R. c. Liakas, 1995 CanLII 4735 (QC CA)
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De l'étude de la jurisprudence, il faut tirer les principes suivants. L'article 11 b) de la Charte ne s'applique pas au délai pré-inculpatoire (R. c. Kalani, 1989 CanLII 63 (CSC), [1989] 1 R.C.S. 1594). Par ailleurs l'article 7 peut recevoir application mais seulement lorsqu'un préjudice réel relatif à l'équité du procès est causé à l'accusé ou dans le cas d'abus de procédure (R c. Potvin, 1993 CanLII 113 (CSC), [1993] 2 R.C.S. 880). Il faut apprécier le préjudice en fonction de ses répercussions sur l'équité du procès (R c. Keyowski, 1988 CanLII 74 (CSC), [1988] 1 R.C.S. 657, R. c. Jewitt, 1985 CanLII 47 (CSC), [1985] 2 R.C.S. 128, R. c. Young, [1984] 40 C.R. 93d) 329).
La durée du délai n'est pas en soi le facteur important mais c'est plutôt l'effet de ce délai sur l'équité du procès qui doit être pris en considération (R.C.L. (W.K.) 1991 CanLII 54 (CSC), [1991] 1 R.C.S. 1091).
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mardi 3 avril 2012
Les critères applicables à une demande d'arrêt des procédures fondée sur le caractère excessif de délais préinculpatoires
Chun c. R., 2009 QCCA 612 (CanLII)
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[50] Le premier juge aurait d'ailleurs pu ajouter un motif de droit encore plus difficile à contourner. Dans une affaire récente de Christine Lepage c. La Reine, la juge Côté résumait comme suit les critères applicables à une demande d'arrêt des procédures fondée sur le caractère excessif de délais préinculpatoires :
[17] Tout d'abord, le délai préinculpatoire, en lui-même, n'est pas suffisant pour justifier un arrêt des procédures à moins que l'accusé n'établisse un préjudice réel dû à ce délai. Le seul écoulement du temps avant l'inculpation ne peut constituer une violation des droits d'un accusé puisque cela équivaudrait à imposer une prescription à l'égard des infractions criminelles (R. c. L.(W.K.), 1991 CanLII 54 (CSC), [1991] 1 R.C.S. 1091). De plus, l'arrêt des procédures ne sera accordé que dans « les cas les plus manifestes » lorsqu'il serait impossible de remédier au préjudice causé au droit de l'accusé à une défense pleine et entière ou lorsque la continuation des procédures causerait un préjudice irréparable (R. c. O'Connor, 1995 CanLII 51 (CSC), [1995] 4 R.C.S. 411, paragr. 82 e; R. c. Gagné 1998 CanLII 12526 (QC CA), (1998), 131 C.C.C. (3d) 444 (C.A.Q.), autorisation de pourvoi refusée à la Cour suprême).
[51] Tel que déjà précisé, la requête même en arrêt des procédures ne soulève qu'un seul motif susceptible d'être relié au droit des appelants à une défense pleine et entière, c'est-à-dire le décès du dénommé Muir (paragraphe 114). Tous les autres préjudices allégués n'ont rien à voir avec l'équité du procès et ne portent essentiellement que sur les inconvénients ou atteintes à la réputation et à la bonne marche des affaires des appelants, ainsi qu'à l'angoisse et l'anxiété normales résultant du caractère inconnu de l'avenir, à la suite de la saisie d'octobre 2002.
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[50] Le premier juge aurait d'ailleurs pu ajouter un motif de droit encore plus difficile à contourner. Dans une affaire récente de Christine Lepage c. La Reine, la juge Côté résumait comme suit les critères applicables à une demande d'arrêt des procédures fondée sur le caractère excessif de délais préinculpatoires :
[17] Tout d'abord, le délai préinculpatoire, en lui-même, n'est pas suffisant pour justifier un arrêt des procédures à moins que l'accusé n'établisse un préjudice réel dû à ce délai. Le seul écoulement du temps avant l'inculpation ne peut constituer une violation des droits d'un accusé puisque cela équivaudrait à imposer une prescription à l'égard des infractions criminelles (R. c. L.(W.K.), 1991 CanLII 54 (CSC), [1991] 1 R.C.S. 1091). De plus, l'arrêt des procédures ne sera accordé que dans « les cas les plus manifestes » lorsqu'il serait impossible de remédier au préjudice causé au droit de l'accusé à une défense pleine et entière ou lorsque la continuation des procédures causerait un préjudice irréparable (R. c. O'Connor, 1995 CanLII 51 (CSC), [1995] 4 R.C.S. 411, paragr. 82 e; R. c. Gagné 1998 CanLII 12526 (QC CA), (1998), 131 C.C.C. (3d) 444 (C.A.Q.), autorisation de pourvoi refusée à la Cour suprême).
[51] Tel que déjà précisé, la requête même en arrêt des procédures ne soulève qu'un seul motif susceptible d'être relié au droit des appelants à une défense pleine et entière, c'est-à-dire le décès du dénommé Muir (paragraphe 114). Tous les autres préjudices allégués n'ont rien à voir avec l'équité du procès et ne portent essentiellement que sur les inconvénients ou atteintes à la réputation et à la bonne marche des affaires des appelants, ainsi qu'à l'angoisse et l'anxiété normales résultant du caractère inconnu de l'avenir, à la suite de la saisie d'octobre 2002.
lundi 2 avril 2012
L'état du droit au sujet de l’amplification
R. c. Araujo, 2000 CSC 65, [2000] 2 RCS 992
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58 Par conséquent, pour déterminer s’il existait des éléments de preuve auxquels le juge aurait pu raisonnablement ajouter foi pour accorder l’autorisation, le tribunal qui siège en révision doit faire abstraction des renseignements inexacts. Cependant, lorsque la police a commis une erreur de bonne foi, on peut avoir recours à l’amplification pour rétablir les faits.
59 En ayant recours à l’amplification, le tribunal doit établir un équilibre entre deux principes fondamentaux du droit relatif aux fouilles, perquisitions et saisies qui s’opposent particulièrement dans ce genre de situation: voir Morris, précité, aux pp. 567 et 568. En raison de cette opposition, les tribunaux ont adopté des points de vue divergents quant aux affidavits incomplets ou inexacts et à leur amplification: voir Morris, aux pp. 560 à 567; cf. R. c. Madrid (1994), 48 B.C.A.C. 271, aux pp. 285 à 290, et R. c. Harris 1987 CanLII 181 (ON CA), (1987), 35 C.C.C. (3d) 1 (C.A. Ont.), aux pp. 23 et 27 (autorisation de pourvoi refusée, [1987] 2 R.C.S. vii). Le risque inhérent à l’amplification tient à ce qu’elle peut devenir un moyen de se soustraire aux conditions de l’autorisation préalable. L’obligation d’obtenir une autorisation préalable est fondamentale à la protection du droit de chacun à la vie privée (Hunter c. Southam Inc., précité, à la p. 160), de sorte que l’amplification ne peut soustraire la police à son obligation d’établir la validité de sa thèse devant le juge saisi de la demande d’autorisation et faire ainsi un leurre de la procédure d’autorisation. Par contre, refuser toute amplification ferait passer la forme avant le fond, lorsque la police a des motifs raisonnables et probables suffisants et a démontré la nécessité pour l’enquête, mais qu’une erreur sans grande importance ou technique s’est glissée par inadvertance dans l’affidavit. Les tribunaux doivent, lorsqu’ils examinent la jurisprudence relative à l’amplification, reconnaître (de pair avec la nécessité pour l’enquête) les deux principes de l’autorisation préalable et des motifs probables, dont la vérification peut requérir un examen soigneux des renseignements dont dispose la police au moment de la demande d’écoute électronique. La démarche adoptée précédemment à l’égard des renseignements inexacts contenus dans l’affidavit présenté à l’appui d’une demande d’autorisation d’écoute électronique tend à concilier ces deux principes. Les tribunaux devraient s’en inspirer en matière d’amplification.
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58 Par conséquent, pour déterminer s’il existait des éléments de preuve auxquels le juge aurait pu raisonnablement ajouter foi pour accorder l’autorisation, le tribunal qui siège en révision doit faire abstraction des renseignements inexacts. Cependant, lorsque la police a commis une erreur de bonne foi, on peut avoir recours à l’amplification pour rétablir les faits.
59 En ayant recours à l’amplification, le tribunal doit établir un équilibre entre deux principes fondamentaux du droit relatif aux fouilles, perquisitions et saisies qui s’opposent particulièrement dans ce genre de situation: voir Morris, précité, aux pp. 567 et 568. En raison de cette opposition, les tribunaux ont adopté des points de vue divergents quant aux affidavits incomplets ou inexacts et à leur amplification: voir Morris, aux pp. 560 à 567; cf. R. c. Madrid (1994), 48 B.C.A.C. 271, aux pp. 285 à 290, et R. c. Harris 1987 CanLII 181 (ON CA), (1987), 35 C.C.C. (3d) 1 (C.A. Ont.), aux pp. 23 et 27 (autorisation de pourvoi refusée, [1987] 2 R.C.S. vii). Le risque inhérent à l’amplification tient à ce qu’elle peut devenir un moyen de se soustraire aux conditions de l’autorisation préalable. L’obligation d’obtenir une autorisation préalable est fondamentale à la protection du droit de chacun à la vie privée (Hunter c. Southam Inc., précité, à la p. 160), de sorte que l’amplification ne peut soustraire la police à son obligation d’établir la validité de sa thèse devant le juge saisi de la demande d’autorisation et faire ainsi un leurre de la procédure d’autorisation. Par contre, refuser toute amplification ferait passer la forme avant le fond, lorsque la police a des motifs raisonnables et probables suffisants et a démontré la nécessité pour l’enquête, mais qu’une erreur sans grande importance ou technique s’est glissée par inadvertance dans l’affidavit. Les tribunaux doivent, lorsqu’ils examinent la jurisprudence relative à l’amplification, reconnaître (de pair avec la nécessité pour l’enquête) les deux principes de l’autorisation préalable et des motifs probables, dont la vérification peut requérir un examen soigneux des renseignements dont dispose la police au moment de la demande d’écoute électronique. La démarche adoptée précédemment à l’égard des renseignements inexacts contenus dans l’affidavit présenté à l’appui d’une demande d’autorisation d’écoute électronique tend à concilier ces deux principes. Les tribunaux devraient s’en inspirer en matière d’amplification.
vendredi 30 mars 2012
Les éléments constitutifs de l'infraction d'enlèvement en contravention avec une ordonnance de garde
Bédard c. R., 2010 QCCA 527 (CanLII)
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[122] L'article 282(1) est de droit relativement nouveau et est rédigé ainsi :
(...)
Il s'agit, à sa face même, de ce qu'il est convenu d'appeler un crime d'intention spécifique. C'est-à-dire qu'il ne suffit pas de prouver hors de tout doute raisonnable le fait ou le geste de l'enlèvement, et la mens rea ou intention reliée à la commission de ce geste, mais de prouver en plus, hors de tout doute raisonnable, que le geste est posé avec l'intention spécifique de priver les personnes mentionnées de la possession de l'enfant. Cette disposition du Code criminel vise exclusivement l'enlèvement commis par une personne qui a la garde ou la charge légale de l'enfant, dans le cadre d'une ordonnance judiciaire.
[123] Il ne s'applique que dans la seule mesure où l'enlèvement (entraînement, retenue, réception, cachette ou hébergement) contrevient aux dispositions d'une ordonnance de garde rendue par un tribunal canadien.
[124] Je retiens donc du texte même de l'infraction décrite à l'article 282(1) qu'en l'espèce la poursuite avait le fardeau de prouver, hors de tout doute raisonnable, 1) le fait de l'enlèvement et de l'intention criminelle afférente à ce geste; 2) que ce geste contrevenait à l'ordonnance rendue par la Cour supérieure quant à la garde de l'enfant; et 3) une intention spécifique de priver le père de la possession de son enfant. Chacun des éléments est essentiel à la commission de l'infraction et chacun doit être établi de façon distincte.
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[122] L'article 282(1) est de droit relativement nouveau et est rédigé ainsi :
(...)
Il s'agit, à sa face même, de ce qu'il est convenu d'appeler un crime d'intention spécifique. C'est-à-dire qu'il ne suffit pas de prouver hors de tout doute raisonnable le fait ou le geste de l'enlèvement, et la mens rea ou intention reliée à la commission de ce geste, mais de prouver en plus, hors de tout doute raisonnable, que le geste est posé avec l'intention spécifique de priver les personnes mentionnées de la possession de l'enfant. Cette disposition du Code criminel vise exclusivement l'enlèvement commis par une personne qui a la garde ou la charge légale de l'enfant, dans le cadre d'une ordonnance judiciaire.
[123] Il ne s'applique que dans la seule mesure où l'enlèvement (entraînement, retenue, réception, cachette ou hébergement) contrevient aux dispositions d'une ordonnance de garde rendue par un tribunal canadien.
[124] Je retiens donc du texte même de l'infraction décrite à l'article 282(1) qu'en l'espèce la poursuite avait le fardeau de prouver, hors de tout doute raisonnable, 1) le fait de l'enlèvement et de l'intention criminelle afférente à ce geste; 2) que ce geste contrevenait à l'ordonnance rendue par la Cour supérieure quant à la garde de l'enfant; et 3) une intention spécifique de priver le père de la possession de son enfant. Chacun des éléments est essentiel à la commission de l'infraction et chacun doit être établi de façon distincte.
mardi 27 mars 2012
La définition de lieu public relativement à une infraction de conduite d'un véhicule à moteur
R. c. Pelletier, 2012 QCCQ 1780 (CanLII)
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[16] L'article 259 (1) C.cr. énonce que le tribunal qui déclare un contrevenant coupable d'une infraction aux articles 253, 254 ou 259 doit lui interdire de conduire un véhicule à moteur « dans une rue, sur un chemin ou une grande route ou dans tout autre lieu public ».
[17] Avant 2006, le législateur utilisait plutôt la formule « […] dans une rue, sur un chemin public, une grande route ou dans un autre endroit public […] ».
[18] Conséquemment, cette interdiction de conduire ne s'applique pas en tous lieux puisqu'elle n'inclut pas les lieux strictement privés.
[19] Lorsque le législateur a criminalisé les courses de rues, il a défini cette notion comme « une épreuve de vitesse entre les véhicules à moteur dans une rue, un chemin ou une grande route ou tout autre lieu public
».
[20] Par la même occasion, il a modifié la version française de l'article 259 C.cr. alors que la version anglaise est demeurée la même (public place).
[21] La définition des termes « lieu public » ou « endroit public » ne se retrouve ni à l'article 2 ni à la partie VIII du Code criminel. Toutefois, d'autres dispositions définissent ces notions.
[22] Dans chacune d'elles, le législateur réfère à un endroit accessible au public.
[23] En vertu de la règle d'interprétation « ejusdem generis », certains juges estiment que le terme « lieu public » doit être interprété à la lumière des mots qui le précèdent alors que d'autres sont d'avis contraire.
[24] Ainsi, monsieur le Juge Morand explique qu'il n'y a pas lieu d'appliquer cette règle lorsque le texte de loi est clair. Sur le sujet, il écrit:
« [14] Le tribunal estime, en l'espèce, que la formulation du paragraphe 259 (1) du Code est limpide et que les mots «un autre endroit public» doivent donc être interprétés selon leur sens commun. Si le législateur avait voulu limiter cette expression à «d'autres voies de circulation publique seulement», comme le propose la défense, il l'aurait exprimé aussi simplement avec des termes précis.
[15] L'expression «endroit public» signifie, au sens courant, un lieu ou une place auquel le public a accès de droit, sur invitation expresse ou implicite. L'obligation de payer un tarif d'entrée ne change pas la nature publique d'un lieu.
[16] Il me paraît que le législateur a voulu, au paragraphe 259 (1) du Code, prévoir et indiquer les endroits où l'on circule avec des véhicules à moteur, qui ne sont pas une rue, un chemin ou une grande route.»
[25] À travers le Canada, plusieurs tribunaux ont abordé cette question. À titre d'exemples, il a été décidé qu'un terrain de camping, une route située sur une réserve amérindienne et une aire de travail sur une route fermée ne sont pas soit un lieu ou un endroit public alors qu'au contraire, la toundra, un tarmac, une emprise ferroviaire, un sentier de motoneige fédéré, un lac gelé ou non et un site où se déroule une compétition de motoneiges répondent à la définition de l'un de ces termes.
[26] L'accusé soumet que lors de ce spectacle, il n'a circulé avec son véhicule à moteur que dans la zone réservée aux participants dûment inscrits et que ces endroits sont des lieux privés et non publics.
[27] Ces arguments ne résistent toutefois pas à l'analyse de l'ensemble de la preuve.
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[16] L'article 259 (1) C.cr. énonce que le tribunal qui déclare un contrevenant coupable d'une infraction aux articles 253, 254 ou 259 doit lui interdire de conduire un véhicule à moteur « dans une rue, sur un chemin ou une grande route ou dans tout autre lieu public ».
[17] Avant 2006, le législateur utilisait plutôt la formule « […] dans une rue, sur un chemin public, une grande route ou dans un autre endroit public […] ».
[18] Conséquemment, cette interdiction de conduire ne s'applique pas en tous lieux puisqu'elle n'inclut pas les lieux strictement privés.
[19] Lorsque le législateur a criminalisé les courses de rues, il a défini cette notion comme « une épreuve de vitesse entre les véhicules à moteur dans une rue, un chemin ou une grande route ou tout autre lieu public
».
[20] Par la même occasion, il a modifié la version française de l'article 259 C.cr. alors que la version anglaise est demeurée la même (public place).
[21] La définition des termes « lieu public » ou « endroit public » ne se retrouve ni à l'article 2 ni à la partie VIII du Code criminel. Toutefois, d'autres dispositions définissent ces notions.
[22] Dans chacune d'elles, le législateur réfère à un endroit accessible au public.
[23] En vertu de la règle d'interprétation « ejusdem generis », certains juges estiment que le terme « lieu public » doit être interprété à la lumière des mots qui le précèdent alors que d'autres sont d'avis contraire.
[24] Ainsi, monsieur le Juge Morand explique qu'il n'y a pas lieu d'appliquer cette règle lorsque le texte de loi est clair. Sur le sujet, il écrit:
« [14] Le tribunal estime, en l'espèce, que la formulation du paragraphe 259 (1) du Code est limpide et que les mots «un autre endroit public» doivent donc être interprétés selon leur sens commun. Si le législateur avait voulu limiter cette expression à «d'autres voies de circulation publique seulement», comme le propose la défense, il l'aurait exprimé aussi simplement avec des termes précis.
[15] L'expression «endroit public» signifie, au sens courant, un lieu ou une place auquel le public a accès de droit, sur invitation expresse ou implicite. L'obligation de payer un tarif d'entrée ne change pas la nature publique d'un lieu.
[16] Il me paraît que le législateur a voulu, au paragraphe 259 (1) du Code, prévoir et indiquer les endroits où l'on circule avec des véhicules à moteur, qui ne sont pas une rue, un chemin ou une grande route.»
[25] À travers le Canada, plusieurs tribunaux ont abordé cette question. À titre d'exemples, il a été décidé qu'un terrain de camping, une route située sur une réserve amérindienne et une aire de travail sur une route fermée ne sont pas soit un lieu ou un endroit public alors qu'au contraire, la toundra, un tarmac, une emprise ferroviaire, un sentier de motoneige fédéré, un lac gelé ou non et un site où se déroule une compétition de motoneiges répondent à la définition de l'un de ces termes.
[26] L'accusé soumet que lors de ce spectacle, il n'a circulé avec son véhicule à moteur que dans la zone réservée aux participants dûment inscrits et que ces endroits sont des lieux privés et non publics.
[27] Ces arguments ne résistent toutefois pas à l'analyse de l'ensemble de la preuve.
jeudi 22 mars 2012
L'analyse et l'application du critère de fiabilité relativement à la notion de ouï-dire
R. c. Moussali, 2012 QCCS 849 (CanLII)
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[22] Une déclaration extrajudiciaire constitue du ouï-dire si elle est présentée pour établir la véracité de son contenu et s’il y a impossibilité de contre-interroger le déclarant au moment précis où il fait cette déclaration. Or, une preuve par ouï-dire est présumée inadmissible. Effectivement, la règle du ouï-dire est par nature une règle d’exclusion générale. Il y a toutefois certaines exceptions traditionnelles de common law à cette règle.
[23] Par ailleurs, c'est dans l'arrêt Khan que la Cour suprême a adopté une exception de principe à la règle interdisant la preuve par ouï-dire. Est donc admissible une telle preuve lorsque sa production est nécessaire et qu’elle est fiable. Ainsi, avant d’admettre une déclaration relatée en vertu de l’exception raisonnée à la règle du ouï-dire, le juge du procès doit tenir un voir-dire dans lequel il doit décider si les critères de nécessité et de fiabilité ont été établis. La partie qui cherche à présenter cette preuve doit établir ces critères selon la prépondérance des probabilités.
[24] Dans le présent cas, la juge d'instance a conclu que le critère de nécessité avait été démontré. Il restait donc le débat sur le critère de fiabilité à faire. En effet, une preuve par ouï-dire ne sera pas déclarée admissible si l’on ne peut pas vérifier sa fiabilité. Cela étant et comme la juge l'affirme " il s’ensuit que, selon la méthode d’analyse raisonnée, l’exigence de fiabilité vise à déterminer les cas où cette difficulté est suffisamment surmontée pour justifier l’admission de la preuve à titre d’exception à la règle d’exclusion générale."
[25] En ce qui concerne la fiabilité, il y a deux manières de satisfaire l'exigence de ce critère. Les auteurs Béliveau et Vauclair mentionnent à ce sujet que:
" on peut envisager la fiabilité de deux manières distinctes, de façon intrinsèque ou extrinsèque. La fiabilité intrinsèque, que la Cour suprême a désignée comme offrant des garanties circonstancielles, est celle qui découle des circonstances de l’espèce. Dans un tel cas, " il n’y a pas de préoccupation réelle quant au caractère véridique ou non de la déclaration, vu les circonstances dans lesquelles elle a été faite ". La fiabilité extrinsèque est celle qui découle des garanties procédurales attachées à la prise de la déclaration. Dans un tel cas, " le seuil de fiabilité repose essentiellement sur l’existence de substituts adéquats aux garanties traditionnelles invoquées pour vérifier la preuve".
[27] Pour déterminer si cette preuve rencontre le critère de fiabilité ou si elle offre suffisamment de garanties circonstancielles de fiabilité, il faut analyser, selon la jurisprudence, les circonstances dans lesquelles les notes ont été écrites.
[28] Or, bien que ces notes aient été rédigées par un agent dans la paix, dans l’exercice de ses fonctions, en utilisant une méthode de rédaction télégraphique, et qu’il ne possédait aucune raison de mentir lorsqu’il a mis sur papier ses observations, cette preuve ne comporte pas suffisamment d’indices de fiabilité et ne peut donc, ni être déposée par l’agent Davidson ni être corroborée par ce dernier.
[29] En effet, l’agent Davidson n’était pas dans le même véhicule que l’agent Graveley lorsque celui-ci écrivait ses notes et, ne pourrait donc pas fournir les explications nécessaires. Davidson n’étant pas aux côtés de Graveley, il n’a pas pu constater, par lui-même, les observations faites par son collègue. Par conséquent, seul Graveley pourrait expliquer ses propres notes car celles-ci sont en apparence incomplètes (blancs, interrogations, absence de réponses).
[30] Ainsi, les notes manuscrites de Graveley ne sont pas assez fiables pour qu'on puisse écarter le danger inhérent à la difficulté de les vérifier. De plus, les circonstances entourant leur prise ne confèrent pas suffisamment de crédibilité permettant de conclure que le seuil de fiabilité a été atteint. Une telle preuve ne peut donc être déclarée admissible et ces deux moyens d'appel doivent par conséquent échouer.
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[22] Une déclaration extrajudiciaire constitue du ouï-dire si elle est présentée pour établir la véracité de son contenu et s’il y a impossibilité de contre-interroger le déclarant au moment précis où il fait cette déclaration. Or, une preuve par ouï-dire est présumée inadmissible. Effectivement, la règle du ouï-dire est par nature une règle d’exclusion générale. Il y a toutefois certaines exceptions traditionnelles de common law à cette règle.
[23] Par ailleurs, c'est dans l'arrêt Khan que la Cour suprême a adopté une exception de principe à la règle interdisant la preuve par ouï-dire. Est donc admissible une telle preuve lorsque sa production est nécessaire et qu’elle est fiable. Ainsi, avant d’admettre une déclaration relatée en vertu de l’exception raisonnée à la règle du ouï-dire, le juge du procès doit tenir un voir-dire dans lequel il doit décider si les critères de nécessité et de fiabilité ont été établis. La partie qui cherche à présenter cette preuve doit établir ces critères selon la prépondérance des probabilités.
[24] Dans le présent cas, la juge d'instance a conclu que le critère de nécessité avait été démontré. Il restait donc le débat sur le critère de fiabilité à faire. En effet, une preuve par ouï-dire ne sera pas déclarée admissible si l’on ne peut pas vérifier sa fiabilité. Cela étant et comme la juge l'affirme " il s’ensuit que, selon la méthode d’analyse raisonnée, l’exigence de fiabilité vise à déterminer les cas où cette difficulté est suffisamment surmontée pour justifier l’admission de la preuve à titre d’exception à la règle d’exclusion générale."
[25] En ce qui concerne la fiabilité, il y a deux manières de satisfaire l'exigence de ce critère. Les auteurs Béliveau et Vauclair mentionnent à ce sujet que:
" on peut envisager la fiabilité de deux manières distinctes, de façon intrinsèque ou extrinsèque. La fiabilité intrinsèque, que la Cour suprême a désignée comme offrant des garanties circonstancielles, est celle qui découle des circonstances de l’espèce. Dans un tel cas, " il n’y a pas de préoccupation réelle quant au caractère véridique ou non de la déclaration, vu les circonstances dans lesquelles elle a été faite ". La fiabilité extrinsèque est celle qui découle des garanties procédurales attachées à la prise de la déclaration. Dans un tel cas, " le seuil de fiabilité repose essentiellement sur l’existence de substituts adéquats aux garanties traditionnelles invoquées pour vérifier la preuve".
[27] Pour déterminer si cette preuve rencontre le critère de fiabilité ou si elle offre suffisamment de garanties circonstancielles de fiabilité, il faut analyser, selon la jurisprudence, les circonstances dans lesquelles les notes ont été écrites.
[28] Or, bien que ces notes aient été rédigées par un agent dans la paix, dans l’exercice de ses fonctions, en utilisant une méthode de rédaction télégraphique, et qu’il ne possédait aucune raison de mentir lorsqu’il a mis sur papier ses observations, cette preuve ne comporte pas suffisamment d’indices de fiabilité et ne peut donc, ni être déposée par l’agent Davidson ni être corroborée par ce dernier.
[29] En effet, l’agent Davidson n’était pas dans le même véhicule que l’agent Graveley lorsque celui-ci écrivait ses notes et, ne pourrait donc pas fournir les explications nécessaires. Davidson n’étant pas aux côtés de Graveley, il n’a pas pu constater, par lui-même, les observations faites par son collègue. Par conséquent, seul Graveley pourrait expliquer ses propres notes car celles-ci sont en apparence incomplètes (blancs, interrogations, absence de réponses).
[30] Ainsi, les notes manuscrites de Graveley ne sont pas assez fiables pour qu'on puisse écarter le danger inhérent à la difficulté de les vérifier. De plus, les circonstances entourant leur prise ne confèrent pas suffisamment de crédibilité permettant de conclure que le seuil de fiabilité a été atteint. Une telle preuve ne peut donc être déclarée admissible et ces deux moyens d'appel doivent par conséquent échouer.
mardi 20 mars 2012
Les facteurs à considérer pour déterminer si le délai écoulé avant le procès a été déraisonnable
R. c. Askov, [1990] 2 RCS 1199
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De l'examen qui précède, il est possible, je crois, de résumer tous les facteurs à considérer pour déterminer si le délai écoulé avant le procès a été déraisonnable.
(i)La longueur du délai.
Plus le délai est long, plus il doit être difficile au tribunal de l'excuser. Il peut être impossible de justifier des délais extrêmement longs.
(ii)L'explication du délai.
a) Les délais imputables au ministère public.
Les délais occasionnés par les actes du ministère public ou de ses agents comptent en faveur de l'accusé. Les affaires Rahey et Smith fournissent des exemples de ce genre de délai.
Les affaires complexes qui exigent une préparation plus longue, l'utilisation de plus de ressources par le ministère public et une utilisation plus longue des installations institutionnelles justifieront des délais plus importants que les affaires simples.
b) Les délais systémiques ou institutionnels.
Les délais tenant au manque de ressources sont imputés au ministère public. Les délais institutionnels doivent être examinés en fonction du critère de comparaison défini plus haut. Le fardeau de justifier la pénurie de ressources qui crée des délais systémiques incombe toujours au ministère public. Il peut y avoir une période de transition pendant laquelle on excusera plus facilement les délais systémiques.
c) Les délais imputables à l'accusé
Certains actes de l'accusé peuvent justifier des délais. Par exemple, une demande d'ajournement ou d'un délai nécessaire pour retenir les services d'un autre avocat.
Il peut se présenter des cas où le ministère public pourra démontrer que les actes de l'accusé avaient pour but de retarder la tenue du procès.
(iii) La renonciation.
Si l'accusé renonce à son droit en consentant à un délai ou y acquiesçant, il faut en tenir compte. Cependant, pour être valide, la renonciation doit être en connaissance de cause, claire et consentie librement. Il incombe au ministère public de prouver que la renonciation découle implicitement des actes de l'accusé. Le consentement de l'avocat de l'accusé à la fixation de la date du procès constitue un exemple de renonciation ou d'acquiescement.
(iv) Le préjudice subi par l'accusé.
Il existe une présomption simple selon laquelle le seul écoulement du temps cause un préjudice à l'accusé et dans le cas de délais très longs la présomption devient pratiquement irréfragable. Lorsque le ministère public peut prouver que l'accusé n'a pas subi de préjudice en raison du délai, cette preuve peut servir à justifier le délai. Il est aussi possible à l'accusé de présenter des éléments de preuve tendant à démontrer qu'il a effectivement subi un préjudice en raison du délai, afin de renforcer sa demande de réparation.
Je crois que les facteurs que j'ai énumérés correspondent en grande partie à ceux que les juges L'Heureux‑Dubé et Sopinka ont mentionnés respectivement dans l'arrêt Conway et dans l'arrêt Smith. Ces critères visent à établir une méthode qui s'appuie sur l'objet qui sous‑tend l'al. 11b) et qui permette aux tribunaux de pondérer les éléments de fond applicables de façon cohérente. Il vaut la peine de rappeler qu'on arrive à un équilibre entre l'objet explicite de l'al. 11b), soit la protection de la personne individuelle, et son objet implicite, soit la dimensions sociale de l'al. 11b), en imposant au ministère public le fardeau de prouver que, par ses actes, l'accusé a délibérément causé les délais, que ceux‑ci équivalent à une renonciation ou encore que l'accusé n'a pas subi de préjudice en raison du délai.
Lien vers la décision
De l'examen qui précède, il est possible, je crois, de résumer tous les facteurs à considérer pour déterminer si le délai écoulé avant le procès a été déraisonnable.
(i)La longueur du délai.
Plus le délai est long, plus il doit être difficile au tribunal de l'excuser. Il peut être impossible de justifier des délais extrêmement longs.
(ii)L'explication du délai.
a) Les délais imputables au ministère public.
Les délais occasionnés par les actes du ministère public ou de ses agents comptent en faveur de l'accusé. Les affaires Rahey et Smith fournissent des exemples de ce genre de délai.
Les affaires complexes qui exigent une préparation plus longue, l'utilisation de plus de ressources par le ministère public et une utilisation plus longue des installations institutionnelles justifieront des délais plus importants que les affaires simples.
b) Les délais systémiques ou institutionnels.
Les délais tenant au manque de ressources sont imputés au ministère public. Les délais institutionnels doivent être examinés en fonction du critère de comparaison défini plus haut. Le fardeau de justifier la pénurie de ressources qui crée des délais systémiques incombe toujours au ministère public. Il peut y avoir une période de transition pendant laquelle on excusera plus facilement les délais systémiques.
c) Les délais imputables à l'accusé
Certains actes de l'accusé peuvent justifier des délais. Par exemple, une demande d'ajournement ou d'un délai nécessaire pour retenir les services d'un autre avocat.
Il peut se présenter des cas où le ministère public pourra démontrer que les actes de l'accusé avaient pour but de retarder la tenue du procès.
(iii) La renonciation.
Si l'accusé renonce à son droit en consentant à un délai ou y acquiesçant, il faut en tenir compte. Cependant, pour être valide, la renonciation doit être en connaissance de cause, claire et consentie librement. Il incombe au ministère public de prouver que la renonciation découle implicitement des actes de l'accusé. Le consentement de l'avocat de l'accusé à la fixation de la date du procès constitue un exemple de renonciation ou d'acquiescement.
(iv) Le préjudice subi par l'accusé.
Il existe une présomption simple selon laquelle le seul écoulement du temps cause un préjudice à l'accusé et dans le cas de délais très longs la présomption devient pratiquement irréfragable. Lorsque le ministère public peut prouver que l'accusé n'a pas subi de préjudice en raison du délai, cette preuve peut servir à justifier le délai. Il est aussi possible à l'accusé de présenter des éléments de preuve tendant à démontrer qu'il a effectivement subi un préjudice en raison du délai, afin de renforcer sa demande de réparation.
Je crois que les facteurs que j'ai énumérés correspondent en grande partie à ceux que les juges L'Heureux‑Dubé et Sopinka ont mentionnés respectivement dans l'arrêt Conway et dans l'arrêt Smith. Ces critères visent à établir une méthode qui s'appuie sur l'objet qui sous‑tend l'al. 11b) et qui permette aux tribunaux de pondérer les éléments de fond applicables de façon cohérente. Il vaut la peine de rappeler qu'on arrive à un équilibre entre l'objet explicite de l'al. 11b), soit la protection de la personne individuelle, et son objet implicite, soit la dimensions sociale de l'al. 11b), en imposant au ministère public le fardeau de prouver que, par ses actes, l'accusé a délibérément causé les délais, que ceux‑ci équivalent à une renonciation ou encore que l'accusé n'a pas subi de préjudice en raison du délai.
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