LSJPA — 093, 2009 QCCA 248 (CanLII)
[15] Si la victime a consenti à se battre avec l’appelant, ce dernier n’a pas pu se livrer à des voies de fait illégales. L’on ne pourra, en général, parler d'infraction car l'actus reus du crime fera défaut. L’absence de consentement doit-t-elle être démontrée hors de tout doute raisonnable par le ministère public dans chaque cas de voies de fait ou s’agit-il d’un moyen de défense ouvert à l’accusé ? Au Canada, l’absence de consentement au recours intentionnel à la force a toujours été un élément essentiel de l’infraction de voies de fait. Le juge Gonthier écrit à ce sujet, pour la majorité, dans l’arrêt Jobidon :
Que le consentement soit formellement considéré comme faisant partie de l'actus reus de l'infraction, ou comme moyen de défense, sa fonction essentielle demeure inchangée — si le consentement est prouvé, ou si l'absence de consentement n'est pas prouvée, une personne accusée de voies de fait pourra en général s'appuyer sur le consentement du plaignant pour empêcher sa condamnation. Elle pourra invoquer le consentement pour nier sa responsabilité. Cette réalité fondamentale est largement reconnue. […]
[16] En revanche, cette règle souffre des limitations que précise la Cour suprême, dans le même arrêt :
La limite que requiert l'application de l'art. 265 aux faits de l'espèce, est l'annulation du consentement entre adultes à l'utilisation intentionnelle de la force pour s'infliger mutuellement des blessures graves ou de sérieuses lésions corporelles au cours d'une rixe ou d'une bagarre à coups de poing. […] Telle est l'étendue de la limite prescrite par la common law en l'espèce. Il se peut qu'il soit jugé, dans d'autres cas, que des limites supplémentaires s'appliquent. Cependant, il est préférable de fixer ces limites, s'il en est, dans chaque cas de sorte que les caractéristiques particulières de l'affaire puissent exercer une influence rationnelle sur l'étendue de la limite et sur sa justification.
[…]
[…] l'énoncé qui précède évite l'invalidation du consentement au recours intentionnel à la force causant seulement de légères blessures ou des lésions corporelles mineures. Les lésions corporelles visées par le critère sont essentiellement équivalentes à celles envisagées par la définition figurant au par. 267(2) du Code, concernant l'infraction de voies de fait causant des lésions corporelles. En vertu de cette disposition, l'expression « lésions corporelles » désigne « une blessure qui nuit à la santé ou au bien‑être du plaignant et qui n'est pas de nature passagère ou sans importance ».
Selon cette définition, et compte tenu du fait que le critère s'applique uniquement aux cas dans lesquels des adultes sont en cause, le phénomène de la bousculade « ordinaire » dans une cour d'école, où garçons ou filles cherchent, par manque de maturité, à régler leurs différends avec leurs mains, ne sera pas visé par cette limite. Cela n'a jamais été la politique de la loi et je n'ai pas l'intention de modifier le statu quo. Toutefois, je ne me prononcerai pas sur la question de savoir si les garçons ou les filles âgés de moins de 18 ans qui ont vraiment l'intention de se blesser mutuellement, et qui se causent en fin de compte plus que des lésions corporelles mineures, pourraient invoquer le consentement comme moyen de
défense. […] Le résultat approprié dépendra sans aucun doute des circonstances propres à chaque affaire
[18] Dans ce contexte, l'accusé qui soulève un doute raisonnable sur le consentement de la victime à l’emploi de la force sera acquitté. L'état d'esprit de la victime au moment des événements permettra de déterminer si elle a consenti expressément ou tacitement à une bagarre, à une échauffourée avec l'accusé. La détermination du consentement s'effectue selon un critère subjectif puisque c'est l'état d'esprit de la victime qui importe alors.
[21] Constituant une erreur de fait, la croyance sincère de l'accusé au consentement de la victime, un critère subjectif, n'a pas à être raisonnable mais doit être fondée sur des motifs objectivement raisonnables.
[22] Il s'agit ici d'examiner la mens rea de l'infraction, soit la croyance de bonne foi appréciée selon le critère de la vraisemblance. Si l’accusé satisfait au fardeau de présentation, il peut bénéficier du doute raisonnable, que le doute découle de sa version ou de la preuve du poursuivant, à moins que le ministère public démontre hors de tout doute raisonnable que l'accusé savait que la victime ne consentait pas à l'emploi de la force contre elle. Ce fardeau est exigeant, tous en conviendront.
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