centre de loisirs.
Un accident, pris isolement et en l'absence de tout autre élément de preuve, ne donne pas en soi les motifs raisonnables de croire à la commission de l'infraction prévue à l’article 253
R. c. Leblanc , 2007 QCCS 4320 (CanLII)
[11] Il va sans dire que l'accident pris isolement et en l'absence de tout autre élément de preuve portant sur la consommation d'alcool ne donne pas en soi les motifs raisonnables et probables de croire que la personne impliquée est en contravention de l’article 253 du Code criminel. Cependant avec les autres constatations faites par l'agent Globensky, notamment l'odeur de l’alcool provenant de l'intimé (confirmation des renseignements fournis préalablement par un citoyen), la confusion concernant les enregistrements, et enfin une démarche hésitante, donne à l'accident une dimension beaucoup plus importante par rapport à la question de cause raisonnable et probable.
[12] Un accident survenu dans des telles circonstances soulève, par exemple, des questions portant directement sur la capacité d'observation de la part de l'intimé et en plus, sur la capacité de ce dernier à réagir en temps utiles. Il est de connaissance judiciaire que la consommation d'alcool est susceptible d'affecter ces facteurs parmi d’autres. Je partage entièrement les commentaires du procureur de l'appelante aux pages 12 et suivantes de son mémoire à ce sujet. Je note, également, que la décision de la Cour d'Appel d'Alberta dans R c Rhyasson, 2006 ABCA 367 (CanLII), (2006) 214 C.C.C. (3d) 337, a été confirmée par une majorité de la Cour Suprême du Canada le 27 juillet dernier 2007 SCC 39 (CanLII), (2007 SCC 39).
[11] Il va sans dire que l'accident pris isolement et en l'absence de tout autre élément de preuve portant sur la consommation d'alcool ne donne pas en soi les motifs raisonnables et probables de croire que la personne impliquée est en contravention de l’article 253 du Code criminel. Cependant avec les autres constatations faites par l'agent Globensky, notamment l'odeur de l’alcool provenant de l'intimé (confirmation des renseignements fournis préalablement par un citoyen), la confusion concernant les enregistrements, et enfin une démarche hésitante, donne à l'accident une dimension beaucoup plus importante par rapport à la question de cause raisonnable et probable.
[12] Un accident survenu dans des telles circonstances soulève, par exemple, des questions portant directement sur la capacité d'observation de la part de l'intimé et en plus, sur la capacité de ce dernier à réagir en temps utiles. Il est de connaissance judiciaire que la consommation d'alcool est susceptible d'affecter ces facteurs parmi d’autres. Je partage entièrement les commentaires du procureur de l'appelante aux pages 12 et suivantes de son mémoire à ce sujet. Je note, également, que la décision de la Cour d'Appel d'Alberta dans R c Rhyasson, 2006 ABCA 367 (CanLII), (2006) 214 C.C.C. (3d) 337, a été confirmée par une majorité de la Cour Suprême du Canada le 27 juillet dernier 2007 SCC 39 (CanLII), (2007 SCC 39).
Les circonstances d'un accident, combinés à d'autres facteurs, peuvent fournir des motifs raisonnables de croire à la commission de l'infraction de conduite avec les facultés affaiblies
R. c. Rhyason, 2007 CSC 39, [2007] 3 R.C.S. 108
12 Comme la Cour l’a expliqué dans R. c. Bernshaw, 1995 CanLII 150 (C.S.C.), [1995] 1 R.C.S. 254, le critère applicable en matière de motifs raisonnables comporte à la fois une composante subjective et une composante objective :
[E]n vertu du par. 254(3) du Code, le policier doit subjectivement croire sincèrement que le suspect a commis l’infraction et, objectivement, cette croyance doit être fondée sur des motifs raisonnables . . .
. . .
C’est en fonction des circonstances de chaque cas qu’il faut décider si un agent de la paix a des motifs raisonnables de croire qu’une personne est en train de commettre une infraction, le justifiant d’ordonner un alcootest en vertu du par. 254(3) du Code criminel, L.R.C. (1985), ch. C‑46. En conséquence, il s’agit essentiellement d’une question de fait et non de droit seulement. [par. 46]
17 Comme l’a signalé la juge McFadyen, aucune des décisions sur lesquelles le juge du procès s’est appuyé n’indiquait que la preuve de l’absorption d’alcool suffisait à elle seule pour établir l’existence de motifs raisonnables. Le juge du procès a lui‑même fait remarquer que la « combinaison de faits », et non la preuve de la simple consommation d’alcool, avait fourni les motifs raisonnables, comme l’indique l’extrait suivant de ses motifs :
[traduction] [I]l est clair que M. Stevens n’a pas arrêté arbitrairement l’accusé. Au contraire, lorsqu’il a décidé de l’arrêter, M. Stevens avait une conscience subjective d’une combinaison de faits objectifs (piéton décédé sur le lieu de l’accident, l’haleine de la personne qui admet être le conducteur dégage une odeur d’alcool, ainsi que d’autres éléments de preuve de moindre importance compatibles avec la thèse que le conducteur avait consommé de l’alcool) qui, ensemble, signalent raisonnablement l’infraction de conduite avec facultés affaiblies causant la mort.
Il a aussi fait remarquer que des signes de consommation d’alcool [traduction] « suffisent à contribuer à établir l’existence de motifs raisonnables » seulement (par. 24 M.V.R. (je souligne)), et non à établir leur existence.
18 Les deux paragraphes suivant immédiatement les deux phrases contestées sont également pertinents. Le juge du procès a estimé que l’accident était important, faisant remarquer que [traduction] « [s]i l’agent Stevens avait simplement décelé des signes de consommation d’alcool en l’absence d’un accident, on aurait pu valablement affirmer que la preuve de l’absorption d’alcool ne constitue pas en soi une preuve de capacité affaiblie » (par. 25 M.V.R.). Comme l’a fait observer le juge du procès, une jurisprudence abondante confirme que les circonstances d’un accident peuvent être prises en considération, avec d’autres éléments de preuve, pour déterminer si un policier avait des motifs raisonnables d’arrêter une personne pour conduite avec facultés affaiblies. (références omises)
19 Cela ne veut pas dire que la consommation d’alcool conjuguée à un accident inexpliqué fournissent toujours des motifs raisonnables ou, à l’inverse, qu’ils ne le font jamais. L’important, c’est que la décision relative à l’existence de motifs raisonnables doit se fonder sur les faits et reste fonction des circonstances. En l’espèce, la présence d’un accident inexpliqué constituait un facteur que le juge du procès a eu raison de prendre en compte pour statuer sur l’existence de tels motifs.
20 À maintes reprises dans ses motifs, le juge du procès a signalé qu’il ne se fondait pas uniquement sur la preuve de la consommation d’alcool pour conclure que le policier ayant procédé à l’arrestation avait des motifs raisonnables d’exiger un échantillon d’haleine. L’ensemble des motifs démontre que le critère approprié a été appliqué.
12 Comme la Cour l’a expliqué dans R. c. Bernshaw, 1995 CanLII 150 (C.S.C.), [1995] 1 R.C.S. 254, le critère applicable en matière de motifs raisonnables comporte à la fois une composante subjective et une composante objective :
[E]n vertu du par. 254(3) du Code, le policier doit subjectivement croire sincèrement que le suspect a commis l’infraction et, objectivement, cette croyance doit être fondée sur des motifs raisonnables . . .
. . .
C’est en fonction des circonstances de chaque cas qu’il faut décider si un agent de la paix a des motifs raisonnables de croire qu’une personne est en train de commettre une infraction, le justifiant d’ordonner un alcootest en vertu du par. 254(3) du Code criminel, L.R.C. (1985), ch. C‑46. En conséquence, il s’agit essentiellement d’une question de fait et non de droit seulement. [par. 46]
17 Comme l’a signalé la juge McFadyen, aucune des décisions sur lesquelles le juge du procès s’est appuyé n’indiquait que la preuve de l’absorption d’alcool suffisait à elle seule pour établir l’existence de motifs raisonnables. Le juge du procès a lui‑même fait remarquer que la « combinaison de faits », et non la preuve de la simple consommation d’alcool, avait fourni les motifs raisonnables, comme l’indique l’extrait suivant de ses motifs :
[traduction] [I]l est clair que M. Stevens n’a pas arrêté arbitrairement l’accusé. Au contraire, lorsqu’il a décidé de l’arrêter, M. Stevens avait une conscience subjective d’une combinaison de faits objectifs (piéton décédé sur le lieu de l’accident, l’haleine de la personne qui admet être le conducteur dégage une odeur d’alcool, ainsi que d’autres éléments de preuve de moindre importance compatibles avec la thèse que le conducteur avait consommé de l’alcool) qui, ensemble, signalent raisonnablement l’infraction de conduite avec facultés affaiblies causant la mort.
Il a aussi fait remarquer que des signes de consommation d’alcool [traduction] « suffisent à contribuer à établir l’existence de motifs raisonnables » seulement (par. 24 M.V.R. (je souligne)), et non à établir leur existence.
18 Les deux paragraphes suivant immédiatement les deux phrases contestées sont également pertinents. Le juge du procès a estimé que l’accident était important, faisant remarquer que [traduction] « [s]i l’agent Stevens avait simplement décelé des signes de consommation d’alcool en l’absence d’un accident, on aurait pu valablement affirmer que la preuve de l’absorption d’alcool ne constitue pas en soi une preuve de capacité affaiblie » (par. 25 M.V.R.). Comme l’a fait observer le juge du procès, une jurisprudence abondante confirme que les circonstances d’un accident peuvent être prises en considération, avec d’autres éléments de preuve, pour déterminer si un policier avait des motifs raisonnables d’arrêter une personne pour conduite avec facultés affaiblies. (références omises)
19 Cela ne veut pas dire que la consommation d’alcool conjuguée à un accident inexpliqué fournissent toujours des motifs raisonnables ou, à l’inverse, qu’ils ne le font jamais. L’important, c’est que la décision relative à l’existence de motifs raisonnables doit se fonder sur les faits et reste fonction des circonstances. En l’espèce, la présence d’un accident inexpliqué constituait un facteur que le juge du procès a eu raison de prendre en compte pour statuer sur l’existence de tels motifs.
20 À maintes reprises dans ses motifs, le juge du procès a signalé qu’il ne se fondait pas uniquement sur la preuve de la consommation d’alcool pour conclure que le policier ayant procédé à l’arrestation avait des motifs raisonnables d’exiger un échantillon d’haleine. L’ensemble des motifs démontre que le critère approprié a été appliqué.
mardi 11 janvier 2011
Les danses contacts : divertissement ou acte de prostitution?
Nous reproduisons une partie d'un article signé par Me Dominique Loslier, concernant le statut juridique des danses contacts
[6] Invoquant les erreurs de droit commises par les instances précédentes, les accusés ont demandé la tenue d'un nouveau procès. Les juges majoritaires de la Cour d’appel ont confirmé les déclarations de culpabilité, concluant que ces «danses à 10\$» étaient des actes de prostitution. Il s'agissait de déterminer si la définition jurisprudentielle de la prostitution devait être modifiée pour tenir compte de l'approche évolutive adoptée par la Cour suprême eu égard au concept d'«indécence» dans le contexte de la définition d'une maison de débauche prévue à l'article 197 (1) C.Cr. À cet égard, les accusés ont prétendu que, puisque les notions de «prostitution» et d'«indécence» se trouvaient dans la même définition de «maison de débauche», il était approprié qu'elles soient traitées de la même manière. Or, le juge Hilton, écrivant pour la majorité, a décidé que cet argument faisait fi du contexte dans lequel ces deux expressions sont utilisées à l'article 197 (1) C.Cr. Pour le juge, il est manifeste que ces deux concepts visent deux situations de fait différentes, l’article 197 (1) C.Cr. faisant référence à un local fréquenté par des personnes soit «à des fins de prostitution», soit «pour la pratique d’actes indécents». Il ajoute qu’il n’est pas nécessaire que l’acte commis soit indécent pour qu’il s’agisse de prostitution.
Le juge a rappelé à cet égard que, dans R. c. Tremblay, la Cour suprême avait infirmé une décision de la Cour d’appel qui avait accueilli un amendement visant à substituer l’expression «la pratique d’actes indécents» à «la pratique de la prostitution» dans un acte d’accusation en vertu de l’article 210 (2) b) C.Cr., reconnaissant ainsi la distinction entre ces deux notions. Dans le Renvoi relatif à l'art. 193 et à l'al. 195.1 (1) c) du Code criminel (Man.), la Cour suprême du Canada précise que, bien que la prostitution ne soit pas un crime au Canada, le législateur a choisi de s'y attaquer indirectement par l'inclusion de certaines dispositions du Code criminel, telles les infractions prévues aux articles 211, 212 et 213 C.Cr. Or, de dire le juge Hilton, il est difficile de concevoir que ces infractions soient prouvées en appliquant les principes établis en matière de pratique d'actes indécents. Il retient que le législateur a un intérêt légitime à criminaliser certaines activités liées à la prostitution, sans qu'il soit nécessaire que l'activité sexuelle qui y a donné lieu résulte d'un acte indécent. À cet égard, il cite l'affaire R. c. Jean-Pierre, de la Cour du Québec, qui a reconnu l’accusé coupable d’avoir entraîné des mineures à se livrer à la prostitution et d’avoir vécu de ses fruits. La conduite de l’accusé avait mené ces victimes à exécuter des danses contacts. Pour le juge, retenir la position des accusés entraînerait alors la situation insensée de ne pas pouvoir, dans un cas comme celui de l’affaire Jean-Pierre, poursuivre sous l’article 212 (1) b) ou 212 (2) C.Cr. Le juge Hilton a également rappelé l’affaire Therrien c. R., où la Cour d’appel a conclu qu'il n'était pas important que l'acte reproché soit indécent, dans la mesure où il aboutissait à de la prostitution.
C’est à la lumière de cette jurisprudence, et en particulier en raison de la distinction qui existe entre la prostitution et l'indécence ainsi que l'a établiR. c. Tremblay, que le tribunal a conclu, à l’instar des tribunaux inférieurs saisis de ce dossier, que l'approche pour définir l'indécence adoptée par la Cour suprême dans Labaye et dans R. c. Kouri n'est pas pertinente afin de déterminer ce qui constitue un acte de prostitution pour l'application de l'article 210 (2) b) C.Cr. Ainsi, la prostitution n'est pas une notion subjective qui évolue selon les standards de la société, mais bien une notion objective.
Tiré de :
http://soquij.qc.ca/fr/ressources-pour-tous/articles/les-danses-contacts-divertissement-ou-acte-de-prostitution
[6] Invoquant les erreurs de droit commises par les instances précédentes, les accusés ont demandé la tenue d'un nouveau procès. Les juges majoritaires de la Cour d’appel ont confirmé les déclarations de culpabilité, concluant que ces «danses à 10\$» étaient des actes de prostitution. Il s'agissait de déterminer si la définition jurisprudentielle de la prostitution devait être modifiée pour tenir compte de l'approche évolutive adoptée par la Cour suprême eu égard au concept d'«indécence» dans le contexte de la définition d'une maison de débauche prévue à l'article 197 (1) C.Cr. À cet égard, les accusés ont prétendu que, puisque les notions de «prostitution» et d'«indécence» se trouvaient dans la même définition de «maison de débauche», il était approprié qu'elles soient traitées de la même manière. Or, le juge Hilton, écrivant pour la majorité, a décidé que cet argument faisait fi du contexte dans lequel ces deux expressions sont utilisées à l'article 197 (1) C.Cr. Pour le juge, il est manifeste que ces deux concepts visent deux situations de fait différentes, l’article 197 (1) C.Cr. faisant référence à un local fréquenté par des personnes soit «à des fins de prostitution», soit «pour la pratique d’actes indécents». Il ajoute qu’il n’est pas nécessaire que l’acte commis soit indécent pour qu’il s’agisse de prostitution.
Le juge a rappelé à cet égard que, dans R. c. Tremblay, la Cour suprême avait infirmé une décision de la Cour d’appel qui avait accueilli un amendement visant à substituer l’expression «la pratique d’actes indécents» à «la pratique de la prostitution» dans un acte d’accusation en vertu de l’article 210 (2) b) C.Cr., reconnaissant ainsi la distinction entre ces deux notions. Dans le Renvoi relatif à l'art. 193 et à l'al. 195.1 (1) c) du Code criminel (Man.), la Cour suprême du Canada précise que, bien que la prostitution ne soit pas un crime au Canada, le législateur a choisi de s'y attaquer indirectement par l'inclusion de certaines dispositions du Code criminel, telles les infractions prévues aux articles 211, 212 et 213 C.Cr. Or, de dire le juge Hilton, il est difficile de concevoir que ces infractions soient prouvées en appliquant les principes établis en matière de pratique d'actes indécents. Il retient que le législateur a un intérêt légitime à criminaliser certaines activités liées à la prostitution, sans qu'il soit nécessaire que l'activité sexuelle qui y a donné lieu résulte d'un acte indécent. À cet égard, il cite l'affaire R. c. Jean-Pierre, de la Cour du Québec, qui a reconnu l’accusé coupable d’avoir entraîné des mineures à se livrer à la prostitution et d’avoir vécu de ses fruits. La conduite de l’accusé avait mené ces victimes à exécuter des danses contacts. Pour le juge, retenir la position des accusés entraînerait alors la situation insensée de ne pas pouvoir, dans un cas comme celui de l’affaire Jean-Pierre, poursuivre sous l’article 212 (1) b) ou 212 (2) C.Cr. Le juge Hilton a également rappelé l’affaire Therrien c. R., où la Cour d’appel a conclu qu'il n'était pas important que l'acte reproché soit indécent, dans la mesure où il aboutissait à de la prostitution.
C’est à la lumière de cette jurisprudence, et en particulier en raison de la distinction qui existe entre la prostitution et l'indécence ainsi que l'a établiR. c. Tremblay, que le tribunal a conclu, à l’instar des tribunaux inférieurs saisis de ce dossier, que l'approche pour définir l'indécence adoptée par la Cour suprême dans Labaye et dans R. c. Kouri n'est pas pertinente afin de déterminer ce qui constitue un acte de prostitution pour l'application de l'article 210 (2) b) C.Cr. Ainsi, la prostitution n'est pas une notion subjective qui évolue selon les standards de la société, mais bien une notion objective.
Tiré de :
http://soquij.qc.ca/fr/ressources-pour-tous/articles/les-danses-contacts-divertissement-ou-acte-de-prostitution
Les trois éléments de la légitime défense sous l'autorité du paragraphe 34(2) C.cr
Dubois c. R., 2010 QCCA 835 (CanLII)
[4] Il est acquis au débat que la défense dont il s'agit comporte trois éléments constitutifs :
1. l'existence d'une attaque illégale;
2. l'appréhension raisonnable d'un danger de mort ou de lésion corporelle grave;
3. la croyance raisonnable qu'on ne peut s'en sortir autrement qu'en tuant l'adversaire.
[5] Chacun de ces éléments constitutifs est soumis au critère de la vraisemblance subjective d'une part et objective d'autre part. On entend ce qui suit par test de vraisemblance :
The term "air of reality" simply means that the trial judge must determine if the evidence put forward is such that, if believed, a reasonable jury properly charged could have acquitted.
[6] Ce test n'impose à l'accusé qu'une charge de présentation et non une charge de persuasion. Toutefois, la démarche doit connaître un succès total. L’arrêt Charbonneau de notre cour enseigne:
85 La défense de légitime défense ne pourra être retenue que si, et seulement si, ces trois éléments existent. Le critère du fondement probant ou de la vraisemblance doit donc s'appliquer à chacun d'eux. Si l'un ou l'autre de ces éléments n'est pas vraisemblable ou ne repose pas sur un fondement probant, la légitime défense n'a pas à être soumise à l'appréciation du jury. L'erreur du juge serait alors sans conséquence.
[4] Il est acquis au débat que la défense dont il s'agit comporte trois éléments constitutifs :
1. l'existence d'une attaque illégale;
2. l'appréhension raisonnable d'un danger de mort ou de lésion corporelle grave;
3. la croyance raisonnable qu'on ne peut s'en sortir autrement qu'en tuant l'adversaire.
[5] Chacun de ces éléments constitutifs est soumis au critère de la vraisemblance subjective d'une part et objective d'autre part. On entend ce qui suit par test de vraisemblance :
The term "air of reality" simply means that the trial judge must determine if the evidence put forward is such that, if believed, a reasonable jury properly charged could have acquitted.
[6] Ce test n'impose à l'accusé qu'une charge de présentation et non une charge de persuasion. Toutefois, la démarche doit connaître un succès total. L’arrêt Charbonneau de notre cour enseigne:
85 La défense de légitime défense ne pourra être retenue que si, et seulement si, ces trois éléments existent. Le critère du fondement probant ou de la vraisemblance doit donc s'appliquer à chacun d'eux. Si l'un ou l'autre de ces éléments n'est pas vraisemblable ou ne repose pas sur un fondement probant, la légitime défense n'a pas à être soumise à l'appréciation du jury. L'erreur du juge serait alors sans conséquence.
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Le dédommagement à la victime doit toujours être envisagé lors de la détermination de la peine
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