samedi 27 mars 2010

Le sens du mot « importer »

R. c. Daher, 2006 QCCQ 11851 (CanLII)

[106] Dans Bell c. La Reine, la principale question en litige consistait à déterminer si l'acte d'importer un stupéfiant prenait fin lorsque le stupéfiant franchissait la frontière canadienne ou s'il continuait jusqu'au moment où le stupéfiant arrivait à sa destination finale prévue au Canada.

[107] Après avoir passé en revue les faits, le juge Dickson écrit :

« Importer au Canada signifie faire entrer à un endroit quelconque au Canada des marchandises provenant d'un endroit quelconque à l'extérieur du Canada. Je ne vois aucune raison de principe ni aucun arrêt qui justifient de limiter l'endroit pertinent au Canada au lieu où les marchandises ont effectivement franchi la frontière. Il ne faut pas, par une interprétation restrictive, vider le mot «importer» de son sens. Bien qu'elle comporte nécessairement le franchissement de la frontière, l'importation continue jusqu'à ce que les marchandises arrivent à leur destination finale prévue. […]

Pour qu'on puisse dire qu'il «commet réellement» l'infraction d'importation, un accusé doit introduire ou faire introduire au Canada des marchandises provenant d'un pays étranger; cela nécessite par définition qu'elles franchissent la frontière canadienne. Quelqu'un dont la participation ne commence qu'après cette étape peut toutefois être coupable d'avoir aidé et encouragé une personne à faire venir des marchandises de l'extérieur du Canada à une destination à l'intérieur du Canada. De toute évidence, l'importateur dans l'affaire Hijazi n'entendait pas que la destination finale au Canada soit l'entrepôt de la douane. L'importation demeurait inachevée jusqu'au dédouanement des stupéfiants. »

[108] Dans le même arrêt, le juge McIntyre propose pour sa part la définition suivante :

« […] À mon avis, puisque la Loi sur les stupéfiants ne fournit pas de définition particulière de ce mot, c'est son sens ordinaire qu'il faut retenir, c'est-à-dire simplement d'introduire ou de faire introduire au pays. Avec les plus grands égards pour les juges qui ont adopté un point de vue différent, j'estime qu'il est erroné de qualifier l'importation d'un stupéfiant d'infraction continue. L'infraction est complète dès lors que les marchandises entrent au pays. Le détenteur ou le propriétaire peut par la suite se rendre coupable d'autres infractions, comme la possession, la possession en vue du trafic, ou même de trafic tout simplement, mais l'infraction d'importation a été consommée et, lorsque l'importateur garde le stupéfiant ou en dispose, il se lance dans une nouvelle activité criminelle. »

[109] Plus récemment, la Cour d'appel du Québec devait décider dans Charbonneau c. R. si l'acte d'importer prenait fin au moment où la marchandise franchissait le territoire canadien.

[110] Dans les motifs de cet arrêt rédigés par la juge Lise Côté, celle-ci conclut que la preuve révèle clairement que les stupéfiants étaient envoyés au Canada en provenance du Venezuela, acheminés dans des casiers distincts enregistrés et loués sous de fausses identités auxquels l'appelant avait accès. De plus, des bons de transport de fonds vers la Colombie confirmaient l'existence de transactions.

[111] Tout en rejetant le pourvoi de l'appelant contre un jugement l'ayant déclaré coupable de 35 chefs d'importation de cocaïne, elle ajoute :

« [35] Par ailleurs, il existe une jurisprudence constante que l'infraction d'importation est commise lorsqu'on prend des dispositions pour importer la drogue. Comme le mentionnait le juge O'Meara de la Cour des sessions du Québec:

I find that there is no ambiguity nor any equivocation in the words "import into Canada" set forth in s. 5(1) of the Act concerned and, on applying to them their ordinary and grammatical sense, it is made abundantly clear that the intent of Parliament is to prohibit the illegal bringing in of narcotics to Canada from an external source, no matter under what circumstances the illicit introduction into the country takes place and regardless of the means employed in the transporting across the national frontiers of the forbidden substance.

[36] Cette interprétation a été adoptée dans plusieurs arrêts subséquents

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